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09/02/2015 | MALI | N°38

Mali | Mali, Cour suprême, 09 février 2015, 38


2ème CHAMBRE CIVILE



Arrêt n°38 du 09 0202 / 2015



Expulsion.



Sommaire :



Moyens de cassation : violation de la loi. Dénaturation des faits. La dénaturation des faits ne constitue pas un cas d’ouverture à cassation. Il est admis à ce niveau que seul un écrit peut être dénaturé.



FAITS ET PROCEDURE :



L’Association Sportive Centre B (CSK) avait suivant protocole d’accord en date du 23 Octobre 2008, passé un contrat de bail

avec la Mairie de la Commune IV du District de Bamako portant sur une parcelle devant lui servir de terrain d’entrainement.



Ledit prot...

2ème CHAMBRE CIVILE

Arrêt n°38 du 09 0202 / 2015

Expulsion.

Sommaire :

Moyens de cassation : violation de la loi. Dénaturation des faits. La dénaturation des faits ne constitue pas un cas d’ouverture à cassation. Il est admis à ce niveau que seul un écrit peut être dénaturé.

FAITS ET PROCEDURE :

L’Association Sportive Centre B (CSK) avait suivant protocole d’accord en date du 23 Octobre 2008, passé un contrat de bail avec la Mairie de la Commune IV du District de Bamako portant sur une parcelle devant lui servir de terrain d’entrainement.

Ledit protocole avait été signé par A en qualité de représentant de l’Association ;

Après la dissolution de la Société Sportive CSK duquel A avait été exclu, le CSK, Association

constatant que A occupait le terrain à d’autres fins, a saisi le juge des référés du Tribunal de la Commune IV aux fins d’expulsion ;

Cette juridiction a, par ordonnance n°480 du 17 juin 2013, dit n’y avoir lieu d’ordonner la mesure sollicitée qui dépasse les pouvoirs du juge des référés.

Sur le recours formé par le CSK, la chambre des référés de la Cour d’Appel de Bamako a, par arrêt n°118 du 4 avril 2014 reçu le recours, annulé l’ordonnance entreprise et, statuant à nouveau, s’est déclarée compétente et a ordonné l’expulsion de A tant de sa personne que de ses biens ainsi que tous occupants de son chef du terrain d’entrainement sis à l’ACI 2000 Hamdallaye, objet du protocole d’accord en date du 23 Octobre 2008 ;

C’est cet arrêt qui fait l’objet du présent pourvoi ;

EXPOSE DES MOYENS :

Le demandeur au pourvoi, sous la plume de son conseil, soulève deux moyens de cassation tirés de la violation de la loi en deux branches et de la dénaturation des faits.

I- Premier moyen tiré de la violation de la loi : (en deux branches) :

1- Première branche du moyen :

A l’appui de cette branche du moyen, le demandeur expose que l’arrêt attaqué justifie le rejet du sursis à statuer en ces termes :

« Considérant que A a demandé le sursis à statuer sur la demande d’expulsion au motif que l’affaire en escroquerie contre lui est pendante devant le juge d’instruction ;

…..Qu’il s’agit ici d’une procédure de référé sur demande d’expulsion ;

Considérant que cette procédure est d’essence une voie d’urgence et qu’elle aboutit sur une décision toujours provisoire pouvant être rétractée en cas de circonstances nouvelles ; que cette urgence s’accommode mal avec un retard procédural même devant le principe du ‘’criminel tient le civil en état’’ ;

Que la demande de sursis à statuer en attendant l’issue de la procédure pénale ne peut aboutir » ;

Qu’autrement dit, les juges du fond affirment qu’ils peuvent en cas d’urgence, faire fi de la règle de droit ;

Qu’une telle motivation viole allègrement les dispositions de l’article 6 du Code de Procédure Pénale qui dispose : « L’action civile est soumise aux règles de la loi civile. Elle peut aussi être exercée séparément de l’action publique ;

Toutefois, il est sursis au jugement de cette action exercée devant la juridiction civile tant qu’il n’a pas été prononcé définitivement sur l’action publique lorsque celle-ci a été mise en mouvement ».

Que l’action publique mise en mouvement par le Centre B, à travers une plainte avec constitution de partie civile est toujours pendante devant le juge d’instruction du 2ème Cabinet du Tribunal de Première Instance de la Commune IV du District de Bamako ;

Que l’arrêt attaqué mérite d’être censuré sur cette branche du moyen ;

2- Deuxième branche du moyen :

En ce que le Centre B avait signé un protocole d’entente avec la Mairie de la Commune IV ;

Que ledit protocole a été signé le 23 Octobre 2008 pour une durée de 5 ans ; qu’il a expiré le 23 Octobre 2013 ;

Qu’à partir de son expiration, le Centre B n’avait plus aucun droit sur le terrain d’entrainement en question et partant aucune qualité pour demander l’expulsion du demandeur ; que la qualité pour agir en justice pouvant être définie comme un intérêt légitime et juridiquement protégé, le Centre B ne disposait plus, à l’expiration du protocole d’accord, de cet intérêt à agir ;

Que l’arrêt attaqué mérite la censure sur ce chef ;

II- Deuxième moyen

Le demandeur expose que l’arrêt attaqué énonce : « … que le bail signé avec possibilité de renouvellement dans cinq (5) ans expirait le 23 Octobre 2013…

…. Que le protocole d’entente a prévu une possibilité de renouvellement, mais qu’à l’expiration du bail le 23 Octobre 2013, durant la procédure, la Mairie n’a fait aucune réclamation au CSK qui a ses investissements sur le terrain ; que cette situation équivaut à une tacite reconduction du contrat de bail avec la Mairie pour une autre période de 5 ans donc jusqu’au 23 Octobre 2018 » ;

Qu’une telle affirmation équivaut à faire une déduction des intentions des contractants, ce qui n’est pas le rôle du juge et dénature les faits en procurant une qualité au CSK qu’il n’avait plus ;

Qu’enfin, pour retenir sa compétence, la Cour d’Appel énonce «...qu’il est établi que dans le bail conclu avec la Mairie, c’est CSK qui est contractant… qu’il y avait CSK Association et CSK Société ; que dans les deux cas A était adhérant ;

Mais considérant que dans CSK Association, A a été régulièrement exclu suivant procès-verbal d’Assemblée Générale du 16 Janvier 2012 ; que par ailleurs, CSK Société a fait l’objet d’une dissolution anticipée statutaire régulière conformément au procès-verbal d’Assemblée Générale de la Société du 16 Janvier 2012, déposé à l’étude du notaire Maître Sangaré le 14 avril 2012 ;

…qu’actuellement A ne fait pas partie du CSK Association et que CSK Société a été dissoute… » ;

Qu’en ce qui concerne CSK Société, le demandeur n’a appris sa dissolution que devant la Cour d’Appel de Bamako ;

Que le Procès-verbal déposé chez le notaire Maître Sangaré a été attaqué devant le Procureur du Pôle économique de Bamako pour faux et usage de faux ;

Que cette procédure est pendante devant cette juridiction ; que les juges du fond, en affirmant de façon péremptoire la dissolution anticipée et régulière est allée un peu trop vite en besogne et a dénaturé les faits afin de retenir sa compétence ;

Que pour cette raison, l’arrêt attaqué mérite la censure ;

Maître Issiaka Kéita, agissant pour le compte du Centre B, défendeur au pourvoi, a produit un mémoire en réplique par lequel il sollicite le rejet du pourvoi ;

ANALYSE DES MOYENS

Attendu que le demandeur au pourvoi soulève deux moyens de cassation tirés de la violation de la loi en deux branches et de la dénaturation des faits.

I - Sur le premier moyen tiré de la violation de la loi :

Attendu que ce moyen se subdivise en deux branches :

1- Sur la première branche du moyen :

Attendu que par cette branche du moyen, le demandeur reproche à l’arrêt attaqué d’avoir refusé de faire droit à sa demande de sursis à statuer en application de l’article 6 du Code de Procédure Pénale au motif que le caractère d’urgence de la procédure de référé s’accommode mal avec un retard procédural ;

Attendu qu’il y a lieu de rappeler que le sursis à statuer est le plus souvent prononcé par le juge pour une bonne administration de la justice ; qu’il a, en général pour but d’éviter toute contrariété entre sa décision et un jugement rendu ou pendant dans une autre affaire ;

Qu’en la matière, le juge dispose pour apprécier l’opportunité du sursis, d’un pouvoir discrétionnaire et sa décision échappe donc au contrôle de la Haute Juridiction ;

Que s’agissant de l’article 6 du Code de Procédure Pénale, si ses dispositions imposent au juge civil de surseoir à statuer, elles visent les cas où l’action civile en réparation du dommage causé par une infraction est exercée devant la juridiction civile, celle-ci doit surseoir jusqu’à ce qu’il ait été prononcé définitivement sur l’action publique lorsque celle-ci a été mise en mouvement ;

Qu’en l’espèce, il résulte des éléments de la cause que c’est le CSK qui a porté plainte contre A pour escroquerie ;

Que l’issue de cette procédure n’ayant aucune incidence sur la demande d’expulsion formée par le même CSK, c’est à bon droit que la Cour d’Appel a déclaré que la demande de sursis ne peut aboutir ;

D’où il suit que cette branche du moyen ne peut être accueillie ;

2- Sur la deuxième branche du moyen :

Attendu que par cette branche du moyen, le demandeur reproche à l’arrêt attaqué d’avoir reçu la demande en expulsion du CSK alors que celui-ci n’avait plus aucune qualité du fait de l’expiration du protocole d’entente ;

Mais attendu que la Cour d’appel énonce « que le protocole relatif au bail a été signé entre la Mairie de la Commune IV et A en qualité de représentant du CSK et non intuitu personae ; que le cocontractant de la Mairie est plutôt le CSK... ; que le bail signé avec possibilité de renouvellement dans 5 ans expirait le 23 Octobre 2013, alors qu’avant cette date l’assignation saisissant le Tribunal est intervenu le 24 Mai 2013 ;

Qu’au moment de la demande en expulsion du CSK, le bail n’était pas expiré… » ;

Qu’en se déterminant ainsi, la Cour d’Appel a légalement justifié sa décision ;

D’où il suit que cette autre branche n’est pas fondée ;

II- Deuxième moyen :

Attendu que par ce moyen, le demandeur reproche à l’arrêt attaqué d’avoir affirmé que le protocole d’accord a prévu une possibilité de renouvellement, mais qu’à l’expiration du bail le 23 Octobre 2013 durant la procédure, la Mairie n’a fait aucune réclamation au CSK qui a ses investissements sur le terrain et d’avoir ensuite constaté que CSK Société a fait l’objet d’une dissolution anticipée, alors que le demandeur, n’a appris la dissolution que devant la Cour d’appel, dénaturant ainsi les faits ;

Mais attendu que le grief de dénaturation ne peut concerner que l’écrit, puisque les faits échappant au contrôle de la Haute Juridiction, ne peuvent faire l’objet d’un grief de dénaturation ;

Qu’il s’ensuit que ce moyen doit être déclaré irrecevable ;

…Le rejette ;…


Synthèse
Numéro d'arrêt : 38
Date de la décision : 09/02/2015

Origine de la décision
Date de l'import : 29/07/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ml;cour.supreme;arret;2015-02-09;38 ?
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