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17/06/2014 | MALI | N°17

Mali | Mali, Cour suprême, 17 juin 2014, 17


CHAMBRE COMMERCIALE



ARRET N° 17 DU 17 Juin 2014.



Réparation de préjudice.



SOMMAIRE :



Le contrat d’adhésion, est un contrat dont toutes les clauses lient les parties. Une méconnaissance du contrat ne saurait justifier sa non application.



Faits et Procédure :







Par requête en date du 02 Octobre 2012, Me Massaman BAGAYOKO, Avocat à la Cour, conseil de A a attrait la Société Energie du Mali SA (en abrégé EDM-SA) en réparation de préjudice. A l’appui de sa demande, il explique

qu’’il est promoteur d’une imprimerie dénommée GRAPHICOLOR lui permettant d’imprimer des carnets, factures, cartes de visites, extraits de naissanc...

CHAMBRE COMMERCIALE

ARRET N° 17 DU 17 Juin 2014.

Réparation de préjudice.

SOMMAIRE :

Le contrat d’adhésion, est un contrat dont toutes les clauses lient les parties. Une méconnaissance du contrat ne saurait justifier sa non application.

Faits et Procédure :

Par requête en date du 02 Octobre 2012, Me Massaman BAGAYOKO, Avocat à la Cour, conseil de A a attrait la Société Energie du Mali SA (en abrégé EDM-SA) en réparation de préjudice. A l’appui de sa demande, il explique qu’’il est promoteur d’une imprimerie dénommée GRAPHICOLOR lui permettant d’imprimer des carnets, factures, cartes de visites, extraits de naissances, mariages, de décès, des vignettes, cachets, tickets de marché, badges et autres documents. Le 19 Septembre 2012, pendant qu’il se trouvait à Bamako, EDM-SA a enlevé son compteur sans aucun préavis et au motif qu’il est défectueux et source de fraude.

A son retour il lui a été expliqué que le disque de son compteur ne tourne pas créant ainsi un blocage qui a entraîné l’arrêt de l’enregistrement des consommations d’électricité.

Ledit compteur a été installé en 1995 et malgré les différents relevés, aucune anomalie n’a été constatée et il n’existe aucun arriéré de paiement. Il prétend n’avoir pas touché au compteur et n’a aucun intérêt à créer une telle situation. L’imprimerie étant sa seule source de revenu, il n’a pu depuis le 19 septembre 2012, date de l’enlèvement du compteur, ni payer ses cinq employés ni satisfaire des nombreuses commandes consécutives à la rentrée scolaire ; en conséquence il demande la réparation du préjudice qu’il évalue provisoirement à 5.000.000 F CFA.

Le tribunal de commerce de Kayes a par jugement n°2 du 28 février 2013 rejeté l’exception de nullité et la fin de non recevoir soulevées et a condamné EDM-SA à payer à A la somme de 4.500.000 F CFA à titre de réparation de préjudice. Il a également déclaré irrecevable la demande reconventionnelle d’EDM-SA.

C’est contre cette décision qu’est dirigé le pourvoi formé par le conseil d’EDM-SA.

2°) Exposé des moyens de cassation :

Me Mahamane I. CISSE, conseil d’EDM-SA soulève deux moyens de cassation tirés de :

a) La dénaturation des faits.

Le conseil de la demanderesse au pourvoi estime que « …..la cour de cassation est conduite à casser une décision pour dénaturation d’un contrat, conclusions d’un plaideur, d’un acte de procédure » (sous la direction de Serge Guinchard, droit et pratique de la procédure civile, page 1292, n° 6322) ; qu’en l’espèce, il ressort du jugement attaqué que « EDM-SA excipe des articles 7 et 16 du cahier de conditions générales d’abonnement pour les fournitures d’Energie électrique et d’Eau pour expliquer l’enlèvement du compteur du demandeur » ;

Que des énonciations du jugement querellé, il ressort que « les débats ont démontré que le demandeur n’a jamais eu connaissance d’un tel document, qu’il ne lui a été donné ni au moment de la conclusion du contrat ni au cours de leur relation contractuelle » ; que ce faisant le juge a dénaturé les faits car les questions relatives au cahier des conditions générales d’abonnement, et sa remise à A n’ont nullement été débattues devant le premier juge ; qu’il s’agit selon le conseil de la demanderesse au pourvoi, des faits ajoutés et imaginés par le juge lui-même, qui dénature ainsi les faits débattus devant lui.

Violation de la loi en trois branches :

-Sur la première branche, le conseil de la demanderesse invoque la violation de l’article 32 CPCCS en ce que « le délai entre le jour où la citation est délivrée et le jour fixé pour la comparution de la personne citée devant la juridiction est d’au moins : huit jour si elle réside au siège de la juridiction ; qu’en l’espèce, le jugement entrepris vise l’article 111 du CPCCS pour dire qu’il y a eu régularisation par une autre citation qui respecte toutes les conditions requises et servie à EDM-SA en date du 05 décembre 2012 ; que suivant la chronologie des dates de renvois, mise en délibéré, rabat de délibéré, il n’y a aucun renvoi pour citation régulière de EDM-SA ; que ce n’est qu’après les débats et la mise en délibéré au 29 novembre 2012 que la citation du 5 décembre 2012 a été servie ; que dès lors, l’instance a été enclenchée sur la base d’une citation nulle ; que les débats ont eux aussi été faits sur la base d’une citation nulle ; que par conséquent l’instance ayant abouti au jugement entrepris est nulle ; qu’aucune citation ultérieure ne peut la régulariser ; qu’en procédant autrement le premier juge a refusé de faire application de l’article 32 CPCCS qui se trouve ainsi violé ;

Que sur cette base, le conseil d’EDM-SA demande la cassation et l’annulation du jugement querellé ;

-Sur la deuxième branche tirée de la violation de l’article 118 CPCCS en ce sens que les parties au contrat sont EDM-SA et la Société Graphicolor ; curieusement, A agit non pas en tant que gérant statutaire de la société mais en son nom personnel ; que ce faisant il n’a aucune qualité pour assigner EDM-SA ; qu’en décidant autrement, le jugement entrepris a violé l’article 118 CPCCS ; En conséquence, le conseil d’EDM-SA sollicite la cassation et l’annulation du jugement querellé ;

-Sur le troisième branche tirée de la violation de l’article 77 du Régime Général des Obligations, en vertu duquel « les conventions légalement formées tiennent lieu de la loi à ceux que les ont faites » ;

Qu’en l’espèce, en signant le contrat d’abonnement, les parties adhèrent à tous les documents y annexés ; au contrat signé par graphicolor Imprimerie est annexé le cahier des conditions générales ; que l’abonné ne peut prétendre ignorer ce document ; qu’en prétextant qu’A n’avait pas connaissance du cahier des conditions générales et qu’EDM-SA ne lui a pas donné ce document le juge du tribunal de commerce de Kayes a violé l’article 77 du Régime Général des Obligations ; que pour toutes ces raisons, la demanderesse au pourvoi sollicite la cassation et l’annulation de la décision querellée ;

3°) Analyse des moyens de cassation :

De la dénaturation des faits dans un écrit.

Attendu qu’il est fait grief à la décision querellée d’avoir dénaturé les termes du contrat en ce sens que la société EDM-SA excipe des articles 7 et 16 du cahier des conditions générales d’abonnement pour les fournitures d’Energie électrique et d’eau pour expliquer l’enlèvement du compteur du demandeur au pourvoi ;

Attendu que des énonciations du jugement querellé, il ressort que « les débats ont démontré que le demandeur n’a jamais eu connaissance d’un tel document, qu’il ne lui a été donné ni au moment de la conclusion du contrat, ni au cours de leur relation contractuelle » ;

Attendu que le contrat d’abonnement de l’EDM-SA est un contrat d’adhésion dans lequel la volonté des parties se conjugue avec celle que dictent les autorités publiques. Que les obligation intégrées au contrat notamment celles contenues dans le cahier des conditions générales de fourniture d’électricité et de l’eau sont les expression de l’ordre public de direction et de l’ordre public de protection, destinés à assurer et maintenir une certaine police contractuelle, qu’en vertu de l’article 1135 du code civil « les conventions obligent non seulement à ce qui y est exprimé, mais encore à toutes les suites que l’équité, l’usage ou la loi donnent à l’obligation d’après sa nature ».

Ainsi les parties au contrat, le professionnel et le non professionnel sont tenues à deux obligations essentielles : celle de renseignement et de conseil et celle de sécurité ; que dans ce cadre les obligations pesant sur les deux parties ont été rééquilibrées en imposant au professionnel de donner les conseils utiles et de renseigner les clients tandis que le non professionnel doit nécessairement se renseigner sur les modalités et suites de contrat ; que ce faisant en affirmant que ces documents n’ont été donnés ni au moment de la conclusion du contrat, ni au cours de leur relation contractuelle, le juge expose sa décision à la censure de la haute cour, pour dénaturation des faits dans un écrit ;

Violation de la loi :

b1)Attendu sur la violation de l’article 32 CPCCS en ce que la première citation délivrée à EDM-SA par A a été servie le 5 novembre 2012 pour une comparution prévue pour le 8 novembre 2012 ; que cette citation ne respecte pas le délai minimum de huit jours imposé par la loi pour la comparution d’une personne résidant au siège de la juridiction ; que cependant le juge a le devoir de s’assurer, en matière ordinaire que le défendeur a disposé d’un délai suffisant (au moins égal à 8 jours et au plus à 3 mois) pour non seulement comparaître mais aussi préparer sa défense ;

Attendu qu’en l’espèce, il résulte des énonciations de la décision attaquée que « l’article 111 du même texte prévoit que la nullité est couverte par la régularisation ultérieure de l’acte si aucune forclusion n’est intervenue, et si la régularisation ne laisse subsister aucun grief » ;

Attendu qu’une autre citation fut servie au défendeur en date de 5 décembre 2012 par le ministère du même huissier ; qu’il y a lieu de conclure que l’acte entaché de nullité fut purgé du vise qui l’affecte ». Attendu en effet qu’à la date du 5 novembre 2012 initialement prévue pour débattre de cette affaire, le conseil de la défenderesse a fait parvenir au tribunal une correspondance datée du 06 novembre 2012 et enregistrée sous le n° 240 du 06-11- 2012 par laquelle il informait de sa constitution en faveur de la Société EDM-SA et demandait par la même occasion le renvoi de l’affaire à une audience ultérieure. En réponse à cette demande l’affaire a été renvoyée « au 22 novembre 2012 pour citation régulière de EDM-SA ». Advenue, cette date l’affaire a été mise en délibéré pour le 29 novembre 2012 puis le délibéré a été rabattu et la réouverture des débats ordonnée pour le 10 janvier 2013 ; qu’ainsi un permis de citer en date de 03 décembre 2012 a été délivré et le 5 décembre 2012 une citation à défendeur a été servie à EDM-SA en la personne du chef d’Agence de Kayes pour d’audience du 10 janvier 2013 ;

Attendu que de ce qui précède il résulte que la citation critiquée a été régularisée dans les conditions de forme et délai exigées par l’article 32 du CPCCS ; d’où il suit que cette 1ère branche du moyen invoqué doit être rejetée ;

b2) - Attendu sur la fin de non recevoir tirée du défaut de qualité d’Amadou que la demanderesse au pourvoi fait grief à la décision attaquée d’avoir rejeté celle là, alors selon le moyen, qu’en se bornant à affirmer que « le demandeur comme attestent toutes les informations recueillies, de même que le témoignage des employés de graphiccolor est le promoteur de cette structure commerciale, que dès lors le droit d’agir ne saurait lui être dénié, par conséquent il convient de rejeter l’exception soulevée » ;

Attendu qu’en statuant ainsi alors qu’il résulte de tous les documents du dossier que la Société Energie du Mali-SA et l’imprimerie graphicolor sont liées par un contrat d’abonnement établi en bonne et due forme ; que les convocations et le constat d’anomalies faits par EDM-SA ainsi que les factures d’électricité sont au nom de l’imprimerie graphicolor et non d’A ; que celui-ci en tant que gérant statutaire de graphicolor peut ester au nom et pour le compte de la structure qu’il dirige et non en son nom personnel comme c’est le cas ; que ce faisant le tribunal de commerce de Kayes n’a pas justifié sa décision ; qu’en conséquence il y a lieu d’accueillir cette seconde branche du moyen ;

b3) Attendu sur la violation de l’article 77 du Régime Général des Obligations que le conseil de la demanderesse reprend les mêmes arguments qu’il a développés pour soutenir la dénaturation des faits ; que cette situation ayant été déjà analysée il est superfétatoire de l’analyser de nouveau ;

…Casse et annule le jugement querellé ;

Renvoie la cause et les parties devant le Tribunal de Commerce de Kayes autrement composée ;…


Synthèse
Numéro d'arrêt : 17
Date de la décision : 17/06/2014

Origine de la décision
Date de l'import : 29/07/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ml;cour.supreme;arret;2014-06-17;17 ?
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