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21/02/2012 | MALI | N°01

Mali | Mali, Cour suprême, 21 février 2012, 01


Texte (pseudonymisé)
ARRET N° 01 DU 21 FEVRIER 2012.

Réparation de préjudice.

Transport terrestre de marchandises- Cause de suspension de la prescription des actions découlant du contrat : article 248 RGO. Moyen de cassation- Dénaturation des faits.

Doit être cassé, l’arrêt de la Cour d’Appel qui retient une autre cause de suspension de la prescription découlant du contrat de transport terrestre de marchandises en dehors des cas cités à l’article 248 RGO.



FAITS ET PROCEDURE :

Courant l’année 2007, la SOGECIM par l’intermédiaire de son mandataire M

onsieur A.K. S, a sollicité les services de la Société MAERSK MALI SA afin d’assurer l’acheminement sur Bama...

ARRET N° 01 DU 21 FEVRIER 2012.

Réparation de préjudice.

Transport terrestre de marchandises- Cause de suspension de la prescription des actions découlant du contrat : article 248 RGO. Moyen de cassation- Dénaturation des faits.

Doit être cassé, l’arrêt de la Cour d’Appel qui retient une autre cause de suspension de la prescription découlant du contrat de transport terrestre de marchandises en dehors des cas cités à l’article 248 RGO.

FAITS ET PROCEDURE :

Courant l’année 2007, la SOGECIM par l’intermédiaire de son mandataire Monsieur A.K. S, a sollicité les services de la Société MAERSK MALI SA afin d’assurer l’acheminement sur Bamako de cinq (05) conteneurs de marchandises en provenance des (USA) du Pakistan et de la Chine.

Le transport des marchandises ayant pris un retard considérable et certains conteneurs ayant été vandalisés au cours du transport, la SOGECIM SA a, par le truchement de son conseil, saisi le Tribunal de Commerce de Bamako d’une action en réparation de préjudice.

Cette juridiction a, par jugement N° 479 du 30 Septembre 2009, Condamné MAERSK MALI SA à payer à la requérante la somme de 221. 000. 000 FCFA tous préjudice confondus.

La Chambre Commerciale de la Cour d’Appel de Bamako saisie sur appel de MAERSK MALI SA a par arrêt N° 71 du 21 décembre 2010, confirmé le jugement entrepris.

C’est cet arrêt qui fait l’objet du présent pourvoi.

EXPOSE DES MOYENS DE CASSATION :

La demanderesse au pourvoi, sous la plume de son Conseil le Cabinet TOUREH et Associés soulève trois moyens de cassation tirés de la violation de la loi par refus d’appliquer la loi, la dénaturation des faits et le défaut de base légale ;

I- PREMIER MOYEN DE LA VIOLATION DE LA LOI PAR REFUS D’APPLIQUER LA LOI :

En ce que l’action en réparation de préjudice relative aux quatre conteneurs visés par la requête de la SOGECIM a été introduite au tribunal de commerce le 21 MAI 2009 soit 15 mois après la livraison faite en janvier 2008 ;

Alors qu’aux termes de l’article 25 de l’Acte Uniforme de l’OHADA relatif au contrat de transport par voie terrestre, « toute action découlant d’un transport régi par le présent acte uniforme se prescrit par un an à compter de la date de livraison ou à compter de celle où la livraison aurait dû être faite » ;

Que par ailleurs, l’alinéa 2 du même article assujettit la recevabilité de l’action en responsabilité contre le transporteur à un recours gracieux préalable qui prend la forme d’une réclamation écrite faite au premier ou dernier transporteur dans un délai de 60 jours après la date de la livraison de la marchandises non livré ;

Qu’en outre il importe de souligner qu’hormis le conteneur N° CAXU 9969359 à propos duquel la SOGECIM adressait à MAERSK MALI SA une réclamation d’un montant de 5.806.701 F CFA celle-ci n’a reçu aucune autre contestation écrite de la part de SOGECIM ;

Que s’agissant du conteneur N° CAXU 99693359, la réclamation faite à MAERSK MALI l’a été hors délai ;

Que cependant pour contourner les prescriptions de l’article 25 de l’Acte Uniforme susvisé, les juges du fond ont estimé qu’une tierce personne (conseil National des chargeurs mali) qui n’avait aucun mandat et qui n’était pas destinataire des marchandises avait écrit à MAERSK- MALI SA, au sujet de la réclamation de SOGECIM et que cet écrit permet de suspendre le cours de la prescription prévue par l’article 25 de l’Acte Uniforme sur les contrats de transports ;

Qu’en rejetant la fin de non-recevoir tirée de la prescription annale, la chambre commerciale de la Cour d’Appel de Bamako a violé les dispositions de l’article 25 de l’Acte Uniforme de l’OHADA sur les contrats de transport et expose ainsi sa décision à la censure de la haute juridiction ;

II- DEUXIEME MOYEN DE LA DENATURAION DES FAITS :

Au soutient de ce moyen, la demanderesse au pourvoi expose qu’il résulte des différents connaissements versés au dossier que les sociétés de transit (Vartivarian USA, Al karan Textile JIAXLANG SHANG SHANGONS SHENG) toutes transitaires de la SOGECIM, ont conclu avec les sociétés MAERSK USA, MAERSK-PAKISTAN et MAERSK Chine, un contrat de transport portant sur l’acheminement des balles de friperie de leur port de chargement d’origine à Bamako ;

Que le prix du transport a été discuté et fixé par les transitaires de la SOGECIM et lesdites sociétés de transit ;

Que la société MAERSK MALI SA n’a à aucun moment traité ni avec la SOGECIM, ni avec ses transitaires au sujet du transport des balles de friperie appartenant à la défenderesse au pourvoi ;

Que c’est en vertu du « shipping Instruction adressé à elle par le transitaire commun des sociétés MAERSK-USA- PAKISTAN et MAERSK CHINE, qu’elle a établi la facture relative au prix de transport des conteneurs ainsi que les prestations locales effectuées par elle à l’arrivée des conteneurs sur le terminal de SOTUBA (Bamako) ;

Que MARSK MALI SA n’étant pas partie aux contrats de transports ci-dessus car n’étant pas une filiale des sociétés C A, MAERSK PAKISTAN et C B, elle ne saurait être déclarée responsable d’un quelconque dommage ou retard liés auxdits contrats de transports ;

Que la cour d’Appel, en niant l’existence de ces contrats a fait dire à une clause claire (B1 de transport) le contraire de ce qu’elle contient ;

Que pour cette raison, son arrêt doit être censuré ;

III- TROISIEME MOYEN TIRE DU DEFAUT DE BASE LEGALE :

En ce moyen, les juges du fond ont condamné MAERSK-MALI SA au paiement des dommages intérêts sans pour autant démontrer que celle-ci a conclu un contrat de transport avec SOGECIM ;

Qu’il n’a été produit aucun document écrit attestant que la demanderesse au pourvoi a exécuté une infime partie du contrat de transport liant SOGECIM aux sociétés étrangères sus indiquées ;

Que dans ces conditions, il est difficile voire impossible de retenir sa responsabilité dans ce transport, la responsabilité supposant l’existence d’une faute d’un préjudice et d’un lien de causalité entre cette faute et le préjudice ;

Qu’une telle constatation faisant défaut à l’arrêt attaqué ; celui-ci manque de base légale et doit en conséquence être cassé ;

La SOGECIM, défenderesse au pourvoi a répliqué sous la plume de ses Conseils Maîtres Simon S. BAGAYOKO et Seydou S. COULIBALY et a demandé le rejet du pourvoi ;

ANALYSE DES MOYENS :

Sur le 1er moyen tiré de la violation de la loi par refus d’appliquer la loi ;

I- SUR LE PREMIER MOYEN TIRE DE LA VIOLATION DE LA LOI ET PAR REFUS D’APPLIQUER LA LOI :

Par ce moyen, la demanderesse reproche à l’arrêt attaqué d’avoir refusé d’appliquer les dispositions de l’article 25 de l’Acte Uniforme de l’OHADA relatif au contrat de transport par voie terrestre qui disposent :

1 – « toute action découlant d’un transport régi par le présent Acte Uniforme se prescrit par un an à compter de la date de livraison ou, à défaut de livraison de la date à laquelle la marchandise aurait dû être livrée ;

Toutefois dans le cas de dol ou de faute équivalente au dol, cette prescription est de trois ans ;

2- L’action n’est recevable que si une réclamation écrite a été préalablement faite au premier transporteur ou au dernier transporteur au plus tard soixante (60) jours après la date de la livraison de la marchandise ou, à défaut de livraison au plus tard six (6) mois après la prise en charge de la marchandises » ;

Attendu que la violation de la loi par refus d’application suppose qu’à partir de faits matériellement établis, correctement qualifiés, les juges du fond ont refusé d’appliquer un texte de loi à une situation qui manifestement rentrait dans son champ d’application ;

Attendu qu’en l’espèce la demanderesse soutient que la SOGECIM aurait dû être déclarée irrecevable pour prescription en vertu des dispositions de l’article 25 de l’Acte Uniforme de l’OHADA relatif au contrat de transport par voie terrestre aux motifs d’une part qu’aucune réclamation écrite n’a été faite au transporteur et qu’aucun recours gracieux préalable n’a été notifié à MAERSK-MALI SA d’autre part ;

Mais attendu que pour rejeter cette fin de non-recevoir, la Cour d’Appel énonce :

« Considérant qu’après Janvier 2008, date contractuelle de livraison des conteneurs, le Conseil Malien des Chargeurs a adressé à la SOGICIM la lettre du 16 Octobre 2008 ;

Que cette lettre avait pour objet la réclamation des conteneurs et la suite réservée à l’intervention auprès de MAERSK-MALI SA. Que cette lettre est la preuve que la SOGECIM a fait des réclamations, qu’en plus MAERSK MALI SA a reconnu avoir proposé à la SOGECIM 10.074.623 FRANCS CFA à titre de règlement à l’amiable ; que cette proposition prouve que la réclamation a été faite à temps, sinon elle n’aurait pas eu lieu ;

Considérant que les différents échanges de correspondance et proposition de règlement amiable sont la preuve que la prescription prévue par l’article 25 de l’Acte Uniforme est interrompue » ;

Attendu que pour écarter la prescription les juges d’appel ont soutenu qu’elle a été interrompue par le fait de l’existence de la lettre du 16 octobre 2008 du conseil malien des chargeurs adressée à la SOGECIM ;

Attendu que selon l’article 248 du régime général des obligations « l’aveu judiciaire, la demande en justice, le commandement de payer, l’exécution totale ou partielle, volontaire ou forcée, interrompent la prescription » ;

Attendu qu’il ne ressort pas de cet article que la lettre visée par l’arrêt correspond à une des causes d’interruption de la prescription ;

Que les juges d’appel en écartant donc la prescription sans s’assurer qu’elle a été interrompu par une des causes prévues par la loi, ont violé les dispositions le l’article 25 cité au moyen ;

Qu’il convient donc d’accueillir favorablement le moyen tiré de la violation de la loi ;

II – SUR LE DEUXIEME MOYEN TIRE DE LA DENATURATION DES FAITS :

Attendu qu’il est fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir retenu la responsabilité de la Société MAERSK-MALI alors que celle-ci n’a à aucun moment traité ni avec la SOGECIM, ni avec ses transitaires les modalités des contrats de transport des conteneurs appartenant à la SOGECIM.

Qu’elle ne saurait donc être responsable d’un quelconque dommage ou retard liés auxdits contrats.

Mais attendu en premier lieu que la dénaturation des faits ne constitue pas un cas d’ouverture à cassation (cass. Soc 21 Oct. 1997 N° 95-44 034).

Qu’en second lieu, il ressort des propres conclusions de la demanderesse que c’est elle qui a établi les factures relatives au prix de transport des conteneurs de la SOGECIM – SA et qui a effectué des prestations locales à l’arrivée des conteneurs sur le terminal de SOTUBA à Bamako ;

Que dès lors, en énonçant que « c’est à bon droit que MAERSK MALI SA a été assigné en réparation de préjudice par la SOGECIM MALI SA, l’arrêt attaqué n’a procédé à aucune dénaturation ;

III – SUR LE TROISIEME MOYEN TIRE DU DEFAUT DE BASE LEGALE :

Attendu qu’il est fait grief à l’arrêt attaqué de manquer de base légale pour avoir condamné MAERSK-MALI SA à réparer le préjudice subi par la SOGECIM sans pour autant démontrer qu’elle avait conclu un contrat avec celle-ci ;

Mais attendu qu’il a été établi par l’analyse du deuxième moyen qu’il existait une relation contractuelle entre MAERSK-MALI SA et la SOGECIM ;

Que dès lors ce moyen manque en fait et doit être rejeté.

…Casse et annule l’arrêt querellé ;

… Renvoie la cause et les parties devant la cour d’appel de Bamako autrement composée ;…


Synthèse
Numéro d'arrêt : 01
Date de la décision : 21/02/2012

Analyses

Réparation de préjudice.


Origine de la décision
Date de l'import : 06/03/2020
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ml;cour.supreme;arret;2012-02-21;01 ?
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