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14/03/1980 | HAïTI | N°14-03-80

Haïti | Haïti, Cour de cassation, 14 mars 1980, 14-03-80


Aff.Commer

Panamerican World Airways Inc contre Marie Therese Etienne

14 mars 1980

Sommaire

Contrat de transport aérien - Responsabilité du transporteur- Preuve libératoire - Frêt - Convention de Varsovie.


Lorsqu'une Compagnie Aérienne de Navigation n'est pas arrivée à administrer la preuve libératoire qui lui incombe ni d'établir l'absence de faute de sa part, ni celle de ses préposés et encore moins renverser cette faute sur son passager, elle doit être tenue pour responsable du retard survenu dans la délivrance du frêt.


La Cour

de Cassation, Sections Réunies, a, en audience solennelle, rendu l'arrêt suivant:

Sur le pourvoi de l...

Aff.Commer

Panamerican World Airways Inc contre Marie Therese Etienne

14 mars 1980

Sommaire

Contrat de transport aérien - Responsabilité du transporteur- Preuve libératoire - Frêt - Convention de Varsovie.

Lorsqu'une Compagnie Aérienne de Navigation n'est pas arrivée à administrer la preuve libératoire qui lui incombe ni d'établir l'absence de faute de sa part, ni celle de ses préposés et encore moins renverser cette faute sur son passager, elle doit être tenue pour responsable du retard survenu dans la délivrance du frêt.

La Cour de Cassation, Sections Réunies, a, en audience solennelle, rendu l'arrêt suivant:

Sur le pourvoi de la PAN AMERICAN WORLD AIRWAYS INC.

Société de Navigation Aérienne ayant son siège social à New-York, Etats-Unis d'Amérique, établie à Port-au-Prince où elle est représentée par son Directeur, le sieur William Mc. Intoch, identifié au No. 3302-E, détenteur du permis de séjour No. 44, ladite Compagnie identifiée, patentée et imposée aux Nos. 62280-D 92266-K; 9774; ayant pour avocats constitués avec élection de domicile au Cabinet desdits Avocats á Port-au-Prince Rue Férou, Etage R.C.A. Mes. Georges N. Léger Fils, Jean-Claude N.Léger, Lamartine Clermont et William A. Allonce, dûment identifiés, patentés et imposés aux Nos. 59-Q, 4423-D, 3501-72628-I, 72629-I, 52112-Y, 72770-I, 688721411-K, 23452-K.

Contre un arrêt de la Cour d'Appel des Gonaives, rendu, sur renvoi, à la date du vingt juin 1979, en ses attributions commerciales entre la pourvoyante d'une part, et la dame Marie Thérèse Etienne, propriétaire, demeurant et domiciliée à Port-au-Prince, identifiée au No. 2288-A, ayant pour Avocat, Me Gérard Etienne, dûment identifié, patenté, imposé aux Nos. 7191, 95898 et 198-A avec élection de domicile au Cabinet de l'Avocat, sis en cette ville, Rue du Centre, No. 97, à l'étage (sic).

Ouï, à l'audience publique du vingt-cinq janvier 1980, les parties n'étant pas représentées à la barre, Monsieur le Substitut Jean D. Kalim, en la lecture des conclusions de son collègue Luc D. Michel.

Vu aux dossiers des parties, l'acte déclaratif du pourvoi, la requête de la demanderesse, la réponse de la défenderesse, les pièces à l'appui, l'arrêt attaqué, le réquisitoire du Ministère Public, les cartes d'identité, le récépissé relatif à l'amende, les textes de lois invoqués.

Et, après délibération en la Chambre du Conseil, au vou de la loi (sic).

Le 16 Juillet 1975, la Chambre Commerciale du Tribunal Civil de Port-au-Prince rendit, sur une action initiée par la dame Marie Thérèse Etienne et relative à un contrat de transport de marchandises, le jugement suivant: Par ces causes et motifs, le Tribunal, après examen et sur les conclusions, en partie, conformes du Ministère Public, déclare fondée la demande introduite contre la Pan American World Airways Inc; Société de Navigation Aérienne, condamne la PANAM à la restitution des 4 colis, pesant 206 Kilos qui lui ont été confiés pour être acheminés à Curaçao (appert le document côté 9) ce, avec une diligence raisonnable; estime la valeur des colis à 16 dollars 50 le kilo,conformément aux dispositions de la Convention de Varsovie; accorde l'exécution provisoire sans caution, sur ce chef; condamne également la PANAM à 1000 dollars de dommages-intérêts, ce, pour les préjudices moraux et matériels causés à la dame Etienne pour lui permettre de récompenser les services professionnels de son avocat; condamne enfin la défenderesse aux dépens de l'instance;

La PANAM en releva appel par devant la Cour d'Appel de Port-au-Prince, laquelle évacua l'appellation par son arrêt du 22 juillet 1976, faisant toujours droit aux demandes de la dame Etienne, mais ramenant les dommages-intérêts à 200 dollars.

Sur un pourvoi exercé contre cette décision, par la Société de Navigation Aérienne, la haute Cour trancha le recours par son arrêt de cassation, en date du 21 janvier 1977 et renvoya la cause et les parties par devant la Cour d'Appel des Gonaïves.

Saisie de l'affaire par assignation du 15 juin 1977, requête de Marie Thérèse Etienne, La Cour de renvoi par son arrêt du 20 juin 1979 rejeta une fin de non-recevoir opposée par l'appelante ainsi que les exceptions soulevées par l'intimée; au fond, maintint le jugement du 16 juillet 1975 pour produire son plein et entier effet; rejeta l'exécution provisoire sans caution sollicitée et condamna la PANAM aux frais et dépens tant de première Instance que d'Appel.

C'est contre ce dernier arrêt que la PANAM AMERICAN WORLD AIRWAYS INC .a dirigé un second recours, par devant les Sections Réunies selon déclaration de pourvoi du onze août 1979, faite au Greffe de la Cour d'Appel des Gonaïves. Elle a proposé, pour le faire casser, trois moyens notifiés dans sa requête du 27 août suivant. La dame Etienne répondit par ses défenses du 27 septembre 1979.Elle conclut au rejet du recours et au maintien de l'ouvre querellée (sic).

Sur le premier moyen du pourvoi, pris de la dénaturation des faits de la cause, violation de l'article 282 du C.P.C

Attendu qu'on relève dans l'arrêt du 20 juin 1979, souligne la pourvoyante, le motif suivant: Considérant que la PANAM, ayant mis 10 jours pour faire parvenir les articles confiés à elle de Port-au-Prince pour Curaçao, ne peut dire qu'elle les a acheminés avec une diligence raisonnable; que c'est là une faute.

Attendu qu'il se constate des documents soumis comme l'a judicieusement avancé la PAN AMERICAN WORLD AIRWAYS INC, que, du 8 avril 1974, date de la remise des colis à Port-au-Prince à la ligne de Navigation Aérienne au 16 avril suivant, date d'arrivée du frêt à destination, huit jours pleins et non dix jours mentionnés audit arrêt; que cette augmentation de la durée du transport de deux jours constitue une erreur de calcul, une dénaturation des faits de la cause.

Attendu que cette dénaturation a effectivement influencé la décision de la Cour d'Appel des Gonaïves dans l'appréciation des négligences reprochées à la compagnie aérienne; qu'ainsi l'ouvre attaquée encourt à bon droit la critique articulée à ce moyen, ce qui la fera casser avec les conséquences de droit.

Par ces motifs, la Cour, Le Ministère Public entendu, casse et annule l'arrêt du 20 juin 1979 rendu sur renvoi par la Cour d'Appel des Gonaïves, ordonne la restitution de l'amende consignée.

Et jugeant définitivement au vou de la l'article 119 de la Constitution:

Attendu que, le 25 avril 1974, la dame Marie Thérèse Etienne avait confié à Port-au-Prince à la PAN AMERICAN WORLD AIRWAYS INC., pour être transporté à Curaçao quatre colis d'articles en acajou vernis, pesant au total 206 kilos; que l'expéditrice, pour en prendre personnellement livraison avait précédé l'arrivée des marchandises à destination; que, prétendant y être restée dix jours, du 8 au 18 avril, dans une vaine attente, elle dut regagner Haïti et, après maintes démarches sans succès auprès de la PANAM, ajourna cette dernière pour entendre dire par la Chambre des Affaires Commerciales du Tribunal Civil de Port-au-Prince que les marchandises étaient égarées; retenir la responsabilité de la Compagnie;la condamner à payer à la demanderesse la somme de 200.00 dollars d'indemnité outre les dépens; accorder l'exécution provisoire sans caution du jugement.

Attendu qu'à cette action la défenderesse originaire a opposé d'abord l'irrecevabilité de la demande, sous prétexte que la dame Etienne ne s'est pas conformée aux prescriptions de la loi du 16 septembre 1960 en produisant sa carte d'identité professionnelle, puis, au fond elle a combattu les prétentions de la demanderesse et a conclu au rejet de l'action.

Sur la fin de non-recevoir

Attendu que la Dame Marie Thérèse Etienne a satisfait à cette exigence purement fiscale; qu'elle a versé à son dossier produit à la Cour d'Appel sa carte pour l'exercice 1975-1976 et pour celui 1973-1974 au cours duquel elle eut à initier son instance; que la fin de non recevoir, devenant sans objet, sera écartée.

Sur une exception de la demanderesse: Attendu que, de son côté, la dame Etienne a soulevé une exception et a demandé à la juridiction saisie d'écarter une partie des pièces soumises par la PANAM, au motif que: 1o) certaines de ces pièces n'ont pas été discutées en première Instance: 2o) d'autres rédigées en anglais, sont traduites en français sans que cette traduction ait été ordonnée par la justice Haïtienne.

Attendu que, d'une part, l'examen des décisions révèle que les premières pièces ont été débattues au cours de l'Instance d'Appel à Port-au-Prince et régulièrement communiquées; que, d'autre part, les pièces, rédigées en langues étrangères, émanent d'une administration publique de Curaçao et sont accompagnées de leur traduction certifiées conforme et légalisée par un juge de ce pays, qu'il y a lieu d'y faire foi sans ordonner une nouvelle traduction; d'où le rejet de l'exception.

Au fond: Attendu que la demanderesse originaire fait reposer son action sur la violation du Contrat de transport, particulièrement sur le retard mis par la PANAM à faire aboutir à destination les colis à elle confiés, points sur lesquels s'est contradictoirement débattu le procès tant en Première Instance que devant les Cours d'Appel de Port-au-Prince et des Gonaïves.

Attendu que la durée du transport des 4 colis même ramenée à son calcul exact soient les huit jours, n'est pas moins excessive, s'agissant de transport aérien ou de transport où la diligence demeure la règle et ou toute perte de temps entraîne la responsabilité du transporteur.

Attendu que ce retard tient à la lenteur mise à l'exécution de ce contrat; qu'en effet les marchandises confiées le 8 avril 1974 à la PANAM sont restées en dépôt à Port-au-Prince trois jours avant d'être expédiées le 11 avril à Porto-Rico, puis cinq autres jours en ce point de transit avant d'être acheminée le 16 avril à Curaçao, alors que le transporteur s'était engagé à les faire parvenir à destination avec diligence raisonnable et qu'il n'ignorait pas que l'expéditrice avait gagné le même 8 avril Curaçao pour attendre son frêt.

Attendu que le comportement de la Cie à l'endroit de la Dame Etienne établit amplement la faute de la PANAM: 1o) La ligne de Navigation Aérienne n'a pu fournir à sa cliente au retour de cette dernière en Haïti le 18 avril des renseignements exacts au sujet de colis à elle confiés; que, selon la Cie, le frêt était encore à cette date à Porto-Rico alors que, d'après les documents du procès, il se trouvait déjà à Curaçao; 2o) Sommé le 19 avril par l'expéditrice d'avoir à lui restituer les marchandises, la PANAM s'est repliée dans une indifférence totale, dans le silence; 3o) Assignée le 25 Avril,ce fut alors qu'elle apprit par ses conclusions de défenses, à la demanderesse que le frêt était tenu à ses ordres à la douane de Curaçao; que ce comportement prouve bien le peu de diligence qu'a porté le transporteur à l'obligation par lui contractée.

Attendu que la PANAM ne devait jamais perdre de vue, comme il se constate en l'espèce-, que le facteur - temps joue un rôle prépondérant dans la Navigation Aérienne; que, si la dame Etienne avait confié ses quatre colis à la ligne de transport, c'était précisément dans le but de gagner du temps, par conséquent dans l'espoir de recevoir ses marchandises dans le meilleur délai, d'éviter les charges d'un séjour coûteux et prolongé; que le moindre retard enregistré durant le trajet engendre à défaut de preuve libératoire la responsabilité de la Compagnie.

Attendu que, malgré ses conclusions tendant à faire écarter sa responsabilité, la PANAM n'est pas arrivée à administrer la preuve libératoire qui lui incombe; qu'elle n'a pu, en l'espèce, ni établir l'absence de faute de sa part ou de la part de ses préposés, ni renverser cette faute sur la Dame Etienne.
Attendu que la demanderesse est restée dix longs jours à Curaçao dans une vaine attente, entreprenant partout des démarches pour retrouver ses colis et supportant seule de lourds frais d'hôtel, de transport à travers cette ville, d'assistance d'intermédiaire et autres (sic).

Qu'ayant épuisé toutes ses réserves, même des valeurs empruntées sur place, la dame Etienne, lasse de traîner une vie de tourments et de privation en terre étrangère, a dû regagner son pays, sans avoir reçu ses colis, sans les avoir écoulés, sans réaliser le profit qu'elle escomptait, sans argent, plutôt avec de nouvelles dettes; que, n'était-ce ce retard produit pendant la période du transport aérien la Dame Etienne n'aurait pas subi ces dommages en raison d'un fret qu'elle avait confié aux soins de la PANAM AMERICAN WORLD AIRWAYS INC.

Attendu qu'aux termes de l'article 19 de la Convention de Varsovie le transporteur est responsable des dommages résultant du retard dans le transport aérien de voyageurs, "Bagages ou marchandises"; qu'il y a donc lieu de condamner la PANAM à restituer les quatre colis concernés, plutôt à payer leur contre-valeur vu que le transporteur n'a pas apporté la preuve que ces marchandises se trouvent encore à la Douane de Curaçao, la Compagnie Aérienne Antillaise Hollandaise ayant mentionné dans un avis daté du 2 mai 1974 la Douane de Curaçao confisquera les articles le 16 mai 1974.

Attendu que, pour l'évaluation des marchandises, il sera tenu compte du poids de 206 kilos portés au contrat de transport et du coût limité de 16 dollars 50 fixé par la Convention de Varsovie à l'article 22, 2ème alinéa; que le montant obtenu tiendra lieu de dommages-intérêts dus pour le retard.

Attendu que l'exécution provisoire sans caution de la décision ne sera pas ordonnée, vu que la demande est devenue sans objet.

Par ces motifs, la Cour, le Ministère Public entendu, rejette la fin de non-recevoir de la PANAM ainsi que l'exception proposée par la Dame Marie Thérèse Etienne; dit que cette ligne de navigation Aérienne est fautive en raison du retard mis à faire aboutir à destination le fret à elle confié par ladite Dame, condamne, en conséquence, la PANAM AMERICAN WORLD AIRWAYS INC. à payer à Mme Marie Thérèse Etienne la contre-valeur des 4 colis d'articles en acajou pesant deux cent six kilos, soit la somme de trois mille trois cent quatre vingt dix neuf dollars; rejette l'exécution provisoire sollicitée; condamne la Compagnie Aérienne succombante aux frais et dépens liquidés à la somme de ........ Gourdes, en ce, non compris le coût du présent arrêt.

Ainsi jugé et prononcé par Nous, Fournier Fortuné, Président, Malherbe Daniel, Vice-Président, Elie Legagneur, Gabriel H. Volcy, Pierre L. Jeannot, Gilbert Austin et Georges Henry, Juges, à l'audience publique solennelle du vendredi quatorze Mars mil neuf cent quatre vingt, en présence de Monsieur Jean D. Kalim, Substitut du Commissaire du Gouvernement, avec l'assistance de Louis A. Day, Greffier.


Synthèse
Numéro d'arrêt : 14-03-80
Date de la décision : 14/03/1980
Sections réunies

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ht;cour.cassation;arret;1980-03-14;14.03.80 ?
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