La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

14/05/2012 | MALI | N°125

Mali | Mali, Cour suprême, 14 mai 2012, 125


Texte (pseudonymisé)
ARRET N°125 du 14/05/2012

Enlèvement de matériaux sous astreinte.

Jugement réputé contradictoire- conditions. Effet dévolutif de l’appel : articles 480, 573 et 574 CPCCS.

Viole les dispositions de l’article 480 CPCCS, l’arrêt de la Cour d’Appel qui à la suite d’une citation servie au vigile pour remise, qualifie sa décision de réputée contradictoire.

De même, méconnaît le principe de l’effet dévolutif de l’appel et viole les dispositions des articles 573 et 574 CPCCS, l’arrêt qui en présence d’un appel sur tous les chefs de demand

es ne statue que sur les seules prétentions d’une des parties.



I - FAITS ET PRO...

ARRET N°125 du 14/05/2012

Enlèvement de matériaux sous astreinte.

Jugement réputé contradictoire- conditions. Effet dévolutif de l’appel : articles 480, 573 et 574 CPCCS.

Viole les dispositions de l’article 480 CPCCS, l’arrêt de la Cour d’Appel qui à la suite d’une citation servie au vigile pour remise, qualifie sa décision de réputée contradictoire.

De même, méconnaît le principe de l’effet dévolutif de l’appel et viole les dispositions des articles 573 et 574 CPCCS, l’arrêt qui en présence d’un appel sur tous les chefs de demandes ne statue que sur les seules prétentions d’une des parties.

I - FAITS ET PROCEDURE :

La société Kindy-Mali SARL représentée par H.K. B se dit propriétaire de la parcelle, objet du titre foncier n°38897 du cercle de Kati, sis à Kalabancoro Extension Sud Est d’une superficie de 3ha 12a 63 ca et sur laquelle A avait déposé des tas de moellons. Celui-ci se prévaut de son droit de propriété sur ladite parcelle et produit à cet effet le titre foncier n°840 du cercle de Kati sis à Kabala, d’une superficie de 4ha 83a 42 ca.

Face à cette contestation, le Directeur Régional des Domaines et du Cadastre de Koulikoro, se ravisa et suivant décision n°09-0001/DNDC-DRDC Ab en date du 02 mars 2009, procéda à l’annulation de l’acte administratif de cession n°09-0037/MLAFU-DNDC6-DRDC du 30 janvier 2009 au profit de la société Kindy-Mali SARL et portant sur la parcelle d’une superficie de 3ha 12a 63ca, sise à Kalabancoro Extension Sud Est, objet du TF n°38897 du cercle de Kati.

Agissant dans le cadre d’un recours pour excès de pouvoir, cette décision du Directeur Régional des domaines et du cadastre de Ae fut annulée à la requête de la société Kindy Mali ,suivant arrêt n°21 du 27 janvier 2011 de la section administrative de la cour suprême.

Munie de cette décision, elle assignait le 29/6/2011 par l’organe de son conseil Maître Moussa Maïga, A devant le juge des référés de Kati pour s’entendre ordonner l’enlèvement des tas de moellons de la parcelle, objet du TF n°38897 sous astreinte de 1.000.000F CFA par jour de retard.

Cette juridiction, suivant ordonnance n°237 du 12 juillet 2011, statuait en ces termes :

« Au principal, renvoyons les parties à mieux se pourvoir, mais d’ores et déjà,

Vu l’urgence et par provision, déclarons l’assignation recevable ; la rejetons comme mal fondée ; mettons les dépens à la charge de la requérante ».

Sur appel de la société Kindy Mali SARL, la chambre des référés de la cour d’appel de Bamako, par arrêt n°312 du 19 août 2011, statuait ainsi que dessus en infirmant l’ordonnance entreprise.

C’est contre cette décision que A, par l’organe de son conseil Maître Mamadou Sylla, s’est pourvu en cassation.

II – EXPOSE DES MOYENS DE CASSATION :

Le demandeur au pourvoi, sous la plume de son conseil, soulève les moyens de cassation tirés de la violation de la loi prise en deux branches, du défaut de base légale et du défaut de motivation.

Premier moyen : la violation de la loi :

Première branche : la violation de l’article 480 du CPCCS :

En ce que l’arrêt attaqué a considéré que la citation à comparaître servie à un vigile dont le demandeur au pourvoi ignore l’identité, est une citation à personne alors que ni son conseil, ni lui-même n’ont eu connaissance de cette procédure qu’à travers la signification de l’arrêt ;

Qu’en qualifiant l’arrêt de réputé contradictoire alors que A n’a pas été cité à sa personne, la chambre des référés de la cour d’appel de Bamako procède d’une violation de l’article 480 du CPCCS et expose sa décision à la censure de la Haute Juridiction.

Deuxième branche : la violation des articles 573 et 574 du CPCCS :

Le demandeur au pourvoi fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir méconnu le principe de l’effet dévolutif de l’appel prévu par les articles 573 et 574 du CPCCS en ce qu’il n’a pris en considération que les prétentions de la société Kindy Mali SARL alors que l’objet de l’appel n’était pas limité à certains chefs de l’ordonnance querellée ;

Que l’objet du litige est indivisible et il est motivé dans l’ordonnance entreprise que A est propriétaire de la parcelle litigieuse et que son droit de propriété est antérieur à celui de la société Kindy Mali SARL ;

Qu’il résulte des pièces du dossier que deux titres fonciers ont été produits, que les arrêts de la section administrative de la cour suprême n’ont pas annulé la cession faite à A ;

Qu’en procédant comme elle a fait, la chambre des référés de la cour d’appel de Bamako a occulté l’aspect dévolutif de l’appel, violant ainsi les articles 573 et 574 du CPCCS visés au moyen ;

Deuxième moyen : le manque de base légale :

En ce que la chambre des référés, sans examiner les pièces versées au dossier devant le juge d’instance, et qui ont accompagné la procédure en appel, a considéré que les droits de la société Kindy Bathily ont été confirmés sur ledit titre foncier alors qu’il a été démontré devant les juges de référé d’instance, que le TF n°840 confère la propriété de cette parcelle à A, mais aussi qu’il s’agit de deux parcelles différentes au vu des pièces versées au dossier, non seulement par le lieu de la situation géographique, mais aussi par la superficie ;

Que les matériaux dont l’enlèvement a été ordonné sont sur la propriété de A dont le TF n°840 devenu définitif n’a jamais été remis en cause ;

Qu’en se fondant sur les arrêts de la section administratives de la cour suprême qui consacrent la propriété de la société Kindy Mali SARL par le TF n°38897 alors que les matériaux dont l’enlèvement est ordonné sont sur le TF n°840 sis à Kabala et non à Kalabancoro Extension Sud Est, l’arrêt attaqué manque de base légale et encourt la cassation.

Le défaut de motivation :

En ce que la chambre des référés de la cour d’appel a ordonné l’enlèvement des matériaux de construction sur une parcelle qui n’est pas la propriété de la société Kindy Mali SARL ;

Que l’arrêt entrepris a pour référence les arrêts de la section administrative de la cour suprême lesquels sont relatifs au titre foncier n°38897 alors que le TF n°840 est la propriété de A, lequel ne saurait être concerné par l’enlèvement de matériaux ordonné par ledit arrêt et ne portant que sur le TF n°38897 ;

Qu’en statuant ainsi, l’arrêt attaqué manque de certitude et procède par des motifs hypothétiques ;

Qu’il y a lieu de le censurer de ce chef.

La Société Kindy Mali SARL, par l’organe de son conseil Maître Moussa Maïga, a, dans un mémoire en défense parvenu au greffe le 23/11/2011, conclu au rejet du pourvoi.

III – ANALYSE DES MOYENS :

Attendu que le demandeur au pourvoi, à l’appui de son recours, soulève les moyens de cassation tirés de la violation de la loi, du défaut de base légale et du défaut de motivation.

Sur le premier moyen tiré de la violation de la loi :

Sur la première branche : la violation de l’article 480 du CPCCS :

Attendu qu’il est fait grief à la cour d’appel d’avoir qualifié sa décision de réputé contradictoire au motif que la citation à comparaître, servie à un vigile est une citation à personne alors que ni le conseil du demandeur, ni le demandeur lui-même n’ont eu connaissance de la procédure qu’à travers la signification de l’arrêt ;

Attendu que l’article 480 du CPCCS dispose « … le jugement est réputé contradictoire lorsque la décision est susceptible d’appel ou lorsque la citation a été délivrée à la personne du défendeur ».

Attendu que la citation à comparaître sur laquelle l’arrêt attaqué se fonde est celle servie par l’Etude de maître Aliou Traoré, le 03 août 2011 et portant la mention ci-après : « Où étant et parlant à : domicile, Monsieur Ac Ad son vigile ainsi déclaré, pour remise » ;

Qu’au regard de cette mention, cet exploit d’huissier n’a pas été servi à la personne de A mais à domicile ;

Qu’en qualifiant leur décision de réputée contradictoire à l’égard de l’intimé, les juges d’appel méconnaissent les dispositions de l’article 480 du CPCCS ;

Que dès lors, il y’a lieu d’accueillir le moyen en cette 1ère branche ;

Sur la 2ème branche : La violation des articles 573 et 574 du CPCCS :

Attendu qu’il est en outre reproché à l’arrêt entrepris la violation des articles 573 et 574 du CPCCS en ce qu’il a méconnu le principe de l’effet dévolutif de l’appel en cantonnant l’examen de la cause aux seules prétentions de la Société Kindy Mali SARL alors que l’objet de l’appel n’était pas limité à certains chefs de l’ordonnance querellée.

Attendu que les textes dont la violation est alléguée sont ainsi libellés :

Article 573 du CPCCS : «l’appel remet la chose jugée en question devant la juridiction d’appel pour qu’il soit à nouveau statué en fait et en droit »

Article 574 du CPCCS : «l’affaire ne défère à la cour que la connaissance des chefs de jugement qu’il critique expressément ou implicitement, et ceux qui en dépendent.

La dévolution s’opère pour le tout lorsque l’appel n’est pas limité à certains chefs, lorsqu’il tend à l’annulation du jugement ou si l’objet du litige est indivisible».

Attendu que l’arrêt attaqué, dans sa motivation ne fait aucune référence au titre foncier n°840 de A et à l’existence de deux parcelles distinctes par leur superficie et leur situation géographique retenue par l’ordonnance querellée ;

Qu’en se bornant à évoquer les seuls arrêts de la Section Administrative de la Cour Suprême qui du reste, ne mettent pas en cause le titre foncier n°840 de Monsieur Aa, les juges d’appel n’ont pas examiné tous les aspects du litige déféré à leur office par l’effet dévolutif de l’appel ;

Qu’en statuant comme ils ont fait, leur décision viole les dispositions des articles 573 et 574 du CPCCS et encourt dès lors la cassation ;

Sur le 2ème moyen : le manque de base légale :

Attendu que le demandeur fait par ailleurs grief à l’arrêt entrepris de manquer de base légale en ce qu’il a considéré que les droits de la société Kindy Mali SARL ont été confirmés sur titre foncier, sans examen des pièces versées devant le juge d’instance alors qu’il a été démontré devant le juge des référés que le titre foncier n°840 confère la propriété de cette parcelle à A, mais aussi qu’il s’agit de deux parcelles différentes au vu des pièces du dossier, non seulement par la situation géographique, mais aussi par la superficie ;

Attendu que selon la doctrine dominante, le grief de défaut de base légale peut être définie comme une insuffisance des constatations de fait qui sont nécessaires pour statuer sur le droit ;

Attendu que dans le cas de figure, l’arrêt querellé s’est prononcé sur les seules pièces produites par la société Kindy Mali notamment les arrêts n°21 du 27-01-2011 et n°125 du 09-06-2011 de la Section Administrative de la Cour Suprême relatifs au Titre foncier n°38897 mais a occulté la production du TF n°840, la question de l’existence possible de deux parcelles distinctes tant par la situation géographique que par la superficie, alors que la pertinence de tels faits est de nature à influencer sur la compétence du juge des référés ;

Qu’en se déterminant ainsi, les juges d’appel ne donnent pas de justification à leur décision et le moyen tiré du défaut de base légale doit être accueilli ;

Sur le 3ème moyen tiré du défaut de motivation :

Attendu qu’il est en outre reproché à l’arrêt attaqué le défaut de motivation en ce qu’il a ordonné l’enlèvement des matériaux de construction sur une parcelle qui n’est pas la pas la propriété de la Société Kindy Mali en se fondant sur les arrêts de la Cour Suprême (Section Administrative) relatifs au titre foncier n°38897 alors que les dites décisions ne concernent pas le titre foncier n°840 de A ;

Attendu que sur ce point, l’arrêt attaqué énonce : « Considérant cependant qu’il ressort des débats, des pièces produites par la société Kindy Mali SARL notamment les arrêts n°21 en date du 27 Janvier 2011 de la Section Administrative de la Cour Suprême, n°125 du 09 Juin 2011 de la même cour, que ses droits ont été confirmés sur le titre foncier ;

Qu’en affirmant de façon péremptoire que les matériaux sont entreposés sur le TF n°38897 alors que la partie adverse exhibe le TF n°840 datant du 23/09/1996, donc antérieur et portant sur une parcelle dont la superficie et la situation géographique sont différentes, de celle, objet du titre ci-dessus visé, les juges de la cour d’appel ne donnent pas de motivation à leur décision ;

Qu’il échet dès lors d’accueillir le moyen soulevé de ce chef ;

…Casse et annule l’arrêt déféré ;

Renvoie la cause et les parties devant la cour d’appel de Bamako autrement composée ;…


Synthèse
Numéro d'arrêt : 125
Date de la décision : 14/05/2012

Analyses

Enlèvement de matériaux sous astreinte.


Origine de la décision
Date de l'import : 06/03/2020
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ml;cour.supreme;arret;2012-05-14;125 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award