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13/04/2015 | MALI | N°86

Mali | Mali, Cour suprême, 13 avril 2015, 86


Texte (pseudonymisé)
2ème CHAMBRE CIVILE

Arrêt n°86 du 13 / 04 / 2015

Revendication de parcelle et inopposabilité de cession.

Sommaire :

Moyens de cassation : Modification de l’objet du litige. Violation de la loi. Défaut de motivation.

L’usufruit ne se transmet pas aux héritiers du bénéficiaire et s’éteint avec le décès de l’usufruitier. Viole donc les dispositions de l’article 578 du Code civil l’arrêt qui considère que des héritiers ont héritiers ont recueilli dans la succession d

e leur auteur un usufruit.

I - FAITS ET PROCEDURE :

La SOMAPIM est une Société de Promotion Immobilière ...

2ème CHAMBRE CIVILE

Arrêt n°86 du 13 / 04 / 2015

Revendication de parcelle et inopposabilité de cession.

Sommaire :

Moyens de cassation : Modification de l’objet du litige. Violation de la loi. Défaut de motivation.

L’usufruit ne se transmet pas aux héritiers du bénéficiaire et s’éteint avec le décès de l’usufruitier. Viole donc les dispositions de l’article 578 du Code civil l’arrêt qui considère que des héritiers ont héritiers ont recueilli dans la succession de leur auteur un usufruit.

I - FAITS ET PROCEDURE :

La SOMAPIM est une Société de Promotion Immobilière qui, en relation avec l’Etat du Mali, réalise des logements économiques, C’est dans ce cadre que par arrêté interministériel du 31 mars 2006, la cession de la parcelle de terrain objet du … CV sise à Ab Aa a été autorisée entre elle et l’Etat.

Les héritiers de feu A qui se prévalent d’un acte de vente sous seing privé et d’une demande d’usufruit, ont assigné la SOMAPIM-SA et la Direction Nationale des Domaines et du Cadastre la 14 Novembre 2013 devant le Tribunal de 1ère Instance de la Commune V du District de Bamako pour revendication de parcelle et inopposabilité de cession.

Par jugement n°80 du 21 Janvier 2013, ledit Tribunal a rendu la décision dont la teneur suit :

« Statuant publiquement contradictoirement, en matière civile et en premier ressort ;

Reçoit la fin de non recevoir soulevée par Maître Goïta, la rejette comme mal fondée ;

Reçoit l’assignation des héritiers de feu A, la déclare bien fondée, y faisant droit, constate les droits d’usufruit consacrés avant la cession et la déclare inopposable aux requérants ;

Ordonne la distraction de la parcelle d’une superficie de un (1) hectare, 8 (huit) ares et 63 (soixante trois) centiares de la cession du 12 Mai 2006 suivant acte administratif n°000195/MCEC-DNDC.

En conséquence, renvoie les requérants et la Direction Nationale des Domaines et du Cadastre à la levée de l’option liée au privilège conféré par l’usufruit.

Met les dépens à la charge des défendeurs ».

Exposé des moyens

A l’appui de leur demande, les requérants, par leurs Conseils ont produit les mémoires suivants :

1°) Mémoire ampliatif n°30/14/MAS du 24 Septembre 2014 de Maître Magatte SEYE pour la SOMAPIM-SA

Il sollicite la cassation de l’arrêt pour modification de l’objet du litige, violation de la loi et défaut de base légale.

- Modification de l’objet du litige :

Que pour écarter la demande d’irrecevabilité soulevée par la SOMAPIM pour autorité de chose jugée, la Cour d’Appel de Bamako a considéré que « la demande de propriété et celle d’inopposabilité de cession n’ont pas la même cause » ;

Alors que la procédure n’a pas uniquement pour objet une demande d’inopposabilité comme il ressort de l’intitulé de l’arrêt ;

Qu’une réclamation de parcelle a forcement le même objet et la même cause qu’une demande de propriété ;

D’où il ressort qu’en modifiant l’objet du litige afin d’écarter la fin de non recevoir soulevée, la Cour d’Appel de Bamako a dénaturé les demandes des parties et modifié les termes du litige dont elle était saisie.

Que sa décision mérite d’être censurée ;

- Violation de la loi :

Que pour confirmer le jugement n°0080, la Cour d’Appel de Bamako s’est fondée sur l’article 42 de la loi n°2012-001 du 10 Janvier 2012, selon lequel, « Toute attribution du Titre Foncier dans le domaine public de l’Etat sans déclassement préalable constitue une voie de fait » pour considérer que « C’est au détriment de la demande préalable de A que la cession a été faite bien après à la SOMAPIM et sans qu’aucune décision de déclassement de ce domaine public de l’Etat ne soit connue » ;

Qu’une telle motivation constitue une violation de l’article 2 du Code Civil selon lequel « La loi ne dispose que pour l’avenir ; elle n’a point d’effet rétroactif » ;

Que la cession de la parcelle à la SOMAPIM étant intervenue en 2006, la Cour d’Appel ne pouvait pas légalement appliquer au litige une disposition issue de la loi nouvelle de 2012.

Qu’il importe donc d’annuler sa décision pour violation de la loi,

- Sur le moyen tiré du défaut de motivation :

Que pour confirmer le jugement de première instance, la Cour d’Appel considère que « la cession à la SOMAPIM du … englobant la parcelle précédemment occupée par A et du vivant de celui-ci ; constitue un véritable traitement inégalitaire des citoyens devant l’administration » ;

Qu’en se prononçant ainsi sans expliquer en quoi la cession constitue un traitement inégalitaire des citoyens devant l’administration, la Cour d’Appel adopte des motifs dubitatifs et hypothétiques qui ne permettent pas à la Haute Cour d’exercer son pouvoir de contrôle ;

Que ce défaut de motivation constitue aussi une cause d’annulation de sa décision ;

Que pour ces trois raisons, il importe de casser et annuler l’arrêt.

2°) Mémoire ampliatif du 30 septembre 2014 du Cabinet Goït’as SCPA pour la SOMAPIM :

Il soulève un moyen unique de cassation tiré de la violation de la loi, pris en quatre (4) branches.

- Sur la violation de l’article 118 du Code de Procédure Civile, Commerciale et Sociale,

Que les héritiers de feu A avaient saisi le Tribunal d’une requête aux fins de confirmation de droit de propriété ;

Que le Tribunal, par jugement n°367 du 11 avril a fait droit à leur demande. Que sur appel de la SOMAPIM-SA, la Cour d’Appel de Bamako a, par arrêt n°726 du 28 décembre 2011 infirmé le jugement entrepris en toutes ses dispositions.

Que les héritiers de feu A se sont pourvus en cassation contre cette décision ; que la première procédure à savoir la confirmation du droit de propriété et la deuxième procédure qui est la revendication de parcelle et d’inopposabilité de cession n’ont pour seul et unique but, le même et unique effet que le droit de propriété sur la même parcelle ;

Que le principe de l’autorité de la chose jugée étant général et absolu, il échet de casser et renvoyer la cause et les parties devant la Cour d’Appel.

- Sur la violation de l’article 617 du Code Civil Français :

Que l’arrêt confirmatif a rejeté la fin de non recevoir relative à l’usufruit au motif que ledit usufruit n’a pas été retiré aux héritiers de feu A par l’Etat ;

Que A n’a jamais eu la propriété de la parcelle donnée en usufruit ; que l’Etat n’a pas besoin de retirer l’usufruit aux Héritiers de Feu A d’autant plus qu’ils n’en sont pas bénéficiaires, l’usufruit ne se transmettant pas, mais s’éteignant plutôt de plein droit par la mort de l’usufruitier ;

Qu’il y a violation manifeste de la loi et sur ce point l’arrêt doit être cassé.

- Sur la violation des articles 76 et 169 du Code Domanial et Foncier :

Que l’arrêt n°318 du 16 Avril 2014, pour confirmer le jugement, a fait fi des dispositions des articles 76 et 169 du Code Domanial et Foncier, que les juges du fond, se basent sur l’article 42 de la loi du 10 Janvier 2012 portant modification de l’ordonnance du 22 Mars 2000 portant Code Domanial et Foncier et ratifiée par la loi du 12 Février 2002. Que cet article 42 dispose en son alinéa 1 « toute attribution du Titre Foncier dans le domaine public de l’Etat sans déclassement préalable constitue une voie de fait » ; que l’arrêt soutient « c’est au détriment de la demande préalable de A que la cession a été faite bien après à la SOMAPIM-SA et sans qu’aucune décision de déclassement de ce domaine public de l’Etat ne soit connue » ;

Que selon l’article 2 du Code Civil, « la loi ne dispose que pour l’avenir, elle n’a point d’effet rétroactif » ;

Qu’en appliquant la loi de 2012 sur le Code Domanial et Foncier à l’Acte Administratif du 12 Mai 2006 relatif à la vente du Titre Foncier l’arrêt viole l’article 2 du Code Civil et s’expose à la censure de la Cour ; que les articles 76 et 169 disposent :

Article 76 : « l’immatriculation est définitive, aucun immeuble immatriculé ne peut être replacé sous son régime antérieur » ;

Article 169 : « le Titre Foncier est définitif et inattaquable, il constitue devant les juridictions maliennes le point de départ unique de tous les droits réels existants sur l’immeuble au moment de son immatriculation » ;

Qu’en remettant en cause le … C.IV au nom de la SOMAPIM, les juges du fond ont violé les articles 76 et 169 ci-dessus et l’arrêt doit être censuré sur ce point.

- Sur la violation de l’article 171 du Code Domanial et Foncier :

Que les juges du fond ont ordonné la distraction de la parcelle d’une superficie d’un hectare et soixante trois centiares du … C.IV objet de la cession du 12 mai 2006 suivant acte administratif de vente n°000 195/MCEC-DNDC ;

Que l’article 171 du Code Domanial et Foncier dispose : « Les personnes dont les droits auraient été lésés par suite d’une immatriculation ne peuvent se pourvoir que par voie d’action réelle, mais seulement en cas de dol, par voie d’action personnelle en indemnité » ;

Que le Titre Foncier mère est du 3 Février 1982 ;

Que dès lors, ni A, ni ses héritiers ne peuvent parler de droit coutumier car celui-ci a été purgé depuis 1982.

Qu’il s’ensuit que la SOMAPIM-SA a la pleine propriété dudit Titre Foncier qui est entré dans son patrimoine dès la conclusion de la vente administrative.

Que l’action menée par les défendeurs n’est ni plus, ni moins que la revendication d’un droit réel ayant pour effet de mettre en cause le droit de propriété de l’immeuble objet du … C V de Ab Aa, ce qui doit être déclaré irrecevable aux termes de l’article 171 susvisé ;

Que la seule voie ouverte aux héritiers de feu A, s’ils estiment être victimes de dol, est non une action réelle, mais plutôt une action personnelle en indemnité contre l’Etat du Mali comme en dispose l’article 171 du Code Domanial ;

Qu’en conséquence, il y lieu de casser l’arrêt incriminé sur ce point ;

En réplique, Maître Ousmane A. Bocoum, Conseil des Héritiers de feu A conclut au rejet du pourvoi en exposant dans son mémoire en réplique :

- Sur la fin de non recevoir liée à l’autorité de la chose jugée

Qu’il est apparu dans les pièces de la procédure que suivant arrêt n°158/13 la Section Administrative de la Cour Suprême a confirmé le jugement n°240 du 12 Juillet 2011 du Tribunal Administratif de Bamako lequel avait été rendu à la requête de la SOMAPIM-SA en matière de tierce opposition pour avoir déclaré nulle la lettre n°1014/M-DB du 13 mai 2011 par laquelle le maire du District de Bamako mettait fin au droit d’usufruit accordé à A.

Que cette décision étant définitive et irréversible, les héritiers de feu A en sollicitant que ce droit soit consacré à leur profit, ne sont nullement en porte à faux avec l’arrêt n°726 du 28 Décembre 2011 de la Cour d’Appel de Bamako qui déclare irrecevable leur requête en confirmation de droit de propriété ;

Que l’usufruitier n’est propriétaire que du droit de surface et des droits tirés de cette surface, à l’exclusion de tout droit sur la même propriété que le propriétaire véritable.

Que dans le cas présent, les héritiers de feu A n’ont pas sollicité la nue propriété et ni le Tribunal, ni la Cour d’appel n’ont adjugé un tel droit, respectant l’autorité conférée à l’arrêt n°726 du 28 décembre 2011 ; que dès lors la fin de non recevoir ne peut prospérer pour rejeter le moyen.

- Sur la violation de la loi (article 2 du Code Civil)

Que pour confirmer le jugement querellé, l’arrêt vise expressément l’article 42 de la loi n°2012-001 du 10 janvier 2012 alors même que la SOMAPIM a acquis la parcelle litigieuse en 2006.

Que l’article 2 du Code Civil Français est ainsi conçu : « La loi ne dispose que pour l’avenir, elle n’a point d’effet rétroactif » ;

Qu’en conséquence pour la SOMAPIM, il y a violation de ce texte.

Qu’or, la loi du 10 janvier 2012, dispose en son article 2 « la présente loi qui abroge toutes dispositions antérieures contraires est applicable aux procédures d’immatriculation en cours ainsi qu’aux contentieux pendants devant l’administration et les juridictions, qu’elles soient de l’ordre judiciaire ou de l’ordre administratif, le jour de sa publication » ;

Qu’en légiférant ainsi le législateur malien a conféré à la loi une application immédiate à l’ensemble des contentieux relatifs aux immatriculations, déclassement et cession dans le domaine immobilier de l’Etat. Que dès lors il y a lieu de rejeter ce moyen comme mal fondé.

- Sur la violation de l’article 617 du Code Civil français

Que cet article dit : « l’usufruit s’éteint par la mort naturelle de l’usufruitier », et le demandeur au pourvoi sollicite de constater que Aé étant décédé le 18 Décembre 2007 avec lui, s’éteint son privilège.

Que cette disposition du Code Civil Français n’ayant pas été reconduite dans la loi malienne, ne peut avoir application dans un espace où elle n’a pas été promulguée.

Qu’il convient de déclarer ce moyen inopérant.

- Sur la violation des dispositions du Code Domanial et Foncier :

1ère branche : Violation des articles 76 et 169

Que ce moyen n’est pas pertinent, car il est ressorti de la procédure que le Titre Foncier n°4477 a été immatriculé au nom de l’Etat du Mali le 1er Février 1982 et c’est sur cette superficie que Ac a été adjudicataire d’un droit d’usufruit à compter du 12 Juillet 1994 ; que les droits cédés à la SOMAPIM ne l’ont été qu’à la date du 12 mai 2006, non à la suite d’une immatriculation, mais pour la diminution du Titre Foncier n°4477 qui ne pouvait plus être immatriculé à nouveau pour que soit visé les dispositions de l’article 76.

Que l’opération qui a permis l’acquisition par la SOMAPIM de la parcelle revendiquée n’est qu’une vente ayant porté sur un bien qui ne peut être vendu qu’après la révocation du droit d’usufruit du possesseur du bien.

2ème branche : Sur la violation de l’article 171

Que dans le cas d’espèce, il est établi qu’aucune immatriculation n’est à l’origine de la méconnaissance des droits reconnus aux héritiers de feu A, lesquels sont postérieurs à l’immatriculation de la zone. Qu’il appartenait à la SOMAPIM de produire les faits nécessaires au succès de ses prétentions devant les juges du fond, qui ont constaté à travers les pièces produites que c’est bien la vente du bien d’autrui qui est à l’origine du litige.

Que ce moyen est également inopérant.

- Sur le défaut de motivation :

Qu’en citant ce qui a été constaté par le juge administratif, seul compétent à se prononcer sur un traitement inégalitaire entre deux citoyens devant l’Administration à travers une décision versée au dossier, l’arrêt de la Cour d’Appel n’a fait que renvoyer à la lecture de la dite décision ; qu’il y a lieu de rejeter ce moyen.

ANALYSE DES MOYENS

Les demanderesses au pourvoi ont, par le truchement de leurs Conseils Maîtres Magatte SEYE et Drissa SAMAKE, produit deux mémoires ampliatifs contenant divers moyens de cassation.

I- Mémoire produit par Maître Magatte SEYE

Attendu que ce mémoire contient trois moyens de cassation tirés de la modification de l’objet du litige, de la violation de la loi et du défaut de motivation.

1- Sur le premier moyen tiré de la modification de l’objet du litige

Attendu que les demanderesses reprochent à l’arrêt attaqué d’avoir modifié l’objet du litige afin d’écarter la fin de non recevoir soulevée et d’avoir ainsi dénaturé les demandes des parties ;

Mais attendu que ce moyen tel que présenté, ne constitue pas un cas d’ouverture à cassation ;

Qu’en effet, les cas d’ouverture traditionnellement admis sont la violation de la règle de droit, l’incompétence et l’excès de pouvoir, la violation des formes de procédure, la contrariété de jugement, la perte de fondement juridique, le défaut de motifs, le défaut de base légale et la dénaturation ;

Attendu par ailleurs qu’aux termes de l’article 4 du CPCCS « l’objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties. Ces prétentions sont fixées par la requête introductive d’instance et par les conclusions en dépense. Toutefois, l’objet du litige peut être modifié par les demandes incidentes lorsque celles-ci se rattachent aux prétentions originelles par un lien suffisant » ;

Qu’en l’espèce, l’objet du litige a été fixé par l’acte d’assignation comme revendication de parcelle et inopposabilité de cession et n’a nullement été modifié par l’arrêt attaqué ;

Que dès lors, il y a lieu de rejeter ce moyen.

2- Sur le deuxième moyen tiré de la violation de la loi :

Attendu qu’il est reproché à l’arrêt attaqué de s’être fondé sur les dispositions de l’article 42 de la loi n°2012-001 du 10 janvier 2012 pour considérer que c’est au détriment de la demande préalable de A que la cession a été faite bien après à la SOMAPIM et sans qu’aucune décision de déclassement de ce domaine public de l’état n’est soit connue  ;

Que selon le pourvoi une telle motivation constitue une violation de l’article 2 du Code Civil selon lequel : « La loi ne dispose que pour l’avenir ; elle n’a point d’effet rétroactif » ;

Mais attendu que dans ses dispositions finales, la loi n°2012-001 susvisé indique : « la présente loi qui abroge toutes dispositions antérieures contraires est applicable aux procédures d’immatriculation en cours ainsi qu’aux contentieux pendants devant l’administration et les juridictions, qu’elles soient de l’ordre judiciaire ou de l’ordre administratif, le jour de sa publication » ;

Qu’il s’ensuit que le législateur a entendu conférer à la nouvelle loi une application immédiate à l’ensemble du contentieux relatif à l’immatriculation et aux Titres Fonciers ;

Que c’est donc à bon droit que l’arrêt attaqué s’est fondé sur les dispositions de l’article 42 de la loi susvisée pour se déterminer ;

Qu’il s’ensuit que ce moyen n’est pas fondé et doit être rejeté.

3- Sur le troisième moyen tiré du défaut de motivation :

Attendu que par ce moyen, les demanderesses font grief à l’arrêt attaqué d’avoir énoncé sans s’en expliquer que  « La cession à la SOMAPIM du Titre Foncier n°271 englobant la parcelle précédemment occupée par A et du vivant de celui-ci constitue un véritable traitement inégalitaire des citoyens devant l’administration » ;

Que de tels motifs aussi dubitatifs qu’hypothétiques ne permettent pas à la Haute Cour d’exercer son contrôle ;

Attendu que le défaut de motifs suppose une absence de toute motivation sur le point considéré ;

Qu’en revanche, le jugement est considéré comme régulier en la forme dès qu’il comporte un motif exprès ou implicite, si incomplet ou si vicieux soit-il sur le point considéré ;

Que dès lors, en se déterminant comme il l’a fait, il ne peut être reproché à l’arrêt attaqué d’avoir manqué de motifs.

Qu’il s’ensuit que le moyen n’est pas fondé ;

Sur le mémoire produit par la SCPA GOITA’S :

Attendu que ce mémoire soulève un moyen unique de cassation tiré de la violation de la loi prise en quatre branches ;

1- Sur la première branche de moyen tirée de la violation de l’article 118 du CPCCS :

Attendu qu’il est reproché à l’arrêt attaqué d’avoir rejeté la fin de non recevoir soulevée par la SOMAPIM au motif que la demande de propriété et celle d’inopposabilité de cession n’ont pas le même objet ni la même cause ;

Qu’ainsi, il viole les dispositions de l’article 118 susvisé, dans la mesure où il y a autorité de chose jugée.

Mais attendu que dans les deux procédures visées, si les parties sont les mêmes, il n’en est pas de l’objet du litige ;

Que dès lors, les conditions de l’autorité de la chose jugée ne sont réunies ;

D’où il suit que cette branche du moyen ne peut prospérer.

2- Sur la deuxième branche du moyen tirée de la violation de l’article 617 du Code Civil :

Attendu que par cette branche, le pourvoi reproche à l’arrêt attaqué d’avoir rejeté la fin de non recevoir relative à l’usufruit au motif que l’usufruit n’avait pas été retiré aux héritiers de feu A par l’Etat ;

Attendu qu’aux termes de l’article 578 du Code Civil : « l’usufruit est le droit de jouir des choses dont un autre a la propriété, comme la propriétaire lui-même, mais à charge d’en conserver la substance » ;

Que l’usufruit s’éteignant par la mort de l’usufruitier, et ne pouvant donc tomber dans la succession de celui-ci, ses héritiers ne peuvent pas valablement s’en prévaloir pour réclamer un droit ;

Que dès lors, la Cour d’Appel, en se déterminant comme elle l’a fait a manifestement refusé d’appliquer les dispositions du texte susvisé ;

D’où il suit que le moyen est pertinent ; 

3- Sur la troisième branche du moyen tirée de la violation des articles 76 et 169 du Code Domanial et Foncier :

Attendu qu’il est fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir violé les dispositions des articles susvisés ;

Attendu qu’aux termes de l’article 76 du Code Domanial et Foncier : « l’immatriculation est définitive, aucun immeuble immatriculé ne peut être replacé sous son régime antérieur » ;

Que l’article 169 du Code Domanial et Foncier énonce : « Le Titre Foncier est définitif et inattaquable, il constitue devant les juridictions Maliennes le point de départ unique de tous les droits réels existant sur l’immeuble au moment de son immatriculation » ;

Attendu que la Cour d’Appel a confirmé le jugement n°80 du 21 janvier 2013 du Tribunal Civil de la Commune V du District de Bamako qui a constaté les droits d’usufruit consacrés avant la cession et déclaré ladite cession inopposable aux requérants, puis ordonné la distraction de la parcelle d’une superficie d’un hectare (1) huit ares et soixante trois centiares de la cession du 12 mai 2006 ;

Qu’une telle décision tend à ramener la partie à distraire dans le statut antérieur de la parcelle qui n’était pas immatriculée avant la cession du 12 mai 2006 et ce en violation de l’article 76 du CDF.

Que par ailleurs, elle vise à annuler l’immatriculation sur la partie à distraire en violation des dispositions de l’article 169 de CDF.

Qu’en effet, selon les dispositions dudit article, le Titre Foncier est inattaquable que dès lors toute action tendant à rechercher son annulation doit être déclaré irrecevable ;

Que dès lors en se déterminant comme elle l’a fait, la Cour d’Appel a méconnu les dispositions des articles 76 et 169 du CDF et expose sa décision à la cassation ;

4- Sur la quatrième branche du moyen tirée de la violation de l’article 171 du Code Domanial et Foncier :

Attendu qu’il est reproché à l’arrêt attaqué d’avoir ordonné la distraction d’une parcelle d’une superficie d’un hectare, huit ares et soixante trois centiares du TF 271/C.VI… alors que l’article 171 du CDF dispose :

« Les personnes dont les droits auraient été lésés par suite d’une immatriculation ne peuvent se pourvoir que par voie d’action réelle, mais seulement en cas de dol, par voie d’action personnelle en indemnité » ;

Attendu en l’espèce que l’action des héritiers de feu A vise à faire reconnaître leurs droits sur la portion de terrain réclamé par eux ;

Qu’une telle action en vertu des dispositions de l’article 171 du CDF susvisée doit être déclarée irrecevable ;

Qu’en faisant droit à cette demande pour ordonner la distraction de la parcelle en question du …/C. V de Baco-Djicoroni, la Cour d’Appel a violé les dispositions susvisées et expose sa décision à la cassation.

…Casse et annule l’arrêt déféré ;

Renvoie la cause et les parties devant la Cour d’Appel de Bamako autrement composée ;…


Synthèse
Numéro d'arrêt : 86
Date de la décision : 13/04/2015

Analyses

Revendication de parcelle et inopposabilité de cession.


Origine de la décision
Date de l'import : 06/03/2020
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ml;cour.supreme;arret;2015-04-13;86 ?
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