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17/01/2012 | MALI | N°20

Mali | Mali, Cour suprême, 17 janvier 2012, 20


Texte (pseudonymisé)
2eme CHAMBRE CIVILE

ARRET N° 20 du 17/01/2012

Validation de vente et restitution de titre de propriété.

VENTE : acte sous-seing privé- Accord entre les parties sur la chose et le prix : article 583 Code Civil et 9 CPCCS.

Méconnaît les disposition des articles 1583 du Code Civil et 9 CPCCS l’arrêt qui rejette une demande de validation de vente de permis d’occuper entre les parties et constaté par un acte sous-seing privé.





I - FAITS ET PROCEDURE :

Aet Bse disputent la propriété de la parcelle

n°7 EB/4 du lotissement de Magnambougou rural, objet de la lettre d’attribution n°CF.3607/6 du 6/1/1982. Le prem...

2eme CHAMBRE CIVILE

ARRET N° 20 du 17/01/2012

Validation de vente et restitution de titre de propriété.

VENTE : acte sous-seing privé- Accord entre les parties sur la chose et le prix : article 583 Code Civil et 9 CPCCS.

Méconnaît les disposition des articles 1583 du Code Civil et 9 CPCCS l’arrêt qui rejette une demande de validation de vente de permis d’occuper entre les parties et constaté par un acte sous-seing privé.

I - FAITS ET PROCEDURE :

Aet Bse disputent la propriété de la parcelle n°7 EB/4 du lotissement de Magnambougou rural, objet de la lettre d’attribution n°CF.3607/6 du 6/1/1982. Le premier soutient l’avoir achetée avec le second suivant acte sous seing privé en date du 31 juillet 1986 à la somme de 750.000F CFA. Celui-ci conteste cette version et allègue qu’il ne s’est jamais agi de vente relative à sa parcelle, mais que Ah Af détient les documents y afférents en garantie d’une somme de 400.000F maliens qu’il avait prêtée à son père.

Les 9 et 27 juillet 1994, Bfit établir une lettre d’attribution et un permis d’occuper en son nom sur la même parcelle.

Par requête en date du 22 juillet 2009, Maître Mamadou Sylla, avocat à la cour, agissant au nom et pour le compte de M.M. H, saisissait le tribunal civil de la commune VI de Bamako d’une action en validation de vente et de restitution de titre de propriété contre B.

Par jugement n°2914 du 14 octobre 2009, cette juridiction faisait droit à la demande de Monsieur Ad, déclarait bonne et valable la vente intervenue entre les parties par acte sous seing privé du 31 juillet 1986 portant sur le terrain à usage d’habitation n°7 EB/4 sis à Magnambougou village, ordonnait à Monsieur Ab de remettre le titre de propriété de ladite parcelle, disait qu’il sera astreint provisoirement au paiement de la somme de cinquante mille (50.000) francs CFA par jour de retard à compter de la notification du présent, et ordonnait l’exécution provisoire du présent nonobstant l’exercice des voies de recours.

Sur appel de B, la chambre civile de la cour d’appel de Bamako, par arrêt n°63 du 2 février 2011, infirmait ce jugement et statuait ainsi que dessus.

C’est contre cette décision que A, par l’organe de son conseil Maître Mamadou Sylla, a déclaré se pourvoir en cassation.

II- EXPOSE DES MOYENS:

Le demandeur au pourvoi, sous la plume de son conseil, soulève trois moyens de cassation tirés de la violation de la loi, la dénaturation des faits et le manque de base légale.

Premier moyen : la violation de la loi prise en deux branches :

Première branche : la violation de l’article 1583 du code civil :

Il est fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir débouté Asans expliquer comment les originaux des documents sont en possession de celui-ci, en se fondant sur la déclaration de Bselon laquelle son père aurait remis lesdits documents au mémorants en garantie des sommes empruntées par ce dernier et en retenant que l’acte de vente est postérieur au P.O 153/94 au nom de Bpour conclure à l’inexistence d’une vente alors que c’est grâce à la lettre d’attribution n°CF 3607/6 du 6/01/1982, la lettre n°265/MI-PUM-85 du 4/02/1986 autorisant Monsieur SBà verser la somme de 125.000F CFA et le reçu de versement n°4426 du 29/04/1986 que la vente a eu lieu ;

Que tous ces actes administratifs sont antérieurs à la vente contrairement à la compréhension des juges de la cour d’appel ;

Qu’en occultant le fait que les parties sont convenues de la chose et du prix, l’arrêt querellé a violé les dispositions de l’article 1583 du code civil et encourt la cassation.

Deuxième branche : la violation de l’article 9 du CPCCS :

En ce que l’arrêt attaqué a retenu que le sieur Ad n’a pas apporté la preuve de la vente alors que celui-ci, contrairement aux motivations de l’arrêt, a produit plusieurs pièces dont l’attestation de vente en date du 31 juillet 1986, la lettre n°265/MI-PUM-85 du 04/02/1986 adressée à Monsieur le Directeur Général de la Banque de Développement du Mali, le bordereau de versement n°4426 du 29/04/1986 au nom de B, le procès-verbal de constat en date du 11/11/2010 dans lequel Ac Ag a été interpellé et la sommation interpellative en date du 29/08/2010 de Aa Ae ;

Que Bn’a pas contesté cette version des faits dans la mesure où il fait référence à la lettre d’acceptation et au bordereau de versement qui datent toutes des années 1980.

Que ceci prouve à suffisance que la vente a lieu sur la référence des pièces et non sur le permis d’occuper n)153/94 qui a été obtenu par fraude en 1994 par B;

Qu’en statuant comme il a fait, l’arrêt entrepris procède d’une fausse application de l’article 9 du CPCCS et encourt la censure de la cour suprême.

Deuxième moyen : le défaut de base légale :

En ce que la cour d’appel a retenu que « le juge d’instance, en déclarant bonne et valable la vente intervenue entre les parties par acte sous seing privé, a fait une mauvaise appréciation des faits et une mauvaise application de la loi » alors que l’arrêt attaqué ne démontre pas en quoi il y a eu mauvaise application de la loi ;

Que contrairement aux juges d’appel, le juge d’instance a pris en considération tous les actes versés au dossier alors que l’arrêt querellé a ignoré tous les actes obtenus par Bdans les années 1980 et qu’il a été prouvé pour l’obtention du permis d’occuper, que Ba non seulement, en dehors du premier versement opéré en 1986, procédé à un autre versement en 1994 ;

Que l’arrêt attaqué a relevé à tort que l’acte de vente est postérieur au permis d’occuper de 1994 et aucune justification n’a été apportée pour soutenir cette assertion.

Qu’en statuant ainsi, l’arrêt entrepris encourt la censure de la cour suprême.

Troisième moyen : la dénaturation des faits :

En ce que les juges d’appel ont, pour infirmer le jugement entrepris, relevé que l’acte de vente est postérieur au permis d’occuper établi en 1994 au nom de Balors que selon le moyen, la demande de Ase fonde sur l’attestation de vente du 31 juillet 1986, la lettre d’attribution CF n°3607/6 du 06/01/1982, la lettre d’acceptation et le bordereau de versement qui datent de 1986 ;

Que dans le cas d’espèce, la dénaturation concerne non seulement une pièce (P.O) mais aussi les faits, et qu’il y a lieu de préciser que la vente n’a pas eu lieu sur la base de ce permis d’occuper, mais sur la base de la lettre d’attribution CF/3607/6 du 06/01/1982 confirmée par une attestation de vente signée des parties le 31 juillet 1986 ;

Qu’en ramenant la qualification juridique de la vente au permis d’occuper de 1994, les juges d’appel ont dénaturé les faits et leur décision encourt la cassation.

En réplique, le cabinet Traoré, cabinet d’avocats agissant au nom et pour le compte de B, a dans un mémoire en défense parvenu au greffe de la cour le 9 septembre 2011, conclu au rejet du pourvoi.

III- ANALYSE DES MOYENS :

Sur le premier moyen tiré de la violation de la loi prise en deux branches :

Sur la première branche : la violation de l’article 1583 du code civil :

Attendu que le demandeur fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir violé les dispositions de l’article 1583 du code civil en ce qu’il a débouté Asans expliquer comment les originaux des documents sont en possession de celui-ci, en se fondant sur la déclaration de Bselon laquelle son père aurait remis lesdits documents au mémorant en garantie des sommes empruntées par ce dernier et en retenant que l’acte de vente est postérieur au permis d’occuper 153/94 au nom de Bpour conclure à l’inexistence d’une vente alors que selon le moyen, c’est grâce à la lettre d’attribution n°CF 3607/6 du 06/01/1982, la lettre n°265/MI-PUM-85 du 4/02/1986 autorisant Bà verser la somme de 125.000F CFA et le reçu de versement n°4426 du 29/4/1986 que la vente a eu lieu ;

Attendu que l’article 1583 du code civil dispose :

« Elle (la vente) est parfaite entre les parties, et la propriété est acquise de droit à l’acheteur à l’égard du vendeur, dès lors qu’on est convenu de la chose et du prix, quoique la chose n’ait pas encore été livrée ni le prix payé ».

Attendu que pour infirmer le jugement entrepris, l’arrêt attaqué retient que « An’apporte pas la preuve que c’est bien Bpropriétaire de la parcelle querellée qui la lui a vendue d’autant plus que l’acte de vente dont celui-ci se prévaut est postérieur au permis d’occuper 153/94 au nom de B» et déclare que cette vente n’est pas valable alors que le mémorant produit un acte sous seing privé datant du 31 juillet 1986 et constatant cette transaction intervenue entre les parties.

Qu’en fondant leur décision sur une prétendue postériorité de l’acte de vente par rapport au P.O 153/94 qui du reste est erronée, sans examiner le contenu réel de l’acte sous seing privé du 31/7/1986, les juges d’appel ont méconnu les dispositions de l’article 1583 du code civil ;

Que dès lors, le moyen pris en cette première branche doit être accueilli ;

Sur la deuxième branche : la violation de l’article 9 du CPCCS :

Attendu qu’il est en outre fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir violé les dispositions de l’article 9 du CPCCS en ce qu’il a retenu que An’a pas apporté la preuve de la vente ;

Attendu que l’article 9 du CPCCS est ainsi libellé :

« Il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention »

Attendu que pour soutenir son action, le mémorant a versé au dossier de la procédure l’attestation de vente du 31 juillet 1986, la lettre n°265/MI-PUM-85 du 4/2/1986 adressée à Monsieur le Directeur Général de la Banque de Développement du mali, le bordereau de versement n°4426 du 29/4/1986 au nom de S. S, le procès-verbal de constat en date du 11/.11/2010 dans lequel Ac Ag a été interpellé et la sommation interpellative du 29 août 2010 de Aa Ae ;

Attendu que s’il est constant que l’appréciation des éléments de preuve apportés par les parties relève du pouvoir souverain des juges du fond, c’est à la condition que ceux-ci soient débattus ;

Qu’en se bornant à déclarer que « An’apporte pas la preuve de la vente » sans examiner les pièces produites par celui-ci à cet effet, l’arrêt querellé viole les dispositions de l’article 9 du CPCCS par refus d’application de la loi ;

Que le moyen est pertinent en cette deuxième branche.

Sur le deuxième moyen tiré du défaut de base légale :

Attendu que le demandeur, par l’organe de son conseil Maître Mamadou Sylla reproche à l’arrêt entrepris le manque de base légale en ce qu’il se borne à relever que « le juge d’instance, en déclarant bonne et valable la vente intervenue entre les parties par acte sous seing privé, a fait une mauvaise appréciation des faits et une mauvaise application de la loi… » sans démontrer en quoi il y a eu une mauvaise application de la loi ;

Attendu que selon la doctrine, « le défaut de base légale est constitué par une insuffisance de motivation de la décision attaquée qui ne permet pas à ola cour de cassation de contrôler la régularité de la décision ou plus précisément de vérifier que les juges du fond ont fait une application correcte de la règle de droit » (Marie Noëlle Jobard – Bachellier – Xaviert Bachellier- La Technique de Cassation 3è P 147).

Que ce cas d’ouverture peut se distinguer sous la forme de trois sous-catégories dont :

l’incertitude quant au fondement juridique de la décision

l’absence de constatation d’une condition d’application de la loi

l’insuffisance de recherche de tous les éléments de fait qui justifient l’application de la loi ;

Attendu que dans le cas d’espèce, l’arrêt attaqué, en retenant que le juge d’instance a fait une mauvaise appréciation des faits et une mauvaise application de la loi au motif qu’il a déclaré bonne et valable la vente intervenue entre les parties par acte sous seing privé, ne se fonde sur aucune constatation de fait, ou ne fait référence aux pièces produites par le mémorant ;

Que l’arrêt pêche par cette insuffisance de recherche des éléments de fait qui justifient cette prise de position ;

Que dès lors le moyen tiré du défaut de base légale est fondé et doit être accueilli.

Sur le troisième moyen tiré de la dénaturation des faits :

Attendu par ailleurs qu’il est fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir dénaturé les faits en ce qu’il a retenu que l’acte de vente est postérieur au permis d’occuper 153/94 établi au nom de S. S ;

Que cette dénaturation concerne tant le P.O, donc une pièce, que les faits ;

Attendu que le grief de dénaturation des faits n’est pas un cas d’ouverture du pourvoi en cassation ;

Que ce grief ne doit être accueilli que « dans les seuls cas où le juge du fond a, pour se prononcer, donné à un document une signification contraire à son sens clair et précis » (Droit et Pratique de la Cassation en matière civile – Coll. Litec. P 101).

Mais attendu que dans le cas d’espèce, les juges d’appel, en relevant que l’acte de vente est postérieur au P.O/153/94 pour justifier leur décision alors que cette pièce est datée du 27/7/1994 et l’attestation de vente du 31/7/1986, ont dénaturé le contenu de cet écrit ;

Que sur ce point, le moyen est pertinent et doit être accueilli.

…casse et annule l’arrêt ;

Renvoie la cause et les parties devant la cour d’appel de Bamako autrement composée ;…


Synthèse
Numéro d'arrêt : 20
Date de la décision : 17/01/2012

Analyses

Validation de vente et restitution de titre de propriété.


Origine de la décision
Date de l'import : 06/03/2020
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ml;cour.supreme;arret;2012-01-17;20 ?
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