Arrêt n° 100
du 11/10/2018
La Cour de cassation, Chambre civile :
Mme Roula El-Masry, Présidente par intérim
M. Samih Sfeir et Mme Ghada Chamseddine, conseillers
Effets de la connaissance par le second acquéreur d’une prénotation relative à un procès - l’obligation de garantie du vendeur – l’article 433 du Code des obligations et des contrats
Attendu que les principes de la foi publique, de la force probante et de l’autorité (à l’égard de tous - erga omnes) des inscriptions du registre foncier, ont été établis dans l’intérêt du tiers, tant pour protéger le droit objet de l’inscription, que pour accorder à ce dernier un ordre prioritaire dans l’inscription ; Que si le régime du registre foncier empêche quiconque de se prévaloir d’un droit réel immobilier non inscrit, il n’exempte pas le vendeur de son obligation légale de garantie ainsi que de ses effets juridiques, notamment le droit à une indemnité tel que prévu par l’article 433 c.o.c. et dans les limites qui y sont prévues et qui supposent l’impossibilité d’établir l’inscription foncière réelle ;
Attendu que la prénotation à caractère public portant mention du procès sur le feuillet réel du registre foncier produit ses effets juridiques en principe en cas de concurrence entre les ayants-droits protégeant ainsi le tiers prétendant un droit sur le bien-fonds ; Qu’en l’espèce, la prénotation profite à l’acheteur non au vendeur lequel cherche à se libérer de son obligation de garantie ; (…) Que la foi publique rattachée à la prénotation présume la connaissance (de l’intéressé) ; Que cette présomption simple accepte toute preuve contraire, alors que l’appréciation des présomptions relève du pouvoir souverain des juges du fond échappant ainsi au contrôle de la Cour de cassation ;
Attendu que la Cour d’Appel a pu souverainement déduire de l’ensemble des données et présomptions qu’elle a pris soin de noter dans son arrêt, que la preuve de la connaissance par la défenderesse au pourvoi de l’imminence de l’éviction n’avait pas été rapportée ;
Attendu que l’arrêt de la Cour de Cassation rendu dans le cadre du procès réel foncier intenté par le premier acheteur s’était borné à relever que la prénotation portant mention de l’action en justice confère à cette dernière une opposabilité à l’égard de tous, y compris à l’égard de la défenderesse au pourvoi, consacrant ainsi le droit du premier acheteur à inscrire son droit de propriété en se fondant exclusivement sur la priorité dont il bénéficie, sans pour autant envisager la possible connaissance du demandeur au pourvoi de l’acte de vente ;
(…)
Attendu que la source du dédommagement réside dans la vente en vigueur entre ses parties, et dans l’obligation de garantie qui en découle, mettant ainsi à la charge du vendeur l’obligation de réparer le préjudice du vendeur subi du fait de la perte du bien vendu ; Que la Cour d’Appel ne s’était pas uniquement fondée sur la nature du dédommagement mais aussi sur les dispositions juridiques qui régissent le sujet, sollicitant ainsi les dispositions de l’article 433-3 du c.o.c. ; Qu’elle en a déduit la nécessaire prise en considération toute amélioration du bien et la hausse de la valeur du bienfonds afin d’établir une équivalence entre ledit dédommagement et le dommage subi réellement auquel s’ajoute le manque à gagner ; d’où, le moyen est inopérant et doit être rejeté ;