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14/05/2012 | MALI | N°123

Mali | Mali, Cour suprême, 14 mai 2012, 123


Texte (pseudonymisé)
ARRET N°123 du 14/05/2012

Démolition sous astreinte.

Cassation- Moyen- Violation de la loi par fausse qualification des faits: article 12 CPCCS.

Encourt la cassation, l’arrêt de la Cour d’Appel qui ordonne des mesures d’expulsion et de démolition sur la base d’un acte administratif inexistant car retiré par l’autorité concédante.





AU FOND :

I - FAITS ET PROCEDURE :

Suivant acte intitulé «Lettre d’attribution» en date du 10 Juin 1989 le chef de village de Kalabacoro affec

ta à M. Aa un lot de 25 X 25 sis au secteur Nord-Ouest face à l’école.

Le 15 mars 2002, le maire de la Comm...

ARRET N°123 du 14/05/2012

Démolition sous astreinte.

Cassation- Moyen- Violation de la loi par fausse qualification des faits: article 12 CPCCS.

Encourt la cassation, l’arrêt de la Cour d’Appel qui ordonne des mesures d’expulsion et de démolition sur la base d’un acte administratif inexistant car retiré par l’autorité concédante.

AU FOND :

I - FAITS ET PROCEDURE :

Suivant acte intitulé «Lettre d’attribution» en date du 10 Juin 1989 le chef de village de Kalabacoro affecta à M. Aa un lot de 25 X 25 sis au secteur Nord-Ouest face à l’école.

Le 15 mars 2002, le maire de la Commune de Baguineda par acte n°402/CRBC informa Ae Ab de l’attribution à celui-ci par la commission de distribution DU lot n°166/a à titre de régularisation.

Ayant constaté que des fondations de trois pièces sont érigées sur ledit lot par M. Aa, M. Af fit citer celui-ci devant le tribunal civil de Kati en démolition sous astreinte des dites réalisations. Cette juridiction fit droit à la requête de M. Af suivant jugement rendu par défaut le 04 Juin 2007 sous le numéro 197. Sur opposition de M. Aa, le tribunal rétracta sa décision et reconnut la propriété de celui sur la parcelle en litige et cela par jugement n°0338 du 25 Août 2008. Sur appel de M. Ac chambre civile de la cour d’appel de Bamako ordonna par arrêt avant dire droit n°142 du 25 Janvier 2009 « le sursis à statuer jusqu’à la décision définitive du tribunal compétent sur la validité de la lettre d’attribution n°402/CRBC du 15 /03/2003, et sur l’autorisation de construire au nom de M. Af».

Par arrêt n°411 du 30 juin 2010, la même chambre infirma le jugement entrepris déclara M. Af propriétaire de la parcelle n°166/A et ordonna la démolition des ouvrages y édifiés par M. Aa.

C’est contre cet arrêt que le présent pourvoi est dirigé.

II -EXPOSE DES MOYENS DE POURVOI :

Au soutien de son pourvoi M. Aa invoque un moyen unique de cassation tiré de la violation de la loi par fausse interprétation et fausse application.

En ce que pour infirmer le jugement entrepris, déclarer M. Af propriétaire de la parcelle litigieuse et ordonner la démolition des ouvrages y réalisés, la cour d’appel a soutenu que M. Aa se devait suite à l’arrêt avant dire droit d’attaquer la lettre administrative que détient M. Af alors que ladite lettre a fait l’objet de retrait suivant la décision n°033/CRBC en date du 18 Août 2008 du maire de Banguineda régulièrement notifiée à M. Af pour faire ouvrir à celui-ci les délais de recours devant les tribunaux administratifs, et alors que l’article 12 du CPCCS prévoit que « le juge tranche le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables » ;

Que les juges du fond en fondant leur décision sur la prééminence d’un acte administratif inexistant ont violé la loi par fausse application de celle-ci ;

Qu’en effet l’arrêt querellé en reprochant à M. Aa son inertie en raison de l’ADD prononcé, fait une mauvaise application de la loi en ne reprochant pas le même comportement à M. Af d’autant qu’il affirme dans un considérant que «des débats et du dossier, il ressort que par jugement ADD n°142 en date du 25 février 2009, la cour de céans a ordonné le sursis à statuer aux motifs que les deux parties ont chacune un titre administratif sur la parcelle litigieuse …. » ;

Que la Cour se devait dès lors d’aller au bout de sa logique qui était la nécessité d’une décision administrative face à la coexistence de deux actes administratifs se rapportant à la même parcelle ;

Qu’au demeurant le retrait de la lettre d’attribution en faveur de M. Af par l’autorité concédante non seulement décharge M. Aa de toute contestation, mais aussi fait peser à contrario sur la cour l’obligation de constater l’inexistence de l’acte ayant fait l’objet de retrait ; que dès lors aucune forclusion de délai de recours administratif ne peut être reprochée à M. Aa auquel on ne peut davantage reprocher détenir un acte administratif de valeur juridique inférieure à celui que détient M. Af et dont l’existence a été mise en cause par l’autorité concédante ;

Que la cour ayant fait une mauvaise application de la loi par mauvaise interprétation a exposé son arrêt à la censure de la Cour Suprême.

III - ANALYSE DU MOYEN :

Attendu que le pourvoi reproche à l’arrêt attaqué, en invoquant l’article 12 du CPCCS d’avoir infirmé le jugement d’instance, déclaré M. Af propriétaire de la parcelle litigieuse et ordonné la démolition des ouvrages y réalisés par M. Aa au motif que celui-ci se devait suite à l’arrêt avant dire droit ayant ordonné le sursis à statuer, d’attaquer la lettre d’attribution que détient M. Af, alors que la dite lettre a fait l’objet de retrait suivant décision n°033/CRBC du 18 Août 2008 du maire de la commune rurale de Baguineda, régulièrement notifiée au bénéficiaire de la lettre retirée ;

Attendu que l’article 12 CPCCS est ainsi conçu : «  le juge tranche le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables. Il doit donner ou restituer leur exacte qualification aux faits et actes litigieux, sans s’arrêter à la dénomination que les parties en auraient proposée.

Il peut relever d’office les moyens de pur droit quel que soit le fondement juridique invoqué par les parties … » ;

Attendu qu’à cet égard, le juge a l’obligation de trancher les litiges qui lui sont soumis conformément aux lois régissant la matière, alors même que l’application de ces lois n’aurait pas été expressément requise par les parties (Civ 20 février 1854, D.P 1854, 1.62, Civ 1ère, 16 nov.1960. D.1961, 7 Mega code NPCC Dalloz 1999) ;

Attendu que pour reconnaître les droits de M. Af sur la parcelle litigieuse, l’arrêt attaqué a retenu qu’« il ressort que la lettre d’attribution dont se prévaut M. Aa a été délivrée par les autorités coutumières contrairement à celle délivrée par la Mairie à M. Af; que seule la lettre attribuée à M. Af par la Mairie a qualité d’acte administratif ;

Que la lettre détenue par M. Aa et délivrée par les autorités coutumières n’a pas de valeur administrative et est insignifiante au regard des dispositions du code domanial et foncier » ;

Attendu cependant que si en vertu des articles 59 et 60 du code domanial et foncier, la preuve des droits d’usage et d’habitation sur les terrains appartenant aux collectivités territoriales résulte du permis d’occuper ou concession urbaine, c’est à la condition que ce permis soit resté valide au moment où le juge statue, le retrait d’un acte administratif que constitue le permis ayant pour effet de supprimer cet acte pour le passé en faisant comme s’il n’avait jamais existé ;

Attendu qu’en l’espèce, il est versé au dossier la lettre décisoire n°33/CRBC du 12 Août 2008 par laquelle le Maire de la commune rurale de Baguineda camp, autorité concédante, a notifié à M. Af l’annulation de la lettre n°402 du 15 mars 2003 portant attribution à celui-ci de la parcelle n°166/A ;

Attendu qu’il ne ressort pas des éléments de la cause que cette décision a été mise en cause par M. Ad vue d’obtenir son annulation ;

Attendu qu’il s’ensuit que les juges du fond en reconnaissant les droits de M. Af sur la parcelle litigieuse sur le fondement d’un acte inexistant n’ont pas tranché le litige qui leur est soumis conformément aux règles régissant les droits d’usage et d’habitation concédés sur les terrains appartenant aux collectivités territoriales en rapport avec les effets du retrait d’un acte administratif ;

Qu’en se déterminant ainsi qu’ils l’ont fait, les juges d’appel ont violé lesdites règles et ont de ce fait exposé leur décision à la censure de la cour suprême.

…Casse et annule l’arrêt ;

Renvoie la cause et les parties devant la cour d’appel de Bamako autrement composée ;…


Synthèse
Numéro d'arrêt : 123
Date de la décision : 14/05/2012

Analyses

Démolition sous astreinte.


Origine de la décision
Date de l'import : 06/03/2020
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ml;cour.supreme;arret;2012-05-14;123 ?
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