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05/04/1982 | HAïTI | N°05-04-82

Haïti | Haïti, Cour de cassation, 05 avril 1982, 05-04-82


Wagner Lalanne Vs Dorsaint Cétoute

5 avril 1982

Sommaire

Juges d'Appel - Droit d'apprécier les faits d'une cause - Garantie - Pièces qu'un Tribunal est obligé de viser.


Il est de principe que les Juges d'Appel, lorsqu'il n'y a pas lieu à infirmation, ont le pouvoir de choisir entre trois options:

1o) ou d'adopter purement et simplement les motifs du premier Juge:

2o) ou les compléter en y ajoutant d'autres;

3o) ou d'appuyer le dispositif de son ouvre sur de nouveaux motifs.

L'existence d'un écrit n'est pas nécessaire pour qu

'il y ait vente; la vente est parfaite dès qu'on est convenu de la chose et du prix.

Le droit d'apprécier...

Wagner Lalanne Vs Dorsaint Cétoute

5 avril 1982

Sommaire

Juges d'Appel - Droit d'apprécier les faits d'une cause - Garantie - Pièces qu'un Tribunal est obligé de viser.

Il est de principe que les Juges d'Appel, lorsqu'il n'y a pas lieu à infirmation, ont le pouvoir de choisir entre trois options:

1o) ou d'adopter purement et simplement les motifs du premier Juge:

2o) ou les compléter en y ajoutant d'autres;

3o) ou d'appuyer le dispositif de son ouvre sur de nouveaux motifs.

L'existence d'un écrit n'est pas nécessaire pour qu'il y ait vente; la vente est parfaite dès qu'on est convenu de la chose et du prix.

Le droit d'apprécier les faits résultant des pièces d'une cause pour rechercher l'intention des parties et la preuve de l'existence d'un contrat appartient aux Juges du fond. Cette appréciation est souveraine et échappe à la censure de la Cour de Cassation, pourvu que ces faits ne soient pas dénaturés.

Aux termes des articles 105 et 106 combinés du C.P.C. l'acquéreur a un délai de 8 jours à partir du jour de la demande originaire pour appeler son vendeur en garantie; ce dernier a le même délai, pour, à son tour, mettre en cause son garant, à partir du jour où il a été appelé.

La loi sur le notariat fait défense aux notaires de ne passer aucun acte de vente de propriété si, au préalable, celle-ci n'a pas été arpentée.

Les pièces qu'un Tribunal est obligé de viser doivent être produites et avoir un rapport avec la cause. Aucune place n'est spécialement réservée aux visas des pièces. Le vou de la loi est rempli toutes les fois qu'elles (pièces) ont été discutées même en l'absence de toute mention de leur visa.

La Cour de Cassation, Première Section, a rendu l'arrêt suivant:

Sur le pourvoi du sieur Wagner Lalanne, propriétaire, identifié au No. 2286-B, demeurant et domicilié à Port-au-Prince, ayant pour Avocat Me. Mercin Rivière, identifié, patenté et imposé aux Nos. 9186-P, 74416 et 14205 avec élection de domicile au cabinet dudit avocat, en cette ville, Rue Bonne Foi au No. 67.

Contre un arrêt de la Cour d'Appel de Port-au-Prince en date du 28 janvier 1981 rendu entre lui et Dorsaint Cétoute, propriétaire, demeurant et domicilié à Port-au-Prince, ayant pour avocat Me. Alcan Dorméus, identifié, patenté et imposé aux Nos. 94894, 2188-I et 757254.

Ouï, à l'audience du lundi 12 octobre 1981, les parties n'étant pas représentées à la barre, Monsieur Luc D. Hector, Commissaire du Gouvernement en la lecture des conclusions du Substitut Luc D. Michel.

Vu l'arrêt attaqué, l'acte déclaratif de pourvoi, les requêtes des parties avec pièces à l'appui, les conclusions du Ministère Public et les dispositions de loi invoquées.

Et, après en avoir délibéré en la Chambre du Conseil.

Attendu que le sieur Dorsaint Cétoute, par ajournement en date du 23 Novembre 1977, appelait les sieurs et dame Wagner Lalanne, François Blain, Albert Laurent et Fidéiste Cajuste par devant le Tribunal Civil de Port-au-Prince pour entendre reconnaître son droit de propriété sur un terrain sis à Arcachon, Côte Plage, sur l'habitation trou Bordet, en la dixième Section Rurale de la Commune de Port-au-Prince.

Que, sur cette action en revendication, sortit un jugement de défaut profit joint qui ordonna la réassignation des non-comparants; le Tribunal Civil de Port-au-Prince par son jugement en date du 6 décembre 1979 fit droit à la demande de Dorsaint Cétoute.

Le sieur Wagner Lalanne interjeta appel de cette décision; elle fut confirmée par arrêt de la Cour d'Appel de Port-au-Prince en date du 28 Janvier 1981;

C'est contre cet arrêt que Wagner Lalanne s'est pourvu en Cassation Il propose pour le faire casser deux moyens que combat la continuatrice juridique de Dorsaint Cétoute, sa fille Marie Josée Cétoute.

Sur le premier moyen, qui se divise en deux branches: violation du principe de dévolution, de l'article 282 du C.P.C. pour absence de motifs, excès de pouvoir.

Sur la première branche: violation du principe de dévolution.

Le pourvoyant reproche à la Cour d'Appel de Port-au-Prince d'avoir violé le Principe de dévolution en ce qu'elle n'a pas jugé à nouveau, en ce qu'elle a repris les motifs erronés du premier Juge pour baser sa décision.

Attendu que, en effet, les Juges d'Appel ont plein pouvoir pour statuer en droit et en fait sur l'affaire qui leur est déférée comme si elle n'avait pas été portée avant par devant un Tribunal, mais qu'il est de principe pourtant suivant la Jurisprudence qu'ils ont aussi le pouvoir, lorsqu'il n'y a pas lieu à infirmation, de choisir entre trois partis: ou d'adopter purement et simplement les motifs du jugement dont est appel, ou d'en ajouter d'autres à ceux-là ou d'en prendre de nouveaux pour justifier la confirmation de l'ouvre du premier Juge;

Sur la deuxième branche du moyen: violation de l'article 282 du C.P.C. pour absence de motifs et non visa de pièces, excès de pouvoir;

Attendu que l'action en revendication de Dorsaint Cétoute repose sur trois actes: un reçu quittance qui a acquis date certaine en février 1972 à la mort du vendeur, Raymond L. Ethéard et qui est classé au rang des minutes du notaire Georges Dieudonné Mondélus de la résidence de Port-au-Prince, deux procès-verbaux suivis de plan, de l'Arpenteur Emmanuel Gérard Dessaint, le 1er de 1968 à la requête de Raymond L. Ethéard, constatant l'extraction de son bien d'une plus grande contenance d'un terrain en faveur de Dorsaint Cétoute; l'autre de 1977 sur la réquisition de Dorsaint Cétoute constatant l'opération de rafraîchissement des lisières de sa propriété à Arcachon.

Attendu que les Juges d'Appel après l'examen de la cause, se basant sur les motifs du premier Juge, ont rejeté les moyens de l'appelant; que pour Wagner Lalanne le motif déterminant du jugement du Magistrat du premier degré est que le reçu quittance produit par Dorsaint Cétoute est un acte sous seing privé de vente translatif de propriété, alors que ce reçu quittance est considéré dans le jugement pour ce qu'il est, une attestation de paiement, et non comme la seule preuve du droit de propriété du demandeur en revendication; qu'il ressort plutôt du raisonnement du premier Juge que cette preuve résulte de la combinaison des pièces susmentionnées le reçu quittance et les deux procès-verbaux d'arpentage.

Attendu que la Cour d'appel adoptant les motifs du Tribunal Civil de Port-au-Prince, s'exprime ainsi:

Attendu que le Juge du Tribunal Civil de Port-au-Prince, à la suite d'une analyse minutieuse des pièces soumises par Dorsaint Cétoute, a déclaré que ces pièces consacrent formellement la possession et la propriété de Dorsaint Cétoute et sont revêtues des attributs les validant à fonder son action en revendication.

Attendu en effet, qu'il n'est pas nécessaire qu'il y ait un écrit pour qu'il y ait vente; qu'il est de principe que la vente est parfaite dès que le vendeur et l'acheteur sont convenus de la chose et du prix; qu'en l'espèce il est prouvé que la chose a été délivrée et que le prix a été payé.

Attendu qu'il appartient aux Juges du fond le droit d'apprécier les faits résultant des pièces de la cause pour rechercher l'intention des parties et la preuve de l'existence d'un contrat, pourvu que ces faits ne soient pas dénaturés, que cette appréciation est souveraine et échappe à la censure de la Cour de Cassation.

Attendu que, de son côté, Wagner Lalanne, le défendeur originaire, pour faire rejeter l'action en revendication de Dorsaint Cétoute et prouver son droit de propriété sur le terrain sis à Arcachon, produit deux pièces, l'une est un acte de vente du 16 juin 1973 en sa faveur au rapport du notaire Victor Avin de la résidence de Duvalier Ville, l'autre un acte d'arpentage du 16 juin 1973 de l'Arpenteur Emmanuel Gérard Dessaint sur la réquisition d'Edouard Pierre, son prétendu vendeur.

Qu'il soutient qu'il a acheté le terrain d'Arcachon du sieur Edouard Pierre qui lui-même l'a acquis de Raymond L. Ethéard; que la Cour d'Appel de Port-au-Prince comme le Tribunal Civil de Port-au-Prince refuse toute force probante aux titres du recourant:

Attendu que, pour établir son droit de propriété sur ledit terrain, Wagner Lalanne devrait d'abord prouver la propriété de son vendeur Edouard Pierre; qu'il n'a pu le faire, que l'acte de vente de 1970 au rapport du notaire Victor Avin de Duvalier Ville en faveur d'Edouard pierre qu'il cite, il ne l'a jamais produit, ni en Première Instance, ni en Appel, que cet acte n'a fait l'objet d'aucun débat.

Que l'acte de vente en faveur du recourant a été passé en l'étude du notaire Victor Avin en 1973, après la mort du propriétaire originaire Raymond Ethéard survenue le 6 février 1972, en violation de la loi sur le notariat qui fait obligation aux notaires de ne passer aucun acte de vente de propriété si au préalable, celle-ci n'a pas été arpentée; qu'aussi l'arpentage sur lequel repose l'acte de vente n'est pas valide comme l'indiquent les motifs de l'arrêt dénoncé.

Attendu, d'autre part, que le pourvoyant fait grief aux Juges du second degré de n'avoir pas visé certaines pièces, que les seconds Juges affirment que les documents de la cause l'ont été comme cela peut être constaté et contrôlé dans leur arrêt.

Attendu que pour qu'un Tribunal soit obligé de viser une pièce, il faut qu'elle ait été produite, même produite, il faut qu'elle ait un rapport avec la cause; qu'en outre, il n'y a pas de place fixe pour la mention des pièces, et qu'il suffit, lorsque la pièce n'est pas visée, qu'elle soit discutée, pour que le vou de la loi soit rempli (sic).

Attendu qu'il résulte, de tout ce qui précède, que le moyen en ses deux branches n'est pas fondé et qu'il doit être rejeté.

Sur le deuxième moyen pris d'excès de pouvoir pour violation de l'article 282 du C.P.C. par omission de statuer sur des chefs de conclusion.

Attendu que le deuxième moyen n'est que la répétition du premier, le recourant reproche aux seconds Juges d'avoir omis de statuer sur des chefs de conclusions dont la question de savoir si le reçu quittance est un acte sous seing privé de vente comme l'admet le premier Juge.

Qu'il a été déjà démontré que le premier Juge ne considère pas le reçu quittance comme un acte de vente sous seing privé.

Attendu que Wagner Lalanne formule une autre critique, qu'il déclare que la Cour d'Appel a gardé le silence sur l'intervention des sous garants qu'il a appelés pour prendre fait et cause pour lui.

Attendu que, contrairement à ce qu'il avance, la Cour d'Appel a décidé sur la demande en garantie du recourant, qu'elle l'a rejetée parce qu'elle n'est pas fondée sur la loi.

Attendu que les articles 105 et 106 combinés du C.P.C. autorisent l'acquéreur à appeler en garantie son vendeur dans la huitaine du jour de la demande originaire et le garant d'en appeler un autre en sous garantie dans le délai de huitaine à compter du jour de la demande en garantie formée contre lui.

Attendu que Wagner Lalanne ne s'est conformé aux dispositions de ces deux textes, qu'il n'a pas fait sa demande dans le délai prévu; qu'en outre, au lieu d'appeler le garant, son prétendu vendeur Edouard Pierre, il a appelé en lieu et place d'Edouard Pierre, les prétendus sous garants de celui-ci, les héritiers de Raymond L. Ethéard, le propriétaire originaire.

Que ce deuxième moyen n'est pas non plus fondé;

Par ces motifs, la Cour, sur les conclusions conformes du Ministère Public, rejette le pourvoi dirigé par Wagner LALANNE contre l'arrêt du 28 janvier 1981 de la Cour d'Appel de Port-au-Prince rendu entre lui et le sieur Dorsaint Cétoute; dit acquise à l'Etat l'amende déposée et condamne le demandeur aux dépens liquidés à la somme de ........ Gourdes, en ce, non compris le coût de l'arrêt.

Ainsi jugé et prononcé par Nous, Rock J. Raymond, Président, Gabriel H. Volcy, Marc Narcisse, Pierre L. Jeannot et Gilbert Austin, Juges, en audience publique de ce jour lundi cinq avril mil neuf cent quatre-vingt-deux, en présence de Monsieur Luc D. Hector, Commissaire du Gouvernement, avec l'assistance de Monsieur Louis A. Day, Greffier.


Synthèse
Numéro d'arrêt : 05-04-82
Date de la décision : 05/04/1982
Civile

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ht;cour.cassation;arret;1982-04-05;05.04.82 ?
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