La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

22/03/2022 | FRANCE | N°18/4575

France | France, Tribunal de grande instance de Paris, Ct0196, 22 mars 2022, 18/4575


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS

3ème chambre
3ème section

No RG 18/04575 -
No Portalis 352J-W-B7C-CMYBJ

No MINUTE :

Assignation du :
10 avril 2018

JUGEMENT
rendu le 22 mars 2022
DEMANDERESSE

Société JET METAL TECHNOLOGIES
[Adresse 2]
[Localité 3]

représentée par Maître Sonia-Maïa GRISLAIN, avocat au barreau de PARIS, avocat postulant, vestiaire #A0035 et par Maître Nicolas MARTIN-TEILLARD, avocat au barreau de LYON, avocat plaidant

DÉFENDERESSES

Société INFOPE INVESTISSEMENT FORMULATION

PEINTURE
[Adresse 1]
[Adresse 8]
[Localité 4]

S.A.S. FLUIDEMAIL
[Adresse 7]
[Localité 5]

représentées par Maître Francine TOUCHARD VONTRAT...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS

3ème chambre
3ème section

No RG 18/04575 -
No Portalis 352J-W-B7C-CMYBJ

No MINUTE :

Assignation du :
10 avril 2018

JUGEMENT
rendu le 22 mars 2022
DEMANDERESSE

Société JET METAL TECHNOLOGIES
[Adresse 2]
[Localité 3]

représentée par Maître Sonia-Maïa GRISLAIN, avocat au barreau de PARIS, avocat postulant, vestiaire #A0035 et par Maître Nicolas MARTIN-TEILLARD, avocat au barreau de LYON, avocat plaidant

DÉFENDERESSES

Société INFOPE INVESTISSEMENT FORMULATION PEINTURE
[Adresse 1]
[Adresse 8]
[Localité 4]

S.A.S. FLUIDEMAIL
[Adresse 7]
[Localité 5]

représentées par Maître Francine TOUCHARD VONTRAT de la SELEURL FTO AVOCAT, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #B0838

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Nathalie SABOTIER, 1ère vice-présidente adjointe
Arthur COURILLON-HAVY, juge
Alix FLEURIET, juge

assisté de Lorine MILLE, greffière,

DÉBATS

A l'audience du 10 novembre 2021 tenue en audience publique devant Nathalie SABOTIER et Arthur COURILLON-HAVY, juges rapporteurs, qui, sans opposition des avocats, ont tenu seuls l'audience, et, après avoir entendu les conseils des parties, en ont rendu compte au Tribunal, conformément aux dispositions de l'article 805 du Code de Procédure Civile. Avis a été donné aux avocats que le jugement serait rendu par mise à disposition au greffe le 25 janvier 2022, prorogée au 22 mars 2022.

JUGEMENT

Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe
Contradictoire
En premier ressort

____________________________

Exposé du litige

1.La société Jet métal technologies (ci-après « Jet métal »), spécialisée dans les revêtements métalliques, reproche aux sociétés Infope investissement formulation peinture (ci-après « Infope ») et Fluidémail de vendre des produits de métallisation en préconisant et décrivant auprès de leurs clients l'emploi d'un procédé contrefaisant deux brevets dont elle est titulaire, et par des moyens qu'elle qualifie de concurrence déloyale et parasitaire. Les défenderesses contestent la validité de ses brevets.

2.Elle est ainsi titulaire :

- d'un brevet français intitulé « Procédé non électrolytique de métallisation en ligne de substrats par projection avec traitement de surface préalable et dispositif pour la mise en oeuvre de ce procédé », dont la demande a été déposée le 30 juillet 2008, enregistrée sous le no FR 0855262 et publiée (le 5 février 2010) sous le no FR 2 934 609, brevet délivré le 22 juillet 2011 (ci-après le brevet FR 609) ; et

- d'un brevet européen du même nom, désignant la France, issu d'une demande internationale no PCT/ EP2009/ 059889 déposée le 30 juillet 2009 (publiée le 4 février 2010 sous le no WO 2010/012810) sous priorité de la demande française 0855262, et publiée en Europe sous le no EP 2 326 747 (le 1er juin 2011), brevet européen délivré le 11 mars 2015 (ci-après le brevet EP 747) ;

lesquels brevets sont régulièrement maintenus en vigueur par le paiement des annuités.

3.Après une saisie-contrefaçon pratiquée le 14 mars 2018 sur autorisation du 9 février, la société Jet métal a assigné le 10 avril 2018 les sociétés Infope et Fluidémail (ainsi que le 18 avril, des sociétés du groupe Carbon, ancien client devenu client des défenderesses, mais envers qui elle s'est ensuite désistée) en contrefaçon des deux brevets, et concurrence déloyale et parasitaire.

4.Dans ses dernières conclusions signifiées par voie électronique le 19 mai 2021, la société Jet métal s'oppose aux demandes reconventionnelles en nullité des saisie-contrefaçon, et demande elle-même :
?Invoquant la contrefaçon des revendications 1, 2, 4, 6, 8, 9, 10, 12, 13, 14 du brevet FR 609, et des revendications 1, 2, 3, 4, 5, 8, 9, 10 du brevet « EP232674 », de
?Interdire aux sociétés Fluidémail et Infope, en substance, de contrefaire le brevet français no 08 55262 et le brevet international PCT/EP2009/059889, sous astreinte définitive de 1 500 euros par produit contrefaisant fabriqué et/ou commercialisé,
?Condamner ces sociétés à lui verser les sommes à parfaire de 500 000 euros pour le manque à gagner, 250 000 euros pour les pertes subies et 50 000 euros pour le préjudice moral au titre des actes de contrefaçon,
?Invoquant des actes de concurrence déloyale et de parasitisme, de
?Condamner les mêmes sociétés à lui verser « chacune les sommes à parfaire de 100 000 euros au titre des actes de concurrence déloyale, 100 000 euros à titre de parasitisme et de 50 000 euros pour l'atteinte à son image,
?À titre subsidiaire, une expertise aux frais avancés des sociétés défenderesses, pour « évaluer l'influence de la méthode de pulvérisation des solutions d'oxydoréduction (aérosol ou pas d'aérosol) sur le rendement de la métallisation ainsi que sur l'aspect des pièces métallisées »
? et en tout état de cause,
?la publication du jugement dans 5 journaux et sur les sites internet des défenderesses,
?enjoindre aux défenderesses de lui communiquer « des documents comptables certifiés permettant de déterminer les quantités exactes de produits et les documents techniques relatifs au procédé contrefait, importés, commandés, reçus, livrés et vendus » par elles, sous astreinte de 500 euros,
?outre 70 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, les dépens y-compris les frais relatifs aux opérations de saisie-contrefaçon et de constat, et l'exécution provisoire.

5.Dans leurs dernières conclusions signifiées par voie électronique le 12 mai 2021, les sociétés Fluidémail et Infope résistent aux prétentions adverses et demandent elles-mêmes de :
?annuler les procès-verbaux des saisies-contrefaçon du 14 mars 2018 pratiquées respectivement dans les locaux du siège et de l'établissement secondaire de la société Fluidémail,
?« Ecarter des débats comme dépourvus de toute valeur probante, les procès-verbaux de saisie-contrefaçon ainsi dressés le 14 mars 2018, et, à tout le moins, les pièces de la société Jet metal technologies no 5B et les annexes au PV de saisie-contrefaçon communiquées sous le no 7.2 »
?annuler le brevet FR 609, entièrement (pour insuffisance de description), subsidiairement en annuler les revendications 1 à 12 (pour extension indue), plus subsidiairement les revendications 1, 2, 4, 6, 12 (pour défaut d'activité inventive) ;
?annuler la partie française du brevet européen EP 747 (pour insuffisance de description), « en tout état de cause » ses revendications 1 à 5, 8, 9 et 10 (pour défaut d'activité inventive),
?condamner la société Jet metal technologies à leur payer 200 000 euros de dommages et intérêts pour procédure abusive « et vexatoire »,
?ainsi que
?l'inscription du jugement au registre national des brevets,
?sa publication sur le site internet de la demanderesse,
?100 000 euros à chacune d'elles au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre 468,09 euros à la société Fluidémail pour le cout d'un constat d'huissier, ainsi que les dépens avec recouvrement par leur avocat.

6.L'instruction a été close le 20 mai 2021, l'affaire plaidée le 10 novembre et le jugement mis en délibéré.

MOTIFS

7.La demande tendant à voir écarter des pièces pour défaut de valeur probante est un moyen tendant au rejet des prétentions adverses, et sera examiné en tant que tel.

1) Sur la validité des procès-verbaux de saisie-contrefaçon

Moyens des parties

8.Les sociétés Infope et Fluidémail estiment les procès-verbal de saisie-contrefaçon nuls en ce que :
- l'ordonnance autorisant chaque saisie n'aurait pas été signifiée avant le début des opérations, la lecture préalable ne valant pas remise d'une copie comme l'exige le texte et l'absence de communication du procès-verbal de signification de ces ordonnances laissant supposer que ces significations ont été opérées de manière irrégulière, selon elles ;

- les procès-verbaux de ces saisies ne leur ont pas été laissés immédiatement après la clôture des opérations, alors que les ordonnances ne prévoyaient pas de délai et que le présent tribunal a déjà jugé qu'à défaut, le procès-verbal doit être « laissé » avant que l'huissier quitte les lieux ; et que les pièces annexées à ces procès-verbaux étaient dépourvues du cachet de l'huissier permettant d'attester de ce qu'il s'agissait bien des pièces saisies, et n'étaient pas accompagnées d'une liste ou d'un bordereau ; ce qui les aurait empêchées d'identifier les pièces rapidement et de solliciter la mise sous séquestre de documents portant sur les formulations de peintures et vernis, qu'elles estiment confidentiels ;

- enfin, l'huissier, dans chaque saisie, aurait posé un grand nombre de questions sur les procédés préconisés par les défenderesses (et qui plus est, dans la saisie faite au Perray, en exhibant un document (5B) sans autorisation), au lieu de se contenter de décrire ce qu'il voyait, et avant même de procéder à cette description ; de sorte qu'il aurait outrepassé sa mission, ce qui serait une irrégularité de fond justifiant la nullité des deux procès-verbaux.

9.La société Jet métal soutient que les ordonnances et requêtes ont été signifiées comme l'indiqueraient les procès-verbaux ; qu'aucun texte ne prévoirait une nullité de la saisie-contrefaçon au-delà d'un certain délai de remise du procès-verbal, et que celui-ci a en l'espèce été remis moins de 48 heures après l'accomplissement de chaque saisie ; que les huissiers auraient valablement posé des questions nécessaires dès lors qu'elles poursuivaient l'objectif de découvrir la matérialité et l'étendue de la contrefaçon, et pouvaient présenter le document 5B dès lors qu'il s'agissait d'une pièce présentée à l'appui des requêtes en saisie-contrefaçon ; outre qu'aucun texte ne prévoirait encore de nullité à ce titre, estime-t-elle.

Réponse du tribunal

a. remise préalable de la copie de l'ordonnance

10.En application de l'article R. 615-2-1 du code de la propriété intellectuelle, à peine de nullité et de dommages-intérêts contre l'huissier, celui-ci doit, avant de procéder à la saisie, donner copie, aux détenteurs des objets saisis ou décrits, de l'ordonnance et, le cas échéant, de l'acte constatant la constitution de garanties. Copie doit être laissée aux mêmes détenteurs du procès-verbal de saisie.

11.En l'espèce, dans le procès-verbal de la saisie-contrefaçon pratiquée au Perray en Yvelines, l'huissier mentionne qu'il arrive sur les lieux à 10h16, se présente à l'accueil, un responsable, en la personne de Mme [V] [H], se présente à sa demande, et après lui avoir expliqué « les raisons de [sa] présence » et constaté l'arrivée d'une deuxième personne de l'entreprise, à 10h21 l'huissier « procède donc à la signification de la requête et de l'ordonnance susvisées à Mme [H] [V], en qualité de responsable de site, tout en lui exhibant l'original. » Puis il lit l'ordonnance.

12.Dans le procès-verbal de la saisie-contrefaçon pratiquée à [Localité 6], l'huissier mentionne qu'il arrive sur les lieux à 10h10, se présente à l'accueil à 10h16, qu'un responsable, en la personne de M. [I] [E], se déclarant directeur d'exploitation, se présente à sa demande, et, à 10h20, l'huissier « signifie la requête et l'ordonnance susvisées à l'intéressé après, lui avoir présenté l'original de l'ordonnance » ; puis il lit l'ordonnance. La suite du procès-verbal révèle également que M. [E] est en possession de la copie de l'ordonnance (à 11h02 il s'absente pour l'envoyer au PDG, p.14, et à 11h20 la secrétaire s'adresse à lui pour lui en demander l'ensemble des pages pour envoi à l'avocat de la société, p.16).

13.De ces deux procès-verbaux il résulte que chacun des huissiers a procédé à trois actions distinctes : il a « signifié » l'ordonnance et la requête, « exhibé » ou « présenté » l'original de l'ordonnance, et lu l'ordonnance. La signification mentionnée ne correspond donc ni à une simple présentation de l'ordonnance, ni à sa lecture ; il ne peut donc s'agir que de la remise d'une copie de l'acte qui est lu et présenté par ailleurs. Cette remise étant faite avant de procéder à la saisie, la nullité n'est pas encourue de ce chef.

b. copie du procès-verbal laissée aux détenteurs des objets

14.L'article R. 615-2-1 précité impose à l'huissier de laisser une copie du procès-verbal aux détenteurs des objets saisis ou décrits. Si le verbe « laisser » peut correspondre, comme le soulèvent les sociétés Fluidémail et Infope, à la situation où c'est avant de partir du lieu de la saisie que l'huissier « laisse » son procès-verbal à la personne présente, en déduire qu'il s'agit d'une situation exclusive relève d'une interprétation relativement incertaine d'un terme isolé, et qui ne peut donc fonder à elle seule un délai de formalité soumis à nullité. À l'inverse, le texte pris dans son ensemble ne mentionne aucun délai ni aucune restriction, le verbe « laisser » pouvant également s'entendre dans un sens très général visant à autoriser la remise immédiate pour se dispenser ainsi d'une signification ultérieure, mais sans imposer pour autant cette remise immédiate ; et ce d'autant moins que la mise en forme claire et lisible du procès-verbal par l'huissier peut légitimement requérir un temps relativement important, sans imposer la présence du saisi. Il ne peut donc être déduit de la lettre comme de l'esprit de l'article R. 615-2-1 que celui-ci imposerait la remise immédiate, et c'est au demeurant en ce sens qu'il est généralement interprété par la jurisprudence, nonobstant l'unique jugement du présent tribunal (3 octobre 2013) statuant en sens inverse, cité par les sociétés Fluidémail et Infope.

15.En revanche, il est évident que la copie du procès-verbal doit être laissée dès que possible, afin de permettre au saisi d'en apprécier le contenu au plus près du moment où ont été accomplis les faits qu'il rapporte. À cet égard, un délai de 48h n'est pas nécessairement excessif, et il ressort des deux procès-verbaux en l'espèce que la durée des saisies (débutées à 10h15 et achevées à 14h45 pour l'une et 17h25 pour l'autre), et leur ampleur, pouvaient justifier ce délai. Les procès-verbaux du 14 mars, dont la société Jet métal allègue qu'ils ont été remis le 16 mars sans être contredite par les sociétés Infope et Fluidémail qui affirment seulement que la remise a eu lieu « plusieurs jours après la clôture des opérations », ce qui est compatible, ne sont donc pas nuls de ce chef.

c. liste des pièces annexées et cachet de l'huissier

16.Les ordonnances ayant autorisé les deux saisies en l'espèce obligeaient également l'huissier à annexer au procès-verbal un exemplaire des documents prélevés ou copiés. Les sociétés Infope et Fluidémail font valoir qu'à défaut de liste des pièces et de cachet sur chaque pièce il est impossible de connaitre rapidement les pièces annexées et de s'assurer qu'elles proviennent bien de la saisie, ce qui nuirait à l'objectif de l'article R. 615-2-1, et les aurait empêchées de demander la mise sous séquestre de ces pièces.

17.Toutefois, cet article ne prévoit pas spécialement une telle obligation, et les demanderesses à la nullité n'invoquent aucune autre disposition qui le prévoirait. Or par hypothèse, les documents annexés au procès-verbal de saisie sont issus de celle-ci, et ont été pris au détenteur, en sa présence. Le saisi est donc la personne la mieux placée pour savoir ce qui a été saisi, et une liste de pièces en plus des pièces elles-mêmes n'est dès lors pas nécessaire à son information. En outre, les procès-verbaux en l'espèce relatent précisément l'obtention des documents au cours de la saisie, ce qui est un moyen suffisant pour les identifier dès lors que le procès-verbal n'est pas d'une longueur extrême et que l'obtention des documents est précisément son objet principal. Il ne peut donc pas être déduit du silence de la règlementation une telle obligation de faire figurer une liste de pièces, qui n'est pas nécessaire à l'objectif que cette règlementation poursuit.

18.Quant au cachet de l'huissier, il n'ajouterait rien de nécessaire à un ensemble de documents annexés à son propre procès-verbal, remis dans un très court délai par l'huissier directement au saisi, lequel a pu constater leur obtention, et dont il est donc à même de contester l'origine. Le cachet de l'huissier peut s'avérer utile dans le cas où les annexes du procès-verbal détenu par le saisi diffèreraient de celles du procès-verbal détenu par le saisissant. Mais ce cas, improbable, n'est en toute hypothèse pas celui de la présente espèce.

d. questions posées par l'huissier et respect de sa mission

19.La saisie-contrefaçon, prévue par l'article L. 615-5 du code de la propriété intellectuelle, consiste soit en la description détaillée, avec ou sans prélèvement d'échantillons, soit en la saisie réelle des produits ou procédés prétendus contrefaisants ainsi que de tout document s'y rapportant. L'ordonnance peut autoriser la saisie réelle de tout document se rapportant aux produits ou procédés prétendus contrefaisants en l'absence de ces derniers. L'article R. 615-2 (4e alinéa) précise que le président peut autoriser l'huissier à procéder à toute constatation utile en vue d'établir l'origine, la consistance et l'étendue de la contrefaçon.

20.La saisie-contrefaçon vise donc à rapporter la preuve matérielle de la contrefaçon et de son étendue, et non l'aveu du contrefacteur suspecté ; elle ne peut donner lieu à un interrogatoire, et tout procédé qui amènerait le saisi à s'incriminer lui-même sans bénéficier des garanties attachées au droit au procès équitable, et en premier lieu la certitude qu'il peut ne pas répondre, ce qui n'est pas garanti lors d'une mesure de contrainte menée par un officier ministériel en présence, souvent (et comme en l'espèce) de représentants de la force publique, porterait une atteinte non justifiée à ce droit, protégé par l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales.

21.Tel est le cas, en particulier, de questions qui, au lieu de faciliter ou éclairer la description, la saisie réelle, ou les constatations relatives à l'étendue de la contrefaçon, comme les questions sur l'emplacement, le fonctionnement, le but, la pertinence en général d'objets ou de documents à décrire ou saisir, visent au contraire à obtenir directement une preuve verbale de la contrefaçon ou de son étendue de la part des personnes présentes elles-mêmes.

22.Les réponses ainsi obtenues doivent être annulées, et tous les actes dont elles sont le support nécessaire. Le reste des procès-verbaux de saisie-contrefaçon, en revanche, s'il n'en dépend pas, n'en est pas affecté.

Application à la saisie du Perrey en Yvelines

23.Le procès-verbal de la saisie pratiquée au Perrey en Yvelines (pièce Jet métal no7.1) révèle qu'après signification, présentation et lecture de l'ordonnance, l'huissier demande aux deux personnes présentes, Mme [H] et M. [O], « comment est gérée la demande d'un client qui s'adresse à eux » pour le procédé d'argenture de la société, puis « si des brochures ou de la documentation est adressée à leurs clients pour qu'ils aient connaissance du process à suivre ». Mme [H] répond qu'il « conviendrait d'aller voir sur le serveur » et M. [O] qu'une « fiche technique est présentée aux clients, identique à celle annexée à l'appui de la requête ». Ces questions initiales tendent à rechercher des documents par lesquels le saisi recommanderait à ses clients de reproduire le procédé breveté. Elles sont donc licites.

24.Puis le conseil en propriété industrielle de la demanderesse suggère à l'huissier « d'interroger Mme [H] et M. [O] sur l'oxydo-réduction », ce qu'il fait. Cette question, qui ne repose sur aucune découverte sur place, tend ainsi à obtenir une preuve de la part des personnes présentes. La partie du procès-verbal qui contient la réponse doit dès lors être cancellée (p. 9 dernier §). La suite est la réaction à cette question nulle puis d'autres questions consistant en un interrogatoire sur le procédé, nulles également (pp. 10 et 11, en entier).

25.En revanche, les explications fournies en p. 12 le sont au vu des fiches de données de sécurité fournies au client (licitement demandées préalablement, p. 9), et correspondent donc aux déclarations et questions nécessaires à l'accomplissement de la mission, autorisées par l'ordonnance. Page 13, la question posée sur le vernis tend rapidement à la recherche de documents (une fiche technique) sur les vernis utilisés, ce qui est licite. De même, ensuite, les questions sur les documents comptables, puis la recherche informatique. Par ailleurs, la présentation d'un document qui était produit au soutien de la requête est licite.

26.Par conséquent, le procès-verbal doit être annulé, mais seulement les parties suivantes : p. 9 dernier paragraphe, p. 10 et p. 11.

Application à la saisie de [Localité 6]

27.Le procès-verbal de la saisie pratiquée à [Localité 6] (pièce Jet métal no7.2) révèle qu'après signification de l'ordonnance, la personne présente, M. [E], confirme à l'huissier avoir « appréhendé l'objet de [sa] mission », puis donne spontanément une explication sur sa connaissance du brevet ; l'huissier demande ensuite la liste des produits vendus par la société Infope mettant en oeuvre le procédé d'argenture, plus tard M. [E] « déclare » que la société Infope vend et préconise « tout ce qui relève du procédé relatif à l'argenture ». L'huissier lui demande alors de lui « décrire ledit procédé tel qu'il est préconisé » et « l'interroge en lui demandant si la société Infope communique à ses clients (...) des préconisations attachées » à ce procédé. M. [E] confirme en ajoutant qu'une notice explicative est remise aux clients, et part imprimer les documents communiqués aux clients. Plus tard, il remet une fiche de préparation des produits et explique ce qui est préconisé. Toutes ces questions ne tendent qu'à permettre la découverte des objets et documents recherchés, et à en comprendre la pertinence et le fonctionnement. Elles sont licites. Il en va de même pour les recherches ultérieures, les explications données sur les documents et la machine découverts.

28.En revanche, lorsque l'huissier demande à M. [E] de lui « détailler la composition du liquide I », « comment le traitement des surfaces du substrat est opéré », et « si, avant l'activateur, vous préconisez un autre traitement », il recherche une information supplémentaire, non nécessaire à l'accomplissement de sa mission, et les réponses données à ces questions ainsi que les réponses supplémentaires qu'elles ont suscitées sont nulles (p. 15 du 4e§ à la fin, p. 16 1er, 2e, 4e et 5e §).

2o) Demande reconventionnelle en nullité du brevet FR 609

a. présentation du brevet et objet des demandes

29.Les parties forment des demandes sur et contre un brevet français et la partie française d'un brevet européen, ayant le même inventeur et la même date de priorité. Celle-ci est toutefois contestée s'agissant du brevet européen, et les parties ne soulèvent pas la substitution du brevet français par le brevet européen. Les deux devront donc être examinés distinctement.

30.En vertu de l'article L. 613-25, 3e alinéa du code de la propriété intellectuelle, dans le cadre d'une action en nullité du brevet, son titulaire est habilité à limiter le brevet en modifiant les revendications ; le brevet ainsi limité constitue l'objet de l'action en nullité engagée. Au cours de la présente instance, la société Jet métal a requis et obtenu la limitation du brevet, en précisant à la revendication 1 que le traitement physique de diminution de la tension de surface du substrat était un flammage, et en supprimant en conséquence les revendications 4 et 5, ramenant ainsi le nombre total de revendications à 13 au lieu de 15 (pièce Jet métal no11E). Elle n'a toutefois pas modifié les numéros des revendications qu'elle cite au soutien de son action en contrefaçon, faisant toujours référence aux revendications 4, 14 et 15, qui n'existent plus. Il faut ainsi lire, lorsqu'elle allègue la contrefaçon de ses revendications « 1, 2, 4, 6, 8, 9, 10, 13 et 14 », en réalité les revendications 1, 2, 4, 6, 7, 8, 11 et 12 du brevet limité. Seules ces revendications forment l'objet du litige en contrefaçon, et la demande reconventionnelle en nullité n'est, elle-même, recevable que dans la mesure où elle porte sur ces revendications, les défenderesses à la contrefaçon ne justifiant pas d'intérêt à soulever les revendications qui ne leur sont pas opposées.

31.L'invention porte sur un procédé industriel de revêtement de la surface d'objets (les « substrats ») par un film métallique, autrement dit de métallisation, et plus particulièrement par un procédé non électrolytique.

32.La description enseigne que l'application industrielle la plus ancienne est « l'argenture du verre », pour la fabrication de miroirs (p. 1), qui a été adaptée à la décoration d'objets notamment en plastique dont l'une des étapes prévoyait d'appliquer un vernis de finition (p. 2 lignes 10-26) ; puis qu'a été divulgué un procédé par projection d'un aérosol contenant un métal sous forme cationique (oxydant) et un réducteur, avec une étape préalable de mouillage de la surface du substrat, mais qui ne prévoit pas « l'optimisation de l'industrialisation du procédé » ni « l'amélioration des performances d'adhésion du film à la surface à métalliser en fonction de chaque substrat » (p. 2, lignes 1-9). Existe encore un procédé de métallisation sous vide (sous pression réduite) qui a l'inconvénient d'impliquer des étapes supplémentaires couteuses en temps et en main d'oeuvre (p. 2, lignes 28-34).

33.L'invention se donne alors pour objectifs de disposer d'un procédé industriel qui favorise l'adhésion du film métallique à la surface du substrat, est propre avec des effluents recyclables, peut être mis en oeuvre à l'aide d'une installation compacte, ou peut s'adapter à chaque substrat pour améliorer l'adhérence du film et l'aspect décoratif.

34.À cette fin, le brevet décrit un procédé caractérisé par trois étapes :
a. traitement physique ou chimique de diminution de la tension de surface du substrat avant métallisation,
b. métallisation non électrolytique de la surface du substrat traitée à l'étape a., par projection d'une ou plusieurs solutions oxydo-réductrices sous forme d'aérosol(s),
c. réalisation d'une couche de finition sur la surface métallisée.

35.Pour réaliser l'étape a., parmi les nombreux traitements de diminution de la tension de surface évoqués, la description cite le flammage, le passage sous une torche à plasma comme celle de commercialisée par Plasmatreat, le polissage à base d'oxyde de terre rare dont, de préférence, l'oxyde de cérium.

36.Ces traitements « ont pour effet de diminuer la tension de surface du substrat et donc d'augmenter la mouillabilité de ce substrat par les solutions qui sont ensuite projetées » (p. 6, l. 20-23).

37.Le brevet limité contient 13 revendications, dont sont soulevées en l'espèce les suivantes :

1. Procédé de métallisation de la surface d'un substrat caractérisé en ce que l'on met en oeuvre les étapes suivantes :
a. traitement physique de diminution de la tension de surface du substrat avant métallisation, ledit traitement physique étant un flammage,
b. métallisation non électrolytique de la surface du substrat traitée à l'étape a., par projection d'une ou plusieurs solutions oxydo-réductrices sous forme d'aérosol(s),
c. réalisation d'une couche de finition sur la surface métallisée.

2. Procédé de métallisation selon la revendication 1, caractérisé en ce que le substrat est un substrat rigide choisi parmi les composés suivants : le verre, les matières plastiques, les métaux, les matériaux composites, les alliages et les polymères.

4. Procédé de métallisation selon la revendication 1, caractérisé en ce que l'étape c. de réalisation d'une couche de finition est l'application d'une composition liquide réticulable de finition sur la surface métallisée, de préférence un vernis.

6. Procédé de métallisation selon l'une des revendications précédentes, caractérisé en ce que le substrat est soumis, préalablement à l'étape a., aux étapes suivantes :
- prétraitement d'accrochage de la surface du substrat,
- application d'au moins une couche d'un revêtement de base.

7. Procédé de métallisation selon l'une des revendications précédentes, caractérisé en ce que l'étape de métallisation non électrolytique comprend, dans l'ordre, les étapes suivantes :
- éventuellement projection éventuelle d'une solution de sensibilisation à base de chlorure stanneux
- éventuellement rinçage,
- projection d'une ou plusieurs solutions oxydo-réductrices sous forme d'aérosol,
- rinçage,
- éventuellement séchage.

8. Procédé de métallisation selon l'une quelconque des revendications précédentes, caractérisé en ce que la projection a une durée de 0,5 à 200 secondes, de préférence 1 à 50 secondes et plus préférentiellement de 2 à 30 secondes pour une surface à métalliser de 1 dm².

11. Dispositif pour la mise en oeuvre du procédé tel que défini à l'une quelconque des revendications précédentes qui comprend les éléments suivants ;
- un module de traitement physique, par flammage, de diminution de la tension de surface de substrats,
- un module de métallisation non électrolytique,
- un module de réalisation d'une couche de finition.

12. Substrat métallisé obtenu par le procédé tel que défini à l'une quelconque des revenciations 1 à 10, le substrat étant un verre creux notamment à usage cosmétique, une pièce d'automobile, une pièce pour la domotique ou pour l'aéronautique.

b. suffisance de description

Moyens des parties

38.Les sociétés Fluidémail et Infope exposent qu'alors que le traitement préalable revendiqué comme l'étape a) de l'invention, visant à améliorer l'adhérence du film métallique, a pour conséquence connue de l'homme du métier, défini comme le spécialiste des traitements de surface, une augmentation de la tension de surface et de l'énergie de surface du substrat, le brevet affirme au contraire dans la description et dans la revendication 1 que ce traitement entraine une diminution de la tension de surface ; que cela empêcherait l'homme du métier d'exécuter l'invention en l'empêchant d'atteindre l'objectif revendiqué, sans que l'on puisse distinguer entre des caractéristiques essentielles ou secondaires, et sans que soient opérantes la possibilité d'atteindre le « résultat décrit » ni la présence dans la description d'un exemple pouvant être exécuté, dès lors que le procédé ainsi mis en oeuvre ne serait pas le procédé revendiqué, et ce d'autant plus, ajoutent-elles, que l'exemple peut donner lieu au résultat grâce à des conditions qui ne figurent pas à la revendication 1 mais à d'autres revendications (6 et 7).

39.Elles font valoir par ailleurs qu'alors que la présence d'un gaz véhiculant le liquide à l'étape b) est invoquée par la société Jet métal comme une caractéristique essentielle, le brevet ne contient aucune indication sur ce gaz, ne donne que des informations très générales (obtenir un brouillard de gouttelettes de taille inférieures à 100 microns, de préférence moins de 60, plus préférentiellement encore de 0,1 à 50 microns), et ne représente aucun moyen de projection ni ne cite aucun moyen de pulvérisation du commerce, se contentant de mentionner « par exemple une série de pistolets grand volume et basse pression HLVP » ; de sorte, selon elles, que l'homme du métier ne pourrait exécuter l'étape b) dans toute sa portée, c'est-à-dire quelles que soient les solutions oxydo-réductrices, les aérosoles, et les substrats, le problème technique étant justement, précisent-elles par ailleurs, l'optimisation du procédé, déjà connu, et l'amélioration de l'adhésion, en l'adaptant à différents substrats.

40.La société Jet métal, selon qui l'homme du métier est le spécialiste de « la métallisation de surface des substrats par des procédés non-électrolytiques de revêtement pour la décoration ou la réalisation de pistes conductrices en électronique », soutient qu'il suffit, pour que le brevet soit suffisamment décrit, qu'il contienne dans son ensemble toutes les indications permettant à l'homme du métier de mettre en oeuvre le procédé décrit et revendiqué, sans qu'il soit nécessaire d'expliquer comment l'invention fonctionne ; et que cette condition serait remplie en l'espèce dès lors que le résultat décrit serait la « caractéristique factuelle » ou « conséquence factuelle » tenant à l'augmentation de la mouillabilité du substrat et de l'adhésion du film métallique qu'on y projette, et serait parfaitement décrit et reproductible, grâce notamment aux exemples qui donnent un protocole reproductible, sans que la question du sens de la notion de tension de surface soit pertinente.

41.Elle ajoute à cet égard que le brevet peut « être son propre dictionnaire » et donner à la notion un « sens spécial prépondérant », et qu'elle a défini la tension de surface dans son brevet européen comme étant inversement proportionnelle à l'énergie de surface ; que même si l'homme du métier prenait en considération une autre interprétation, il devrait être animé de l'intention de comprendre et donner un sens à la description et aux revendications, sans s'arrêter à une prétendue ambigüité qu'il devrait confronter aux enseignement du brevet et à ses propres connaissances ; qu'en toute hypothèse la connaissance de l'homme du métier alléguée par les sociétés Infope et Fluidémail s'appuie sur des documents non probants car consistant en des copies d'écran internet non constatées par un huissier, comportant des incohérences, des documents n'ayant pas date certaine et dont seule la première page est datée, et qui sont éloignés du domaine technique, ou consistent en un brevet alors que les connaissances générales de l'homme du métier n'englobent pas les brevets ni les articles scientifiques.

Réponse du tribunal

42.Selon l'article L.613-25 du code de la propriété intellectuelle, « Le brevet est déclaré nul par décision de justice : (...)
b) S'il n'expose pas l'invention de façon suffisamment claire et complète pour qu'un homme du métier puisse l'exécuter ; »

43.L'exigence de suffisance de description, qui a pour finalité de garantir la possibilité pour l'homme du métier d'exécuter l'invention sans effort excessif grâce aux informations fournies par l'ensemble du brevet et ses propres connaissances techniques, est satisfaite dès lors que la description indique les moyens qui donnent à l'homme du métier, doté des capacités et des connaissances que l'on est en droit d'attendre de lui, la possibilité d'exécuter ou de mettre en oeuvre l'invention en faisant un effort raisonnable de réflexion, par exemple des essais de routine.

44.L'homme du métier est celui du domaine technique où se pose le problème que l'invention, objet du brevet, se propose de résoudre (Cass. Com., 20 novembre 2012, pourvoi no11-18.440). Il peut s'aider de la description et des dessins pour reproduire l'invention (Cass. Com., 20 mars 2007, pourvoi no05-12.626), ainsi que de ses connaissances générales.

45.En l'espèce, le domaine de l'invention est la métallisation de surface, dont l'homme du métier est donc spécialiste. Ce domaine inclut les connaissances générales sur les traitements de surface ayant un effet sur l'adhérence, laquelle est une des conditions de la métallisation.

46.Les demanderesses à la nullité se prévalent d'explications données par une société Plasmatreat à ses clients, exposées sur son site internet avant la date de dépôt du brevet, le 28 octobre 2007 (pièce no3bis) et le 10 avril 2008 (pièce no3), telles qu'elles ont été archivées par « l'Internet archive way-back machine » (archive.org), et selon lesquelles l'adhérence durable d'un liquide à un revêtement dépend de la tension de surface du matériau qui doit être supérieure à celle du liquide ; et qu'ainsi par son traitement plasma, la tension est augmentée, et l'on peut imprimer ou faire adhérer une matière d'une façon optimale dans l'étape suivante proposée (sens en Français du site en langue anglaise plasmatreat.co.uk/ test_inks_surface_tension.html, pièce no3). Le fait, critiqué par la société Jet métal, que le contenu de ce site soit encore le même en 2012 (sa pièce no11A), ne fait que confirmer la véracité des captures d'écran produites, sans remettre en question la crédibilité de leur date. Et les produits de la société Plasmatreat sont expressément cités dans la description du brevet comme étant utilisables pour le traitement de l'étape a. visant à augmenter l'adhérence (cf point 35 ci-dessus). Cette information, mise en avant sur un site commercial relève donc des connaissances générales sur l'adhérence des surfaces, connues du spécialiste de la métallisation de surface.

47.La réalité d'une augmentation d'adhérence causée par l'augmentation de la tension de surface du substrat (et non sa diminution) est confirmée par la description d'une demande de brevet antérieure relative à un procédé d'activation de la surface du verre pour la rendre plus réceptive au dépôt ultérieur de couches hydrophobes (FR 2869604 déposée le 28 avril 2004, pièce Fluidémail no9), selon laquelle un traitement de surface par plasma ou un abrasif de polissage comme l'oxyde de cérium, dont l'effet peut se constater par des mesures de tensions de surface par exemple à l'aide de liquides étalon du type Plasmatreat, mène à une tension de surface d'au moins 62 mN / m en tout point.

48.Elle l'est encore par un livre intitulé « Surface Treatment of Materials for Adhesion Bonding » (Traitement de surface des matériaux pour le collage par adhérence, pièces Fluidémail no10 et no10bis), qui explique, en page 111, que les traitements du plastique, parmi lesquels le plasma ou le flammage, augmentent l'énergie de surface, exprimée en dynes /cm. C'est au demeurant ce qu'enseigne le brevet EP 747 de la société Jet métal elle-même, dans ses revendications, qui visent expressément un niveau minimum d'énergie de surface. Or la même unité que dans le manuel précité (dynes /cm) est également utilisée pour décrire la tension de surface sur le site internet d'une entreprise Boussey control, qui comme la société Plasmatreat met en avant des mesures de la tension de surface (pièce Fluidémail no6) ; et la société Jet métal, dans ses propres conclusions (p 37), pour illustrer l'augmentation de l'énergie de surface causée par le flammage dans le but d'augmenter l'adhérence, la mesure avec des encres Plasmatreat intitulées « encre de tension de surface », dont les mesures vont croissant avec l'adhérence, de 30 mN /m à 72 mN /m.

49.De ces éléments, il résulte que pour augmenter la capacité d'adhérence d'un substrat en vue de le recouvrir d'un film (par exemple métallique), il faut augmenter sa tension de surface ; que les traitements préconisés par le brevet FR 609 ont cet effet d'augmentation de la tension de surface, et d'augmentation de l'énergie de surface. Il en résulte également que ces notions, qui sont expliquées en des termes simples avant la date de dépôt du brevet par des entreprises qui vendent des produits destinés à mesurer la tension de surface d'un objet pour y imprimer ou coller un matériau, font manifestement parties des connaissances générales de l'homme du métier.

50.La revendication 1, qui consiste en un traitement par flammage qui doit diminuer la tension de surface alors que ce traitement a l'effet inverse, ne peut dès lors pas être mise en oeuvre. Ni la description, qui répète à de nombreuses reprises qu'il s'agit de diminuer la tension de surface, ni les autres revendications, ni les dessins, n'apportent de solution à cette contradiction et cette impossibilité absolue (étant observé que la « définition spéciale » invoquée par le breveté figure au brevet EP 747 et non dans le FR 609).

51.Par conséquent, le brevet n'expose pas l'invention de façon suffisamment claire et complète pour qu'un homme du métier puisse l'exécuter, et la revendication 1 doit être annulée, et avec elle l'ensemble des autres revendications, qui en sont toutes dépendantes et souffrent donc de la même insuffisance.

3o) Demande reconventionnelle en nullité du brevet EP 747

a. présentation du brevet et objet des demandes

52.Le brevet EP 747 porte sur un procédé identique à celui décrit dans le brevet FR 609, décrit d'une manière similaire, à ceci près que l'étape a. du procédé consiste non plus à diminuer la tension de surface, mais à faire passer l'énergie de surface au-dessus de 50 dynes [0011], de préférence supérieure ou égale à 60 dynes et plus préférentiellement supérieure ou égale à 70 dynes [0024].

53.Ainsi, le brevet contient 10 revendications, dont sont invoquées au soutien de la demande en contrefaçon les suivantes :

1. Procédé de métallisation de la surface d'un substrat caractérisé en ce que l'on met en oeuvre les étapes suivantes :
a. Traitement physique du substrat avant métallisation de sorte que l'énergie de surface du substrat soit supérieure ou égale à 50 dynes, le traitement physique étant choisi parmi les traitements suivants : un flammage, un traitement corona, un traitement plasma et leurs combinaisons,
b. métallisation non électrolytique de la surface du substrat traitée à l'étape a., par projection d'une ou plusieurs solutions oxydo-réductrices sous forme d'aérosol(s),

c. réalisation d'une couche de finition sur la surface métallisée qui est l'application d'une composition liquide réticulable ou un épaississement électrolytique de la surface métallisée.

2. Procédé de métallisation selon la revendication 1, caractérisé en ce que le traitement de l'étape a. est réalisé de sorte que l'énergie de surface du substrat soit supérieure ou égale à 55 dynes, de préférence supérieure ou égale à 60 ou 65 dynes, et encore plus préférentiellement supérieure ou égale à 70 dynes.

3. Procédé de métallisation selon la revendication 1, caractérisé en ce que le traitement physique de l'étape a. est choisi parmi les traitements suivants : un flammage, un traitement plasma et leurs combinaisons.

4. Procédé de métallisation selon la revendication 1, caractérisé en ce que le métal de l'étape b. est choisi dans le groupe de métaux suivants : argent, nickel, étain, leurs alliages et leurs juxtapositions, l'argent étant particulièrement préféré.

5. Procédé de métallisation selon l'une des revendications précédentes, caractérisé en ce que le substrat est soumis, préalablement à l'étape a., aux étapes suivantes :
§ prétraitement d'accrochage de la surface du substrat,
§ application d'au moins une couche d'un revêtement de base.

8. Dispositif pour la mise en oeuvre du procédé selon l'une quelconque des revendications précédentes, caractérisé en ce qu'il comprend les éléments suivants :
§ un module de traitement physique de surface de substrats choisi parmi les traitements suivants : un flammage, un traitement corona, un traitement plasma et leurs combinaisons,
§ un module de métallisation non électrolytique comprenant des moyens de projection de solutions,
§ un module de réalisation d'une couche de finition par application d'une composition liquide réticulable ou par épaississement électrolytique.

9. Substrat métallisé obtenu par le procédé selon l'une quelconque des revendications 1 à 7, caractérisé en ce que ce substrat est un verre creux notamment à usage cosmétique, une pièce d'automobile, une pièce pour la domotique ou pour l'aéronautique.

10. Substrat métallisé obtenu par le procédé selon l'une quelconque des revendications 1 à 7, caractérisé en ce que ce substrat est une pièce d'électronique telle une piste conductrice, une antenne d'étiquette radiofréquence, ou un revêtement pou un blindage électromagnétique.

b. date de priorité

Moyens des parties

54.Les demanderesses à la nullité estiment qu'une revendication ne peut bénéficier du droit de priorité au sens de l'article « 81(1) » de la convention sur le brevet européen que si l'homme du métier peut, en faisant appel à ses connaissances générales, déduire directement et sans ambigüité l'objet de cette revendication de la demande antérieure considérée dans son ensemble. Or, exposent-elles, en portant l'une sur une diminution de la tension de surface, l'autre sur une augmentation de l'énergie de surface, les revendications 1 de chaque brevet retiendraient des solutions opposées, et n'auraient pas le même champ de protection. Et elles ajoutent qu'à supposer que l'homme du métier comprenne que la tension soit inversement proportionnelle à l'énergie, aucune valeur de cette tension ou énergie n'étant donnée dans le brevet français, aucun droit de priorité n'existe pour la caractéristique tenant à la valeur minimale de l'énergie de surface.

55.La société Jet métal répond que le brevet européen définissant l'énergie de surface comme étant inversement proportionnelle à la tension de surface, la revendication 1 des deux brevets couvrirait donc la même invention.

Réponse du tribunal

56.En application de l'article 87 (1) de la convention de Munich du 5 octobre 1973 sur la délivrance de brevets européens, telle que modifiée depuis (ci-après, la CBE), celui qui a régulièrement déposé dans un État partie à la convention de Paris pour la protection de la propriété industrielle (dont fait partie la France) une demande de brevet d'invention jouit, pour effectuer le dépôt d'une demande de brevet européen pour la même invention, d'un droit de priorité pendant un délai de 12 mois.

57.La « même invention » au sens de cet article est celle que l'homme du métier, en faisant appel à ses connaissances générales, peut déduire directement et sans ambigüité de la demande précédente prise dans son ensemble (Voir OEB, G 2/98). Il en est déduit que la demande nouvelle qui décrit complètement une invention n'est pas la même qu'une demande antérieure qui ne permet pas la réalisation de l'ensemble des éléments revendiqués. (OEB, T 0843/03, point 3 des motifs).

58.En l'espèce, la revendication 1 du brevet EP 747 (dont toutes les autres revendications sont dépendantes), suppose d'augmenter l'énergie de surface, alors que la revendication 1 de la demande FR 609 portait sur des traitements physiques ou chimiques de diminution de la tension de surface. La demande EP 747 définit certes l'énergie de surface comme inversement proportionnelle à la tension de surface, mais aucune définition n'en est donnée dans la demande FR 609. Or il a été démontré que pour l'homme du métier, les traitements revendiqués par la demande FR 609 avaient pour effet d'augmenter la tension comme l'énergie de surface du substrat, notions qu'il emploie de façon équivalente (cf points 46 à 50). La nouvelle demande revendique donc des traitements d'augmentation de l'énergie de surface tandis que la demande antérieure revendiquait des traitements de diminution de cette énergie. Il ne s'agit donc pas de la même invention, et la priorité de la demande FR 609 ne peut pas être invoquée.

59.Néanmoins, les demanderesses à la nullité n'invoquent pas la demande FR 609 elle-même ou des documents postérieurs pour contester l'activité inventive du brevet EP 747.

c. suffisance de description

Moyens des parties

60.Les sociétés Fluidémail et Infope soutiennent que la valeur de 50 dynes, outre qu'elle ne serait pas exprimée dans la bonne unité (qui serait dyn /cm), est arbitraire et spéculative, car le breveté n'expliquerait pas quel effet technique le franchissement de cette valeur permettrait d'obtenir, d'autant moins que certains substrats, comme le verre, ont déjà une tension de surface supérieure à 50 dyn /cm, et qu'aucune mesure précise ne serait proposée, alors que les connaissances générales de l'homme du métier ne portent que sur des méthodes de mesure empiriques et approximatives et que la tension dépendrait également de la température et de la technique de mesure choisie.

61.La défenderesse à la nullité estime que les tests connus de l'homme du métier son précis et scientifiques, que l'homme du métier, même si certains substrats sont déjà supérieurs à 50 dynes (unité désignée ainsi par facilité de langage, ce qui serait connu), est rigoureux et mettrait donc en oeuvre le procédé de toute façon, pour augmenter davantage l'énergie de surface ; et qu'en aucun cas cela ne rendrait impossible la mise en oeuvre de l'étape a.

Réponse du tribunal

62.Il est constant que l'homme du métier connait, et que sont décrits dans le brevet, une méthode de mesure de l'énergie de surface (ou tension, puisque ces deux mesures sont manifestement exprimées par les professionnels du secteur dans les mêmes unités, dynes ou mN rapportées à une distance, cm ou m, comme le révèlent les documents que les sociétés Infope et Fluidémail invoquent elles-mêmes) ; méthode qui consiste à observer la réaction d'une encre étalon sur le substrat. Cette méthode est certes empirique mais il ressort des documents commerciaux des différents producteurs invoqués par les parties que ces étalons existent dans des intervalles réduits, de 1 à 2 dynes /cm (ou mN /m), ce qui est suffisamment faible, au regard de l'ordre de grandeur indiqué dans le brevet (50 dynes /cm), pour permettre une mesure assez précise pour reproduire l'invention.

63.À cet égard, il n'est pas allégué que l'existence de substrats ayant initialement une énergie ou tension supérieure à 50 dynes /cm empêcherait l'homme du métier de reproduire l'invention. Au contraire, selon la description, celle-ci vise à apporter une solution applicable à tout substrat, de sorte qu'il est évident que le seuil de 50 dynes /cm s'entend d'un minimum que l'invention permettra d'atteindre pour les substrats à la valeur la plus faible, mais que les substrats aux valeurs de bases supérieures doivent eux aussi subir le traitement préalable si l'on veut augmenter leur adhérence. C'est ce qu'indiquent également les seuils successifs indiqués dans la description et la revendication 2 (jusqu'à 70). Enfin il n'est pas démontré qu'en atteignant un seuil de 50 dynes seulement après traitement préalable, l'invention ne pourrait pas être réalisée par l'homme du métier. Le moyen n'est donc pas fondé.

d. activité inventive

Moyens des parties

64.Les demanderesses à la nullité soutiennent qu'une demande internationale de brevet WO 2004/069948, publiée en 2004 (ci-après le document König) divulgue un procédé de métallisation dont la seule différence avec la revendication 1 du brevet EP 747 serait que celle-ci précise un niveau minimal d'énergie de surface de 50 dynes ; mais que cette valeur ne correspondrait pas à un effet technique divulgué par le brevet, et serait un résultat nécessairement atteint, et induit, par la mise en oeuvre du procédé décrit dans König au regard des valeurs de plusieurs matériaux ; que ce document divulguerait notamment une pulvérisation au pistolet, ce qui correspondrait à la pulvérisation d'aérosols revendiquée par le brevet, cette identité étant, précisent-elles, invoquée par la société Jet métal elle-même pour tenter de démontrer la contrefaçon.

65.Elles invoquent également la thèse publiée en 1999 de M. [W] [M] (ci-après le document [M]), qui divulguerait un procédé de métallisation comprenant l'étape b), et un procédé de métallisation comprenant l'étape a) avant l'étape b) tout en mettant en avant l'importance de l'énergie de surface et en présentant une courbe révélant que le seuil de 50 mJ /m² est franchi dès les premières secondes de traitement par les substrats testés. Elles ajoutent que l'homme du métier, sachant que l'augmentation de l'énergie de surface est favorable à l'adhérence d'un revêtement, est incité à effectuer un prétraitement de sorte que l'énergie de surface soit supérieure ou égale à par exemple 50 dynes. Et en concluent que la seule différence entre la revendication 1 du brevet et le document [M] tient à la couche de finition par un liquide réticulable ou un épaississement électrolytique (étape c), mais que cette opération de finition serait évidente pour l'homme du métier, et serait analogue au vernissage des procédés antérieurs de métallisation par projection cités dans le document [M] et dans le document König.

66.La société Jet métal répond que le document [M] montre certes une valeur d'énergie de surface en fonction du traitement corona, mais qu'aucune étape de métallisation n'est effectuée après cette décharge, et que la valeur de 50 dynes n'est pas décrite, pas plus qu'elle n'est suggérée par l'art antérieur ; que ce document ne décrit pas non plus l'étape c) de finition ; que les différences avec le brevet portent sur l'augmentation de l'adhérence du film métallique, l'aspect décoratif, des cadences industrielles, avec des réactifs non toxiques.

67.Sur le document König, elle fait valoir que si ce document décrit un procédé de revêtement d'un substrat (mais pour créer un miroir) dans lequel le substrat subit un traitement préalable de flammage, plasma ou corona, et est à la fin revêtu d'une couche de vernis de protection, il ne suggèrerait pas une énergie de surface minimale atteinte ou à atteindre, alors que le brevet aurait l'avantage de permettre une meilleure adhérence et un aspect décoratif amélioré grâce à une énergie de surface supérieure ou égale à 50 dynes /cm ; qu'en outre le procédé König n'a pas de dimension industrielle, et divulgue une pulvérisation mais pas une projection sous forme d'aérosol (ce qui améliorerait le rendement et le résultat visuel).

Réponse du tribunal

68.La nullité des brevets européens, avec effet pour un État, est prévue par l'article 138, paragraphe 1 de la CBE, qui la prévoit notamment dans le cas (point a)) où l'objet du brevet européen n'est pas brevetable en vertu des articles 52 à 57. Le premier de ces articles limite la brevetabilité aux inventions nouvelles, qui impliquent une activité inventive, et qui sont susceptibles d'application industrielle. Et l'activité inventive est définie par l'article 56, aux termes duquel « une invention est considérée comme impliquant une activité inventive si, pour un homme du métier, elle ne découle pas d'une manière évidente de l'état de la technique ».

69.Pour apprécier l'activité inventive d'un brevet, il convient de déterminer d'une part l'état de la technique, d'autre part le problème technique objectif à résoudre, et enfin d'examiner si l'invention revendiquée aurait été évidente pour l'homme du métier. Les éléments de l'art antérieur ne sont destructeurs d'activité inventive que si, pris isolément ou associés entre eux selon une combinaison raisonnablement accessible à l'homme du métier, ils permettaient à l'évidence à ce dernier d'apporter au problème résolu par l'invention la même solution que celle-ci.

70.En l'espèce, le domaine technique est celui de la métallisation de surface ; les deux antériorités citées (documents König et [T] [D]) en font partie.

71.Le document König, intitulé « Procédé de revêtement d'un substrat comprenant une couche métallique adhérente », divulgue (pièce Fluidémail no19bis, traduction, p. 5, l. 3 et s.) un « procédé de revêtement par adhérence d'un substrat afin de lui conférer un aspect métallique », dont les étapes sont les suivantes :
« a) un substrat ou une couche de vernis d'apprêt appliquée sur celui-ci est soumis ou soumise à un traitement à la flamme, à un traitement plasma, un traitement Corona, un traitement par fluoration et/ou un traitement par rinçage ;
b) le substrat ainsi traité ou la couche de vernis d'apprêt ainsi traitée est traité ou traitée avec un agent sensibilisant ;
c) immédiatement après l'étape b), une couche métallique est appliquée au moyen d'un procédé de pulvérisation par voie chimique de réduction ; et
d) la couche métallique est recouverte d'au moins un vernis de protection »

72.Ces étapes divulguent la préparation du substrat par un traitement tel que ceux décrits dans le brevet (flammage, corona, plasma et leur combinaison) ; il divulgue la réalisation, ensuite, de la métallisation proprement dite par un procédé qui peut être qualifié d'oxydo-réducteur ; puis la réalisation d'une couche de finition. Les différences susceptible d'exister entre ce procédé et celui de la revendication 1 du brevet EP 747 (citée au point 53) sont donc :
- le seuil de 50 dynes énoncé à son étape a),
- la projection par aérosol de l'étape b),
- et dans l'étape c) la réalisation de la couche de finition soit par l'application d'une « composition liquide réticulable »
- soit par un « épaississement électrolytique de la surface métallisée ».

73.Comme le soulignent les sociétés Fluidémail et Infope, plusieurs des substrats possibles possèdent des énergies de surface proches de 50 dynes /cm (ou mN /m), voire supérieures, tels que le nylon (48), le PVC (45), ou le verre (65 à 69), et le document [M] révèle, en prenant l'exemple du traitement Corona de trois polymères (ABS, PET, Zénite), que leur énergie de surface dépasse 50 mJ /m² en moins de 10 secondes de traitement, alors que le graphique se poursuit sur 120 secondes, et il n'est pas contesté que les valeurs exprimées en mJ /m² sont équivalentes à celles exprimées en mN /m. Par ailleurs, la demande de brevet FR 2869604 de 2004 précitée (point 47) révèle qu'un autre traitement de surface préalable ayant le même objectif d'augmenter l'adhérence d'un revêtement sur le substrat mène à une tension de surface d'au moins 62 mN /m. La valeur de 50 dynes /cm (ou mN /m ou mJ /m²) est donc une simple conséquence de la mise en oeuvre d'un procédé du type de celui déjà décrit dans le document König, sans que lui soit attaché aucun effet supplémentaire ou inconnu, et surtout sans qu'elle induise aucune modification du procédé. Il ne s'agit donc pas de la résolution d'un problème technique, mais seulement de la description d'une technique déjà connue.

74.S'agissant de l'emploi d'aérosol, il est clairement suggéré par le document [M] de 1999, dont le résumé en dernière page, cité par les sociétés Fluidémail et Infope (leur pièce no14) explique qu'il porte sur les « dépôts métalliques auto-catalytiques ou ‘electroless' », « technique de métallisation largement utilisée » quoique de façon « statique », qu'il propose d'améliorer par un « nouveau concept de dépôt par voie ‘humide' fonctionnant de façon dynamique », dont le principe est de « transporter par un aérosol, sur le substrat à recouvrir, une phase aqueuse dispersée contenant les espèces électroactives. La réaction d'oxydo-réduction se déclenche alors à la surface du substrat », et la réaction de dépôt s'amorce « dans la mesure où [notamment] l'énergie de surface (Es) du substrat est élevée de sorte que la surface présente une bonne mouillabilité ». Ainsi, même à supposer que la « pulvérisation » du document König ne soit pas faite par aérosol, cet emploi d'un aérosol pour la réalisation d'un procédé de métallisation par oxydo-réduction est clairement présent dans l'état de la technique à la date du brevet EP 747.

75.Quant aux deux éléments de l'étape c), la société Jet métal ne conteste pas qu'ils étaient connus de l'homme du métier. Et en effet, il ressort du brevet EP 747 lui-même qu'un vernis est une « composition liquide réticulable » ([0054] lignes 36-37) ; toujours selon le brevet EP 747, « la technique de l'épaississement électrolytique est bien connue de l'homme du métier » ([0056] lignes 17-18).

76.Enfin, le fait que le procédé du brevet König ne soit pas « industriel » ne ressort aucunement de sa description ou de ses revendications, et serait au demeurant indifférent, cette caractéristique n'étant pas revendiquée dans le brevet EP 747, outre qu'il est difficile d'en saisir le sens, toute invention brevetable devant être « susceptible d'application industrielle » (article 52 de la CBE).

77.Ainsi, la revendication 1 du brevet EP 747 ne revendique que l'état de la technique, tel qu'il ressort d'une façon évidente d'un brevet antérieur portant sur un procédé quasiment identique, combiné à l'emploi d'aérosols qui était déjà divulgué pour un procédé lui-même très similaire, et en présentant différemment certaines étapes (niveau d'énergie et finition) déjà connues de l'homme du métier ou sans qu'il s'ensuive une modification du procédé ni de son résultat, nonobstant les allégations de meilleur effet visuel, qui reposent en réalité sur la simple mise en oeuvre de l'état de la technique (prétraitement, éventuellement sensibilisation, métallisation par aérosol, vernis). L'invention revendiquée n'implique donc aucune activité inventive.

78.De même :
- la revendication 2 n'apporte qu'une élévation supérieure de l'énergie de surface, que l'homme du métier était déjà incité à rechercher (le document König divulguant par exemple, p. 10, l. 10-12, que « l'effet obtenu augmente au fur et à mesure que le temps de séjour [devant la flamme] d'un substrat (...) augmente) ;
- la revendication 3 répète les traitements physiques déjà énumérés à la revendication1 ;
- la revendication 4 propose des métaux déjà connus : le document König mentionne l'argent à plusieurs reprises, et le nickel et l'étain sont également cités par un brevet Jet métal antérieur, FR 2763962, cité par les demanderesses à la nullité, et qui constitue un état antérieur de la technique de métallisation non-électrolytique par aérosols ; au demeurant, aucune restriction quant aux choix des métaux ne ressort des documents de l'art antérieur précités, de sorte que cette revendication 4 est une illustration d'un mode de réalisation possible de l'invention et non une invention en soi, faute de problème technique ;
- la revendication 5 correspond au vernis préalable du document König ;
- la revendication 8 n'est que l'application de la revendication 1 par un « module » pour réaliser chaque étape, ce qui en soi n'est pas inventif ;
- la revendication 9 précise que le procédé peut être utilisé pour des objets en verre creux, notamment à usage cosmétique, pour l'automobile, la domotique ou l'aéronautique ; ce qui n'implique pas d'activité inventive, le document König concernant déjà tout type de substrats, sans que rien ne rende plus contraignant l'application à ce type d'objet en particulier ;
- la revendication 10 est, comme la revendication 9, une déclinaison à un type de substrats, à savoir les pièces d'électronique, et de même rien n'indique qu'elle vise la résolution d'un problème distinct.

79.Par conséquent, les revendications en cause (1, 2, 3, 4, 5, 8, 9, 10), qui n'impliquent pas d'activité inventive, sont nulles.

e. conséquences sur d'autres demandes

80.Par suite, les deux brevets invoqués étant nuls, les demandes en contrefaçon de ces brevets sont rejetées (dommages et intérêts, interdiction, communication, publication), de même que la demande en expertise, qui vise à déterminer les effets d'une des caractéristiques brevetées.

4o) Demande en concurrence déloyale et parasitaire

Moyens des parties

81.La société Jet métal reproche aux défenderesses, d'abord, d'avoir capté son savoir-faire technique et économique en reproduisant les caractéristiques de son procédé y-compris celles qui ne sont pas couvertes par les brevets, en obtenant son savoir-faire et des informations confientielles via son propre client, le groupe Carbon, qui leur aurait remis les documents annexés à son contrat de licence avec elle, et en se positionnant grâce à cela en fonction de sa grille tarifaire, pour proposer « des tarifs parfois moins chers » que les siens. Elle invoque pour le prouver, d'une part « les relations entre les sociétés du groupe Carbon et Fluidémail et Infope » qui sont « largement relatés au sein des différentes pièces », et d'autre part un courriel du 21 juillet 2014 par lequel Fluidémail adresse à un (autre) prospect une comparaison de prix vis-à-vis d'elle et affirme que l'argent se révèle plus rapidement avec ses produits ; ce qui montre, explique-t-elle, que les défenderesses ont eu accès à des informations confidentielles et ont pu faire des essais avec ses produits.

82.Elle leur reproche, d'autre part, une publicité comparative illicite au sens de la directive 2006/114 et de l'article « L. 121-9 » du code de la consommation, tirant indûment profit de sa notoriété et présentant les produits comme une reproduction des siens, en ce que le courriel du 21 juillet 2014 l'identifie explicitement, déroge à l'objectivité en n'énonçant pas clairement les critères comparés (prix, temps, vitesse, produit), sans démontrer les allégations par des tests scientifiques.

83.Les sociétés Infope et Fluidémail répliquent que les annexes du contrat de Carbon ne prouvent pas la consistance du savoir-faire, qu'il n'est pas prouvé qu'elles l'aient reproduit ni qu'elles y aient eu accès, qu'au demeurant il s'agirait d'une faute de Carbon et non de leur part ; et affirment généralement qu'elles ont développé leur propre savoir-faire indépendamment. Contre l'allégation d'une publicité comparative illicite, elles invoquent l'article L. 122-1 du code de la consommation et font valoir que le courriel litigieux présente une comparaison de prix sur une base de données objectives détaillées, telles que l'utilisation de quantités inférieures qui seraient précisément indiquées ; que le dirigeant d'une société Crésilas, qui aurait testé les consommables, aurait confirmé que leurs produits étaient « plus performants » que ceux de jet métal, et que la citation du nom de celle-ci n'aurait vocation qu'à informer le destinataire de manière objective et non à tirer profit de sa notoriété, qu'elles estiment d'ailleurs non démontrée.

Réponse du tribunal

a. captation d'un savoir-faire (parasitisme)

84.La concurrence déloyale, sanctionnée en application de l'article 1240 du code civil, doit être appréciée au regard du principe de la liberté du commerce qui implique qu'un bien ou un service qui ne fait pas l'objet de droits de propriété intellectuelle puisse être librement commercialisé sous certaines conditions tenant à l'absence de faute par la création d'un risque de confusion dans l'esprit de la clientèle sur son origine, circonstance attentatoire à l'exercice loyal des affaires. L'appréciation de la faute au regard du risque de confusion doit résulter d'une approche concrète et circonstanciée des faits de l'espèce prenant en compte notamment le caractère plus ou moins servile, systématique ou répétitif de la reproduction ou de l'imitation, l'ancienneté d'usage, l'originalité et la notoriété de la prestation copiée.

85.Le parasitisme, qui s'apprécie dans le même cadre que la concurrence déloyale dont il constitue une déclinaison mais dont la caractérisation est toutefois indépendante du risque de confusion, consiste dans le fait pour une personne de profiter volontairement et de façon injustifiée des investissements, d'un savoir-faire ou d'un travail intellectuel d'autrui produisant une valeur économique individualisée, et générant un avantage concurrentiel.

86.En l'espèce, la demanderesse n'expose pas en quoi les caractéristiques non brevetées de son procédé seraient le fruit d'investissements propres, ni en quoi les défenderesses les auraient reproduites grâce à des documents ou informations obtenues de manière illicite : le fait qu'elles aient pu échanger avec un client ou ancien client de la société Jet métal ne prouve pas, en soi, que ce client leur ait remis des informations confidentielles ni que les défenderesses aient exploité ces données en ayant conscience d'enfreindre une telle confidentialité ; le fait qu'elles aient été en mesure d'utiliser les produits de la société Jet métal et d'en comparer l'efficacité ne prouve pas davantage l'exploitation frauduleuse d'une quelconque information (cela prouve seulement qu'elles ont obtenu les produits, ce qui est licite, les ont utilisé, ce qui est aussi licite, et en ont tiré une comparaison, dont la licéité est examinée à la partie b. ci-après). Quant aux prix, outre qu'il ne s'agit pas en soi d'un savoir-faire, les preuves visées par la demanderesse ne sont pas de nature à démontrer qu'ils aient été obtenus de façon illicite. Leur donner comme le fait la demanderesse une nature confidentielle permettant de présumer une obtention illicite du seul fait que le concurrent en a connaissance revient à nier toute possibilité d'une concurrence par les prix, ce qui n'est évidemment pas compatible avec la liberté du commerce et le principe de libre concurrence.

b. publicité comparative (concurrence déloyale)

87.L'article L. 122-1 du code de la consommation prévoit que toute publicité qui met en comparaison des biens ou services en identifiant, implicitement ou explicitement, un concurrent ou des biens ou services offerts par un concurrent n'est licite que si :

1o Elle n'est pas trompeuse ou de nature à induire en erreur ;
2o Elle porte sur des biens ou services répondant aux mêmes besoins ou ayant le même objectif ;
3o Elle compare objectivement une ou plusieurs caractéristiques essentielles, pertinentes, vérifiables et représentatives de ces biens ou services, dont le prix peut faire partie.

88.L'article L. 122-2 précise que la publicité comparative ne peut :

1o Tirer indûment profit de la notoriété attachée à une marque de produits ou de services, à un nom commercial, à d'autres signes distinctifs d'un concurrent ou à l'appellation d'origine ainsi qu'à l'indication géographique protégée d'un produit concurrent ;

2o Entraîner le discrédit ou le dénigrement des marques, noms commerciaux, autres signes distinctifs, biens, services, activité ou situation d'un concurrent ;

3o Engendrer de confusion entre l'annonceur et un concurrent ou entre les marques, noms commerciaux, autres signes distinctifs, biens ou services de l'annonceur et ceux d'un concurrent ;

4o Présenter des biens ou des services comme une imitation ou une reproduction d'un bien ou d'un service bénéficiant d'une marque ou d'un nom commercial protégé.

89.Il n'est pas contesté que le courriel du 21 juillet 2014 adressé par la société Fluidémail à un prospect et cité par la société Jet métal constitue une publicité comparative. La société Fluidémail y indique ainsi : « ce cout sur machine est nettement plus avantageux avec notre système vis-à-vis de Jet métal. De plus, et ceci a été constaté lors de nos derniers essais, l'argent se révèle bien plus rapidement avec nos produits, d'où gain de temps, de vitesse, de produit. »

90.Cette comparaison se fonde toutefois sur des caractéristiques essentielles, pertinentes, vérifiables et représentatives des produits, que sont la rapidité de révélation, et les prix. Ces derniers sont clairement comparés par une pièce-jointe, et la société Jet métal n'expose pas en quoi cette présentation des prix et de la vitesse de révélation serait trompeuse. Pour le reste, cette comparaison, qui porte sur des biens répondant aux mêmes besoins, ne s'appuie pas sur la renommée du concurrent, en se contentant de le citer et de procéder à une comparaison ; elle n'entraine aucun discrédit, ni n'engendre de confusion, et ne présente en rien les produits promus comme une imitation ou une reproduction de ceux du concurrent.

91.Les demande en concurrence déloyale et parasitaire (dommages et intérêts, publication, communication de documents), ainsi manifestement infondées, sont par conséquent rejetées.

4o) Demandes reconventionnelle en dommages et intérêts pour abus de procédure et en publication

Moyens des parties

92.Les sociétés Infope et Fluidémail estiment que la procédure de saisie-contrefaçon a été détournée de son objet pour devenir l'instrument d'une manoeuvre visant à appréhender leurs secrets commerciaux en permettant l'obtention plusieurs documents relevant de leur savoir-faire, sans rapport direct avec la contrefaçon alléguée, et sans utilité pour en rapporter la preuve. Elles estiment en outre que la société Jet métal ne pouvait se méprendre sur la nullité de ses deux brevets, n'a témoigné qu'une intention de leur nuire, en mettant initialement dans la cause un client afin de l'intimider pour l'inciter à renouveler son contrat d'approvisionnement exclusif avec elle, en prolongeant artificiellement la procédure pour différer l'annulation de ses brevets, et empêchant ainsi les société défenderesses au principal de commercialiser leurs produits, leur causant une baisse de chiffre d'affaires de près de 150 000 euros par an.

93.La société Jet métal soutient au contraire que la saisie-contrefaçon n'a été diligentée que dans le but d'obtenir la preuve de la contrefaçon, que les société Infope et Fluidémail n'ont pas demandé la protection de leurs informations confidentielles, par exemple en demandant de placer des documents sous enveloppe scellée ; et que son action était légitime, au regard des brevets dont elle est titulaire.

Réponse du tribunal

94.Le droit d'agir en justice dégénère en abus constitutif d'une faute au sens de l'article 1240 du code civil lorsqu'il est exercé en connaissance de l'absence totale de mérite de l'action engagée, ou par une légèreté inexcusable, obligeant le défendeur à se défendre contre une action que rien ne justifie sinon la volonté d'obtenir ce que l'on sait indu, une intention de nuire, ou l'indifférence aux conséquences de sa légèreté.

95.La saisie-contrefaçon était légitimement fondée sur un brevet délivré et sans que la façon dont elle a été demandée ne révèle une volonté de la détourner de son but. Le fait que des documents obtenus soient confidentiels ou sans rapport avec la contrefaçon est certes une conséquence dommageable mais rien n'indique qu'en espèce cette conséquence ait été recherchée par la société Jet métal. La saisie-contrefaçon, dans son principe et dans sa réalisation, ne traduit donc aucun abus.

96.La nullité des brevets, constatée par le présent tribunal, n'était pas d'une évidence telle qu'elle suffirait à prouver que le breveté en avait connaissance ; et aucune autre preuve n'est invoquée pour démontrer qu'il savait ou aurait dû savoir que ses brevets étaient nuls. Dès lors, l'action en contrefaçon qu'il a intentée n'était pas abusive.

97.Par conséquent, la demande est rejetée. Par suite, la demande en publication, qui était justifiée par le besoin pour les sociétés Infope et Fluidémail de faire savoir qu'elles avaient fait l'objet d'une action abusive, doit être rejetée.

5o) Dispositions finales

98.Aux termes de l'article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie. L'article 700 du même code permet au juge de condamner en outre la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l'autre, pour les frais exposés mais non compris dans les dépens, une somme qu'il détermine, en tenant compte de l'équité et de la situation économique de cette partie.

99.En l'espèce, la demanderesse principale perd le procès et est donc tenue aux dépens. L'ampleur et la complexité du litige justifie la demande d'indemnité de procédure des défenderesses à hauteur de 50 000 euros chacune (ce qui inclut le cout du constat d'huissier qu'elles invoquent).

100.Enfin, vu l'article 515 du code de procédure civile, l'exécution provisoire, qui est nécessaire afin, notamment, d'assurer l'indemnisation rapide des défendeurs pour leurs frais de procédure, et est compatible avec la nature du litige, doit être ordonnée.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal, statuant publiquement en premier ressort par jugement contradictoire mis à disposition au greffe,

Annule partiellement le procès-verbal de saisie-contrefaçon du 14 mars 2018 au Perrey en Yvelines, à savoir seulement sa page 9, dernier paragraphe, et ses pages 10 et 11 (en entier) ;

Annule partiellement le procès verbal de saisie-contrefaçon du 14 mars 2018 à Boissy l'Aillery, à savoir seulement sa 15e page à partir du 4e paragraphe, et sa 16e page, 1er, 2e, 4e et 5e paragraphes ;

Rejette les demandes en nullité de ces procès-verbaux pour le surplus ;

Déclare nulles les revendications 1, 2, 4, 6, 7, 8, 11, et 12 du brevet français publié sous le numéro FR 2 934 609, tel que limité ;

Déclare nulles les revendications 1, 2, 3, 4, 5, 8, 9 et 10 de la partie françaises du brevet européen publié sous le numéro EP 2 326 747 ;

Dit que la présente décision, lorsqu'elle ne sera plus susceptible d'aucun recours, sera transmise à l'INPI à l'initiative de la partie la plus diligente, pour inscription au registre ;

Rejette les demandes de la société Jet métal en interdiction et dommages et intérêts fondées sur la contrefaçon de ces brevets ;

Rejette sa demande d'expertise ;

Rejette sa demande en dommages et intérêts pour concurrence déloyale et parasitaire ;

Rejette ses demandes en publication et communication de documents

Rejette la demande reconventionnelle des sociétés Infope et Fluidémail en dommages et intérêts pour abus et publication du jugement ;

Condamne la société Jet métal aux dépens, avec recouvrement dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile par l'avocat des sociétés Infope et Fluidémail, ainsi qu'à payer à celles-ci 50 000 euros chacune au titre de l'article 700 du même code (qui incluent les 468,09 euros demandés au titre d'un constat d'huissier) ;

Ordonne l'exécution provisoire.

Fait et jugé à Paris le 22 Mars 2022

La GreffièreLa Présidente


Synthèse
Tribunal : Tribunal de grande instance de Paris
Formation : Ct0196
Numéro d'arrêt : 18/4575
Date de la décision : 22/03/2022

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.grande.instance.paris;arret;2022-03-22;18.4575 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award