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26/10/2023 | LUXEMBOURG | N°108/23

Luxembourg | Luxembourg, courdecassation, 26 octobre 2023, 108/23


Assistance judiciaire accordée à PERSONNE1.) par décision du 25 mai 2023 du délégué de la Bâtonnière à l’assistance judiciaire.

N° 108 / 2023 pénal du 26.10.2023 Not. 11822/19/CD Numéro CAS-2022-00123 du registre La Cour de cassation du Grand-Duché de Luxembourg a rendu en son audience publique du jeudi, vingt-six octobre deux mille vingt-trois, sur le pourvoi de PERSONNE2.), né le DATE1.) à ADRESSE1.), demeurant à L-ADRESSE2.), prévenu et défendeur au civil, demandeur en cassation, comparant par Maître Sébastien LANOUE, avocat à la Cour, en l’étude duquel domi

cile est élu, en présence du Ministère public et de PERSONNE1.), demeurant à L-...

Assistance judiciaire accordée à PERSONNE1.) par décision du 25 mai 2023 du délégué de la Bâtonnière à l’assistance judiciaire.

N° 108 / 2023 pénal du 26.10.2023 Not. 11822/19/CD Numéro CAS-2022-00123 du registre La Cour de cassation du Grand-Duché de Luxembourg a rendu en son audience publique du jeudi, vingt-six octobre deux mille vingt-trois, sur le pourvoi de PERSONNE2.), né le DATE1.) à ADRESSE1.), demeurant à L-ADRESSE2.), prévenu et défendeur au civil, demandeur en cassation, comparant par Maître Sébastien LANOUE, avocat à la Cour, en l’étude duquel domicile est élu, en présence du Ministère public et de PERSONNE1.), demeurant à L-ADRESSE3.), demanderesse au civil, défenderesse en cassation, comparant par Maître Barbara KOOPS, avocat à la Cour, en l’étude de laquelle domicile est élu, l’arrêt qui suit :

Vu l’arrêt attaqué rendu le 8 novembre 2022 sous le numéro 320/22 V. par la Cour d’appel du Grand-Duché de Luxembourg, cinquième chambre, siégeant en matière correctionnelle ;

Vu le pourvoi en cassation au pénal et au civil, formé par Maître Sébastien LANOUE, avocat à la Cour, au nom de PERSONNE2.), suivant déclaration du 8 décembre 2022 au greffe de la Cour supérieure de justice ;

Vu le mémoire en cassation signifié le 5 janvier 2023 par PERSONNE2.) à PERSONNE1.), déposé le 6 janvier 2023 au greffe de la Cour ;

Vu le mémoire en réponse signifié le 1er février 2023 par PERSONNE1.) à PERSONNE2.) et à Madame le Procureur général d’Etat près la Cour supérieure de justice de et à Luxembourg, déposé le 2 février 2023 au greffe de la Cour ;

Sur les conclusions du premier avocat général Simone FLAMMANG.

Sur les faits Selon l’arrêt attaqué, la chambre correctionnelle du Tribunal d’arrondissement de Luxembourg avait condamné PERSONNE2.) du chef de viol et d’attentat à la pudeur à une peine d’emprisonnement assortie du sursis intégral, à une peine d’amende, à la destitution de certains des droits énumérés à l’article 11 du Code pénal et à une interdiction du droit d’exercer la profession de médecin. Au civil, elle avait condamné le demandeur en cassation à indemniser la partie civile. La Cour d’appel a confirmé ce jugement, sauf à rectifier le libellé de l’infraction à l’article 375 du Code pénal.

Sur le premier moyen de cassation Enoncé du moyen « Contradiction de motifs valant défaut de motifs – Violation des articles 89 de la Constitution, 195 du Code de procédure pénale - Article 375 du Code pénal -

Contradiction entre les motifs qualifiant l’absence de consentement de la victime et les motifs qualifiant l’intention coupable du prévenu.

A.

Dispositions critiquées de l’arrêt de la Cour d’appel Attendu que les dispositions critiquées de l’arrêt de la Cour d’appel figurent :

D’une part dans les motifs de la décision entreprise, à la page 10 :

Page 10 :

2 Ensuite il y a encore lieu de rappeler que PERSONNE1.) a indiqué avoir été totalement surprise par l'acte sexuel commis par PERSONNE2.) sur sa personne, la laissant ainsi totalement bloquée par la surprise.

[…] Au vu des développements qui précèdent, l'absence de consentement dans le chef de PERSONNE1.) est suffisamment établie.

Page 10 :

Par conséquent le prévenu était parfaitement conscient du fait qu'elle avait du mal à manifester son refus, de sorte qu'il savait pertinemment que PERSONNE1.), qui s'est opposée à ses agissements, même si ce n'est pas avec la plus grande véhémence, n'était pas consentante.

L'intention criminelle est partant établie dans le chef du prévenu.

D’autre part dans les motifs de la décision entreprise, à la page 37 :

Les infractions d'attentat à la pudeur et de viol exigent également une intention criminelle dans le chef de l'auteur. Ces infractions ne sont constituées que si l'auteur a voulu l'acte de nature sexuelle, que s'il l'a perçu comme tel et qu'il a eu conscience d'aller à l'encontre de la volonté de la victime.

Les juges de première instance ont à cet égard, à juste titre, considéré que l'intention coupable dans le chef du prévenu est établie. En effet, au vu des déclarations effectuées par la victime ci-avant reproduites, cette intention ne fait pas de doute, le prévenu ayant imposé les actes incriminés, de sorte qu'il a nécessairement eu conscience d'aller à l'encontre de la volonté de PERSONNE1.).

De plus, la circonstance aggravante de l'article 377 du Code pénal a été retenue à juste titre par tes juges de première instance, le prévenu ayant été́ le médecin-psychiatre traitant de ta victime et ayant eu de ce fait autorité sur elle.

Quant à l'autre circonstance aggravante tenant à l'état de particulière vulnérabilité de la victime, circonstance qui a été libellée par te parquet, c'est à juste titre que celle-ci n'a pas été retenue par les juges de première instance à charge du prévenu.

Il s'ensuit que c'est à bon droit et pour des motifs qu'il y a lieu d'adopter, que la juridiction de première instance a retenu à charge du prévenu les infractions aux articles 372, 375 et 377, 2° du Code pénal, sauf qu'il convient conformément au réquisitoire du ministère public de remplacer l'alinéa sous l'intitulé en page 25 du jugement par tes termes suivants: .

De troisième part dans le dispositif de la décision entreprise, à la page 38 :

européenne des droits de l'homme et dit qu'il n'y a pas lieu à institution d'une nouvelle expertise de crédibilité sinon une expertise génétique ;

3 […] dit l'appel au pénal et au civil d'PERSONNE2.) non fondé ;

[…] confirme le jugement entrepris sauf à rectifier le libellé de l'article 375 du Code pénal conformément à la motivation du présent arrêt ; » B.

Exposé du moyen et griefs Attendu que le demandeur en cassation fait grief aux juges du fond de s’être prononcé par adoption de motifs contradictoires.

Attendu que, dans l’exercice de son pouvoir souverain d’appréciation, le juge du fond ne saurait se prononcer par des motifs contradictoires et incompatibles, partant qui s’excluent l’un l’autre, sans encourir la cassation pour contradiction de motifs.

Attendu qu’une telle contradiction vaut défaut de motifs, au sens de l’article 89 de la constitution (Cassation N°38/2014 pénal, du 23 octobre 2014. Not. :

4509/12/CD, numéro 3396 du registre).

Attendu qu’en l’espèce, afin de qualifier les éléments constitutifs de l’infraction libellée à l’article 375 du Code pénal, le juge du fond a pourtant adopté des motifs contradictoires et inconciliables.

1.

Quant à l’absence de consentement de la victime : Motivé par l’absence de toute résistance de la part de la victime Attendu que pour qualifier l’absence de consentement de la victime, le juge du fond a motivé sa décision par la circonstance de fait résultant tant des déclarations réitérées sous la foi du serment du témoin PERSONNE1.), que des rapports des deux experts, le docteur Deborah EGAN-KLEIN et Dominique DUBOIS, que la victime n’avait pas été en mesure d’opposer de résistance, qu’elle était figée en état de syndrome de .

Voir ainsi :

Page 5 :

Dans son rapport du 2 mars 2020, le docteur Deborah EGAN-KLEIN arrive à la conclusion que sur le point de la personnalité, PERSONNE1.) est une personne qui veut toujours faire plaisir à l'autre, qui a beaucoup de mal à s'affirmer, à dire non et à poser des limites. Elle s'auto déprécierait facilement. Ces traits de caractère se retrouveraient déjà dans son enfance et seraient notamment les raisons pour lesquelles PERSONNE1.) serait allée consulter le docteur PERSONNE2.). Elle aurait une personnalité dépendante, très naïve, passive, très indécise, soumise, qui 4 se retient, à se mettre beaucoup en question et à être peu sure d'elle. Le docteur Deborah EGAN-KLEIN a encore révélé l'existence d'un stress post-traumatique qui se trouverait à la limite inférieure de la catégorie . En ce qui concerne la notion de crédibilité́ que l'on pourrait accorder aux dires de PERSONNE1.), le docteur Deborah EGAN-KLEIN a constaté que cette dernière n'a jamais changé de narratif et que ses dires ne variaient pas avec sa déposition auprès de le Police et les entretiens qu'elle a eu avec elle. La caractéristique de la crédibilité serait un discours constant. De plus il n'y aurait ni eu de surévaluation, ni de sous- évaluation dans les deux tests MMPI et PCL.

Dans son rapport du 15 mars 2020, le co-expert Dominique DUBOIS arrive également à la conclusion que PERSONNE1.) est crédible dans ses déclarations, alors que son témoignage est cohérent, logique, détaillé et fidèle dans le temps.

Concernant la personnalité de PERSONNE1.), l'expert note qu'il s'agit de quelqu'un qui se blinde émotionnellement et perd pied lorsqu'elle est confrontée à une situation qui provoque de l’émotion. L'émotion en l'espèce aurait été́ la surprise par rapport aux agissements du docteur PERSONNE2.), et elle serait restée figée en raison de cette inhibition. PERSONNE1.) appartiendrait au type de personnes qui en face d'un danger restent inhibées, figées, par opposition à d'autres personnes qui passent à l'action et courent. De plus, elle manquerait de confiance en elle, s'estimerait peu et aurait tendance à se disqualifier.

Page 5 :

PERSONNE1.) a déclaré maintenir ses déclarations faites auprès de la Police et des experts, et les a réitérées sous la foi du serment, tout en les complétant par certains détails. Ainsi elle a expliqué que lorsque le docteur PERSONNE2.) a commencé à l'embrasser après l'avoir tirée vers lui, elle aurait été́ totalement surprise. Elle l'aurait certes repoussé, mais sans vraiment se débattre alors qu'elle aurait été sidérée, hors de contrôle, je n'étais plus là ».

Page 10 :

A ceci il vient s'ajouter qu'il ressort des développements de l'expert le docteur Deborah EGAN-KLEIN, que PERSONNE1.) est une personne qui a tendance à entrer en état de sidération dans une situation de stress (), ce qui pourrait expliquer pourquoi elle ne s'est pas davantage défendue et n'a pas fui la salle de consultation du docteur PERSONNE2.) en courant.

De plus les deux experts décrivent PERSONNE1.) comme une personne qui a beaucoup de mal à s'affirmer, à dire non et à poser des limites. ce qui explique que, même si ses protestations n'étaient pas plus énergiques, elle n'était pas pour autant d'accord avec les agissements du docteur PERSONNE2.).

Au vu des développements qui précèdent, l'absence de consentement dans le chef de PERSONNE1.) est suffisamment établie.

2.

Quant à l’intention coupable du prévenu : Motivé par l’expression de la résistance de la victime 5 Attendu que pour qualifier l’intention coupable du prévenu, le juge du fond a motivé sa décision par la circonstance de fait résultant tant des déclarations réitérées sous la foi du serment du témoin PERSONNE1.), que celle-ci a opposé toute la résistance dont elle était capable à l’accomplissement des faits reprochés au prévenu, résistance manifestée par des actes extérieurs répétés, clairs et manifestes, qui n’ont pas pu échapper à la conscience du prévenu qui aurait dès lors agi en pleine connaissance du refus de la victime.

Voir ainsi :

Pages 3 et 4 :

Après avoir essayé plusieurs fois de l'embrasser sur la bouche, le docteur PERSONNE2.) aurait glissé ses mains sous son t-shirt et l'aurait touchée aux seins, en descendant son soutien-gorge. Il aurait également mis un doigt dans sa bouche et dévoilé son pénis. Pendant cet épisode, le docteur PERSONNE2.) lui aurait fait comprendre qu'il était attiré par elle, et qu'il était persuadé qu'elle éprouvait la même chose pour lui. Après lui avoir fait comprendre que tel n'était pas le cas, il l'aurait traitée de menteuse.

A un moment donné, le prochain patient aurait sonné à la porte, de sorte que le docteur PERSONNE2.) serait sorti de la salle de consultation pour l'accueillir et l'installer dans la salle d'attente. Elle aurait profité de son absence pour se reboutonner et elle se serait trouvée debout, prête à partir, lorsqu'il serait revenu dans la salle de consultation. A ce moment, il aurait de nouveau commencé à l'embrasser et PERSONNE1.) aurait constaté qu’il avait également de nouveau rabaissé son pantalon et son caleçon, mettent à nu son pénis. Il aurait pris sa main en la mettant sur son pénis et aurait demandé qu'elle lui fasse une fellation. Elle aurait refusé de ce faire, en disent plusieurs fois . Ensuite il l'aurait suppliée de lui donner un bisou sur son pénis, ce qu'elle aurait également refusé de faire. A un moment donné, il aurait glissé sa main dans sa culotte et aurait pénétré son vagin avec un doigt. Ce geste l'aurait encore plus surprise et elle n'aurait pas réagi car elle aurait été totalement bloquée par la surprise. PERSONNE1.) était formelle pour dire que le doigt était à l'intérieur du vagin. Après avoir sorti ses mains de sa culotte, il aurait encore une fois demandé qu'elle lui fasse une fellation, ce qu'elle aurait refusé de faire.

PERSONNE1.) a Indiqué aux enquêteurs que pendant tout l'épisode, elle a réitéré ses . Elle ne pourrait pas s'expliquer pourquoi le docteur PERSONNE2.) ignorait son refus, alors qu’en tant que psychiatre, il serait le mieux placé pour se rendre compte de son opposition. Finalement PERSONNE2.) lui aurait encore divulgué son envie de la et l’aurait priée de revenir à cette fin dans l'après-midi, en ramenant de la vaseline. Ayant vu une opportunité pour fuir la situation, PERSONNE1.) aurait alors confirmé qu'elle reviendrait dans l’après-midi, pour ensuite quitter la salle de consultation.

Pages 34 et 35 :

Ainsi faut-il constater qu'il ressort de la transcription de la vidéo-audition policière du 8 avril 2019, que PERSONNE1.) a révélé qu'elle a été victime 6 d'attouchements sexuels et de viol de la part du prévenu en déclarant que : .

Par ailleurs, PERSONNE1.) a fait des dépositions dont le caractère crédible découle de certaines descriptions qu'elle a fournies (cf ) et du fait que celles-ci sont corroborées par un élément objectif du dossier, à savoir le contenu des messages envoyés par le prévenu avant le 8 avril 2019, contenu qui n'était qu'un prétexte pour que PERSONNE1.) passe au cabinet médical.

Page 37 :

Les infractions d'attentat à la pudeur et de viol exigent également une intention criminelle dans le chef de l'auteur. Ces infractions ne sont constituées que si l'auteur a voulu l'acte de nature sexuelle, que s'il l'a perçu comme tel et qu'il a eu conscience d'aller à l'encontre de la volonté de la victime.

Les juges de première instance ont à cet égard, à juste titre, considéré que l'intention coupable dans le chef du prévenu est établie. En effet, au vu des déclarations effectuées par la victime ci-avant reproduites, cette intention ne fait pas de doute, le prévenu ayant imposé les actes incriminés, de sorte qu'il a nécessairement eu conscience d'aller à l'encontre de ta volonté de PERSONNE1.).

 Premier refus de la victime Attendu ainsi que le témoin déclare en particulier avoir été en mesure d’opposer son refus exprès et effectif une première fois à la demande du prévenu qu’elle lui fasse une fellation.

7 Qu’il est précisé qu’à ce moment le prévenu se trouvait, selon les déclarations du témoin, le pantalon et le caleçon baissés, le pénis à nu, et que le prévenu aurait pris la main du témoin pour la placer sur son pénis tandis qu’il formulait la demande qu’elle lui fasse une fellation à laquelle le témoin s’est opposée efficacement.

 Second refus de la victime Que le témoin déclare encore qu’elle a été en mesure d’opposer son refus exprès et effectif une seconde fois à la demande du prévenu qu’elle donne un bisou sur son pénis.

Que pendant le même temps, selon les déclarations du témoin, le prévenu l’aurait embrassée, l’aurait touchée à travers son tee-shirt, lui aurait défait la ceinture de son pantalon, lui aurait descendu son soutien-gorge et lui aurait touché le sein, tout en ayant lui-même toujours le pantalon et le caleçon baissé et le pénis à nu.

Que le témoin déclare qu’elle aurait été ensuite totalement bloquée par la surprise causée par l’introduction par le prévenu de la main dans son pantalon stretch qu’elle portait, et dans son sous vêtement, puis par l’introduction par le prévenu d’un doigt dans son vagin.

 Troisième refus de la victime Que le témoin déclare enfin que suite au retrait de la main du prévenu, elle a été en mesure d’opposer son refus exprès et effectif une troisième fois à la nouvelle demande du prévenu qu’elle lui fasse une fellation.

Mais attendu que le juge du fond ne distingue pas dans son analyse entre les demandes du prévenu au témoin de lui pratiquer une fellation, et l’affirmation par le témoin que le prévenu aurait introduit un doigt dans son vagin, fait retenu par le juge comme établi et comme caractérisant l’acte de pénétration sexuelle, élément matériel et premier élément constitutif de l’infraction à l’article 375 du Code pénal libellée contre le prévenu.

Que le juge procède au contraire à une analyse globale de manière globale de l’attitude de la victime, et admet suite à ce raisonnement, que le second élément constitutif de l’infraction à l’article 375 du Code pénal, tenant à l’absence de consentement de la victime, est établi au motif que la victime n’a pas été en mesure de s’opposer à l’acte de pénétration sexuelle alors qu’elle était hors d’état d’exprimer la moindre résistance.

Que le juge admet enfin toujours en procédant à une analyse globale, que le troisième élément constitutif de l’infraction à l’article 375 du Code pénal libellée contre le prévenu, tenant à l’intention criminelle, l’élément intentionnel de l’infraction, est établi alors que la résistance exprimée, manifestée et réitérée de la victime n’a pu laisser dans l’esprit du prévenu, la place à aucun doute sur son absence de consentement dont il a nécessairement eu conscience.

8 Que le pouvoir souverain d’appréciation du juge du fond ne va pas jusqu’à permettre aux juges du fond de retenir deux circonstances de fait contraires, contradictoires et incompatibles, pour la qualification de deux des éléments constitutifs d’une seule et même infraction.

Qu’ainsi, le juge du fond pouvait, dans le cadre de son pouvoir souverain d’appréciation, soit retenir l’absence de toute capacité de la victime à exprimer la moindre résistance, motif de nature à valablement justifier la qualification de l’absence de consentement de la victime au titre de l’article 375 du Code pénal, soit retenir que la victime avait démontré sa capacité à exprimer son refus et sa résistance de manière expresse et effective.

Mais que le juge du fond ne pouvait pas retenir une fois l’une et une fois l’autre pour qualifier successivement deux éléments constitutifs de la même infraction.

 Première hypothèse : La victime était incapable d’exprimer de la résistance Attendu que si le juge du fond devait, dans le cadre de son pouvoir souverain d’appréciation, retenir l’absence de toute capacité de la victime à exprimer la moindre résistance, il y aurait alors motif de nature à valablement justifier la qualification de l’absence de consentement de la victime au titre de l’article 375 du Code pénal.

Que dans cette hypothèse toutefois, l’élément intentionnel de l’infraction ne pourrait être établi à l’abri de tout doute, et que le juge du fond devrait alors constater qu’il demeurait à tout le moins un doute, du fait de cette absolue absence de résistance manifestée ou exprimée, à ce que le prévenu ait eu conscience de l’absence de consentement à l’acte critiqué.

Attendu en effet que le juge du fond n’a à aucun moment envisagé, ni décrit, ni analysé à l’appui de son raisonnement, la symptomatologie médicale connue, spécifique et caractéristique du syndrome de pour en tirer la conclusion que le prévenu, en sa qualité de professionnelle, ne pouvait se méprendre par rapport à ces symptômes spécifiques (*) (**) du syndrome Freeze, et qu’il ne pouvait ignorer que l’absence de résistance exprimée n’était pas une preuve de consentement.

* Les symptômes caractéristiques connus sont notamment décrits comme suit:

 Hyper-vigilance  Rythme cardiaque augmenté  Tension dans le corps et les muscles (immobilité tonique)  L'énergie semble accumulée, mais ne peut pas être libérée  Certains indices verbaux minimes (comme "Je me sens coincé", "Je ne peux pas bouger" ou "Je suis paralysé"). Ou pas de discours du tout.

 Respiration superficielle et rapide ** La perte de mémoire fait également partie des symptômes décrits : De nombreuses personnes qui ont été sujettes à cette réaction ne semblent pas se 9 souvenir des détails, voire de l’intégralité des événements traumatiques. Comme une façon de se protéger de séquelles psychologiques Que tout au contraire le juge du fond raisonne à contrario, en retenant que le prévenu n’a pas pu ignorer le refus exprimé par la victime.

Voir ainsi :

Page 10 :

Par conséquent le prévenu était parfaitement conscient du fait qu'elle avait du mal à manifester son refus, de sorte qu'il savait pertinemment que PERSONNE1.), qui s'est opposée à ses agissements, même si ce n'est pas avec la plus grande véhémence, n'était pas consentante.

Attendu qu’il convient de souligner que la circonstance suivant laquelle le juge du fond a également qualifié l’existence de l’usage de la ruse et de la violence par le prévenu pour en conclure à l’existence de l’élément intentionnel dans son chef, est indifférente concernant le moyen tiré de la contradiction de motifs, dans la mesure où cette circonstance ne remet pas en question la constatation faite par le juge du fond que la victime à dûment exprimé son opposition aux agissements du prévenu et que le prévenu n’a pu l’ignorer.

 Seconde hypothèse : La victime était capable d’exprimer de la résistance Attendu que si le juge du fond devait, dans le cadre de son pouvoir souverain d’appréciation, retenir la capacité d’expression par la victime de son refus, partant d’une résistance aux agissements non désirés du prévenu, il y aurait par voie de conséquence, lieu de constater que cette résistance et ce refus, s’est valablement exprimé à itératives reprises lorsque, suivant les déclarations du témoin, notamment lorsqu’elle aurait refusé à trois reprises immédiatement avant et après le fait qualifié de pénétration digitale, refusé de pratiquer au prévenu une fellation.

Que dès lors, si le témoin n’a pas exprimé de refus lorsque le prévenu a introduit la main dans son pantalon et dans son sous-vêtement, fait non contesté et, suivant les déclarations du témoin, introduit un doigt dans son vagin – fait contesté - ce n’est pas en raison d’une impossibilité pour le témoin d’exprimer un tel refus, impossibilité contredite en l’espèce par l’expression libre et claire d’un refus sur certains acte, refus par ailleurs respecté par le prévenu qui a obtempéré, mais en raison de l’absence d’un refus que le témoin était en capacité d’exprimer au moment où le geste était accompli.

Que c’est à tort que le juge du fond a omis de confronter la déclaration selon laquelle le témoin aurait été surpris par le geste du prévenu à un point tel que le témoin se serait retrouvé en état de stupeur qualifiée de syndrome , aux autres déclarations du même témoin dont il résulte qu’au moment où le prévenu a mis la main dans son pantalon et dans son sous-vêtement, le prévenu avait déjà au préalable fait s’asseoir le témoin sur ses genoux, embrassé le témoin, touché la poitrine du témoin au travers de son tee-shirt, puis lui avait baissé le soutien-gorge 10 et touché le sein et lui avait défait sa ceinture, que le prévenu avait pour sa part déjà baissé son pantalon et son caleçon, que son pénis aurait été sorti et que le témoin aurait tenu le pénis du prévenu dans sa main sur insistance du prévenu, tout ceci n’ayant pas empêché le témoin d’exprimer son refus à trois reprises de faire une fellation au prévenu et de donner un bisou sur son pénis lorsque celui-ci l’a demandé au témoin, refus qui a été à chaque fois respecté par le prévenu.

Que dès lors qu’il a admis que le témoin a été capable d’exprimer et de manifester son refus et donc de la résistance, le juge du fond ne pouvait dès lors pas écarter de manière absolue l’existence d’un consentement à l’acte pour lequel il n’y a pas eu de refus exprimé.

Que la circonstance que le témoin ait, a posteriori changé d’avis sur les suites à réserver à cet acte n’est pas de nature à faire disparaître son consentement au moment où l’acte était accompli.

Attendu dès lors, que le juge du fond en retenant le motif d’une part que la victime ne pouvait pas exprimer la moindre résistance pour établir l’élément constitutif d’absence de consentement dans son chef, et d’autre part que la victime a exprimé sa résistance pour établir l’élément constitutif d’intention criminelle dans le chef du prévenu, pour qualifier l’infraction libellée à l’article 375 du Code pénal, le juge du fond a procédé par voie de motifs contradictoires valant défaut de motifs, en violation des articles 89 de la Constitution, 195 du Code de procédure pénale, et 375 du Code pénal.

Que l’arrêt entrepris encourt dès lors la cassation. ».

Réponse de la Cour Le demandeur en cassation fait grief aux juges d’appel de s’être contredits entre, d’une part, les motifs qualifiant l’absence de consentement de la défenderesse en cassation et, d’autre part, les motifs qualifiant l’intention coupable du demandeur en cassation.

Le grief tiré de la contradiction de motifs suppose une contradiction entre deux motifs d’une même décision.

En ce que le moyen se fonde sur une contradiction entre les motifs du jugement de première instance et ceux de l’arrêt attaqué, il ne met pas en cause une contradiction entre deux motifs de l’arrêt d’appel.

Il s’ensuit que le moyen n’est pas fondé.

Sur le deuxième moyen de cassation Enoncé du moyen « Violation de la présomption d’innocence, droit garanti par l’article 3 de la Directive (UE) 2016/343 portant renforcement de certains aspects de la présomption d'innocence, et encore garanti par l’article 6§2 de la Convention européenne des 11 droits de l’Homme, par l’article 48 § 1 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, par l’article 14 § 2 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, et principe à valeur de principe général du droit A.

Base légale Attendu que le présent moyen est basé sur la violation de la présomption d’innocence, droit garanti par l’article 3 de la Directive (UE) 2016/343 portant renforcement de certains aspects de la présomption d'innocence, et encore garanti par l’article 6§2 de la Convention européenne des droits de l’Homme, par l’article 48 § 1 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, par l’article 14 § 2 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, et principe à valeur de principe général du droit.

1.

Quant à la valeur de la présomption d’innocence en droit national Attendu qu’il ressort du dossier parlementaire No 7320, relatif au projet de loi déposé le 20 juin 2018, portant transposition de la directive 2016/343 du Parlement et du Conseil du 09/03/2016 portant renforcement de certains aspects de la présomption d’innocence, et plus spécialement de l’exposé des motifs, au paragraphe relatif aux considérations générales :

par plusieurs textes de droit international, dont la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales et le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, qui sont directement applicables en droit national.

Page 6 du projet de loi :

Etant donné que le droit à la présomption d’innocence et celui d’assister à son procès constituent des principes généraux qui ont été consacrés par plusieurs textes internationaux, il n’est guère surprenant que la législation nationale est d’ores et déjà en grande partie conforme aux exigences de la directive.

Ainsi, même en l’absence de texte général propre garantissant le droit à la présomption d’innocence, le respect de ce principe, prévu à l’article 3 de la directive, est garanti à travers l’application directe en droit interne des textes internationaux précités, qui permettent au justiciable d’invoquer le droit à la présomption d’innocence dans le cadre d’une procédure pénale. La jurisprudence nationale fait d’ailleurs souvent référence au droit à la présomption d’innocence en tant que principe général du droit. » 12 Qu’il ressort de ces considérations que la présomption d’innocence est pleinement reconnue en droit national, et que son application effective ne doit faire, du moins en principe, l’objet d’aucune remise en cause par les juridictions du fond chargée de veiller à sa mise en œuvre.

2.

Quant à l’applicabilité directe en droit national de l’article 3 de la Directive (UE) 2016/343 du 9 mars 2016 portant renforcement de certains aspects de la présomption d'innocence Attendu que la Cour de justice de l'Union européenne admet l’effet direct des directives depuis ses arrêts Franz Grad c/ Finanzamt et Van Duyn.

Qu’elle a ainsi admis que les justiciables peuvent s'en prévaloir en l'absence de transposition ou après une directive mal transposée, sous les conditions suivantes:

 Que la directive soit claire, c'est-à-dire qu'elle pose une obligation de faire ou de ne pas faire  Qu’elle soit précise, c’est-à-dire qu'elle ne nécessite pas de règlement d'application  Qu’elle soit inconditionnelle, c'est-à-dire que le délai de transposition soit arrivé à son terme Attendu que la Directive (UE) 2016/343 du 9 mars 2016 dispose en son article 3 :

soient présumés innocents jusqu'à ce que leur culpabilité ait été légalement établie. » Qu’il ne fait l’objet d’aucune discussion, et qu’il résulte pour autant que de besoin des travaux parlementaires visés ci-dessus, que l’article 3 de la directive n’a pas été transposé en droit interne, et qu’il n’existe pas en droit luxembourgeois de texte général propre garantissant le droit à la présomption d’innocence.

Que la seule référence du Code de procédure pénale, en son article 8(3), à l’obligation pesant sur le procureur général d’Etat de respecter la présomption d’innocence dans le cas de communications d’informations au public ne saurait suffire à valoir transposition effective de la Directive sur ce point :

informations sur le déroulement d’une procédure, en respectant la présomption 13 d’innocence, les droits de la défense, le droit à la protection de la vie privée et de la dignité des personnes ainsi que les nécessités de l’instruction ».

Que cet article 8(3) du Code de procédure pénale résulte en tout état de cause d’une loi du 6 octobre 2009, et ne saurait dès lors pas être considéré comme valant transposition de l’article 3 de la Directive (UE) 2016/343 du 9 mars 2016 qui lui est ultérieure.

Attendu qu’il résulte des procès-verbaux de la Commission juridique ayant échangé sur le projet de loi de transposition 7320 que la nécessité d’adopter la loi de transposition avec célérité compte tenu de la date de transposition fixée dans la Directive, les débats n’ont matériellement pas pu être menés de manière approfondie sur la question de la présomption d’innocence, tout en envisageant la possibilité de mener ce débat approfondi sur le respect de la présomption d’innocence par la suite :

projet de loi sous rubrique par la Chambre des Députés. Selon l’orateur, une telle adoption n’empêche aucunement, par la suite, un débat approfondi sur le respect de la présomption d’innocence et sur le respect du principe du délai raisonnable.

L’orateur énonce que le délai de transposition de la directive 2016/343 est échu, de sorte qu’il convient de se mettre rapidement en conformité avec les exigences de ladite directive. Par ailleurs, il y a lieu de préciser que le texte du projet de loi sous rubrique a été avisé favorablement par le Conseil d’Etat.

Madame la Présidente-Rapportrice appuie cette proposition.

Un membre du groupe politique DP s’interroge sur l’opportunité de reprendre, dans le rapport de la commission parlementaire, les débats menés au sujet de la transposition de la directive 2016/343 dans le rapport sur le projet de loi sous rubrique.

Un membre du groupe politique CSV prend acte de ces déclarations émises par Monsieur le Ministre de la Justice et estime qu’on ne saurait invoquer valablement dans ce cas l’échéance du délai de transposition de la directive 2016/343, alors que le projet de loi sous rubrique portant transposition de ladite directive n’a été déposé que tardivement par le Gouvernement. Aux yeux de l’orateur, une multitude d’arguments plaide en faveur de mener l’instruction parlementaire dans le calme et en toute sérénité.

Madame la Présidente-Rapportrice préconise une adoption rapide du projet de loi sous rubrique et renvoie à l’avis du Conseil d’Etat qui n’a pas soulevé de critiques majeures dans le cadre de son avis y relatif.

Un membre du groupe politique CSV donne à considérer que les matières juridiques dans lesquelles le législateur est amené à intervenir deviennent de plus en 14 plus complexes. A titre d’exemples non limitatifs, l’orateur renvoie à la réglementation applicable à la protection des données ou encore à celle applicable à la lutte contre le blanchiment d’argent. Il y a lieu de signaler que les risques d’interférences et de contrariétés entre des textes de lois en vigueur ne sont pas négligeables. L’orateur est d’avis qu’il y a lieu de mener un travail de réflexion approfondi en matière de respect du principe de la présomption d’innocence, avant de légiférer en la matière.

Commission juridique - Procès-verbal de la réunion du 18 juillet 2018 :

Page 2/18 : Echanges de vues relatifs au projet de loi 7320 :

Un membre du groupe politique CSV renvoie aux observations du Conseil d’Etat, soulevées dans le cadre de son avis du 10 juillet 2018, qui s’interroge sur la nécessité de légiférer en la matière et estime qu’il " […] est satisfait au requis de la directive si la sauvegarde des droits en cause est assurée, avec une certitude suffisante, dans l’ordre juridique national, sans que les droits doivent être expressément repris, dans les mêmes termes, dans la loi nationale ".

Par ailleurs, l’orateur s’interroge si l’esprit de la directive a été correctement transposé par la loi en projet et donne à considérer que le terme d’ "autorités publiques" doit être interprété au sens large, et ne se limite pas uniquement aux autorités judiciaires.

La représentante du Ministre de la Justice explique que la directive 2016/343 est nécessaire pour apporter une certaine harmonisation au niveau des Etats membres des législations nationales régissant le respect de la présomption d’innocence.

A noter que le droit la législation nationale est d’ores et déjà en grande partie conforme aux exigences de la directive. Ainsi, même en l’absence de texte général propre garantissant le droit à la présomption d’innocence, le respect de ce principe, prévu à l’article 3 de la directive, est garanti par le biais de l’application directe en droit interne de la Convention européenne des droits de l’homme. » Attendu qu’il résulte de ces développements que les conditions requises pour admettre l’effet direct de la Directive, telle que définies pas la Cour de justice de l’Union depuis ses arrêts Franz Grad c/ Finanzamt et Van Duyn, sont toutes réunies :

Qu’il n’est pas discutable que l’article 3 de la Directive de la Directive (UE) 2016/343 du 9 mars 2016 portant renforcement de certains aspects de la présomption d'innocence, n’a pas été transposé en droit interne.

Que cet article de la Directive est clair.

Qu’il est précis en ce qu’il ne nécessite pas de règlement d'application.

Qu’il inconditionnel dès lors que le délai de transposition est arrivé à son terme.

15 Attendu dès lors que le demandeur en cassation est fondé à invoquer comme il l’a fait en première instance et en instance d’appel, la Directive (UE) 2016/343 du 9 mars 2016 comme base légale à l’appui de son grief de non respect de sa présomption d’innocence.

B.

Dispositions critiquées de l’arrêt de la Cour d’appel Attendu que les dispositions critiquées de l’arrêt de la Cour d’appel figurent :

D’une part dans les motifs de la décision entreprise, aux pages 9 et 10 :

Page 9 :

Ad 1) L'élément matériel consistant dans un acte de pénétration sexuelle PERSONNE1.) a déclaré lors de ses auditions policières et devant le juge d'instruction que le prévenu l'avait pénétrée digitalement dans son vagin, déclarations qu'elle a réitérées sous la fol du serment à l'audience.

Etant donné que le Tribunal a, dans ses développements antérieurs, accordé crédit aux déclarations de PERSONNE1.), il y a lieu de retenir que l'élément matériel du viol est établi.

ad 2) L'absence de consentement de la victime Page 10 :

En l'espèce, le Tribunal rappelle qu'il résulte des déclarations de PERSONNE1.) qu'elle n'avait pas consenti quant à l'acte sexuel perpétré sur sa personne par le prévenu, qu'il l'a tenue par les cheveux pour la tirer vers l'arrière, et qu'il a profité de ce moment de déséquilibre pour glisser sa main sous son pantalon stretch qu'elle portait et introduire un doigt dans son vagin.

Le Tribunal retient que les agissements consistant à prendre une personne par les cheveux pour la tirer vers l'arrière, constituent des violences au sens de l'article 483 du code pénal.

De ce fait, PERSONNE1.) se trouvait hors d'état d'opposer de la résistance, de sorte qu'il y a manifestement eu absence de consentement.

Ensuite il y a encore lieu de rappeler que PERSONNE1.) a indiqué avoir été totalement surprise par l'acte sexuel commis par PERSONNE2.) sur sa personne, la laissant ainsi totalement bloquée par la surprise.

Il y a partant lieu de retenir que l'acte de pénétration sexuelle a également été commis par ruse, qui fait partie des moyens cités par l'article 375 du code pénal impliquant nécessairement une absence de consentement.

Ad 3) L'intention criminelle 16 […] En l'espèce, l'intention criminelle ne fait pas de doute dans le chef du prévenu au regard des violences qu'il a employées tel que développé précédemment . Ce même raisonnement s'applique quant à la ruse, alors qu'en surprenant PERSONNE1.), PERSONNE2.) devait être conscient du fait qu'il imposait à cette dernière un rapport sexuel contre son gré.

Attendu en outre que, à l’appui de son raisonnement, et partant du postulat que le témoin / partie civile ne mentait pas, le juge du fond a tout au long des deux instances, rejeté de manière systématique et sans analyse réelle, tous les éléments – nombreux en l’espèce – susceptibles de venir remettre en cause la crédibilité du témoin.

Qu’ainsi la culpabilité du prévenu était de-facto établie dès l’ingrès et avant analyse de l’ensemble des éléments du dossier répressif et des pièces de la défense, sur la seule admission par le juge du fond que le témoin / partie civile ne mentait pas.

Que le juge du fond n’a dans la suite de son raisonnement suite, ni analysé ni pris en considération les éléments à décharge du dossier, pourtant susceptibles de faire naitre un doute quant à la culpabilité du prévenu, allant même jusqu’à refuser d’ordonner une expertise génétique proposée par le ministère public et pour laquelle la défense était également d’accord.

D’autre part dans les motifs de la décision entreprise, aux pages 25, 28 et 34 :

Page 25 :

[Le réquisitoire du ministère public] au cas où la Cour a un doute quant à l'infraction de viol, il y a lieu d'ordonner une expertise génétique du set d'agression sexuelle qui a été effectué par le docteur Paul Kayser le jour des faits.

Page 28 :

[La réplique de la défense] Il relève encore que son mandant est d'accord à ce que soit ordonnée avant tout autre progrès en cause une expertise génétique du set d'agression sexuelle qui a été effectuée sur la personne de PERSONNE1.).

Page 34 :

[La Cour - Quant aux critiques formulées par la défense à l'égard des experts judiciaires :] Il s'y ajoute que les conclusions des deux experts judiciaires quant à la personnalité de PERSONNE1.) sont corroborées par un autre élément, à savoir le certificat médical du 5 mai 2021 du docteur Béatrice Risch, qui retient : .

De troisième part dans le dispositif de la décision entreprise, à la page 38 :

17 Page 38 :

européenne des droits de l'homme et dit qu'il n'y a pas lieu à institution d'une nouvelle expertise de crédibilité sinon une expertise génétique ;

[…] dit l'appel au pénal et au civil d'PERSONNE2.) non fondé ;

[…] confirme le jugement entrepris sauf à rectifier le libellé de l'article 375 du Code pénal conformément à la motivation du présent arrêt ; » C.

Exposé du moyen et griefs Attendu que le demandeur en cassation fait grief à la juridiction du fond d’avoir violé, à son détriment, la présomption d’innocence dont il devait pourtant bénéficier, au vœu de l’article 3 de la Directive (UE) 2016/343 du 9 mars 2016 portant renforcement de certains aspects de la présomption d'innocence.

Que le demandeur en cassation reproche en effet à la Cour d’appel d’avoir, par l’application qu’elle a fait des articles 372, 375 et 377 du Code pénal, violé la présomption d’innocence dont il devait bénéficier.

Que la présomption d’innocence est une notion complexe qui comporte plusieurs aspects (Arrêt 4/21 Ch. Crim., du 9 février 2021, Not.: 14815/16/CD, page 96) :

la manière dont l'accusé doit être traité dans le cadre du procès pénal et , d'autre part , une règle relative à l’administration de la preuve en ce qui concerne notamment la charge de la preuve et l'exigence de rapporter la preuve au-delà de tout doute raisonnable. » 1.

Première branche du moyen : Violation de la présomption d’innocence en tant que règle déterminant la manière dont l'accusé doit être traité dans le cadre du procès pénal Attendu que les griefs du demandeur en cassation relatifs à la violation de la présomption d’innocence par les juridictions du fond n’ont pas portés sur le traitement qui a été réservé à l’accusé dans le cadre du procès pénal.

Que cette branche du moyen n’a dès lors pas autrement lieu d’être développée.

2.

Seconde branche du moyen : Violation de la présomption d’innocence en tant que règle relative à l’administration de la preuve en ce qui concerne 18 notamment la charge de la preuve et l'exigence de rapporter la preuve au-delà de tout doute raisonnable Attendu que le demandeur en cassation fait grief aux juges du fond d’avoir violé la présomption d’innocence qui aurait du lui profiter dans son second aspect, en tant que règle relative à l’administration de la preuve en ce qui concerne notamment la charge de la preuve et l'exigence de rapporter la preuve au-delà de tout doute raisonnable.

Attendu que le demandeur en cassation reproche aux juges du fond de s’être fondé, pour établir l’ensemble des infractions mises à sa charge, de manière très largement prépondérante sur les seules déclarations du témoin / partie civile.

Que le demandeur en cassation relève ainsi que les trois éléments constitutifs de l’infraction à l’article 375 du Code pénal, sont établis par le juge du fond sur base des seules déclarations dudit témoin.

Que plus encore, le demandeur en cassation relève que les trois circonstances aggravantes que sont la ruse, la violence, et l’abus d’autorité sont de la même manière établis sur base des seules déclarations du témoin.

Que le demandeur en cassation relève même l’existence d’un raisonnement circulaire, par lequel le juge du fond déduit l’existence de l’intention criminelle dans le chef du prévenu, élément constitutif de l’infraction à l’article 375 du Code pénal, du seule fait de l’admission de l’existence de circonstances aggravantes de cette infraction que sont la ruse et la violence, lesquelles circonstances aggravantes sont établies par le juge du fond, sur base des seules déclarations du témoin / partie civile.

Que le demandeur en cassation met ainsi en évidence que le raisonnement suivi par le juge du fond, tant en première instance qu’en instance d’appel, a consisté à admettre en premier lieu que le témoin ne pouvait pas mentir, puis à déduire des déclarations dudit témoin l’existence des circonstances aggravantes de l’infraction principale, et enfin à déduire de l’existence des circonstances aggravantes et des déclarations du témoin, l’existence de l’infraction principale.

Voir en ce sens :

Page 9 :

Ad 1) L'élément matériel consistant dans un acte de pénétration sexuelle PERSONNE1.) a déclaré lors de ses auditions policières et devant le juge d'instruction que le prévenu l'avait pénétrée digitalement dans son vagin, déclarations qu'elle a réitérées sous la fol du serment à l'audience.

Etant donné que le Tribunal a, dans ses développements antérieurs, accordé crédit aux déclarations de PERSONNE1.), il y a lieu de retenir que l'élément matériel du viol est établi.

ad 2) L'absence de consentement de la victime 19 Page 10 :

En l'espèce, le Tribunal rappelle qu'il résulte des déclarations de PERSONNE1.) qu'elle n'avait pas consenti quant à l'acte sexuel perpétré sur sa personne par le prévenu, qu'il l'a tenue par les cheveux pour la tirer vers l'arrière, et qu'il a profité de ce moment de déséquilibre pour glisser sa main sous son pantalon stretch qu'elle portait et introduire un doigt dans son vagin.

Le Tribunal retient que les agissements consistant à prendre une personne par les cheveux pour la tirer vers l'arrière, constituent des violences au sens de l'article 483 du code pénal.

De ce fait, PERSONNE1.) se trouvait hors d'état d'opposer de la résistance, de sorte qu'il y a manifestement eu absence de consentement.

Ensuite il y a encore lieu de rappeler que PERSONNE1.) a indiqué avoir été totalement surprise par l'acte sexuel commis par PERSONNE2.) sur sa personne, la laissant ainsi totalement bloquée par la surprise.

Il y a partant lieu de retenir que l'acte de pénétration sexuelle a également été commis par ruse, qui fait partie des moyens cités par l'article 375 du code pénal impliquant nécessairement une absence de consentement.

Ad 3) L'intention criminelle […] En l'espèce, l'intention criminelle ne fait pas de doute dans le chef du prévenu au regard des violences qu'il a employées tel que développé précédemment . Ce même raisonnement s'applique quant à la ruse, alors qu'en surprenant PERSONNE1.), PERSONNE2.) devait être conscient du fait qu'il imposait à cette dernière un rapport sexuel contre son gré.

Attendu en outre que, à l’appui de son raisonnement, et partant du postulat que le témoin / partie civile ne mentait pas, le juge du fond a tout au long des deux instances, rejeté de manière systématique et sans analyse réelle, tous les éléments -

nombreux en l’espèce - susceptibles de venir remettre en cause la crédibilité du témoin.

Qu’ainsi la culpabilité du prévenu était de-facto établie dès l’ingrès et avant analyse de l’ensemble des éléments du dossier répressif et des pièces de la défense, sur la seule admission par le juge du fond que le témoin / partie civile ne mentait pas.

Que le juge du fond n’a dans la suite de son raisonnement suite, ni analysé ni pris en considération les éléments à décharge du dossier, pourtant susceptibles de faire naitre un doute quant à la culpabilité du prévenu, allant même jusqu’à refuser d’ordonner une expertise génétique proposée par le ministère public et pour laquelle la défense était également d’accord.

Voir ainsi :

20 Page 25 :

[Le réquisitoire du ministère public] au cas où la Cour a un doute quant à l'infraction de viol, il y a lieu d'ordonner une expertise génétique du set d'agression sexuelle qui a été effectué par le docteur Paul Kayser le jour des faits.

Page 28 :

[La réplique de la défense] Il relève encore que son mandant est d'accord à ce que soit ordonnée avant tout autre progrès en cause une expertise génétique du set d'agression sexuelle qui a été effectuée sur la personne de PERSONNE1.).

Page 34 :

[La Cour - Quant aux critiques formulées par la défense à l'égard des experts judiciaires :] Il s'y ajoute que les conclusions des deux experts judiciaires quant à la personnalité de PERSONNE1.) sont corroborées par un autre élément, à savoir le certificat médical du 5 mai 2021 du docteur Béatrice Risch, qui retient : .

Il s'ensuit qu'il n'y a pas lieu de faire droit à la demande de nomination d'un nouvel expert respectivement d'une institution d'une expertise génétique et que c'est à bon droit que les juges de première instance ont tenu compte, entre autres éléments, des rapports de crédibilité des deux experts judiciaires.

Que les autres éléments à décharge écartés, rejetés ou non pris en compte par le juge du fond se présentent comme suit :

 Le rapport du professeur MORMONT versé par la défense du prévenu qui apporte des éléments critiques relatifs à la méthodologie des deux experts ayant conclu à la crédibilité du témoin / victime  Le témoignage sous serment du professeur MORMONT qui vient à la barre confirmer son rapport d’analyse technique relatifs à la méthodologie des deux experts ayant conclu à la crédibilité du témoin / victime  La version initiale en langue allemande du Procès-verbal de Police qui met en évidence des contradictions dans les déclarations du témoin / partie civile  L’expertise médicolégale (set agression sexuelle) du Dr Paul KAYSER, (Page 3 : Le docteur Paul KAYSER ayant réalisé l'examen, a remarqué qu'une pénétration digitale du vagin ne serait guère décelable).

 Le rapport d’expertise mentale du Dr. Edmond REYNAUD (confirmé dans son analyse par le Dr GLEIS) qui fait état chez le prévenu d’un profil psychique normal  Le témoignage du Dr GLEIS qui conclue à l’absence de contrôle sur le patient après seulement quelques séances  La demande d’expertise génétique formulée par le Parquet général et à laquelle la défense a donné son accord  Le témoignage de l'épouse du docteur PERSONNE2.) , PERSONNE3.), également appelée par la défense comme témoin, a déclaré que dès 21 la première séance avec PERSONNE1.), PERSONNE2.) lui aurait fait part de son attirance qu'il avait envers cette dernière et de son inconfort qui en résulterait  L’absence d’antécédent judiciaire du prévenu  L’absence de mobile chez un prévenu sans aucun antécédent, conscient des risques pour sa carrière et capable de discerner les signes d’un état de syndrome chez un patient.

Attendu à contrario, que le juge du fond a retenu uniquement les éléments à charge, à savoir les deux rapports d’expertises, nonobstant les critiques formulées à leur encontre par la défense du prévenu, ainsi que le certificat médical du Dr RISCH versé par la partie civile Voir ainsi :

Page 34 :

[La Cour - Quant aux critiques formulées par la défense à l'égard des experts judiciaires :] Il s'y ajoute que les conclusions des deux experts judiciaires quant à la personnalité de PERSONNE1.) sont corroborées par un autre élément, à savoir le certificat médical du 5 mai 2021 du docteur Béatrice Risch, qui retient : .

Attendu qu’il résulte de ces développements que l’arrêt entrepris encourt la cassation pour avoir violé la présomption d’innocence en tant que règle relative à l’administration de la preuve en ce qui concerne notamment la charge de la preuve et l'exigence de rapporter la preuve au-delà de tout doute raisonnable.

D.

Violation de la présomption d’innocence, principe à valeur constitutionnelle et demande de question préjudicielle à la Cour constitutionnelle.

Attendu que le demandeur au pourvoi a fait valoir devant les juridictions du fond, tant en première instance qu’en instance d’appel, le grief tiré de la violation de la présomption d’innocence.

Attendu que la mise en œuvre devant les juridictions du fond, par le demandeur en cassation, du moyen tiré de la violation de la présomption d’innocence au cours de la procédure, a été entravée en raison de l’absence de toute définition en droit national, tant au regard de la Constitution, qu’au regard de la loi et spécifiquement le Code pénal et le Code de procédure pénale.

Qu’une telle absence au niveau des normes nationales interpelle tout d’abord au regard de la valeur reconnue à la présomption d’innocence par les normes de droit international.

Que cette absence interpelle encore alors que la loi du 10 août 2018 publiée au Mémorial A n° 795 du 12 septembre 2018, avait précisément pour objet de transposer la DIRECTIVE (UE) 2016/343 DU PARLEMENT EUROPÉEN ET DU 22 CONSEIL du 9 mars 2016 portant renforcement de certains aspects de la présomption d'innocence et du droit d'assister à son procès dans le cadre des procédures pénales, et qu’il est dès lors permis de s’interroger sur la conformité de la transposition de ladite directive en droit national.

Qu’il ressort à ce propos d’un rapport de 2018 du Ministère des affaires étrangères et européennes, Direction des relations économiques internationales et des affaires européennes, sur la transposition des directives européennes et l’application du droit de l’Union :

Partie 2 – Les procédures d’infraction engagées par la Commission européenne à l’égard du Luxembourg.

Les procédures d’infraction pour non-transposition d’une directive dans le délai.

Qu’à la date du rapport (2018) le Luxembourg faisait l’objet de neuf procédures précontentieuses d’infraction pour non-transposition d’une directive dans le délai. Que sept de ces procédures d’infraction étaient concernées par la nouvelle stratégie plus stricte de la Commission européenne.

Qu’en effet, pour toute nouvelle mise en demeure pour non-transposition d’une directive dans le délai émise par la Commission européenne après la date du 19 janvier 2017, si la procédure d’infraction aboutit à une saisine de la CJUE et que l’État membre ne communique l’ensemble des mesures de transposition que pendant la procédure contentieuse devant la CJUE, la Commission ne se désistera plus de l’affaire de sorte que l’État membre sera néanmoins condamné, dans tous les cas, à une somme forfaitaire, qui s’élevé pour le Luxembourg à un montant d’au moins 577.000 EUR. Notons que ce montant peut aller bien au-delà selon le facteur de gravité et le coefficient de durée retenus.

Qu’à la date du rapport, la mise en demeure adressée sur base de l’article 258 TFUE, concernait le Ministère de la Justice, dans le cadre de la transposition de la Directive 2016/343 présomption d’innocence, échéance de transposition 01/04/2018, numéro d’infraction 2018/0115, début de la procédure 24/05/2018.

Que par la suite, a été publiée au Mémorial A N°795 du 12 septembre 2018, la Loi du 10 août 2018 portant modification :

1° du Code pénal ;

2° du Code de procédure pénale ;

3° de la loi modifiée du 7 mars 1980 sur l’organisation judiciaire ; en vue de la transposition de la directive (UE) 2016/343 du Parlement européen et du Conseil du 9 mars 2016 portant renforcement de certains aspects de la présomption d’innocence et du droit d’assister à son procès dans le cadre des procédures pénales.

Attendu que le demandeur au pourvoi a soulevé expressément et en substance, devant les juridictions du fond du premier degré et d’appel, la violation de la présomption d’innocence.

23 Que tant la Convention européenne des droits de l’homme, en son article 6§2, que l’article 3 de la Directive (UE) 2016/343 du Parlement Européen et du Conseil du 9 mars 2016 portant renforcement de certains aspects de la présomption d'innocence et du droit d'assister à son procès dans le cadre des procédures pénales, reconnaissent expressément le droit à la présomption d’innocence.

Mais attendu cependant que texte de la Constitution luxembourgeoise ne vise pas expressément la notion de présomption d’innocence.

Qu’il résulte toutefois du principe de primauté du droit international sur l’ordre interne, ensemble avec les articles 6§2 de la Convention européenne des droits de l’homme et 3 de la Directive (UE) 2016/343 du Parlement Européen et du Conseil du 9 mars 2016 susvisés, que la Constitution luxembourgeoise doit nécessairement, bien qu’implicitement, reconnaître le droit à la présomption d’innocence, et que ce principe doit dès lors avoir valeur constitutionnelle dans l’ordre interne luxembourgeois.

Que néanmoins, à défaut d’une disposition exprès dans la Constitution du Grand-Duché de Luxembourg, le prévenu a été privé de la possibilité d’invoquer la violation d’un article de la Constitution à l’appui de ses griefs, de même qu’il a été privé de la possibilité d’invoquer la violation d’un principe reconnu comme ayant valeur constitutionnelle.

Qu’il s’ensuit que la cassation est encourue de ce chef.

Mais attendu que pour répondre à ce moyen, le demandeur au pourvoi estime pertinent, proportionné et nécessaire de demander à la Cour de cassation de bien vouloir soumettre, conformément à l’article 6 de la loi du 27 juillet 1997 portant organisation de la Cour constitutionnelle, la question préjudicielle suivante :

articles 6§2 de la Convention européenne des droits de l’homme, et 3 de la Directive (UE) 2016/343 du Parlement Européen et du Conseil du 9 mars 2016 portant renforcement de certains aspects de la présomption d'innocence et du droit d'assister à son procès dans le cadre des procédures pénales, a-t-il valeur constitutionnelle dans l’ordre interne luxembourgeois ? » Qu’il y a encore lieu de surseoir à statuer en attendant la décision de la Cour constitutionnelle.

E.

Demande de question préjudicielle à la Cour de justice de l’Union européenne portant sur l’interprétation de la Directive (UE) 2016/343 du Parlement Européen et du Conseil du 9 mars 2016 portant renforcement de certains aspects de la présomption d'innocence et du droit d'assister à son procès dans le cadre des procédures pénales Attendu que le demandeur en cassation entend encore soumettre à Votre Cour une demande de renvoi préjudiciel tel qu’exposé ci-dessous.

24 1.

Recevabilité de la question préjudicielle Attendu que, saisie dans une précédente affaire d’une demande tendant à lui voir poser deux questions préjudicielles à la Cour de justice de l’Union, sur base de l’article 267 traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE), Votre Cour a jugé dans son arrêt N° 05/2019 pénal. du 10 janvier 2019, Not. 34618/14/CD et 11043/15/CD, Numéro 4061 du registre (page 13 de l’arrêt tel que publié), que :

sur les pourvois et la procédure en cassation le mémoire en cassation doit préciser les dispositions attaquées de l’arrêt et contenir les moyens de cassation ;

Attendu que les questions préjudicielles soulevées ne sont pas posées dans le cadre d’un moyen de cassation ;

Qu’il en suit que la demande tendant à voir saisir la Cour de justice de l’Union européenne des deux questions préjudicielles est irrecevable ; » Attendu que, dans le respect de cette jurisprudence, le demandeur en cassation soumet à Votre Cour une demande tendant à voir posée la question préjudicielle suivante dans le cadre du moyen de cassation ci-dessus développé, tenant à la violation de la présomption d’innocence.

Attendu en effet que le demandeur au pourvoi fait encore valoir que les droits garantis par l’article 3 de la Directive (UE) 2016/343, ne figurent pas dans le texte de la loi luxembourgeoise du 10 août 2018 portant transposition de ladite directive.

Que faute de disposer d’une disposition de droit national, le prévenu fait valoir qu’il a été privé de base légale en droit national sur laquelle fonder ses griefs.

Que cependant, la directive étant supposée avoir été transposée par la loi du 10 août 2018, il y a une difficulté d’interprétation tenant à savoir si l’article 3 a effectivement été ou n’a pas été transposé en droit national.

2.

Compétence de la Cour de justice de l’Union Attendu que l’arrêt entrepris rappelle la position du Ministère Public quant à la compétence de la Cour de justice de l’Union pour connaître d’une question préjudicielle posée par une juridiction nationale.

Attendu ainsi que la Cour de justice de l’Union européenne a eu l’occasion depuis son arrêt Covaci du 15 octobre 2015, de préciser en détail la nature de son rôle dans le cadre du mécanisme de la question préjudicielle :

Affaire C-216/14 Covaci :

Page 2 de l’arrêt de la Cour de justice de l’Union :

25 Paragraphe 1 :

La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation des articles 1er, paragraphe 2, et 2, paragraphes 1 et 8, de la directive 2010/64/UE du Parlement européen et du Conseil, du 20 octobre 2010, relative au droit à l’interprétation et à la traduction dans le cadre des procédures pénales (JO L 280, p. 1), ainsi que des articles 2, 3, paragraphe 1, sous c), et 6, paragraphes 1 et 3, de la directive 2012/13/UE du Parlement européen et du Conseil, du 22 mai 2012, relative au droit à l’information dans le cadre des procédures pénales (JO L 142, p. 1).

Paragraphe 2 :

Cette demande a été présentée dans le cadre d’une procédure pénale engagée contre M. Covaci pour des infractions routières commises par l’intéressé.

Page 7 de l’arrêt de la Cour de justice de l’Union :

Sur les questions préjudicielles Sur la première question Paragraphe 25 :

Par sa première question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si les articles 1er à 3 de la directive 2010/64 doivent être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à une législation nationale, telle que celle en cause au principal, qui, dans le cadre d’une procédure pénale, n’autorise pas la personne faisant l’objet d’une ordonnance pénale à former une opposition par écrit contre cette ordonnance dans une langue autre que celle de la procédure, alors même que cette personne ne maîtrise pas cette dernière langue.

Page 10 de l’arrêt de la Cour de justice de l’Union :

Sur la seconde question Paragraphe 52 :

Par sa seconde question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si les articles 2, 3, paragraphe 1, sous c), et 6, paragraphes 1 et 3, de la directive 2012/13 doivent être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à une législation d’un État membre, telle que celle en cause au principal, qui, dans le cadre d’une procédure pénale, impose à la personne poursuivie ne résidant pas dans cet État membre de désigner un mandataire aux fins de la signification d’une ordonnance pénale la concernant, un délai pour former une opposition contre cette ordonnance courant à compter de la signification de celle-ci audit mandataire.

Pages 12 et 13 de l’arrêt de la Cour de justice de l’Union :

Par ces motifs, la Cour (première chambre) dit pour droit:

26 1) Les articles 1er à 3 de la directive 2010/64/UE du Parlement européen et du Conseil, du 20 octobre 2010, relative au droit à l’interprétation et à la traduction dans le cadre des procédures pénales, doivent être interprétés en ce sens qu’ils ne s’opposent pas à une législation nationale, telle que celle en cause au principal, qui, dans le cadre d’une procédure pénale, n’autorise pas la personne faisant l’objet d’une ordonnance pénale à former une opposition par écrit contre cette ordonnance dans une langue autre que celle de la procédure, alors même que cette personne ne maîtrise pas cette dernière langue, à condition que les autorités compétentes ne considèrent pas, conformément à l’article 3, paragraphe 3, de cette directive, que, au vu de la procédure concernée et des circonstances de l’espèce, une telle opposition constitue un document essentiel.

2) Les articles 2, 3, paragraphe 1, sous c), et 6, paragraphes 1 et 3, de la directive 2012/13/UE du Parlement européen et du Conseil, du 22 mai 2012, relative au droit à l’information dans le cadre des procédures pénales, doivent être interprétés en ce sens qu’ils ne s’opposent pas à une législation d’un État membre, telle que celle en cause au principal, qui, dans le cadre d’une procédure pénale, impose à la personne poursuivie ne résidant pas dans cet État membre de désigner un mandataire aux fins de la signification d’une ordonnance pénale la concernant, à condition que cette personne bénéficie effectivement de l’intégralité du délai imparti pour former une opposition contre ladite ordonnance. » Attendu que l’interprétation de la Directive donnée par la Cour de justice de l’Union est une interprétation visant à déterminer si la Directive s’oppose ou non à une législation nationale d’un État membre. (Voir en ce sens les paragraphes 25 et 52 ainsi que les pages 12 et 13 de l’arrêt de la Cour de justice de l’Union susvisé :

« Arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne 15 octobre 2015 – Affaire C-

216/14 Covaci ) Attendu qu’il résulte des mêmes dispositions très claires de l’arrêt Covaci de la Cour de justice de l’Union, que l’article 267 du Traité sur le fonctionnement de l'Union Européenne, vise précisément à contrôler la conformité du droit national aux Directives européennes.

Attendu par conséquent qu’il y a lieu de constater que la Cour de justice de l’Union, respectivement le Tribunal de l’Union sont compétents pour connaître de la question préjudicielle posée.

3.

La question préjudicielle posée a.

Base légale de la demande de question préjudicielle Attendu que le Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE) autorise le juge national à saisir la Cour de justice de l’Union européenne d’une question préjudicielle aux fins de l’interroger sur l’existence d’une opposition entre une Directive européenne et une disposition législative nationale.

27 Attendu que lorsqu’une question préjudicielle est soumise à une juridiction nationale dont les décisions ne sont pas susceptibles d’un recours juridictionnel en droit interne, cette juridiction est tenue de saisir la Cour de justice de l’Union européenne.

Attendu, que la Directive (UE) 2016/343 du Parlement Européen et du Conseil du 9 mars 2016 portant renforcement de certains aspects de la présomption d'innocence et du droit d'assister à son procès dans le cadre des procédures pénales, dispose :

Article 3 Présomption d'innocence Les États membres veillent à ce que les suspects et les personnes poursuivies soient présumés innocents jusqu'à ce que leur culpabilité ait été légalement établie.

Article 14 Transposition 1. Les Etats membres mettent en vigueur les dispositions législatives, règlementaires et administratives nécessaires pour se conformer à la présente directive au plus tard le 1er avril 2018. Ils en informent immédiatement la Commission.

Lorsque les Etats membres adoptent ces dispositions, celles-ci contiennent une référence à la présente directive ou sont accompagnées d'une telle référence lors de leur publication officielle. Les modalités de cette référence sont arrêtées par les Etats membres.

2. Les Etats membres communiquent à la Commission le texte des dispositions essentielles de droit interne qu'ils adoptent dans le domaine régi par la présente directive.

Article 15 Entrée en vigueur La présente directive entre en vigueur le vingtième jour suivant celui de sa publication au Journal officiel de l'Union européenne.

Attendu que la directive a été publiée au Journal officiel de l’Union européenne, numéro L 65, 59è année, du 11 mars 2016.

Qu’elle est entrée en vigueur le 31 mars 2016.

Attendu que le délai pour transposer la directive expirait le 1er avril 2018.

Attendu qu’à défaut d’avoir été correctement transposée, la directive est depuis le 02 avril 2018, directement invocable devant les juridictions nationales en vertu du principe de l’effet direct.

28 Que la Cour de justice de l'Union européenne admet l’effet direct des directives depuis ses arrêts Franz Grad c/ Finanzamt et Van Duyn.

Qu’elle a ainsi admis que les justiciables peuvent s'en prévaloir en l'absence de transposition ou après une directive mal transposée, sous les conditions suivantes:

 Que la directive soit claire, c'est-à-dire qu'elle pose une obligation de faire ou de ne pas faire  Qu’elle soit précise, c’est-à-dire qu'elle ne nécessite pas de règlement d'application  Qu’elle soit inconditionnelle, c'est-à-dire que le délai de transposition soit arrivé à son terme Attendu que toutes ces conditions sont réunies en l’espèce et que le prévenu peut valablement se prévaloir de l’effet direct de la Directive (UE) 2016/343 du Parlement Européen et du Conseil du 9 mars 2016 portant renforcement de certains aspects de la présomption d'innocence et du droit d'assister à son procès dans le cadre des procédures pénales.

Attendu que le Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne dispose :

Article 256 (ex-article 225 TCE) 3. Le Tribunal est compétent pour connaître des questions préjudicielles, soumises en vertu de l'article 267, dans des matières spécifiques déterminées par le statut.

Lorsque le Tribunal estime que l'affaire appelle une décision de principe susceptible d'affecter l'unité ou la cohérence du droit de l'Union, il peut renvoyer l'affaire devant la Cour de justice afin qu'elle statue.

Les décisions rendues par le Tribunal sur des questions préjudicielles peuvent exceptionnellement faire l'objet d'un réexamen par la Cour de justice, dans les conditions et limites prévues par le statut, en cas de risque sérieux d'atteinte à l'unité ou à la cohérence du droit de l'Union.

Article 267 (ex-article 234 TCE) La Cour de justice de l'Union européenne est compétente pour statuer, à titre préjudiciel:

a) sur l'interprétation des traités, b) sur la validité et l'interprétation des actes pris par les institutions, organes ou organismes de l'Union.

29 Lorsqu'une telle question est soulevée devant une juridiction d'un des États membres, cette juridiction peut, si elle estime qu'une décision sur ce point est nécessaire pour rendre son jugement, demander à la Cour de statuer sur cette question.

Lorsqu'une telle question est soulevée dans une affaire pendante devant une juridiction nationale dont les décisions ne sont pas susceptibles d'un recours juridictionnel de droit interne, cette juridiction est tenue de saisir la Cour.

Si une telle question est soulevée dans une affaire pendante devant une juridiction nationale concernant une personne détenue, la Cour statue dans les plus brefs délais.

Attendu que la Cour de cassation doit, au vœu de l’article 267 b) du TFUE, saisir le Tribunal sinon la Cour de justice de l’Union de la question préjudicielle lui soumise.

b.

La demande de question préjudicielle Attendu que le demandeur en cassation soumet à Votre Cour la question préjudicielle suivante :

Conseil du 9 mars 2016 portant renforcement de certains aspects de la présomption d'innocence, doit-il s’interpréter en ce sens qu’il s’oppose à une législation nationale telle que la loi du 10 août 2018 prise en ses articles Ier, II, III et IV, qui transpose la directive (UE) 2016/343 du Parlement européen et du Conseil du 9 mars 2016 portant renforcement de certains aspects de la présomption d’innocence et du droit d’assister à son procès dans le cadre des procédures pénales, alors que ne figure dans cette loi aucune définition de la présomption d’innocence, ni aucune mention de la présomption d’innocence ? » Que le demandeur en cassation demande encore à Votre Cour de surseoir à statuer en attendant la décision de la Cour de justice de l’Union européenne.

Réponse de la Cour Sur la première branche du moyen Le demandeur en cassation admet que le grief tiré de la violation de la présomption d’innocence ne porte pas sur le traitement qui lui a été réservé dans le cadre du procès pénal.

Il s’ensuit que le moyen, pris en sa première branche, est inopérant.

Sur la seconde branche du moyen Le demandeur en cassation fait grief aux juges d’appel d’avoir violé le principe de la présomption d’innocence consacré par l’article 3 de la Directive (UE) 30 2016/343 du Parlement et du Conseil du 9 mars 2016 portant renforcement de certains aspects de la présomption d’innocence et du droit d’assister à son procès dans le cadre des procédures pénales (ci-après « la Directive ») dans le cadre de l’administration de la preuve, par le fait de s’être basés sur les seules déclarations de la défenderesse en cassation pour constater la réunion des éléments constitutifs et des circonstances aggravantes, que seraient la ruse ou la violence, de l’infraction de viol.

La présomption d’innocence et le droit à un procès équitable sont consacrés par les articles 47 et 48 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, par l’article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales et par l’article 14 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.

L’article 3 de la Directive dispose « Les Etats membres veillent à ce que les suspects et les personnes poursuivies soient présumés innocents jusqu’à ce que leur culpabilité ait été légalement établie.».

L’article 6 de la Directive dispose « 1. Les Etats membres veillent à ce que l’accusation supporte la charge de la preuve visant à établir la culpabilité des suspects et des personnes poursuivies.

Cette disposition s’entend sans préjudice de toute obligation incombant au juge ou à la juridiction compétente de rechercher des éléments de preuve tant à charge qu’à décharge, et sans préjudice du droit de la défense de présenter des éléments de preuve conformément au droit national applicable.

2. Les Etats membres veillent à ce que tout doute quant à la question de la culpabilité profite au suspect ou à la personne poursuivie, y compris lorsque la juridiction apprécie si la personne concernée doit être acquittée ».

L’article 375, alinéa 1, du Code pénal dispose « Tout acte de pénétration sexuelle, de quelque nature qu’il soit et par quelque moyen que ce soit, commis sur une personne qui n’y consent pas, notamment à l’aide de violences ou de menaces graves, par ruse ou artifice, ou en abusant d’une personne hors d’état de donner un consentement libre ou d’opposer la résistance, constitue un viol et sera puni de la réclusion de cinq à dix ans. ».

La présomption d’innocence invoquée par le demandeur en cassation n’est pas un principe de droit pénal matériel, mais un principe de procédure pénale qui garantit à tout prévenu d’être présumé innocent jusqu’à ce que sa culpabilité soit légalement établie. Ce droit est consacré par les articles 3 et 6 de la Directive qui a pour objet de renforcer le droit du justiciable à un procès équitable dans le cadre d’une procédure pénale et de définir des règles minimales communes concernant certains aspects de la présomption d’innocence et le droit d’assister à son procès.

Il se dégage du libellé de l’article 375, alinéa 1, du Code pénal que ni la ruse ni la violence ne constituent des circonstances aggravantes de l’infraction de viol, 31 mais uniquement des critères permettant d’établir l’absence de consentement de la victime, partant l’un des éléments constitutifs de l’infraction de viol.

Le principe de la présomption d’innocence implique qu’il appartient à la partie poursuivante d’établir les éléments matériels et moral du crime de viol et aux juges du fond d’apprécier les éléments de preuve à charge et à décharge du prévenu.

En confrontant, lors de l’examen des éléments constitutifs du viol, les déclarations du demandeur en cassation, empreintes de contradictions, à celles de la défenderesse en cassation, demeurées constantes et dont la crédibilité avait été reconnue par deux experts judiciaires, pour retenir la culpabilité du prévenu, les juges d’appel n’ont violé ni le principe de la présomption d’innocence ni celui selon lequel la charge de la preuve repose sur l’accusation.

Il s’ensuit que le moyen, pris en sa seconde branche, n’est pas fondé.

Le demandeur en cassation entend voir soumettre à la Cour constitutionnelle la question préjudicielle suivante :

« La présomption d’innocence, principe de droit pénal garanti par les articles 6§2 de la Convention européenne des droits de l’homme, et 3 de la Directive (UE) 2016/343 du Parlement Européen et du Conseil du 9 mars 2016 portant renforcement de certains aspects de la présomption d'innocence et du droit d'assister à son procès dans le cadre des procédures pénales, a-t-il valeur constitutionnelle dans l’ordre interne luxembourgeois ? ».

Au vu de la réponse donnée au moyen, la question soulevée n’est pas pertinente pour la solution du litige.

Il s’ensuit qu’il n’y a pas lieu de la poser.

Le demandeur en cassation entend, par ailleurs, voir soumettre à la Cour de justice de l’Union européenne la question préjudicielle suivante :

« L’article 3 de la Directive (UE) 2016/343 du Parlement Européen et du Conseil du 9 mars 2016 portant renforcement de certains aspects de la présomption d'innocence, doit-il s’interpréter en ce sens qu’il s’oppose à une législation nationale telle que la loi du 10 août 2018 prise en ses articles Ier, II, III et IV, qui transpose la directive (UE) 2016/343 du Parlement européen et du Conseil du 9 mars 2016 portant renforcement de certains aspects de la présomption d’innocence et du droit d’assister à son procès dans le cadre des procédures pénales, alors que ne figure dans cette loi aucune définition de la présomption d’innocence, ni aucune mention de la présomption d’innocence ? ».

Au vu de la réponse donnée au moyen, la question soulevée n’est pas pertinente pour la solution du litige.

Il s’ensuit qu’il n’y a pas lieu de la poser.

32 Sur les troisième et quatrième moyens de cassation réunis Enoncé des moyens le troisième, « Violation de l’obligation pour l’Etat de veiller à ce que l’accusation supporte la charge de la preuve, violation de l’obligation incombant au juge de rechercher les éléments à décharge, violation du droit de la défense de présenter des éléments de preuve – Article 6§1 de la Directive (UE) 2016/343 portant renforcement de certains aspects de la présomption d'innocence.

A. Dispositions critiquées de l’arrêt de la Cour d’appel Attendu que les dispositions critiquées de l’arrêt de la Cour d’appel figurent :

D’une part dans les motifs de la décision entreprise, aux pages 9 et 10 :

Page 9 :

Ad 1) L'élément matériel consistant dans un acte de pénétration sexuelle PERSONNE1.) a déclaré lors de ses auditions policières et devant le juge d'instruction que le prévenu l'avait pénétrée digitalement dans son vagin, déclarations qu'elle a réitérées sous la fol du serment à l'audience.

Etant donné que le Tribunal a, dans ses développements antérieurs, accordé crédit aux déclarations de PERSONNE1.), il y a lieu de retenir que l'élément matériel du viol est établi.

ad 2) L'absence de consentement de la victime Page 10 :

En l'espèce, le Tribunal rappelle qu'il résulte des déclarations de PERSONNE1.) qu'elle n'avait pas consenti quant à l'acte sexuel perpétré sur sa personne par le prévenu, qu'il l'a tenue par les cheveux pour la tirer vers l'arrière, et qu'il a profité de ce moment de déséquilibre pour glisser sa main sous son pantalon stretch qu'elle portait et introduire un doigt dans son vagin.

Le Tribunal retient que les agissements consistant à prendre une personne par les cheveux pour la tirer vers l'arrière, constituent des violences au sens de l'article 483 du code pénal.

De ce fait, PERSONNE1.) se trouvait hors d'état d'opposer de la résistance, de sorte qu'il y a manifestement eu absence de consentement.

Ensuite il y a encore lieu de rappeler que PERSONNE1.) a indiqué avoir été totalement surprise par l'acte sexuel commis par PERSONNE2.) sur sa personne, la laissant ainsi totalement bloquée par la surprise.

33 Il y a partant lieu de retenir que l'acte de pénétration sexuelle a également été commis par ruse, qui fait partie des moyens cités par l'article 375 du code pénal impliquant nécessairement une absence de consentement.

Ad 3) L'intention criminelle […] En l'espèce, l'intention criminelle ne fait pas de doute dans le chef du prévenu au regard des violences qu'il a employées tel que développé précédemment . Ce même raisonnement s'applique quant à la ruse, alors qu'en surprenant PERSONNE1.), PERSONNE2.) devait être conscient du fait qu'il imposait à cette dernière un rapport sexuel contre son gré.

Page 10 :

Ensuite il y a encore lieu de rappeler que PERSONNE1.) a indiqué avoir été totalement surprise par l'acte sexuel commis par PERSONNE2.) sur sa personne, la laissant ainsi totalement bloquée par la surprise.

[…] Au vu des développements qui précèdent, l'absence de consentement dans le chef de PERSONNE1.) est suffisamment établie.

Page 10 :

Par conséquent le prévenu était parfaitement conscient du fait qu'elle avait du mal à manifester son refus, de sorte qu'il savait pertinemment que PERSONNE1.), qui s'est opposée à ses agissements, même si ce n'est pas avec la plus grande véhémence, n'était pas consentante.

L'intention criminelle est partant établie dans le chef du prévenu.

D’autre part dans les motifs de la décision entreprise, aux pages 25, 28 et 34 :

Page 25 :

[Le réquisitoire du ministère public] au cas où la Cour a un doute quant à l'infraction de viol, il y a lieu d'ordonner une expertise génétique du set d'agression sexuelle qui a été effectué par le docteur Paul Kayser le jour des faits.

Page 28 :

[La réplique de la défense] Il relève encore que son mandant est d'accord à ce que soit ordonnée avant tout autre progrès en cause une expertise génétique du set d'agression sexuelle qui a été effectuée sur la personne de PERSONNE1.).

Page 34 :

[La Cour - Quant aux critiques formulées par la défense à l'égard des experts judiciaires :] 34 Il s'y ajoute que les conclusions des deux experts judiciaires quant à la personnalité de PERSONNE1.) sont corroborées par un autre élément, à savoir le certificat médical du 5 mai 2021 du docteur Béatrice Risch, qui retient : .

De troisième part dans les motifs de la décision entreprise, à la page 37 :

Page 37 :

Les infractions d'attentat à la pudeur et de viol exigent également une intention criminelle dans le chef de l'auteur. Ces infractions ne sont constituées que si l'auteur a voulu l'acte de nature sexuelle, que s'il l'a perçu comme tel et qu'il a eu conscience d'aller à l'encontre de la volonté de la victime.

Les juges de première instance ont à cet égard, à juste titre, considéré que l'intention coupable dans le chef du prévenu est établie. En effet, au vu des déclarations effectuées par la victime ci-avant reproduites, cette intention ne fait pas de doute, le prévenu ayant imposé les actes incriminés, de sorte qu'il a nécessairement eu conscience d'aller à l'encontre de la volonté de PERSONNE1.).

De plus, la circonstance aggravante de l'article 377 du Code pénal a été retenue à juste titre par tes juges de première instance, le prévenu ayant été́ le médecin-psychiatre traitant de ta victime et ayant eu de ce fait autorité sur elle.

Quant à l'autre circonstance aggravante tenant à l'état de particulière vulnérabilité de la victime, circonstance qui a été libellée par te parquet, c'est à juste titre que celle-ci n'a pas été retenue par les juges de première instance à charge du prévenu.

Il s'ensuit que c'est à bon droit et pour des motifs qu'il y a lieu d'adopter, que la juridiction de première instance a retenu à charge du prévenu les infractions aux articles 372, 375 et 377, 2° du Code pénal, sauf qu'il convient conformément au réquisitoire du ministère public de remplacer l'alinéa sous l'intitulé en page 25 du jugement par tes termes suivants: .

De quatrième part dans le dispositif de la décision entreprise, à la page 38 :

Page 38 :

européenne des droits de l'homme et dit qu'il n'y a pas lieu à institution d'une nouvelle expertise de crédibilité sinon une expertise génétique ;

[…] dit l'appel au pénal et au civil d'PERSONNE2.) non fondé ;

35 […] confirme le jugement entrepris sauf à rectifier le libellé de l'article 375 du Code pénal conformément à la motivation du présent arrêt ; » B.

Exposé du moyen et griefs Attendu que le demandeur en cassation fait grief aux juges du fond, en violation de l’article 6§1 de la Directive (UE) 2016/343 du Parlement Européen et du Conseil du 9 mars 2016 portant renforcement de certains aspects de la présomption d'innocence :

1.

Première branche du moyen : D’avoir violé l’obligation incombant à l’accusation de supporter la charge de la preuve Attendu que le demandeur en cassation fait grief aux juges du fond d’avoir accepté que l’accusation rapporte la preuve des faits reprochés uniquement au moyen de l’examen déclarations du témoin / partie civile, et ce pour la totalité des éléments constitutifs des infractions mises à la charge du prévenu, déchargeant ce faisant le ministère public de rapporter, pour chaque élément constitutif pris séparément, la preuve de l’élément constitutif en question.

Qu’en l’espèce, le ministère public a ainsi été autorisé, et suivi en ce sens par le juge du fond, à établir l’ensemble des éléments constitutifs sur base de la considération que le témoin / partie civile était crédible, partant ne mentait pas.

2.

Seconde branche du moyen : D’avoir violé l’obligation incombant au juge de rechercher les éléments à décharge Attendu que le demandeur en cassation fait grief aux juges du fond d’avoir refusé de rechercher les éléments à décharge, ou de les avoir indûment écartés lorsque ceux-ci lui étaient présentés.

Voir en ce sens :

Page 34 :

[La Cour - Quant aux critiques formulées par la défense à l'égard des experts judiciaires :] Il s'ensuit qu'il n'y a pas lieu de faire droit à la demande de nomination d'un nouvel expert respectivement d'une institution d'une expertise génétique et que c'est à bon droit que les juges de première instance ont tenu compte, entre autres éléments, des rapports de crédibilité des deux experts judiciaires.

Que les autres éléments à décharge écartés, rejetés ou non pris en compte par le juge du fond se présentent comme suit :

36  Le rapport du professeur MORMONT versé par la défense du prévenu qui apporte des éléments critiques relatifs à la méthodologie des deux experts ayant conclu à la crédibilité du témoin / victime  Le témoignage sous serment du professeur MORMONT qui vient à la barre confirmer son rapport d’analyse technique relatifs à la méthodologie des deux experts ayant conclu à la crédibilité du témoin / victime  La version initiale en langue allemande du Procès-verbal de Police qui met en évidence des contradictions dans les déclarations du témoin / partie civile  L’expertise médicolégale (set agression sexuelle) du Dr Paul KAYSER, (Page 3 : Le docteur Paul KAYSER ayant réalisé l'examen, a remarqué qu'une pénétration digitale du vagin ne serait guère décelable).

 Le rapport d’expertise mentale du Dr. Edmond REYNAUD (confirmé dans son analyse par le Dr GLEIS) qui fait état chez le prévenu d’un profile psychique normal  Le témoignage du Dr GLEIS qui conclue à l’absence de contrôle sur le patient après seulement quelques séances  La demande d’expertise génétique formulée par le Parquet général et à laquelle la défense a donné son accord  Le témoignage de l'épouse du docteur PERSONNE2.) , PERSONNE3.), également appelée par la défense comme témoin, a déclaré que dès la première séance avec PERSONNE1.), PERSONNE2.) lui aurait fait part de son attirance qu'il avait envers cette dernière et de son inconfort qui en résulterait  L’absence d’antécédent judiciaire du prévenu  L’absence de mobile chez un prévenu sans aucun antécédent, conscient des risques pour sa carrière et capable de discerner les signes d’un état de syndrome chez un patient.

Attendu à contrario, que le juge du fond a retenu uniquement les éléments à charge, à savoir les deux rapports d’expertises, nonobstant les critiques formulées à leur encontre par la défense du prévenu, ainsi que le certificat médical du Dr RISCH versé par la partie civile Voir ainsi :

Page 34 :

[La Cour - Quant aux critiques formulées par la défense à l'égard des experts judiciaires :] Il s'y ajoute que les conclusions des deux experts judiciaires quant à la personnalité de PERSONNE1.) sont corroborées par un autre élément, à savoir le certificat médical du 5 mai 2021 du docteur Béatrice Risch, qui retient : .

37 3.

Troisième branche du moyen : D’avoir violé le droit de la défense de présenter des éléments de preuve Attendu que le demandeur en cassation fait grief aux juges du fond d’avoir violé le droit de la défense de présenter des éléments de preuve.

Voir en ce sens :

Page 8 :

Concernant le rapport du professeur Christian MORMONT versé par la défense pour mettre en doute les rapports d'expertise des experts judiciaires, le Tribunal est d'avis que cet écrit manque d'objectivité et d'impartialité.

Page 9 :

Tout au long de son analyse, le professeur Christian MORMONT. chargé unilatéralement par la défense, émet des prises de positions partisanes, de sorte que le Tribunal a des doutes sur l'objectivité et l'impartialité de son écrit et de ses déclarations à l'audience, lors de laquelle il a été entendu, ce qui est important de rappeler, comme simple témoin.

Page 31 :

En l'occurrence, la Cour d'appel constate, à l'instar du tribunal, qu'il peut être déduit des commentaires faites par le professeur Christian Mormont que ce dernier a systématiquement favorisé la situation du prévenu en analysant les déclarations effectuées par PERSONNE1.) devant la police, de sorte que le constat relatif au manque d'objectivité et d'impartialité dudit expert est patent.

[…] Il n'y a donc pas eu impartialité de la part du tribunal en ce qu'il a décidé de ne pas prendre en considération le rapport du professeur Christian Mormont qui lui a été soumis.

Pour ce qui concerne le deuxième rapport du professeur Christian Mormont il est un fait que celui-ci contient également des passages qui manquent d'objectivité et d'impartialité.

[…] Les développements précédents amènent la Cour d'appel à la conclusion que le premier rapport et le deuxième rapport du professeur Christian Mormont manquent d'objectivité et ne sont pas de nature à tenir en échec la crédibilité des déclarations de PERSONNE1.).

Page 34 :

[La Cour - Quant aux critiques formulées par la défense à l'égard des experts judiciaires :] 38 Il s'ensuit qu'il n'y a pas lieu de faire droit à la demande de nomination d'un nouvel expert respectivement d'une institution d'une expertise génétique et que c'est à bon droit que les juges de première instance ont tenu compte, entre autres éléments, des rapports de crédibilité des deux experts judiciaires.

Qu’il découle de ce moyen, pris dans ses trois branches, que la décision entreprise viole les droits garantis par l’article 6§1 de la Directive (UE) 2016/343, partant qu’elle encourt la cassation.

Mais attendu que le demandeur au pourvoi fait encore valoir que les droits garantis par l’article 6§1 de la Directive (UE) 2016/343, ne figurent pas dans le texte de la loi luxembourgeoise du 10 août 2018 portant transposition de ladite directive.

Que faute de disposer d’une disposition de droit national, le prévenu fait valoir qu’il a été privé de base légale en droit national sur laquelle fonder ses griefs.

Que cependant, la directive étant supposée avoir été transposée par la loi du 10 août 2018, il y a une difficulté d’interprétation tenant à savoir si l’article 6§1 a effectivement été ou n’a pas été transposé en droit national.

C.

Demande de question préjudicielle à la Cour de justice de l’Union européenne portant sur l’interprétation de la Directive (UE) 2016/343 du Parlement Européen et du Conseil du 9 mars 2016 portant renforcement de certains aspects de la présomption d'innocence et du droit d'assister à son procès dans le cadre des procédures pénales Attendu que le demandeur en cassation entend encore soumettre à Votre Cour une demande de renvoi préjudiciel tel qu’exposé ci-dessous.

1.

Recevabilité de la question préjudicielle Attendu que, dans le respect de l’arrêt N° 05/2019 pénal. du 10 janvier 2019, Not. 34618/14/CD et 11043/15/CD, Numéro 4061 du registre précité, le demandeur en cassation soumet à Votre Cour une demande tendant à voir posée la question préjudicielle suivante dans le cadre du moyen de cassation ci-dessus développé, tenant à la violation de l’obligation pour l’Etat de veiller à ce que l’accusation supporte la charge de la preuve, violation de l’obligation incombant au juge de rechercher les éléments à décharge, violation du droit de la défense de présenter des éléments de preuve.

2.

Compétence de la Cour de justice de l’Union Attendu que le demandeur en cassation renvoie à ses développements sous le Deuxième moyen, sous le point E. 2. Compétence de la Cour de justice de l’Union, qu’il convient de reprendre intégralement ici.

39 Attendu que, par conséquent, y a lieu de constater que la Cour de justice de l’Union, respectivement le Tribunal de l’Union sont compétents pour connaître de la question préjudicielle posée.

3.

La question préjudicielle posée a.

Base légale de la demande de question préjudicielle Attendu que le demandeur en cassation renvoie à ses développements sous le Deuxième moyen, sous le point E. 3. 1. Base légale de la demande de question préjudicielle, qu’il convient de reprendre intégralement ici.

Attendu que la Cour de cassation doit, au vœu de l’article 267 b) du TFUE, saisir le Tribunal sinon la Cour de justice de l’Union de la question préjudicielle lui soumise.

b.

La demande de question préjudicielle Attendu que le demandeur en cassation soumet à Votre Cour la question préjudicielle suivante :

du Conseil du 9 mars 2016 portant renforcement de certains aspects de la présomption d'innocence, doit-il s’interpréter en ce sens qu’il s’oppose à une législation nationale telle que la loi du 10 août 2018 prise en ses articles Ier, II, III et IV, qui transpose la directive (UE) 2016/343 du Parlement européen et du Conseil du 9 mars 2016 portant renforcement de certains aspects de la présomption d’innocence et du droit d’assister à son procès dans le cadre des procédures pénales, alors que ne figure dans cette loi aucune définition de l’obligation pour l’Etat de veiller à ce que l’accusation supporte la charge de la preuve, aucune définition de l’obligation incombant au juge de rechercher les éléments à décharge, ni aucune définition du droit de la défense de présenter des éléments de preuve, et qu’il ne figure dans cette loi aucune mention de ces trois notions ? » Que le demandeur en cassation demande encore à Votre Cour de surseoir à statuer en attendant la décision de la Cour de justice de l’Union européenne. » et le quatrième, « Violation du droit à ce que tout doute profite à l’accusé – Article 6§1 CEDH : Principe – Article 6§2 de la Directive (UE) 2016/343 portant renforcement de certains aspects de la présomption d'innocence) A.

Dispositions critiquées de l’arrêt de la Cour d’appel Attendu que les dispositions critiquées de l’arrêt de la Cour d’appel figurent :

40 D’une part dans les motifs de la décision entreprise, aux pages 9 et 10 :

Page 9 :

Ad 1) L'élément matériel consistant dans un acte de pénétration sexuelle PERSONNE1.) a déclaré lors de ses auditions policières et devant le juge d'instruction que le prévenu l'avait pénétrée digitalement dans son vagin, déclarations qu'elle a réitérées sous la fol du serment à l'audience.

Etant donné que le Tribunal a, dans ses développements antérieurs, accordé crédit aux déclarations de PERSONNE1.), il y a lieu de retenir que l'élément matériel du viol est établi.

ad 2) L'absence de consentement de la victime Page 10 :

En l'espèce, le Tribunal rappelle qu'il résulte des déclarations de PERSONNE1.) qu'elle n'avait pas consenti quant à l'acte sexuel perpétré sur sa personne par le prévenu, qu'il l'a tenue par les cheveux pour la tirer vers l'arrière, et qu'il a profité de ce moment de déséquilibre pour glisser sa main sous son pantalon stretch qu'elle portait et introduire un doigt dans son vagin.

Le Tribunal retient que les agissements consistant à prendre une personne par les cheveux pour la tirer vers l'arrière, constituent des violences au sens de l'article 483 du code pénal.

De ce fait, PERSONNE1.) se trouvait hors d'état d'opposer de la résistance, de sorte qu'il y a manifestement eu absence de consentement.

Ensuite il y a encore lieu de rappeler que PERSONNE1.) a indiqué avoir été totalement surprise par l'acte sexuel commis par PERSONNE2.) sur sa personne, la laissant ainsi totalement bloquée par la surprise.

Il y a partant lieu de retenir que l'acte de pénétration sexuelle a également été commis par ruse, qui fait partie des moyens cités par l'article 375 du code pénal impliquant nécessairement une absence de consentement.

Ad 3) L'intention criminelle […] En l'espèce, l'intention criminelle ne fait pas de doute dans le chef du prévenu au regard des violences qu'il a employées tel que développé précédemment . Ce même raisonnement s'applique quant à la ruse, alors qu'en surprenant PERSONNE1.), PERSONNE2.) devait être conscient du fait qu'il imposait à cette dernière un rapport sexuel contre son gré.

Page 10 :

41 Ensuite il y a encore lieu de rappeler que PERSONNE1.) a indiqué avoir été totalement surprise par l'acte sexuel commis par PERSONNE2.) sur sa personne, la laissant ainsi totalement bloquée par la surprise.

[…] Au vu des développements qui précèdent, l'absence de consentement dans le chef de PERSONNE1.) est suffisamment établie.

Page 10 :

Par conséquent le prévenu était parfaitement conscient du fait qu'elle avait du mal à manifester son refus, de sorte qu'il savait pertinemment que PERSONNE1.), qui s'est opposée à ses agissements, même si ce n'est pas avec la plus grande véhémence, n'était pas consentante.

L'intention criminelle est partant établie dans le chef du prévenu.

D’autre part dans le dispositif de la décision entreprise, aux pages 25, 28 et 34 :

Page 25 :

[Le réquisitoire du ministère public] au cas où la Cour a un doute quant à l'infraction de viol, il y a lieu d'ordonner une expertise génétique du set d'agression sexuelle qui a été effectué par le docteur Paul Kayser le jour des faits.

Page 28 :

[La réplique de la défense] Il relève encore que son mandant est d'accord à ce que soit ordonnée avant tout autre progrès en cause une expertise génétique du set d'agression sexuelle qui a été effectuée sur la personne de PERSONNE1.).

Page 34 :

[La Cour - Quant aux critiques formulées par la défense à l'égard des experts judiciaires :] Il s'y ajoute que les conclusions des deux experts judiciaires quant à la personnalité de PERSONNE1.) sont corroborées par un autre élément, à savoir le certificat médical du 5 mai 2021 du docteur Béatrice Risch, qui retient : .

De troisième part dans les motifs de la décision entreprise, à la page 37 :

Page 37 :

Les infractions d'attentat à la pudeur et de viol exigent également une intention criminelle dans le chef de l'auteur. Ces infractions ne sont constituées que 42 si l'auteur a voulu l'acte de nature sexuelle, que s'il l'a perçu comme tel et qu'il a eu conscience d'aller à l'encontre de la volonté de la victime.

Les juges de première instance ont à cet égard, à juste titre, considéré que l'intention coupable dans le chef du prévenu est établie. En effet, au vu des déclarations effectuées par la victime ci-avant reproduites, cette intention ne fait pas de doute, le prévenu ayant imposé les actes incriminés, de sorte qu'il a nécessairement eu conscience d'aller à l'encontre de la volonté de PERSONNE1.).

De plus, la circonstance aggravante de l'article 377 du Code pénal a été retenue à juste titre par tes juges de première instance, le prévenu ayant été́ le médecin-psychiatre traitant de ta victime et ayant eu de ce fait autorité sur elle.

Quant à l'autre circonstance aggravante tenant à l'état de particulière vulnérabilité de la victime, circonstance qui a été libellée par te parquet, c'est à juste titre que celle-ci n'a pas été retenue par les juges de première instance à charge du prévenu.

Il s'ensuit que c'est à bon droit et pour des motifs qu'il y a lieu d'adopter, que la juridiction de première instance a retenu à charge du prévenu les infractions aux articles 372, 375 et 377, 2° du Code pénal, sauf qu'il convient conformément au réquisitoire du ministère public de remplacer l'alinéa sous l'intitulé » 1) en infraction aux articles 375 et 377 du Code pénal» en page 25 du jugement par tes termes suivants: « d'avoir commis un acte de pénétration sexuelle, de quelque nature qu'il soit et par quelque moyen que ce soit, sur une personne qui n'y consent pas, notamment à l'aide de violences, par ruse ».

De quatrième part dans le dispositif de la décision entreprise, à la page 38 :

Page 38 :

européenne des droits de l'homme et dit qu'il n'y a pas lieu à institution d'une nouvelle expertise de crédibilité sinon une expertise génétique ;

[…] dit l'appel au pénal et au civil de PERSONNE2.) non fondé ;

[…] confirme le jugement entrepris sauf à rectifier le libellé de l'article 375 du Code pénal conformément à la motivation du présent arrêt ; » B.

Exposé du moyen et griefs 1.

Première branche du moyen : Violation du principe général du droit pénal reconnu par la Cour européenne des droits de l’homme.

Attendu que le requérant reproche aux juges du fond d’avoir violé à son préjudice le droit garanti à ce que tout doute profite à l’accusé.

43 Attendu que la Cour européenne des droits de l’homme a récemment eu l’occasion de rappeler dans un arrêt BOUTAFFALA c. BELGIQUE (Requête no 20762/19) du 28 juin 2022, le caractère de principe fondamental du droit pénal du principe (Boutafala c. Belgique no 20762/19, § 81 et Navalnyy c. Russie [GC], nos 29580/12 et 4 autres, § 83, 15 novembre 2018).

Que la Cour européenne des droits de l’homme a ainsi rappelé dans cet arrêt du 28 juin 2022 :

81. La Cour a déjà considéré que lorsque sont contestés les faits essentiels à la base des chefs d’inculpation et que les seuls témoins de l’accusation sont les policiers qui ont joué un rôle actif dans les événements litigieux, il est indispensable que les tribunaux usent de toute possibilité raisonnable de vérifier les déclarations à charge faites par ces policiers, sans quoi il y aura violation des principes fondamentaux du droit pénal, en particulier du principe (Navalnyy c. Russie [GC], nos 29580/12 et 4 autres, § 83, 15 novembre 2018).

82. En l’espèce, la cour d’appel de Bruxelles a justifié son refus de mettre en doute les déclarations à charge faites par les policiers au motif qu’elles étaient confirmées par celles, convergentes et détaillées, d’autres policiers présents lors des faits mais étrangers à ceux-ci (paragraphe 30 ci-dessus).

Attendu qu’il peut être déduit de cet arrêt, mutatis mutandis, que lorsque l’accusation repose plus généralement sur les seuls témoins de l’accusation, tel qu’en l’espèce, il est indispensable que les tribunaux usent de toute possibilité raisonnable de vérifier les déclarations à charge.

Attendu que l’arrêt de la Cour européenne poursuit ainsi :

30. La cour d’appel considéra que la prévention de rébellion demeurait établie et résultait à suffisance du dossier répressif. Après avoir passé en revue l’ensemble des versions des faits et la teneur des déclarations, elle jugea qu’il n’existait aucun motif de mettre en doute les déclarations circonstanciées et détaillées des agents […] 84. La Cour relève que par contraste, la cour d’appel a relativisé la valeur probante des déclarations des quatre témoins à décharge au motif que connaissant le requérant, ils ne présentaient pas des garanties suffisantes d’indépendance (paragraphe 30 ci-dessus).

85. La Cour note à l’examen de l’arrêt de la cour d’appel de Bruxelles qu’aucun autre témoignage ni aucun autre élément de preuve obtenu dans le cadre des procédures internes ne vient conforter la version de la rébellion présentée par les policiers.

Mais attendu que le raisonnement du juge du fond est analogue en l’espèce, et que celui-ci s’est contenté de confirmer la crédibilité des déclarations du témoin, tout en rejetant tous les éléments de nature à remettre en cause lesdites déclarations.

44 Qu’il résulte de cet arrêt de la Cour européenne des droits de l’homme qu’il était indispensable que le juge du fond use de toute possibilité raisonnable de vérifier les déclarations à charge faites par ce témoin, sans quoi il y aura violation des principes fondamentaux du droit pénal, en particulier du principe (Navalnyy c. Russie [GC], nos 29580/12 et 4 autres, § 83, 15 novembre 2018).

Que tel n’a cependant pas été le cas en l’espèce, et que non seulement le juge du fond n’a pas utilisé toutes les possibilités raisonnables à sa disposition pour vérifier les déclarations à charge du témoin / partie civile, mais que tout au contraire, le juge a rejeté de manière systématique, expressément ou implicitement, tous les éléments du dossiers, nombreux en l’occurrence, qui auraient été de nature à remettre en cause les déclarations du témoin / partie civile. Et surtout sans qu’il ne ressorte de la décision entreprise que chacun de ces éléments écartés a été dûment analysé par le juge du fond.

Attendu que le demandeur en cassation fait grief aux juges du fond d’avoir refusé de rechercher les éléments à décharge, ou de les avoir indûment écartés lorsque ceux-ci lui étaient présentés.

Voir en ce sens :

Page 34 :

[La Cour - Quant aux critiques formulées par la défense à l'égard des experts judiciaires :] Il s'ensuit qu'il n'y a pas lieu de faire droit à la demande de nomination d'un nouvel expert respectivement d'une institution d'une expertise génétique et que c'est à bon droit que les juges de première instance ont tenu compte, entre autres éléments, des rapports de crédibilité des deux experts judiciaires.

Que les autres éléments à décharge écartés, rejetés ou non pris en compte par le juge du fond se présentent comme suit :

 Le rapport du professeur MORMONT versé par la défense du prévenu qui apporte des éléments critiques relatifs à la méthodologie des deux experts ayant conclu à la crédibilité du témoin / victime  Le témoignage sous serment du professeur MORMONT qui vient à la barre confirmer son rapport d’analyse technique relatifs à la méthodologie des deux experts ayant conclu à la crédibilité du témoin / victime  La version initiale en langue allemande du Procès-verbal de Police qui met en évidence des contradictions dans les déclarations du témoin / partie civile  L’expertise médicolégale (set agression sexuelle) du Dr Paul KAYSER, (Page 3 : Le docteur Paul KAYSER ayant réalisé l'examen, a remarqué qu'une pénétration digitale du vagin ne serait guère décelable).

 Le rapport d’expertise mentale du Dr. Edmond REYNAUD (confirmé dans son analyse par le Dr GLEIS) qui fait état chez le prévenu d’un profile psychique normal 45  Le témoignage du Dr GLEIS qui conclue à l’absence de contrôle sur le patient après seulement quelques séances  La demande d’expertise génétique formulée par le Parquet général et à laquelle la défense a donné son accord  Le témoignage de l'épouse du docteur PERSONNE2.) , PERSONNE3.), également appelée par la défense comme témoin, a déclaré que dès la première séance avec PERSONNE1.), PERSONNE2.) lui aurait fait part de son attirance qu'il avait envers cette dernière et de son inconfort qui en résulterait  L’absence d’antécédent judiciaire du prévenu  L’absence de mobile chez un prévenu sans aucun antécédent, conscient des risques pour sa carrière et capable de discerner les signes d’un état de syndrome chez un patient.

Attendu à contrario, que le juge du fond a retenu uniquement les éléments à charge, à savoir les deux rapports d’expertises, nonobstant les critiques formulées à leur encontre par la défense du prévenu, ainsi que le certificat médical du Dr RISCH versé par la partie civile Voir ainsi :

Page 34 :

[La Cour - Quant aux critiques formulées par la défense à l'égard des experts judiciaires :] Il s'y ajoute que les conclusions des deux experts judiciaires quant à la personnalité de PERSONNE1.) sont corroborées par un autre élément, à savoir le certificat médical du 5 mai 2021 du docteur Béatrice Risch, qui retient : .

Attendu que le demandeur en cassation fait encore grief aux juges du fond d’avoir violé le droit de la défense de présenter des éléments de preuve.

Voir en ce sens :

Page 8 :

Concernant le rapport du professeur Christian MORMONT versé par la défense pour mettre en doute les rapports d'expertise des experts judiciaires, le Tribunal est d'avis que cet écrit manque d'objectivité et d'impartialité.

Page 9 :

Tout au long de son analyse, le professeur Christian MORMONT. chargé unilatéralement par la défense, émet des prises de positions partisanes, de sorte que le Tribunal a des doutes sur l'objectivité et l'impartialité de son écrit et de ses déclarations à l'audience, lors de laquelle il a été entendu, ce qui est important de rappeler, comme simple témoin.

46 Page 31 :

En l'occurrence, la Cour d'appel constate, à l'instar du tribunal, qu'il peut être déduit des commentaires faites par le professeur Christian Mormont que ce dernier a systématiquement favorisé la situation du prévenu en analysant les déclarations effectuées par PERSONNE1.) devant la police, de sorte que le constat relatif au manque d'objectivité et d'impartialité dudit expert est patent.

[…] Il n'y a donc pas eu impartialité de la part du tribunal en ce qu'il a décidé de ne pas prendre en considération le rapport du professeur Christian Mormont qui lui a été soumis.

Pour ce qui concerne le deuxième rapport du professeur Christian Mormont il est un fait que celui-ci contient également des passages qui manquent d'objectivité et d'impartialité.

[…] Les développements précédents amènent la Cour d'appel à la conclusion que le premier rapport et le deuxième rapport du professeur Christian Mormont manquent d'objectivité et ne sont pas de nature à tenir en échec la crédibilité des déclarations de PERSONNE1.).

Page 34 :

[La Cour - Quant aux critiques formulées par la défense à l'égard des experts judiciaires :] Il s'ensuit qu'il n'y a pas lieu de faire droit à la demande de nomination d'un nouvel expert respectivement d'une institution d'une expertise génétique et que c'est à bon droit que les juges de première instance ont tenu compte, entre autres éléments, des rapports de crédibilité des deux experts judiciaires.

Qu’il résulte de l’ensemble de ces considérations, que le juge du fond n’a pas utilisé toutes les possibilités raisonnables à sa disposition pour vérifier les déclarations à charge du témoin / partie civile.

Que le principe fondamental du droit pénal selon lequel le doute doit profiter à l’accusé a dès lors été violé et que l’arrêt entrepris encourt dès lors la cassation.

2. Seconde branche du moyen : Violation du droit garanti par l’article 6§2 de la Directive (UE) 2016/343 du Parlement Européen et du Conseil du 9 mars 2016 portant renforcement de certains aspects de la présomption d'innocence, à ce que tout doute profite à l’accusé.

Attendu que le demandeur en cassation fait grief aux juges du fond, d’avoir violé le droit garanti par l’article 6§2 de la Directive (UE) 2016/343 du Parlement Européen et du Conseil du 9 mars 2016 portant renforcement de certains aspects de la présomption d'innocence, à ce que tout doute profite à l’accusé.

47 Attendu que les développements de la première branche sont repris ici en ce qui concerne l’analyse de la décision entreprise.

Qu’ainsi, le demandeur au pourvoi fait grief aux juges du fond d’avoir, raisonné en l’espèce en se contentant de confirmer la crédibilité des déclarations du témoin, tout en rejetant tous les éléments de nature à remettre en cause lesdites déclarations.

Qu’il était indispensable que le juge du fond use de toute possibilité raisonnable de vérifier les déclarations à charge faites par ce témoin, sans quoi il y aura violation des principes fondamentaux du droit pénal, en particulier du principe (Navalnyy c. Russie [GC], nos 29580/12 et 4 autres, § 83, 15 novembre 2018).

Que tel n’a cependant pas été le cas en l’espèce, et que non seulement le juge du fond n’a pas utilisé toutes les possibilités raisonnables à sa disposition pour vérifier les déclarations à charge du témoin / partie civile, mais que tout au contraire, le juge a rejeté de manière systématique, expressément ou implicitement, tous les éléments du dossiers, nombreux en l’occurrence, qui auraient été de nature à remettre en cause les déclarations du témoin / partie civile. Et surtout sans qu’il ne ressorte de la décision entreprise que chacun de ces éléments écartés a été dûment analysé par le juge du fond.

Attendu que le demandeur en cassation fait grief aux juges du fond d’avoir refusé de rechercher les éléments à décharge, ou de les avoir indûment écartés lorsque ceux-ci lui étaient présentés.

Voir en ce sens :

Page 34 :

[La Cour - Quant aux critiques formulées par la défense à l'égard des experts judiciaires :] Il s'ensuit qu'il n'y a pas lieu de faire droit à la demande de nomination d'un nouvel expert respectivement d'une institution d'une expertise génétique et que c'est à bon droit que les juges de première instance ont tenu compte, entre autres éléments, des rapports de crédibilité des deux experts judiciaires.

Que les autres éléments à décharge écartés, rejetés ou non pris en compte par le juge du fond se présentent comme suit :

 Le rapport du professeur MORMONT versé par la défense du prévenu qui apporte des éléments critiques relatifs à la méthodologie des deux experts ayant conclu à la crédibilité du témoin / victime  Le témoignage sous serment du professeur MORMONT qui vient à la barre confirmer son rapport d’analyse technique relatifs à la méthodologie des deux experts ayant conclu à la crédibilité du témoin / victime 48  La version initiale en langue allemande du Procès-verbal de Police qui met en évidence des contradictions dans les déclarations du témoin / partie civile  L’expertise médicolégale (set agression sexuelle) du Dr Paul KAYSER, (Page 3 : Le docteur Paul KAYSER ayant réalisé l'examen, a remarqué qu'une pénétration digitale du vagin ne serait guère décelable).

 Le rapport d’expertise mentale du Dr. Edmond REYNAUD (confirmé dans son analyse par le Dr GLEIS) qui fait état chez le prévenu d’un profile psychique normal  Le témoignage du Dr GLEIS qui conclue à l’absence de contrôle sur le patient après seulement quelques séances  La demande d’expertise génétique formulée par le Parquet général et à laquelle la défense a donné son accord  Le témoignage de l'épouse du docteur PERSONNE2.) , PERSONNE3.), également appelée par la défense comme témoin, a déclaré que dès la première séance avec PERSONNE1.), PERSONNE2.) lui aurait fait part de son attirance qu'il avait envers cette dernière et de son inconfort qui en résulterait  L’absence d’antécédent judiciaire du prévenu  L’absence de mobile chez un prévenu sans aucun antécédent, conscient des risques pour sa carrière et capable de discerner les signes d’un état de syndrome chez un patient.

Attendu à contrario, que le juge du fond a retenu uniquement les éléments à charge, à savoir les deux rapports d’expertises, nonobstant les critiques formulées à leur encontre par la défense du prévenu, ainsi que le certificat médical du Dr RISCH versé par la partie civile Voir ainsi :

Page 34 :

[La Cour - Quant aux critiques formulées par la défense à l'égard des experts judiciaires :] Il s'y ajoute que les conclusions des deux experts judiciaires quant à la personnalité de PERSONNE1.) sont corroborées par un autre élément, à savoir le certificat médical du 5 mai 2021 du docteur Béatrice Risch, qui retient : .

Attendu que le demandeur en cassation fait encore grief aux juges du fond d’avoir violé le droit de la défense de présenter des éléments de preuve.

Voir en ce sens :

Page 8 :

Concernant le rapport du professeur Christian MORMONT versé par la défense pour mettre en doute les rapports d'expertise des experts judiciaires, le Tribunal est d'avis que cet écrit manque d'objectivité et d'impartialité.

49 Page 9 :

Tout au long de son analyse, le professeur Christian MORMONT. chargé unilatéralement par la défense, émet des prises de positions partisanes, de sorte que le Tribunal a des doutes sur l'objectivité et l'impartialité de son écrit et de ses déclarations à l'audience, lors de laquelle il a été entendu, ce qui est important de rappeler, comme simple témoin.

Page 31 :

En l'occurrence, la Cour d'appel constate, à l'instar du tribunal, qu'il peut être déduit des commentaires faites par le professeur Christian Mormont que ce dernier a systématiquement favorisé la situation du prévenu en analysant les déclarations effectuées par PERSONNE1.) devant la police, de sorte que le constat relatif au manque d'objectivité et d'impartialité dudit expert est patent.

[…] Il n'y a donc pas eu impartialité de la part du tribunal en ce qu'il a décidé de ne pas prendre en considération le rapport du professeur Christian Mormont qui lui a été soumis.

Pour ce qui concerne le deuxième rapport du professeur Christian Mormont il est un fait que celui-ci contient également des passages qui manquent d'objectivité et d'impartialité.

[…] Les développements précédents amènent la Cour d'appel à la conclusion que le premier rapport et le deuxième rapport du professeur Christian Mormont manquent d'objectivité et ne sont pas de nature à tenir en échec la crédibilité des déclarations de PERSONNE1.).

Page 34 :

[La Cour - Quant aux critiques formulées par la défense à l'égard des experts judiciaires :] Il s'ensuit qu'il n'y a pas lieu de faire droit à la demande de nomination d'un nouvel expert respectivement d'une institution d'une expertise génétique et que c'est à bon droit que les juges de première instance ont tenu compte, entre autres éléments, des rapports de crédibilité des deux experts judiciaires.

Qu’il résulte de l’ensemble de ces considérations, que le juge du fond n’a pas utilisé toutes les possibilités raisonnables à sa disposition pour vérifier les déclarations à charge du témoin / partie civile.

Que le droit garanti par l’article 6§2 de la Directive (UE) 2016/343 du Parlement Européen et du Conseil du 9 mars 2016 portant renforcement de certains aspects de la présomption d'innocence, à ce que tout doute profite à l’accusé à partant été violé et que l’arrêt entrepris encourt dès lors la cassation.

50 Mais attendu que le demandeur au pourvoi fait encore valoir que les droits garantis par l’article 6§2 de la Directive (UE) 2016/343, ne figurent pas dans le texte de la loi luxembourgeoise du 10 août 2018 portant transposition de ladite directive.

Que faute de disposer d’une disposition de droit national, le prévenu fait valoir qu’il a été privé de base légale en droit national sur laquelle fonder ses griefs.

Que cependant, la directive étant supposée avoir été transposée par la loi du 10 août 2018, il y a une difficulté d’interprétation tenant à savoir si l’article 6§2 a effectivement été ou n’a pas été transposé en droit national.

C.

Demande de question préjudicielle à la Cour de justice de l’Union européenne portant sur l’interprétation de la Directive (UE) 2016/343 du Parlement Européen et du Conseil du 9 mars 2016 portant renforcement de certains aspects de la présomption d'innocence et du droit d'assister à son procès dans le cadre des procédures pénales Attendu que le demandeur en cassation entend encore soumettre à Votre Cour une demande de renvoi préjudiciel tel qu’exposé ci-dessous.

1.

Recevabilité de la question préjudicielle Attendu que, dans le respect de l’arrêt N° 05/2019 pénal. du 10 janvier 2019, Not. 34618/14/CD et 11043/15/CD, Numéro 4061 du registre précité, le demandeur en cassation soumet à Votre Cour une demande tendant à voir posée la question préjudicielle suivante dans le cadre du moyen de cassation ci-dessus développé, tenant à la violation de l’obligation pour l’Etat de veiller à ce que l’accusation supporte la charge de la preuve, violation de l’obligation incombant aux juges de rechercher les éléments à décharge, violation du droit de la défense de présenter des éléments de preuve.

2.

Compétence de la Cour de justice de l’Union Attendu que le demandeur en cassation renvoie à ses développements sous le Deuxième moyen, sous le point E. 2. Compétence de la Cour de justice de l’Union, qu’il convient de reprendre intégralement ici.

Attendu que, par conséquent, y a lieu de constater que la Cour de justice de l’Union, respectivement le Tribunal de l’Union sont compétents pour connaître de la question préjudicielle posée.

3.

La question préjudicielle posée a.

Base légale de la demande de question préjudicielle 51 Attendu que le demandeur en cassation renvoie à ses développements sous le Deuxième moyen, sous le point E. 3. 1. Base légale de la demande de question préjudicielle, qu’il convient de reprendre intégralement ici.

Attendu que la Cour de cassation doit, au vœu de l’article 267 b) du TFUE, saisir le Tribunal sinon la Cour de justice de l’Union de la question préjudicielle lui soumise.

b.

La demande de question préjudicielle Attendu que le demandeur en cassation soumet à Votre Cour la question préjudicielle suivante :

du Conseil du 9 mars 2016 portant renforcement de certains aspects de la présomption d'innocence, doit-il s’interpréter en ce sens qu’il s’oppose à une législation nationale telle que la loi du 10 août 2018 prise en ses articles Ier, II, III et IV, qui transpose la directive (UE) 2016/343 du Parlement européen et du Conseil du 9 mars 2016 portant renforcement de certains aspects de la présomption d’innocence et du droit d’assister à son procès dans le cadre des procédures pénales, alors que ne figure dans cette loi aucune définition de l’obligation pour l’Etat de veiller à ce que tout doute profite à l’accusé, et qu’il ne figure dans cette loi aucune mention de ce droit ? » Que le demandeur en cassation demande encore à Votre Cour de surseoir à statuer en attendant la décision de la Cour de justice de l’Union européenne. ».

Réponse de la Cour Le demandeur en cassation fait grief aux juges d’appel d’avoir violé le principe de la présomption d’innocence consacré par l’article 6, alinéas 1 et 2, de la Directive par le fait de s’être basés sur les seules déclarations de la défenderesse en cassation pour constater la réunion des éléments constitutifs des infractions retenues à sa charge et écarté les éléments de preuve par lui présentés.

Au vu de la réponse donnée au deuxième moyen, les moyens ne sont pas fondés.

Le demandeur en cassation entend, à titre subsidiaire, voir soumettre à la Cour de justice de l’Union européenne les questions préjudicielles suivantes :

« L’article 6§1 de la Directive (UE) 2016/343 du Parlement Européen et du Conseil du 9 mars 2016 portant renforcement de certains aspects de la présomption d'innocence, doit-il s’interpréter en ce sens qu’il s’oppose à une législation nationale telle que la loi du 10 août 2018 prise en ses articles Ier, II, III et IV, qui transpose la directive (UE) 2016/343 du Parlement européen et du Conseil du 9 mars 2016 portant renforcement de certains aspects de la présomption d’innocence et du droit d’assister à son procès dans le cadre des procédures pénales, alors que ne figure dans cette loi aucune définition de l’obligation pour l’Etat de veiller à ce que 52 l’accusation supporte la charge de la preuve, aucune définition de l’obligation incombant au juge de rechercher les éléments à décharge, ni aucune définition du droit de la défense de présenter des éléments de preuve, et qu’il ne figure dans cette loi aucune mention de ces trois notions ? » et « L’article 6§2 de la Directive (UE) 2016/343 du Parlement Européen et du Conseil du 9 mars 2016 portant renforcement de certains aspects de la présomption d'innocence, doit-il s’interpréter en ce sens qu’il s’oppose à une législation nationale telle que la loi du 10 août 2018 prise en ses articles Ier, II, III et IV, qui transpose la directive (UE) 2016/343 du Parlement européen et du Conseil du 9 mars 2016 portant renforcement de certains aspects de la présomption d’innocence et du droit d’assister à son procès dans le cadre des procédures pénales, alors que ne figure dans cette loi aucune définition de l’obligation pour l’Etat de veiller à ce que tout doute profite à l’accusé, et qu’il ne figure dans cette loi aucune mention de ce droit ? ».

Au vu de la réponse donnée à la seconde branche du deuxième moyen, la question préjudicielle n’est pas pertinente.

Il n’y a pas lieu de la poser.

Sur le cinquième moyen de cassation Enoncé du moyen « Violation du droit à bénéficier d’un procès équitable - Article 6§1 de la Convention européenne des droits de l’homme A.

Dispositions critiquées de l’arrêt de la Cour d’appel Attendu que les dispositions critiquées de l’arrêt de la Cour d’appel figurent :

D’une part dans les motifs de la décision entreprise, aux pages 9 et 10 :

Page 9 :

Ad 1) L'élément matériel consistant dans un acte de pénétration sexuelle PERSONNE1.) a déclaré lors de ses auditions policières et devant le juge d'instruction que le prévenu l'avait pénétrée digitalement dans son vagin, déclarations qu'elle a réitérées sous la fol du serment à l'audience.

Etant donné que le Tribunal a, dans ses développements antérieurs, accordé crédit aux déclarations de PERSONNE1.), il y a lieu de retenir que l'élément matériel du viol est établi.

53 ad 2) L'absence de consentement de la victime Page 10 :

En l'espèce, le Tribunal rappelle qu'il résulte des déclarations de PERSONNE1.) qu'elle n'avait pas consenti quant à l'acte sexuel perpétré sur sa personne par le prévenu, qu'il l'a tenue par les cheveux pour la tirer vers l'arrière, et qu'il a profité de ce moment de déséquilibre pour glisser sa main sous son pantalon stretch qu'elle portait et introduire un doigt dans son vagin.

Le Tribunal retient que les agissements consistant à prendre une personne par les cheveux pour la tirer vers l'arrière, constituent des violences au sens de l'article 483 du code pénal.

De ce fait, PERSONNE1.) se trouvait hors d'état d'opposer de la résistance, de sorte qu'il y a manifestement eu absence de consentement.

Ensuite il y a encore lieu de rappeler que PERSONNE1.) a indiqué avoir été totalement surprise par l'acte sexuel commis par PERSONNE2.) sur sa personne, la laissant ainsi totalement bloquée par la surprise.

Il y a partant lieu de retenir que l'acte de pénétration sexuelle a également été commis par ruse, qui fait partie des moyens cités par l'article 375 du code pénal impliquant nécessairement une absence de consentement.

Ad 3) L'intention criminelle […] En l'espèce, l'intention criminelle ne fait pas de doute dans le chef du prévenu au regard des violences qu'il a employées tel que développé précédemment . Ce même raisonnement s'applique quant à la ruse, alors qu'en surprenant PERSONNE1.), PERSONNE2.) devait être conscient du fait qu'il imposait à cette dernière un rapport sexuel contre son gré.

Page 10 :

Ensuite il y a encore lieu de rappeler que PERSONNE1.) a indiqué avoir été totalement surprise par l'acte sexuel commis par PERSONNE2.) sur sa personne, la laissant ainsi totalement bloquée par la surprise.

[…] Au vu des développements qui précèdent, l'absence de consentement dans le chef de PERSONNE1.) est suffisamment établie.

Page 10 :

Par conséquent le prévenu était parfaitement conscient du fait qu'elle avait du mal à manifester son refus, de sorte qu'il savait pertinemment que PERSONNE1.), qui s'est opposée à ses agissements, même si ce n'est pas avec la plus grande véhémence, n'était pas consentante.

L'intention criminelle est partant établie dans le chef du prévenu.

54 D’autre part dans les motifs de la décision entreprise, aux pages 25, 28 et 34 :

Page 25 :

[Le réquisitoire du ministère public] au cas où la Cour a un doute quant à l'infraction de viol, il y a lieu d'ordonner une expertise génétique du set d'agression sexuelle qui a été effectué par le docteur Paul Kayser le jour des faits.

Page 28 :

[La réplique de la défense] Il relève encore que son mandant est d'accord à ce que soit ordonnée avant tout autre progrès en cause une expertise génétique du set d'agression sexuelle qui a été effectuée sur la personne de PERSONNE1.).

Page 34 :

[La Cour - Quant aux critiques formulées par la défense à l'égard des experts judiciaires :] Il s'y ajoute que les conclusions des deux experts judiciaires quant à la personnalité de PERSONNE1.) sont corroborées par un autre élément, à savoir le certificat médical du 5 mai 2021 du docteur Béatrice Risch, qui retient : .

De troisième part dans les motifs de la décision entreprise, à la page 37 :

Page 37 :

Les infractions d'attentat à la pudeur et de viol exigent également une intention criminelle dans le chef de l'auteur. Ces infractions ne sont constituées que si l'auteur a voulu l'acte de nature sexuelle, que s'il l'a perçu comme tel et qu'il a eu conscience d'aller à l'encontre de la volonté de la victime.

Les juges de première instance ont à cet égard, à juste titre, considéré que l'intention coupable dans le chef du prévenu est établie. En effet, au vu des déclarations effectuées par la victime ci-avant reproduites, cette intention ne fait pas de doute, le prévenu ayant imposé les actes incriminés, de sorte qu'il a nécessairement eu conscience d'aller à l'encontre de la volonté de PERSONNE1.).

De plus, la circonstance aggravante de l'article 377 du Code pénal a été retenue à juste titre par tes juges de première instance, le prévenu ayant été́ le médecin-psychiatre traitant de ta victime et ayant eu de ce fait autorité sur elle.

Quant à l'autre circonstance aggravante tenant à l'état de particulière vulnérabilité de la victime, circonstance qui a été libellée par te parquet, c'est à juste titre que celle-ci n'a pas été retenue par les juges de première instance à charge du prévenu.

Il s'ensuit que c'est à bon droit et pour des motifs qu'il y a lieu d'adopter, que la juridiction de première instance a retenu à charge du prévenu les infractions aux 55 articles 372, 375 et 377, 2° du Code pénal, sauf qu'il convient conformément au réquisitoire du ministère public de remplacer l'alinéa sous l'intitulé« 1) en infraction aux articles 375 et 377 du Code pénal» en page 25 du jugement par tes termes suivants: « d'avoir commis un acte de pénétration sexuelle, de quelque nature qu'il soit et par quelque moyen que ce soit, sur une personne qui n'y consent pas, notamment à l'aide de violences, par ruse ».

De quatrième part dans le dispositif de la décision entreprise, à la page 38 :

Page 38 :

européenne des droits de l'homme et dit qu'il n'y a pas lieu à institution d'une nouvelle expertise de crédibilité sinon une expertise génétique ;

[…] dit l'appel au pénal et au civil d'PERSONNE2.) non fondé ;

[…] confirme le jugement entrepris sauf à rectifier le libellé de l'article 375 du Code pénal conformément à la motivation du présent arrêt ; » B.

Exposé du moyen et griefs Attendu que le demandeur en cassation fait grief aux juges du fond, en violation de l’article 6§1 de la Convention européenne des droits de l’homme, de l’avoir privé d’un procès équitable, au sens de la Convention, dans la mesure où la procédure considérée dans son ensemble, n’a pas revêtu un caractère équitable.

1.

Première branche du moyen : Violation du droit à un procès équitable tenant au non respect du principe de l’égalité des armes Attendu que le demandeur en cassation soulève le grief tenant au non respect du principe de l’égalité des armes.

Que le requérant fait ainsi valoir que les pièces et témoins de la défense ont été écartés ou rejetés, et notamment les deux rapports du professeur MORMONT ainsi que sa déposition à l’audience sous la foi du serment, alors que de l’autre coté, les rapports à charge et le certificat médical versé par la partie civile sont admis sans examen critique.

Page 25 :

[Le réquisitoire du ministère public] à ce sujet il renvoie à une pièce versée par le mandataire de PERSONNE1.) selon laquelle l'actuel psychiatre, le docteur Béatrice Risch, confirme que celle-ci a une personnalité fragile, personnalité qui fait que PERSONNE1.) est une victime idéale ;

56 Page 34 :

[La Cour - Quant aux critiques formulées par la défense à l'égard des experts judiciaires :] Il s'y ajoute que les conclusions des deux experts judiciaires quant à la personnalité de PERSONNE1.) sont corroborées par un autre élément, à savoir le certificat médical du 5 mai 2021 du docteur Béatrice Risch, qui retient : .

Il s'ensuit qu'il n'y a pas lieu de faire droit à la demande de nomination d'un nouvel expert respectivement d'une institution d'une expertise génétique et que c'est à bon droit que les juges de première instance ont tenu compte, entre autres éléments, des rapports de crédibilité des deux experts judiciaires.

2.

Seconde branche du moyen : Violation du procès équitable tenant à l’examen des preuves soumises aux juges du fond Attendu que le demandeur au pourvoi fait grief aux juges du fond d’avoir fondé leur décision exclusivement sur les déclarations du témoin dont ils ont tiré la preuve de l’intégralité des éléments constitutifs des infractions libellées à charge du prévenu, y compris les éléments constitutifs matériels.

Attendu ainsi que les trois éléments constitutifs du viol sont établis par les juges en se basant exclusivement sur les déclarations du témoin / partie civile.

Que l’acte matériel de pénétration est établi sur base des seules déclarations du témoin, a défaut de tout autre élément matériel.

Page 9 :

Ad 1) L'élément matériel consistant dans un acte de pénétration sexuelle PERSONNE1.) a déclaré lors de ses auditions policières et devant le juge d'instruction que le prévenu l'avait pénétrée digitalement dans son vagin, déclarations qu'elle a réitérées sous la fol du serment à l'audience.

Etant donné que le Tribunal a, dans ses développements antérieurs, accordé crédit aux déclarations de PERSONNE1.), il y a lieu de retenir que l'élément matériel du viol est établi.

A contrario, en présence des contestations formelles du prévenu, les juges ne prennent pas en considération le résultat de l’analyse médico-légale dont il ressort qu’aucune trace de pénétration digitale n’est décelable, et plus encore, les juges refusent de faire droit à une demande d’expertise génétique proposée par le ministère public.

57 Page 3 :

Le docteur Paul KAYSER ayant réalisé l'examen, a remarqué qu'une pénétration digitale du vagin ne serait guère décelable.

Page 38 :

dit non fondés les moyens tirés de la violation de la Convention européenne des droits de l'homme et dit qu'il n'y a pas lieu à institution d'une nouvelle expertise de crédibilité sinon une expertise génétique ;

Attendu de même, l’absence de consentement est établi sur base des déclarations du témoin.

Que quant à l’intention coupable dans le chef du prévenu, celle-ci est admise par les juges du fond, par déduction de l’existence dans le chef du prévenu des circonstances aggravantes de la ruse et de la violence, circonstances qui sont elle-

même établies au vu des seules déclarations du témoin / partie civile.

Page 10 :

En l'espèce, le Tribunal rappelle qu'il résulte des déclarations de PERSONNE1.) qu'elle n'avait pas consenti quant à l'acte sexuel perpétré sur sa personne par le prévenu, qu'il l'a tenue par les cheveux pour la tirer vers l'arrière, et qu'il a profité de ce moment de déséquilibre pour glisser sa main sous son pantalon stretch qu'elle portait et introduire un doigt dans son vagin.

Le Tribunal retient que les agissements consistant à prendre une personne par les cheveux pour la tirer vers l'arrière, constituent des violences au sens de l'article 483 du code pénal.

De ce fait, PERSONNE1.) se trouvait hors d'état d'opposer de la résistance, de sorte qu'il y a manifestement eu absence de consentement.

Ensuite il y a encore lieu de rappeler que PERSONNE1.) a indiqué avoir été totalement surprise par l'acte sexuel commis par PERSONNE2.) sur sa personne, la laissant ainsi totalement bloquée par la surprise.

Il y a partant lieu de retenir que l'acte de pénétration sexuelle a également été commis par ruse, qui fait partie des moyens cités par l'article 375 du code pénal impliquant nécessairement une absence de consentement.

Page 37 :

Les infractions d'attentat à la pudeur et de viol exigent également une intention criminelle dans le chef de l'auteur. Ces infractions ne sont constituées que si l'auteur a voulu l'acte de nature sexuelle, que s'il l'a perçu comme tel et qu'il a eu conscience d'aller à l'encontre de la volonté de la victime.

58 Les juges de première instance ont à cet égard, à juste titre, considéré que l'intention coupable dans le chef du prévenu est établie. En effet, au vu des déclarations effectuées par la victime ci-avant reproduites, cette intention ne fait pas de doute, le prévenu ayant imposé les actes incriminés, de sorte qu'il a nécessairement eu conscience d'aller à l'encontre de ta volonté de PERSONNE1.).

Que les juges qualifient enfin l’abus d’autorité, en ne prenant pas en compte les expertises pourtant concordantes du Docteur Edmond REYNAUD et du Docteur Marc GLEIS.

Page 5 :

Sur le plan de sa personnalité le, docteur Edmond REYNAUD n'a pas relevé́ chez le prévenu de traits de caractéropathie ni a fortiori de psychopathie, pas plus que d'indices de perversion au plan sexuel, ni d'antécédents dans ce domaine spécifique.

Les conclusions du docteur Edmond REYNAUD ont été́ confirmées par le co-

expert le docteur Marc GLEIS dans son rapport du 4mars 2020.

Page 5 :

Le docteur Marc GLEIS a réitéré les conclusions consignées dans son rapport d'expertise. Sur question du Tribunal, il a précisé que les pouvoirs des psychiatres seraient souvent surestimés et qu'après quelques séances de consultation. il serait peu probable que le patient serait sous l'emprise totale du psychiatre.

Attendu que le tribunal qualifie néanmoins l’abus d’autorité, en se fondant sur les déclarations du témoin / partie civile.

Page 10 :

I.

Quant à l’abus d’autorité – Etat de dépendance Etat de dépendance ? En l'espèce il y a lieu de rappeler que PERSONNE1.) a déclaré qu'elle ne savait pas comment réagir dans la mesure où son agresseur était en même temps son psychiatre, censé l'accompagner dans sa thérapie. A plusieurs reprises elle a indiqué au Tribunal que l'un de ses majeurs soucis au moment des faits, était la fin inévitable de sa thérapie suite su dérapage du docteur PERSONNE2.), de sorte qu'il y a lieu de constater que PERSONNE1.) se trouvait, même après que trois séances, déjà dans un certain état de dépendance par rapport à son psychiatre.

Page 11 :

Ceci est d'ailleurs confirmé par les conclusions de l'expert judiciaire Deborah EGAN-KLEIN, qui note dans son rapport (page 5 alinéa 3) que 59 devant le Dr. PERSONNE2.) qu'elle idéalisait, dont elle écoutait les conseils et dont elle était sûre qu'il pouvait lui être un grand secours tout comme c'était le cas avec le psychiatre qu'elle a fréquenté dans sa jeunesse. Les psychiatres/psychothérapeutes sont des figures d'autorité puissants aux yeux de leurs patients. N'oublions pas non plus que son père, autre figure d'autorité, était également médecin. » Attendu que le demandeur au pourvoi fait encore valoir le grief tiré du rejet péremptoire sans examen, de tous les éléments à décharge, que ce rejet soit exprès ou implicite.

Attendu que les deux rapports et le témoignage du professeur MORMONT.

font l’objet d’un rejet exprès :

Page 8 :

Concernant le rapport du professeur Christian MORMONT versé par la défense pour mettre en doute les rapports d'expertise des experts judiciaires, le Tribunal est d'avis que cet écrit manque d'objectivité et d'impartialité.

Page 9 :

Tout au long de son analyse, le professeur Christian MORMONT. chargé unilatéralement par la défense, émet des prises de positions partisanes, de sorte que le Tribunal a des doutes sur l'objectivité et l'impartialité de son écrit et de ses déclarations à l'audience, lors de laquelle il a été entendu, ce qui est important de rappeler, comme simple témoin.

Page 31 :

En l'occurrence, la Cour d'appel constate, à l'instar du tribunal, qu'il peut être déduit des commentaires faites par le professeur Christian Mormont que ce dernier a systématiquement favorisé la situation du prévenu en analysant les déclarations effectuées par PERSONNE1.) devant la police, de sorte que le constat relatif au manque d'objectivité et d'impartialité dudit expert est patent.

[…] Il n'y a donc pas eu impartialité de la part du tribunal en ce qu'il a décidé de ne pas prendre en considération le rapport du professeur Christian Mormont qui lui a été soumis.

Pour ce qui concerne le deuxième rapport du professeur Christian Mormont il est un fait que celui-ci contient également des passages qui manquent d'objectivité et d'impartialité.

[…] Les développements précédents amènent la Cour d'appel à la conclusion que le premier rapport et le deuxième rapport du professeur Christian Mormont manquent d'objectivité et ne sont pas de nature à tenir en échec la crédibilité des déclarations de PERSONNE1.).

60 Qu’est encore expressément rejetée la version initiale en langue allemande du Procès-verbal de Police :

Page 27 :

[La réplique de la défense] Il faudrait également noter que la police aurait posé les bonnes questions, mais qu'elle n'aurait pas relaté que son mandant l'aurait violemment pris par les cheveux.

Page 34 :

[La Cour] Quant au fond Les juges de première instance ont fourni un descriptif correct et détaillé des faits auquel il convient de se référer. Il y a uniquement lieu de préciser que le résumé effectué par la police en langue allemande des déclarations de PERSONNE1.) ne sera pas pris en considération étant donné qu'il existe une transcription en langue française des déclarations effectuées par cette dernière le 8 avril 2019 lors d'une audition par vidéo.

Qu’est encore expressément rejetée la demande tendant à voir ordonner une nouvelle expertise de crédibilité :

Page 21 :

[Les conclusions de la défense] En guise de conclusion, le mandataire conclut à l'acquittement de son mandant. Subsidiairement, il y aurait lieu avant tout autre progrès en cause d'ordonner une nouvelle expertise.

Qu’est enfin expressément rejetée la demande tendant à la réalisation d’une expertise génétique :

Page 25 :

[Le réquisitoire du ministère public] au cas où la Cour a un doute quant à l'infraction de viol, il y a lieu d'ordonner une expertise génétique du set d'agression sexuelle qui a été effectué par le docteur Paul Kayser le jour des faits.

Page 28 :

[La réplique de la défense] Il relève encore que son mandant est d'accord à ce que soit ordonnée avant tout autre progrès en cause une expertise génétique du set d'agression sexuelle qui a été effectuée sur la personne de PERSONNE1.).

Page 38 :

dit non fondés les moyens tirés de la violation de la Convention européenne des droits de l'homme et dit qu'il n'y a pas lieu à institution d'une nouvelle expertise de crédibilité sinon une expertise génétique ;

Que sont en revanche tacitement, mais implicitement rejetés les éléments suivants :

 L’expertise médicolégale (set agression sexuelle) concluant à l’absence de pénétration digitale (Page 3 : Le docteur Paul KAYSER ayant réalisé 61 l'examen, a remarqué qu'une pénétration digitale du vagin ne serait guère décelable).

 L’expertise du Docteur Edmond REYNAUD (confirmée par le Docteur Marc GLEIS) : Profile psychique normal.

 L’absence d’antécédents judiciaires du prévenu.

 Les conclusions du Docteur GLEIS tendant à l’absence de contrôle par le psychiatre sur un patient après seulement quelques séances.

 Le témoignage de l'épouse du docteur PERSONNE2.), PERSONNE3.), également appelée par la défense comme témoin, a déclaré que dès la première séance avec PERSONNE1.), PERSONNE2.) lui aurait fait part de son attirance qu'il avait envers cette dernière et de son inconfort qui en résulterait.

 Les déclarations de l’accusé.

Que les juges du fond font encore abstraction de toutes les contradictions relevées dans le dossier, contradictions pourtant susceptibles de fonder un doute sur la culpabilité du prévenu :

1) Selon l’expert EGAN KLEIN, la constance dans les déclarations sont un signe de crédibilité.

Alors que :

Selon l’Enquêteur, les petites variations dans les déclarations sont un signe de crédibilité.

Page 5 :

Dans son rapport du 2 mars 2020, le docteur Deborah EGAN-KLEIN […] La caractéristique de la crédibilité serait un discours constant. De plus il n'y aurait ni eu de surévaluation, ni de sous- évaluation dans les deux tests MMPI et PCL.

A l'audience publique du 11 mai 2021, le témoin PERSONNE4.) a sous la foi du serment relaté le déroulement de l'enquête de police […] L'existence de petites différences dans les différents récits serait souvent un indice que la personne concernée dit la vérité, alors que des récits appris par cœur ne varieraient guère.

2) Les experts EGAN-KLEIN et Dominique DUBOIS retiennent l’existence d’un syndrome de Alors que Le témoin PERSONNE1.) déclare sous serment qu’elle a dit non, qu’elle a repoussé le prévenu, qu’elle a refusé trois fois de lui faire une fellation, qu’elle s’est rhabillée, qu’elle s’est levée.

62 3) Le témoin PERSONNE1.) déclare sous serment qu’elle était dans un état sidéré, paralysée, Alors que Le témoin PERSONNE1.) déclare également sous serment qu’elle a dit non, qu’elle a repoussé le prévenu, qu’elle a refusé trois fois de lui faire une fellation, qu’elle s’est rhabillée, qu’elle s’est levée.

Attendu enfin que le rapport de police en langue allemande est écarté par la Cour :

Page 34 :

Il y a uniquement lieu de préciser que le résumé effectué par la police en langue allemande des déclarations de PERSONNE1.) ne sera pas pris en considération étant donné qu'il existe une transcription en langue française des déclarations effectuées par cette dernière le 8 avril 2019 lors d'une audition par vidéo.

Attendu qu’il résulte de l’ensemble de ces éléments, pris dans les deux branches du moyen, que la procédure n’a pas, considérée dans son ensemble, revêtu un caractère équitable au sens de l’article 6§1 de la Convention européenne des droits de l’homme.

Qu’il résulte de la violation de cet article, que le prévenu a été dans l’impossibilité absolue d’exercer valablement et utilement sa défense.

Que la décision entreprise encourt dès lors la cassation. ».

Réponse de la Cour Sur les deux branches du moyen réunies Le demandeur en cassation fait grief aux juges d’appel de l’avoir privé de son droit à un procès équitable pour avoir écarté sa déposition faite sous la foi du serment ainsi que les rapports d’expertise par lui versés à la faveur des rapports et certificat médical versés par la défenderesse en cassation et d’en avoir tiré la preuve des éléments constitutifs des infractions libellées à sa charge.

Le principe d’égalité des armes a pour objet d’assurer que chaque partie se voie offrir une possibilité raisonnable de présenter sa cause dans des conditions qui ne la placent pas dans une situation de net désavantage par rapport à son adversaire.

Il implique, dans le cadre du procès pénal, que la partie poursuivie ne soit pas placée dans une situation défavorable par rapport au Ministère public.

Il ressort des réponses données aux moyens qui précèdent que les juges d’appel n’ont pas violé la disposition visée au moyen.

Il s’ensuit que le moyen n’est pas fondé.

63 Sur la demande en allocation d’une indemnité de procédure Il serait inéquitable de laisser à charge de la défenderesse en cassation l’intégralité des frais non compris dans les dépens. Il convient de lui allouer l’indemnité de procédure sollicitée de 3.000 euros.

PAR CES MOTIFS, la Cour de cassation rejette le pourvoi ;

condamne le demandeur en cassation à payer à la défenderesse en cassation une indemnité de procédure de 3.000 euros ;

le condamne aux frais de l’instance en cassation au pénal, ceux du Ministère public étant liquidés à 10 euros ;

le condamne aux dépens de l’instance en cassation au civil avec distraction au profit de Maître Barbara KOOPS, sur ses affirmations de droit.

Ainsi jugé par la Cour de cassation du Grand-Duché de Luxembourg en son audience publique du jeudi, vingt-six octobre deux mille vingt-trois, à la Cité Judiciaire, Bâtiment CR, Plateau du St. Esprit, composée de :

Thierry HOSCHEIT, président de la Cour, Christiane JUNCK, conseiller à la Cour de cassation, Agnès ZAGO, conseiller à la Cour de cassation, Marie-Laure MEYER, conseiller à la Cour de cassation, Monique HENTGEN, conseiller à la Cour de cassation, qui, à l’exception du président Thierry HOSCHEIT, qui se trouvait dans l’impossibilité de signer, ont signé le présent arrêt avec le greffier à la Cour Daniel SCHROEDER.

La lecture du présent arrêt a été faite en la susdite audience publique par le conseiller Christiane JUNCK en présence du procureur général d’Etat adjoint Christiane BISENIUS et du greffier Daniel SCHROEDER.

64 Conclusions du Parquet Général dans l’affaire de cassation PERSONNE2.) c/ PERSONNE1.) en présence du Ministère Public (n° CAS-2022-00123 du registre)

________________________________________________________________________

Par déclaration faite le 8 décembre 2022 au greffe de la Cour Supérieure de Justice, Maître Sébastien LANOUE, avocat à la Cour, forma un recours en cassation, au pénal et au civil, au nom et pour le compte d’PERSONNE2.), contre un arrêt rendu le 8 novembre 2022 sous le numéro 320/22 V. par la Cour d’appel, cinquième chambre, siégeant en matière correctionnelle.

Cette déclaration de recours fut suivie en date du 6 janvier 2023 du dépôt d’un mémoire en cassation, signé par Maître Sébastien LANOUE, avocat à la Cour, au nom et pour le compte d’PERSONNE2.), préalablement signifié à la partie défenderesse au civil PERSONNE1.) en date du 5 janvier 2023.

Le pourvoi respecte le délai d’un mois courant à partir du prononcé de la décision attaquée dans lequel la déclaration de pourvoi doit, conformément à l’article 41 de la loi modifiée du 18 février 1885 sur les pourvois et la procédure en cassation, intervenir. Il respecte en outre le délai d’un mois, prévu par l’article 43 de la loi du 18 février 1885, dans lequel la déclaration du pourvoi doit être suivie du dépôt du mémoire en cassation.

Conformément à l’article 43 précité, ce mémoire a été signé par un avocat à la Cour, précise les dispositions attaquées de l’arrêt et contient des moyens de cassation. De même, il a été signifié antérieurement à son dépôt à la défenderesse au civil.

65 Le pourvoi est donc recevable.

La partie défenderesse au civil PERSONNE1.) a déposé le 2 février 2023 au greffe de la Cour Supérieure de Justice un mémoire en réponse, signé par Maître Barbara KOOPS, avocat à la Cour, demeurant à Luxembourg, et signifié au demandeur en cassation en son domicile élu le 1er février 2023. Ce mémoire peut donc être pris en considération.

Faits et rétroactes :

Par jugement n°1765/2021 du 15 juillet 2021 rendu contradictoirement par le tribunal d’arrondissement de Luxembourg, siégeant en matière correctionnelle, PERSONNE2.) a été condamné, du chef de viol et d’attentat à la pudeur commis sur la personne de PERSONNE1.), avec la circonstance aggravante que les faits ont été commis par une personne qui abuse de l’autorité que lui confèrent ses fonctions, à une peine d’emprisonnement de vingt-quatre mois, assortie du sursis intégral, à une amende de 7.500 euros, à une interdiction pour la durée de cinq ans des droits énoncés aux numéros 1, 3, 4, 5 et 7 de l’article 11 du Code pénal, ainsi qu’à une interdiction pour une durée de cinq ans du droit d’exercice de la profession de médecin. De plus, il a été condamné à payer un montant de 7.500 euros à la demanderesse au civil.

Sur appel d’PERSONNE2.), du procureur d’Etat de Luxembourg et de la partie civile, la Cour d’appel, chambre correctionnelle, par arrêt n°320/22 V. rendu le 8 novembre 2022, a confirmé le jugement entrepris, sauf à rectifier le libellé de l’infraction de viol retenue.

Le pourvoi est dirigé contre cet arrêt.

Quant au premier moyen de cassation:

tiré de la contradiction de motifs valant défaut de motifs – violation des articles 89 de la Constitution, 195 du Code de procédure pénale – article 375 du Code pénal – contradiction entre les motifs qualifiant l’absence de consentement de la victime et les motifs qualifiant l’intention coupable du prévenu Le premier moyen de cassation met en œuvre le grief de la contradiction de motifs, vice de forme de l’arrêt attaqué.

Les magistrats d’appel se seraient contredits dans le cadre de leur analyse de deux éléments constitutifs de l’infraction de viol, à savoir l’absence de consentement de la victime, d’un côté, et l’intention criminelle de l’auteur, de l’autre. Plus précisément, « en retenant d’une part que la victime ne pouvait pas exprimer la moindre résistance pour établir l’élément constitutif d’absence de consentement dans son chef, et d’autre part que la victime a exprimé sa résistance pour établir l’élément constitutif d’intention criminelle dans le chef 66 du prévenu, pour qualifier l’infraction libellée à l’article 375 du Code pénal »1, la Cour d’appel se serait exprimée par des motifs contradictoires.

A l’appui de son moyen, le demandeur en cassation cite pêle-mêle des passages du jugement de première instance pour les opposer à des extraits de la motivation de l’arrêt attaqué.

Or, pour que la contradiction puisse être invoquée à l’appui d’un moyen de cassation, il est nécessaire que le vice ait été révélé par la décision attaquée, ou, s’il était présent dans la décision des premiers juges, qu’il ait été invoqué vainement dans les conclusions d’appel2. Il en découle que les motifs critiqués comme contradictoires doivent être contenus dans la même décision, à savoir dans l’arrêt attaqué, sinon dans le jugement entrepris et adoptés en tant que tels par l’arrêt confirmatif attaqué. Une contradiction entre des motifs extraits d’un jugement de première instance, d’une part, et d’un arrêt rendu sur appel contre ce jugement, d’autre part, ne se conçoit pas en tant que fondement d’un moyen de cassation.

Sous cette optique, le moyen est irrecevable, sinon inopérant.

En outre, il faut constater que le moyen manque en fait, en ce qu’il procède d’une lecture incomplète, sinon erronée de l’arrêt du 8 novembre 2022.

En effet, la Cour d’appel, contrairement aux termes du moyen, n’a pas qualifié l’élément constitutif de l’absence de consentement de la victime en retenant que la victime aurait été incapable d’opposer la moindre résistance aux agissements de l’actuel demandeur en cassation.

Concernant l’absence de consentement de la victime, l’arrêt attaqué se lit comme suit :

« Par ailleurs, c’est à bon droit que les juges de première instance ont retenu qu’il y avait absence de consentement dans le chef de PERSONNE1.) au vu de ses déclarations claires et précises reproduites ci-dessus. Il convient de souligner à cet égard qu’il est établi, au vu de ses déclarations, que le prévenu l’a tirée avec les cheveux, qu’il l’a surprise avec ses actes et qu’elle avait clairement dit à plusieurs reprises qu’elle ne voulait pas de relation sexuelle.3 »4 Ce passage de l’arrêt ne figure pas parmi ceux cités dans le mémoire en cassation. Il s’agit pourtant justement de la motivation sur base de laquelle les magistrats d’appel ont décidé que la victime n’avait pas été consentante à l’acte de pénétration sexuelle que lui avait imposé l’auteur. Il s’en dégage clairement que ce n’est pas l’incapacité de la victime d’opposer de la résistance, figurant parmi les critères énumérés à titre d’exemples par 1 Mémoire en cassation, page 9, alinéa 4 2 J.et L. BORE, La cassation en matière civile, Ed. Dalloz 2015/2016, n°77.131, page 414 3 Souligné par la soussignée 4 Arrêt attaqué, page 36, dernier alinéa 67 l’article 375 du Code pénal5, mais l’emploi de violences par l’auteur (« le prévenu l’a tirée par les cheveux »), la surprise, ainsi que la circonstance que la victime avait verbalisé son opposition à plusieurs reprises (« qu’elle a clairement dit à plusieurs reprises qu’elle ne voulait pas de relation sexuelle ») qui ont conduit les juges du fond à retenir que la victime n’avait pas consenti à l’acte de pénétration sexuelle.

Le demandeur en cassation semble vouloir insinuer que la victime aurait seulement dit non par rapport à la fellation que l’actuel demandeur en cassation lui avait demandé de pratiquer sur sa personne. Ceci n’est cependant pas exact, dès lors qu’il résulte de la motivation sus-citée qu’« elle a clairement dit à plusieurs reprises qu’elle ne voulait pas de relation sexuelle », ce qui signifie que son opposition ne concernait pas le seul acte de pénétration bucco-génitale sollicité par l’actuel demandeur en cassation, mais portait sur tout acte de pénétration sexuelle, de quelque nature qu’il soit et par quelque moyen que ce soit, donc y compris sur l’acte de pénétration vaginale par le doigt, retenu en tant qu’élément matériel de l’infraction de viol.

Il en ressort qu’en retenant que l’élément constitutif de l’absence de consentement de la victime résultait de l’emploi par l’auteur de violences et de surprise, ainsi que de l’opposition verbale claire de la victime, la Cour d’appel ne s’est pas contredite en décidant quant à l’intention criminelle de l’auteur du viol que celle-ci se déduisait des déclarations de la victime, dont résultait son opposition non équivoque, au vu de laquelle l’auteur avait « nécessairement conscience d’aller à l’encontre de la volonté de PERSONNE1.) »6.

En réalité, sous le couvert du grief de la contradiction de motifs, le moyen ne vise qu’à remettre en cause l’appréciation par les juges du fond des circonstances factuelles et des éléments de preuve dans le cadre de la qualification de l’absence de consentement de la victime et de l’intention criminelle concernant l’infraction de viol. Cette analyse relève de leur pouvoir souverain d’appréciation et échappe donc au contrôle de Votre Cour.

De ce point de vue, le premier moyen de cassation ne saurait être accueilli.

Quant au deuxième moyen de cassation :

tiré de la violation de la présomption d’innocence, droit garanti par l’article 3 de la Directive (UE) 2016/343 portant renforcement de certains aspects de la présomption d’innocence, et encore garanti par l’article 6§2 de la Convention européenne des droits de l’Homme, par l’article 48§1 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union Européenne, par l’article 14§2 du pacte international relatif aux droits civils et politiques, et principe à valeur de principe général du droit 5 Selon le libellé actuel de l’article 375 du Code pénal, le viol consiste en tout acte de pénétration sexuelle, de quelque nature qu’il soit et par quelque moyen que ce soit, commis sur une personne qui n’y consent pas, notamment à l’aide violences ou de menaces graves, par ruse ou artifice, ou en abusant d’une personne hors d’état de donner un consentement libre ou d’opposer la résistance 6 Arrêt attaqué, page 37, alinéa 2 68 - première branche : violation de la présomption d’innocence en tant que règle déterminant la manière dont l’accusé doit être traité dans le cadre du procès pénal - deuxième branche : violation de la présomption d’innocence en tant que règle relative à l’administration de la preuve en ce qui concerne notamment la charge de la preuve et l’exigence de rapporter la preuve au-delà de tout doute raisonnable Quant à la recevabilité du deuxième moyen pris en ses deux branches:

Les développements quant au deuxième moyen de cassation analysent de manière détaillée la question de savoir si les dispositions citées au moyen peuvent servir de fondement à un moyen de cassation. Il est en effet légitime de s’interroger à cet égard, puisqu’il est de principe qu’à priori, les dispositions d’une directive européenne ne sont pas directement applicables, mais doivent être transposées via des textes de loi internes afin de faire partie du droit positif de chaque Etat membre de l’Union Européenne. Ce n’est que si une directive n’a pas été transposée dans le délai imparti et à condition que la disposition en cause soit suffisamment précise, claire et inconditionnelle que son effet direct peut être invoqué par un justiciable7.

La disposition en cause de la Directive (UE) 2016/343 est rédigée dans les termes suivants :

- article 3 : « Les Etats membres veillent à ce que les suspects et les personnes poursuivies soient présumés innocents jusqu’à ce que leur culpabilité ait été légalement établie. » Cette Directive a été transposée en droit luxembourgeois interne par une loi du 10 août 2018. Les auteurs dudit texte ont fait le choix de ne pas intégrer le principe de la présomption d’innocence de manière directe dans le Code de procédure pénale, respectivement dans le Code pénal, en rappelant qu’il s’agit d’un principe général du droit, directement applicable en ce qu’il est consacré par différents textes supranationaux, tels que la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales8.

Même si l’on pourrait donc se demander si l’article 3 de la Directive en cause est suffisamment précis, clair et inconditionnel pour être revêtu d’un effet direct, la soussignée estime qu’étant donné qu’il s’agit d’un principe général du droit d’une importance fondamentale, reconnu par des juridictions supranationales, notamment la Cour de Justice de l’Union Européenne (CJUE) ainsi que la Cour Européenne des Droits de l’Homme (CEDH), et formellement consacré par des textes internationaux s’imposant dans notre système de droit interne, il doit pouvoir servir de fondement à un moyen de cassation.

Le deuxième moyen de cassation est dès lors à considérer comme étant recevable à cet égard.

7 CJUE 4 décembre 1974, Van Duyn 8 Travaux parlementaires n°7320, Exposé des motifs, considérations générales, pages 5 et 6 69 Quant au bien-fondé du deuxième moyen pris en ses deux branches:

Le deuxième moyen de cassation reproche à la Cour d’appel d’avoir violé le principe de la présomption d’innocence, garanti par l’article 3 de la Directive (UE) 2016/343 portant renforcement de certains aspects de la présomption d’innocence, en condamnant le demandeur en cassation du chef de viol et d’attentat à la pudeur.

Bien que le moyen soit articulé en deux branches, le demandeur en cassation ne fait valoir aucun grief dans le cadre la première branche, concernant la manière dont l’accusé doit être traité dans le cadre du procès pénal.

Il admet donc qu’il n’a pas été porté atteinte à ce volet de la présomption d’innocence, de sorte que la première branche du moyen est inopérante9.

Au vœu de la deuxième branche, il est reproché à la Cour d’appel de s’être basé, pour établir l’ensemble des infractions mises à la charge de l’actuel demandeur en cassation, mais surtout pour retenir l’infraction de viol, « de manière largement très prépondérante sur les seules déclarations »10 de l’actuelle défenderesse en cassation.

Le demandeur en cassation formule sa critique notamment dans les termes suivants :

« Que le demandeur en cassation relève ainsi que les trois éléments constitutifs de l’infraction à l’article 375 du Code pénal, sont établis par le juge du fond sur base des seules déclarations dudit témoin.

Que plus encore, le demandeur en cassation relève que les trois circonstances aggravantes que sont la ruse, la violence, et l’abus d’autorité sont de la même manière établies sur base des seules déclarations du témoin.

Que le demandeur en cassation relève même l’existence d’un raisonnement circulaire, par lequel le juge du fond déduit l’existence de l’intention criminelle dans le chef du prévenu, élément constitutif de l’infraction à l’article 375 du Code pénal, du seul fait de l’admission de l’existence de circonstances aggravantes de cette infraction que sont la ruse et la violence, lesquelles circonstances aggravantes sont établies par le juge du fond, sur base des seules déclarations du témoin/partie civile.

Que le demandeur en cassation met ainsi en évidence que le raisonnement suivi par le juge du fond, tant en première instance qu’en instance d’appel, a consisté à admettre en premier lieu que le témoin ne pouvait pas mentir, puis à déduire des déclarations dudit témoin l’existence des circonstances aggravantes de l’infraction principale, et enfin de déduire de l’existence des circonstances aggravantes et des déclarations du témoin, l’existence de l’infraction principale. »11 9 Voir en ce sens : Cass. 10 mars 2022, n°39/2022 pénal, n°CAS-2021-00017 du registre 10 Mémoire en cassation, page 14, alinéa 14 11 Mémoire en cassation, page 14, trois derniers alinéas d’en bas, et page 15, alinéas 1 et 2 70 Tout d’abord, il convient de souligner que le raisonnement juridique soutenu dans le cadre de ces développements est faux. Ni la violence, ni la ruse ne constituent des circonstances aggravantes de l’infraction de viol, mais des critères, énumérés de façon non limitative par l’article 375 du Code pénal, permettant d’établir l’un des éléments constitutifs de cette infraction, à savoir l’absence de consentement de la victime.

Vu que le moyen se fonde sur une argumentation juridique erronée, il est irrecevable, sinon inopérant.

A cela s’ajoute que de toute évidence, sous le couvert du grief tiré de la violation de la disposition visée au moyen, à savoir le principe de la présomption d’innocence, celui-ci ne tend qu’à remettre en discussion l’appréciation, par les juges du fond, de l’ensemble des éléments de preuve leur soumis et qui les ont amenés à retenir pour établie l’infraction de viol, de même que l’infraction d’attentat à la pudeur reprochée au demandeur en cassation, appréciation qui relève de leur pouvoir souverain et échappe au contrôle de Votre Cour12.

La deuxième branche du moyen ne saurait donc être accueillie.

A titre subsidiaire, le moyen n’est pas fondé.

Loin de tenir les déclarations de la présumée victime d’emblée pour établies, les juges du fond en ont analysé la valeur et la cohérence en détail, avant d’arriver à la conclusion qu’elles étaient crédibles. A ce titre, ils ont fait preuve d’une appréciation critique du témoignage, notamment quant à la valeur morale du témoin, à la valeur de ses facultés psychologiques ainsi qu’à la valeur de la déposition elle-même13.

Les magistrats d’appel ont encore constaté que contrairement aux déclarations constantes de la présumée victime, celles de l’actuel demandeur en cassation étaient empreintes de contradictions14.

Ils ont également examiné scrupuleusement la foi à accorder aux deux rapports d’expertise judiciaire à la lumière des critiques formulées par la défense, de même que les conclusions à tirer des rapports unilatéraux15 versés par l’actuel demandeur en cassation16.

Ils en ont déduit, sur base de leur propre appréciation, corroborée par deux experts judicaires et également par le certificat du psychiatre traitant de la présumée victime, que les déclarations de cette dernière étaient crédibles, de sorte qu’il n’y avait lieu ni d’ordonner une expertise psychologique complémentaire, ni une exploitation du set d’agression sexuelle sous forme d’une expertise génétique.

12 Voir en ce sens: Cass. 27 avril 2023, n°44/2023, n°CAS-2022-00057 du registre 13 Jugement de première instance du 15 juillet 2021, arrêt attaqué, page 8. La Cour a adopté ces motifs des premiers juges.

14 Arrêt attaqué, page 35, alinéa 3 15 Il s’agit de deux rapports rédigés par le Professeur Christian MORMONT à la demande de la défense, le premier ayant été versé déjà en première instance et le deuxième en instance d’appel 16 Arrêt attaqué, pages 31 à 34 71 Le principe de la présomption d’innocence dont bénéficie l’actuel demandeur en cassation n’a donc pas été violé, dès lors que la présomption, réfragable, a dûment été renversée par les preuves se dégageant du dossier répressif, et notamment par les déclarations jugées cohérentes, constantes et crédibles de la victime.

Quant aux questions préjudicielles proposées :

Dans le cadre du deuxième moyen de cassation, il est demandé à Votre Cour de saisir tant la Cour constitutionnelle que la Cour de Justice de l’Union Européenne (CJUE) de questions préjudicielles.

La question préjudicielle à poser à la Cour constitutionnelle :

Le demandeur en cassation expose qu’il aurait été « privé de la possibilité d’invoquer la violation d’un article de la Constitution à l’appui de ses griefs, de même qu’il a été privé de la possibilité d’invoquer la violation d’un principe reconnu comme ayant valeur constitutionnelle »17, à défaut de disposition expresse consacrant le principe de la présomption d’innocence dans la Constitution du Grand-Duché de Luxembourg.

A cet égard, il demande à Votre Cour de saisir la Cour Constitutionnelle d’une question préjudicielle rédigée dans les termes suivants :

« La présomption d’innocence, principe de droit pénal garanti par les articles 6§2 de la Convention européenne des droits de l’homme, et 3 de la Directive (UE) 2016/343 du Parlement Européen et du Conseil du 9 mars 2016 portant renforcement de certains aspects de la présomption d’innocence et du droit d’assister à son procès dans le cadre des procédures pénales, a-t-il valeur constitutionnelle dans l’ordre interne luxembourgeois ? »18 Or, aux termes de l’article 6 de la loi modifiée du 27 juillet 1997 portant organisation de la Cour Constitutionnelle, cette dernière est compétente pour contrôler la conformité de dispositions légales à la Constitution. Elle ne saurait donc être saisie pour se prononcer sur la valeur constitutionnelle de principes généraux du droit. L’analyse de la question préjudicielle, telle que proposée, ne rentre donc pas dans les missions de la Cour Constitutionnelle.

A cela s’ajoute qu’au vu de l’article 6 précité, une juridiction est dispensée de saisir la Cour constitutionnelle lorsqu’elle estime qu’une décision sur la question soulevée n’est pas nécessaire à son jugement.

En l’espèce, au vu de la solution que la soussignée propose de donner quant au bien-fondé du moyen, à savoir que le principe de la présomption d’innocence, reconnu et non remis en cause par les juges du fond, n’a pas été violé par ces derniers, la réponse à la question 17 Mémoire en cassation page 18, alinéa 8 18 Mémoire en cassation, page 18 72 de savoir si ce principe a valeur constitutionnelle ou non ne change rien au droit de l’actuel demandeur en cassation de l’invoquer.

Tel qu’indiqué déjà en amont, étant donné qu’il s’agit d’un principe général du droit d’une importance fondamentale, reconnu par des juridictions supranationales, notamment la CJUE ainsi que la CEDH, et formellement consacré par des textes internationaux s’imposant dans notre système de droit interne, l’actuel demandeur en cassation a pu valablement faire valoir son argumentation en relation avec le principe de la présomption d’innocence et les juges du fond ont dûment statué à cet égard. L’intérêt de la question est donc tout au plus d’un ordre purement théorique et elle ne saurait utilement contribuer à la solution du litige.

Par ailleurs, vu que le principe de la présomption d’innocence revêt une valeur supranationale et qu’il est applicable directement dans notre ordre juridique interne, en ce qu’il se trouve consacré notamment par la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, dont les droits qu’elle institue sont directement applicables devant toutes les juridictions luxembourgeoises, il n’existe aucun besoin de l’inscrire en plus dans la Constitution.

Par conséquent, la soussignée estime qu’il n’y a pas lieu de soumettre la question préjudicielle proposée à la Cour Constitutionnelle.

La question préjudicielle à poser à la Cour de Justice de l’Union Européenne :

Dans un même ordre d’idées, le demandeur en cassation requiert que Votre Cour pose à la CJUE la question préjudicielle suivante :

« L’article 3 de la Directive (UE) 2016/343 du Parlement Européen et du Conseil du 9 mars 2016 portant renforcement de certains aspects de la présomption d’innocence, doit-

il s’interpréter en ce sens qu’il s’oppose à une législation nationale telle que la loi du 10 août 2018 prise en ses articles Ier, II, III, et IV, qui transpose la directive (UE) 2016/343 du Parlement européen et du Conseil du 9 mars 2016 portant renforcement de certains aspects de la présomption d’innocence et du droit d’assister à son procès dans le cadre des procédures pénales, alors que ne figure dans cette loi aucune définition de la présomption d’innocence, ni aucune mention de la présomption d’innocence ? ».

Une question préjudicielle tend, en principe, à l’interprétation de normes de droit européen, tel que le prévoit l’article 267 du Traité sur le fonctionnement de l’Union Européenne (TFUE), au regard d’une règle de droit interne susceptible de s’y heurter.

Il se dégage de la jurisprudence de la CJUE que l’article 267 TFUE doit être interprété en ce sens qu’une juridiction nationale dont les décisions ne sont pas susceptibles d’un recours juridictionnel de droit interne doit déférer à son obligation de saisir la Cour d’une question relative à l’interprétation du droit de l’Union soulevée devant elle, à moins que celle-ci ne constate que cette question n’est pas pertinente ou que la disposition du droit de l’Union en cause a déjà fait l’objet d’une interprétation de la part de la Cour ou encore 73 que l’interprétation correcte du droit de l’Union s’impose avec une telle évidence qu’elle ne laisse place à aucun doute raisonnable19.

En l’espèce, la question est dénuée de toute pertinence et elle n’est pas utile à la solution du litige.

Comme indiqué à propos de la question préjudicielle à poser à la Cour Constitutionnelle et contrairement à ce qui est affirmé par le demandeur en cassation, le principe de la présomption d’innocence fait partie de l’ordre juridique interne, en tant que norme à valeur supranationale, de sorte que la question ne se pose tout simplement pas.

Ainsi Votre Cour n’a pas besoin de saisir la CJUE de la question préjudicielle proposée par le deuxième moyen de cassation.

Quant aux troisième et quatrième moyens de cassation réunis:

tirés :

- le troisième de la violation de l’obligation pour l’Etat de veiller à ce que l’accusation supporte la charge de la preuve, violation de l’obligation incombant au juge de rechercher les éléments à décharge, violation du droit de la défense de présenter des éléments de preuve – Article 6§1 de la Directive (UE) 2016/343 portant renforcement de certains aspects de la présomption d’innocence 1. première branche : violation de l’obligation incombant à l’accusation de supporter la charge de la preuve 2. deuxième branche : violation de l’obligation incombant au juge de rechercher des éléments à décharge 3. troisième branche : violation du droit de la défense de présenter des éléments de preuve - le quatrième de la violation du droit à ce que tout doute profite à l’accusé – Article 6§1 CEDH : Principe « In dubio pro reo » - Article 6§2 de la Directive (UE) 2016/343 portant renforcement de certains aspects de la présomption d’innocence 1. première branche : violation du principe général du droit pénal « In dubio pro reo » reconnu par la Cour européenne des droits de l’homme 2. deuxième branche : violation du droit garanti par l’article 6§2 de la Directive (UE) du Parlement Européen et du Conseil du 9 mars 206 portant renforcement de 19 CJUE 6 octobre 1982, Cilfit ; CJUE 6 octobre 2021, Consorzio Italian Management e Catania Multiservizi 74 certains aspects de la présomption d’innocence, à ce que tout doute profite à l’accusé Quant à la recevabilité des troisième et quatrième moyens de cassation :

A l’instar du deuxième, les troisième et quatrième moyens de cassation sont tirés de la violation de la loi, et plus particulièrement de l’article 6 de la Directive (UE) 2016/343 du 9 mars 2016 portant renforcement de certains aspects de la présomption d’innocence et du droit d’assister à son procès dans le cadre des procédures pénales.

Se pose donc la question de la possibilité d’invoquer cette disposition à l’appui d’un moyen de cassation.

La soussignée réitère ici ses observations quant à la recevabilité du deuxième moyen de cassation. Vu que l’article 6 de la Directive précitée concerne des droits fondamentaux reconnus par des juridictions supranationales et consacrés par les textes internationaux, tels que la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, donc directement applicables en droit luxembourgeois pour en faire partie intégrante, les principes qu’il pose doivent pouvoir servir de fondement à un moyen de cassation.

Les deux moyens sont donc recevables à cet égard.

Quant au bien-fondé des troisième et quatrième moyens de cassation, en leurs branches respectives réunies :

En substance, les deux moyens consistent à reprocher à la Cour d’appel d’avoir confirmé que l’actuel demandeur en cassation s’était rendu coupable des infractions lui reprochées, à savoir de viol et d’attentat à la pudeur, en se fondant sur les seules déclarations de la présumée victime, sans prendre en compte les éléments à décharge figurant au dossier répressif, ni les éléments de preuve présentés par la défense. Ainsi, elle n’aurait pas fait bénéficier ce dernier du doute qui en résultait.

Tout comme le deuxième, les troisième et quatrième moyens de cassation ne tendent qu’à remettre en cause, sous le couvert des dispositions et des principes y visés, l’appréciation par les magistrats d’appel des éléments de preuve et des circonstances factuelles figurant au dossier répressif, et plus particulièrement du témoignage de la présumée victime, des déclarations du prévenu, des expertises judiciaires et des rapports unilatéraux versés par la défense. Cette analyse relève du pouvoir souverain d’appréciation des juges du fond et échappe au contrôle de Votre Cour.

Il s’ensuit que les troisième et quatrième moyens ne sauraient être accueillis.

A titre subsidiaire, ils ne sont pas fondés.

75 Tel que la soussignée l’a développé à propos du deuxième moyen, la Cour d’appel ne s’est pas limitée à adopter simplement les déclarations de la présumée victime. Elle ne les a déclarées comme étant crédibles qu’après les avoir analysées de manière critique, ainsi qu’après avoir examiné la valeur des deux rapports d’expertise psychologiques, corroborés par le certificat médical établi par le psychiatre traitant de la présumée victime.

Concernant les rapports psychologiques unilatéraux produits par la défense20, la Cour d’appel ne les a pas rejetés d’emblée, mais elle les a examinés en détail. Elle en a conclu que différents passages manquent d’objectivité et d’impartialité dans le chef de leur rédacteur, de sorte qu’aux yeux des magistrats d’appel, ces rapports n’étaient pas de nature à tenir en échec la crédibilité des déclarations de l’actuelle défenderesse en cassation21.

Donc, l’affirmation selon laquelle la défense n’aurait pas été admise à produire des moyens de preuve est erronée, puisque lesdits éléments ont bien été pris en compte par la Cour d’appel, mais jugés non susceptibles de porter atteinte à la valeur probante des éléments de preuve retenus pour y fonder sa décision quant à la culpabilité de l’actuel demandeur en cassation.

Quant aux questions préjudicielles proposées :

Le demandeur en cassation estime nécessaire, dans le cadre de ses troisième et quatrième moyens, que Votre Cour saisisse la CJUE des questions préjudicielles suivantes :

« L’article 6§1 de la Directive (UE) 2016/343 du Parlement Européen et du Conseil du 9 mars 2016 portant renforcement de certains aspects de la présomption d’innocence, doit-

il s’interpréter en ce sens qu’il s’oppose à une législation nationale telle que la loi du 10 août 2018 prise en ses articles Ier, II, III et IV, qui transpose la directive (UE) 2016/343 du Parlement européen et du Conseil du 9 mars 2016 portant renforcement de certains aspects de la présomption d’innocence et du droit d’assister à son procès ans le cadre des procédures pénales, alors que ne figure dans cette loi aucune définition de l’obligation pour l’Etat de veiller à ce que l’accusation supporte la charge de la preuve, aucune définition de l’obligation incombant au juge de rechercher les éléments à décharge, ni aucune définition du droit de la défense de présenter des éléments de preuve, et qu’il ne figure dans cette loi aucune mention de ces trois notions ? » « L’article 6§2 de la Directive (UE) 2016/343 du Parlement Européen et du Conseil du 9 mars 2016 portant renforcement de certains aspects de la présomption d’innocence, doit-

il s’interpréter en ce sens qu’il s’oppose à une législation nationale telle que la loi du 10 août 2018 prise en ses articles Ier, II, III, et IV, qui transpose la directive (UE) 2016/343 du Parlement européen et du Conseil du 9 mars 2016 portant renforcement de certains aspects de la présomption d’innocence et du droit d’assister à son procès dans le cadre des procédures pénales, alors que ne figure dans cette loi aucune définition de l’obligation 20 Rapports du Professeur Christian MORMONT versés en première instance et en instance d’appel 21 Arrêt attaqué, page 31 76 pour l’Etat de veiller à ce que tout doute profite à l’accusé, et qu’il ne figure dans cette loi aucune mention de ce droit ? » Les questions préjudicielles proposées, à l’instar de celle figurant au deuxième moyen, sont dénuées de la moindre pertinence, en ce qu’elles ne sont pas utiles pour la solution du litige.

Les principes et droits résultant de l’article 6 de la Directive (UE) 2016/343 sont également consacrés par d’autres textes internationaux, ayant une valeur supranationale, et font ainsi partie de notre droit positif interne. Ils se retrouvent notamment à l’article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, pierre angulaire de la garantie du droit à un procès équitable et des droits de la défense, y compris dans le cadre de l’administration de la preuve. Le deuxième paragraphe dudit article 6 consacre le principe de la présomption d’innocence qui exige, entre autres, que le doute profite à l’accusé.

Les différents droits et principes que l’on retrouve à l’article 6 de la Directive (UE) 2016/343 sont donc des normes applicables en droit luxembourgeois et cela nonobstant la circonstance qu’il ne se retrouvent pas textuellement dans une disposition légale.

Les questions qu’il est proposé à Votre Cour de transmettre à la CJUE ne se posent donc pas et il n’y a pas non plus lieu de surseoir à statuer.

Quant au cinquième moyen de cassation :

tiré de la violation du droit à bénéficier d’un procès équitable – article 6§1 de la Convention européenne des droits de l’homme 1. première branche : violation du droit à un procès équitable tenant au non respect du principe de l’égalité des armes 2. deuxième branche : violation du droit à un procès équitable tenant à l’examen des preuves soumises aux juges du fond Le cinquième et dernier moyen de cassation fait grief à la Cour d’appel d’avoir privé l’actuel demandeur en cassation d’un procès équitable, « dans la mesure où la procédure considérée dans son ensemble, n’a pas revêtu un caractère équitable »22.

Les reproches concrets, articulés dans le cadre de deux branches, sont les mêmes que ceux formulés par les deuxième, troisième et quatrième moyens de cassation, à savoir que la Cour d’appel aurait fondé sa décision sur les seules déclarations de la victime ainsi que sur les rapports d’expertise judiciaire et qu’elle n’aurait pas pris en considération les éléments de preuve et arguments avancés par la défense.

22 Mémoire en cassation, page 40, alinéa 3 77 Comme les moyens précédents, le cinquième ne saurait être accueilli, en ce qu’il ne tend qu’à remettre en cause l’examen des éléments factuels et des moyens de preuve par les juges du fond, relevant de leur pouvoir d’appréciation souverain.

A titre subsidiaire, il n’est pas fondé et la soussignée renvoie à cet égard à ses développements formulés à titre subsidiaire dans le cadre des deuxième, troisième et quatrième moyens de cassation.

Conclusion Le pourvoi est recevable, mais non fondé.

Pour le Procureur Général d’Etat, le premier avocat général, Simone FLAMMANG 78


Synthèse
Numéro d'arrêt : 108/23
Date de la décision : 26/10/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 31/10/2023
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;courdecassation;arret;2023-10-26;108.23 ?

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