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23/03/2015 | MALI | N°20

Mali | Mali, Cour suprême, 23 mars 2015, 20


Texte (pseudonymisé)
ARRET N°20 DU 23 / 03 / 2015

Atteintes aux biens publics.



Mise en liberté sous caution – Appel du Procureur est possible dans le délai de 3 jours fixé par l’article 190 du CPP même si l’inculpé a déjà exécuté l’ordonnance de mise en liberté en versant la caution



Insuffisance de motifs – l’arrêt de la chambre d’accusation statuant sur une demande de mise en liberté ne peut se contenter de termes vagues «  attendu que les faits sont graves », « que le montant est élevé »  - En ne donnant aucune indication par rapport a

u montant des sommes reprochées ledit arrêt mérite censure de la haute Juridiction pour insuffisance de motifs. 

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ARRET N°20 DU 23 / 03 / 2015

Atteintes aux biens publics.

Mise en liberté sous caution – Appel du Procureur est possible dans le délai de 3 jours fixé par l’article 190 du CPP même si l’inculpé a déjà exécuté l’ordonnance de mise en liberté en versant la caution

Insuffisance de motifs – l’arrêt de la chambre d’accusation statuant sur une demande de mise en liberté ne peut se contenter de termes vagues «  attendu que les faits sont graves », « que le montant est élevé »  - En ne donnant aucune indication par rapport au montant des sommes reprochées ledit arrêt mérite censure de la haute Juridiction pour insuffisance de motifs. 

Sommaire :

Aux termes de l’article 189 CPP « le procureur de la république et le procureur général pourront interjeter appel dans tous les cas contre les ordonnances du juge d’instruction. »

Ne viole pas les articles 154 et 158 du CPP, l’arrêt de la chambre d’accusation qui reçoit l’appel du Procureur de la République contre une ordonnance qu’il a déjà exécutée et, par ailleurs, qui a été rendue conformément à ses réquisitions.

La Chambre criminelle estime que la gravité des faits, ni le montant élevé des sommes reprochées ne sont pas légalement des obstacles à la mise en liberté.

FAITS ET PROCEDURE : 

Sur dénonciation du Ministre de la justice au Procureur Général près la Cour d’Appel de Bamako qui à son tour saisissait le procureur de la République près le Tribunal de 1ère instance de la Commune III du District de Bamako, la brigade du pôle économique fut chargée de mener une enquête sur les faits d’atteintes aux biens publics corruption prise illégale d’intérêts favoritisme et autres espèces de fraudes objet de la dénonciation ministérielle, qui précisait que ces faits étaient commis au niveau du PMU-Mali et que le préjudice dépassait les 39. 000. 000. 000 F CFA.

Après l’enquête préliminaire une information judiciaire fut ouverte contre C, X, Y, B et A qui seront inculpés pour atteintes aux biens publics, corruption, prise illégale d’intérêt favoritisme et autres espèces de fraudes et complicité.

Au cours de l’information ils bénéficieront tous le 6 mai 2014 d’une mesure de remise en liberté  assortie de paiement d’une caution.

Cependant le procureur de la République fera appel de toutes les ordonnances de mise en liberté par acte au greffe en date du 07 mai 2014.

La chambre d’accusation de la Cour d’Appel par arrêt N° 301 du 03 juin 2014 statuait en ces termes :

----Reçoit l’appel du Ministère Public ;

----Confirme l’ordonnance du juge d’instruction du 5ème Cabinet du tribunal de 1ère instance de la commune III du District de Bamako en ce qu’elle a ordonné la mise en liberté de A soumise à caution.

Infirme l’ordonnance en ses autres dispositions et statuant à nouveau :

1°) Rejette la demande de mise en liberté des inculpés C et X.

2°) ordonne la mise en liberté des inculpés B, Y s’ils ne sont détenus pour autre cause.

Dit toutefois que leur mise en liberté sera soumise au paiement d’un cautionnement ou la constitution d’une sureté respectivement d’un montant ou d’une valeur de :

Vingt et un million de francs (21. 000. 000.000 F) pour L.T repartis ainsi qu’il suit :

Un million de francs (1. 000.000) garantissant la représentativité de l’inculpé à tous les actes de la procédure et pour l’exécution de toutes les décisions ultérieures.

Vingt million de francs (20. 000.000 F) représentant les restitutions partielles, les dommages intérêts les frais avancés par la partie civile, les amendes et frais.

Quinze millions de francs (15.000.000 F CFA) pour Y repartis comme suit :

Deux millions (2. 000.000 F CFA) garantissant la représentation de l’inculpé à tous les actes de la procédure et pour l’exécution des décisions.

Treize millions (13. 000.000 F CFA) représentant les restitutions partielles, les dommages et intérêts, les frais avancés par la partie civile les amendes et frais….

Par actes en date du 5 juin 2014 et 6 juin 2014, le Procureur Général près la cour d’Appel de Bamako d’une part et les inculpés C et X d’autre part par le truchement de leur conseil Me Cheick Oumar KONARE ont déclaré se pourvoir en cassation contre l’arrêt de la chambre d’accusation.

Le Procureur Général dispensé de consigner n’a cependant pas produit de mémoire ampliatif.

les inculpés demandeurs au pourvoi ont acquitté la consignation et produit mémoires ampliatifs régulièrement notifiés au procureur Général près la Cour d’Appel de Bamako.

PRESENTATION DES MOYENS DE CASSATION :

Contre l’arrêt de la chambre d’accusation les inculpés C et X par le truchement de leurs Conseils Cheick Oumar KONARE et L.C tous Avocats, soulèvent deux moyens de cassation tirés de la violation de la loi (1) et le manque de motivation sérieuse (2).

1er moyen : La violation de la loi :

En ce que :

1°) La chambre d’accusation a reçu l’appel du Procureur de la République alors que ce dernier n’avait pas intérêt et qualité pour relever appel d’une ordonnance qu’il a déjà exécuté et par ailleurs rendue conformément à ses réquisitions.

2°)La procédure de mise en liberté sous caution est régie par les articles 154, 155, 156, 157 et 518 du code de procédure pénale, et l’article 156 dispose que « Dans les cas où, la mise en liberté a été subordonnée à un cautionnement, ce cautionnement est fourni en espèce, billets de banque, chèques certifiés ou titre émis en garantie par l’état. Il est versé entre les mains du greffier en chef du Tribunal ou de la cour ou du receveur de l’enregistrement.

Sur le vu du récépissé, le Ministère public fait exécuter sur le champ la décision de mise en liberté ».

Que l’appel n’est pas prévu, la caution ayant but et effet de garantir entre autre la représentation de l’inculpé et les intérêts de la partie civile.

Que recevoir l’appel contre une ordonnance de mise en liberté sous caution revient à violer les articles 154 et 158 du Code pénal.

2ème moyen que l’arrêt de la chambre d’accusation manque de motivation sérieuse pour avoir fait droit à des réquisitions du parquet qui tendent à faire croire en l’énormité des sommes détournées, alors qu’après avoir justifié toutes ses dépenses l’inculpé a convaincu le juge, le mieux placé pour apprécier les faits, que le dossier était vide.

Qu’au demeurant quelles soient que les charges, elles ne peuvent empêcher une mise en liberté dès lors que la détention de l’inculpé n’est plus nécessaire à la manifestation de la vérité.

Le Procureur général n’a pas répliqué.

SUR CE, LA COUR :

En la forme :

Attendu que le Procureur Général près la Cour d’Appel de Bamako dispensé de consigner n’a pas produit de mémoire ampliatif au soutien de son pourvoi :

Qu’il doit en être déclaré déchu en application des dispositions de l’article 518 al5 CPP.

Attendu que les inculpés C et Ab Aa justifient du paiement de la consignation. Ils ont en outre produit mémoire ampliatif ; Que leurs recours sont donc recevables ;

Au fond :

Sur le moyen tiré de la violation de la loi

1°) Attendu que ce moyen reproche à l’arrêt d’avoir violé la loi notamment les articles 154 à 158 CPP en recevant l’appel du Procureur de la République contre une ordonnance de mise en liberté sous caution déjà exécutée et qui par ailleurs a été rendue conformément à ses réquisitions.

Attendu qu’aux termes de l’article 189 CPP « le procureur de la république et le procureur général pourront interjeter appel dans tous les cas contre les ordonnances du juge d’instruction. Qu’il s’agit là d’un droit général en vertu duquel le Procureur de la République peut interjeter appel d’une ordonnance de mise en liberté sous caution.

Attendu qu’il est de jurisprudence constante qu’il peut même interjeter appel des ordonnances rendues conformément à ses réquisitions.

Attendu qu’il est en outre reproché à la chambre d’accusation d’avoir reçu l’appel contre une ordonnance déjà exécutée.

Attendu qu’il y a lieu de rappeler que le délai d’appel du Procureur de la République est de 3 jours à partir du jour de l’ordonnance. Que ce délai est suspensif de l’exécution de l’ordonnance et donc du paiement de la caution et de la mise en liberté.

Attendu que l’ordonnance de mise en liberté de C date du 6 juin 2014. Que la caution a été payée le même jour, et le même jour l’ordre de mise en liberté a été signé.

Qu’il est donc avéré que l’ordonnance a été exécutée dans le délai suspensif de son exécution donc de manière prématurée voire illégale.

Attendu que le paiement de la caution dans les délais d’appel du Procureur de la République ne peut être un frein à l’exercice de son recours, et, ne viole point l’article 156 CPP la Cour d’appel qui a reçu l’appel du Procureur de la République dans les conditions ci-dessus spécifiées.

2°) Attendu qu’il est en outre fait grief à l’arrêt de manquer de motivation pour être basé sur un réquisitoire du parquet tendant à faire croire à l’énormité des sommes détournés, alors que quelles que soient les charges contre un inculpé, elles ne peuvent empêcher sa mise en liberté dès lors que la détention n’est plus nécessaire à la manifestation de la vérité.

Attendu que pour rejeter les demandes de mise en liberté de C et Ab Aa, l’arrêt retient la gravité des faits résultant de la nature de l’infraction et du montant des sommes reprochés ;

Mais attendu que la gravité des faits n’est pas légalement un obstacle à la mise en liberté encore que l’arrêt ne donne aucune indication par rapport au montant des sommes reprochées ; il y a

lieu de conclure que l’arrêt est insuffisamment motivé sur ce point

…Casse et annule l’arrêt déféré en ce qu’il a rejeté les demandes de mise en liberté de C et Ab Aa ;…


Synthèse
Numéro d'arrêt : 20
Date de la décision : 23/03/2015

Analyses

Atteintes aux biens publics.


Origine de la décision
Date de l'import : 06/03/2020
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ml;cour.supreme;arret;2015-03-23;20 ?
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