La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

12/02/2021 | FRANCE | N°3

France | France, Tribunal de grande instance de Paris, Ct0196, 12 février 2021, 3


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS

3ème chambre 2ème section

No RG 19/04475
No Portalis 352J-W-B7D-CPTXJ

No MINUTE :

Assignation du :
9 avril 2019
JUGEMENT
rendu le 12 février 2021

DEMANDERESSES

SOCIÉTÉ HUGO BOSS TRADE MARK MANAGEMENT GMBH et CO KG
[Adresse 1]
[Adresse 7]
ALLEMAGNE

S.A.S. HUGO BOSS FRANCE
[Adresse 3]
[Adresse 8]

représentées par Maître Christophe CHAPOULLIE, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #R188

DÉFENDEURS

Maître [N] [P]
Mandataire Judiciaire exerçant r>[Adresse 2]
[Adresse 5]

ès qualités de mandataire liquidateur de la
S.A.S.U. KARTEX CREATION CONCEPTION
[Adresse 4]
[Adresse 6]

représenté par Maître G...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS

3ème chambre 2ème section

No RG 19/04475
No Portalis 352J-W-B7D-CPTXJ

No MINUTE :

Assignation du :
9 avril 2019
JUGEMENT
rendu le 12 février 2021

DEMANDERESSES

SOCIÉTÉ HUGO BOSS TRADE MARK MANAGEMENT GMBH et CO KG
[Adresse 1]
[Adresse 7]
ALLEMAGNE

S.A.S. HUGO BOSS FRANCE
[Adresse 3]
[Adresse 8]

représentées par Maître Christophe CHAPOULLIE, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #R188

DÉFENDEURS

Maître [N] [P]
Mandataire Judiciaire exerçant
[Adresse 2]
[Adresse 5]

ès qualités de mandataire liquidateur de la
S.A.S.U. KARTEX CREATION CONCEPTION
[Adresse 4]
[Adresse 6]

représenté par Maître Guillaume DAUCHEL de la SELARL CABINET SEVELLEC DAUCHEL, avocats au barreau de PARIS, vestiaire #W0009 et Maître Christophe BEJIN, de la SCP BEJIN-CAMUS-BELOT, avocats au barreau de SAINT QUENTIN

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Florence BUTIN, Vice-Présidente
Catherine OSTENGO, Vice-présidente
Emilie CHAMPS, Vice-Présidente

assistées de Géraldine CARRION, greffier

DÉBATS

A l'audience du 8 janvier 2021
tenue en audience publique

JUGEMENT

Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe
Contradictoire
en premier ressort

FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES :

La société de droit allemand Hugo Boss Trade Mark Management GmbH et Co KG (ci-après « Hugo Boss ») est une société s?ur de la société Hugo Boss AG qui, depuis 1923, conçoit, fabrique et commercialise du prêt-à-porter pour hommes et femmes.

Elle est notamment titulaire :

- de la marque verbale française no1414947 « BOSS » enregistrée le 23 juin 1987 notamment en classe 25 pour désigner les « Vêtements en tous genres pour hommes, femmes et enfants, notamment, costumes, manteaux, vestes, pantalons, chemises, imperméables; survêtements et sous-vêtements » et la « bonneterie : bas et chaussettes, tricots, pull-overs, chemises tricotées ; linge et lingerie »;

- de la marque verbale de l'Union européenne no 49221 « BOSS » enregistrée le 4 janvier 1996 notamment en classe 25 pour désigner les « Vêtements pour hommes, femmes et enfants; bas; chapellerie; sous-vêtements; vêtements pour la nuit; vêtements de bain; peignoirs de bain; ceintures; ceintures en cuir; châles; accessoires, à savoir fichus, foulards, châles, pochettes; cravates; gants; chaussures ».

- de la marque semi-figurative de l'Union européenne no49262 enregistrée le 4 janvier 2016 :

notamment en classe 25 pour désigner les « Vêtements pour hommes, femmes et enfants; bas; chapellerie; sous-vêtements; vêtements pour la nuit; vêtements de bain; peignoirs de bain; ceintures; châles; accessoires, à savoir fichus, foulards, châles, pochettes; cravates; gants; chaussures; ceintures en cuir. »

La société Hugo Boss France, filiale française de la société Hugo Boss AG, importe et commercialise en France les articles fabriqués par celle-ci.

Le 20 février 2019, la société Hugo Boss Trade Mark Management a reçu une notification de la Direction Régionale des Douanes de Maubeuge-Bavay lui indiquant que ses services avaient retenu ex officio 37.119 paires de chaussettes soupçonnées de constituer des contrefaçons des marques dont elle est titulaire à la suite de laquelle, y étant précédemment autorisée par ordonnance du 7 mars 2019 elle a fait pratiquer une saisie-contrefaçon dont les opérations qui se sont déroulées dans leurs locaux le 11 mars 2019 ont permis de découvrir que 47.658 paires de chaussettes avaient été saisies portant la mention « BOGOSS » et d'appréhender les factures correspondantes émises par la société Fransali Tektil, destinées à la société KARTEX CREATION CONCEPTION.

Suivant jugement du 11 mars 2019 publié le 20 mars 2019 le Tribunal de commerce de Valenciennes a placé la société KARTEX CREATION CONCEPTION (ci-après KARTEX) en redressement judiciaire et désigné Maître [N] [P] en qualité de représentant des créanciers entre les mains duquel les sociétés Hugo Boss Trade Mark Management et Hugo Boss France ont, par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 29 avril 2019, déclaré leurs créances à titre provisionnel.

Par acte signifié le 9 avril 2019, les demanderesses ont fait assigner la société KARTEX et le représentant des créanciers en contrefaçon de marque et subsidairement atteinte à leur marque de renommée et concurrence déloyale et parasitaire.

Par jugement du 1er juillet 2019 confirmé par arrêt du 13 février 2020 de la cour d'appel de DOUAI, la procédure de redressement judiciaire a été convertie en liquidation judiciaire et Maître [N] [P] désigné en qualité de mandataire liquidateur.

Dans leurs dernières conclusions signifiées par voie électronique le 9 septembre 2020 les sociétés Hugo Boss Trade Mark Management et Hugo Boss France, demandent au tribunal de :

Vu les articles 9§1, 9§2 b. et 9§2 c. du Règlement européen 2017/1001 du 14 juin 2017 sur la marque de l'Union européenne,
Vu les articles L. 717-1, L. 717-2, L.713-1, L.713-2 b), L.713-3 b), L. 713-5 alinéa 1 er , L.716-1, L. 716-7, L. 716-8, et L.716-14 du Code de la propriété intellectuelle, dans leur rédaction antérieure à l'Ordonnance no 2019-1169 du 13 novembre 2019 relative aux marques de produits ou de services,
Vu les articles 1240 et 1241 du Code civil,
Vu les articles L. 622-22, L. 622-24, L. 622-25 et R. 622-24 du Code de commerce,
Vu le procès-verbal de saisie-contrefaçon du 11 mars 2019,
Vu le jugement du 1 er juillet 2019 du Tribunal de commerce de Valenciennes, prononçant la liquidation judiciaire de la société KARTEX et nommant Maître [N] [P], ès qualité de liquidateur judiciaire de ladite société,

- DÉBOUTER la société KARTEX CREATION CONCEPTION et Maître [N] [P], ès qualité de liquidateur judiciaire, de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions.

À TITRE LIMINAIRE, ET PRINCIPALEMENT

- DIRE ET JUGER que l'action des sociétés Hugo Boss Trade Mark Management GmbH et Co KG et Hugo Boss France à l'encontre de la société KARTEX CREATION CONCEPTION et Maître [N] [P], ès qualité de liquidateur judiciaire, est régulière et recevable, en ce que leur action et leurs demandes se limitent à voir juger que la société KARTEX CREATION CONCEPTION a commis des fautes délictuelles en acquérant, en important et en détenant 47.648 paires de chaussettes dont les emballages sont revêtus du signe , et fixer au passif de cette dernière leurs créances respectives.

En conséquence,

- DÉBOUTER la société KARTEX CREATION CONCEPTION et Maître [N] [P], ès qualité de liquidateur judiciaire, de leurs demandes visant à déclarer irrecevables ladite action et leurs demandes afférentes.

- DIRE ET JUGER que :
-les sociétés Hugo Boss Trade Mark Management GmbH et Co KG et Hugo Boss France ont régulièrement déclaré leurs créances auprès de Maître [N] [P], ès qualité de mandataire judiciaire, par lettre et bordereau en date du 29 avril 2019, réceptionnée le 30 avril 2019 ;
-ladite déclaration de créance est régulière sur le fond et la forme, révélant la volonté non équivoque des sociétés Hugo Boss Trade Mark Management GmbH et Co KG et Hugo Boss France de voir inscrire au passif de la société KARTEX CREATION CONCEPTION les créances visées, dont le quantum est précisément évalué

En conséquence,

-DÉBOUTER la société KARTEX CREATION CONCEPTION et Maître [N] [P], ès qualité de liquidateur judiciaire, de leurs demandes visant à juger nulle et de nul effet la déclaration de créance en date du 29 avril 2019 et déclarer irrecevables la présente action et les demandes des concluantes.

- DIRE ET JUGER que la saisie-contrefaçon est une mesure probatoire et que la saisie-contrefaçon judiciairement autorisée par ordonnance du 7 mars 2019, exécutée le 11 mars 2019, est régulière en la forme et juste au fond.

En conséquence,

DÉBOUTER la société KARTEX CREATION CONCEPTION et Maître [N] [P], ès qualité de liquidateur judiciaire, de leurs demandes visant à :
- juger que les sociétés Hugo Boss Trade Mark Management GmbH et Co KG et Hugo Boss France ont renoncé à se prévaloir de la saisie-contrefaçon exécutée le 11 mars 2019 ;
- l'annulation des opérations de saisie-contrefaçon pratiquées le 11 mars 2019 et du procès-verbal dressé en conséquence ;
- la restitution, sous astreinte, des 47.648 paires de chaussettes litigieuses, alors encore que leur saisie réelle a été effectuée par les douanes, tiers à la procédure.

À TITRE LIMINAIRE, ET SUBSIDIAIREMENT

- DIRE ET JUGER que, sous réserve des exemplaires des paires de chaussettes litigieuses réellement saisis en exécution de l'ordonnance de saisie-contrefaçon du 7 mars 2019, à des fins d'administration de la preuve, les sociétés Hugo Boss Trade Mark Management GmbH et Co KG et Hugo Boss France n'ont ni la propriété, ni la possession desdites paires de chaussettes.

En conséquence,

- DÉBOUTER la société KARTEX CREATION CONCEPTION et Maître [N] [P], ès qualité de liquidateur judiciaire, de leurs demandes visant à ordonner la restitution, sous astreinte, des 47.648 paires de chaussettes litigieuses, y compris les exemplaires réellement saisis en exécution de l'ordonnance de saisie-contrefaçon du 7 mars 2019 à des fins d'administration de la preuve.

SUR LE FOND ET À TITRE PRINCIPAL

- DIRE ET JUGER que la société KARTEX CREATION CONCEPTION a commis des actes de contrefaçon :
- des marques de l'Union européenne No49 262 et BOSS No49 221,
- de la marque française BOSS No 1 414 947,
en acquérant, en important et en détenant 47.648 paires de chaussettes dont les emballages sont revêtus du signe les imitant illicitement.

En conséquence,

- FIXER la créance de la société Hugo Boss Trade Mark Management GmbH et Co KG au passif de la société KARTEX CREATION CONCEPTION à la somme de 30.000 euros, sauf à parfaire, à titre de dommages et intérêts en réparation des actes de contrefaçon de marques.

- DIRE ET JUGER, qu'en acquérant, en important et en détenant 47.648 paires de chaussettes dont les emballages sont revêtus du signe contrefaisant les marques précitées, la société KARTEX CREATION CONCEPTION a commis des actes de concurrence déloyale à l'égard de la société Hugo Boss France, en sa qualité de distributeur des produits authentiques revêtus de ces marques.

En conséquence,

FIXER la créance de la société Hugo Boss France au passif de la société KARTEX CREATION CONCEPTION à la somme de 20.000 euros, sauf à parfaire, à titre de dommages-intérêts en réparation des actes de concurrence déloyale.

À TITRE SUBSIDIAIRE

DIRE ET JUGER que la société KARTEX CREATION CONCEPTION a, par l'acquisition et l'importation en France de 47.648 paires de chaussettes dont les emballages sont revêtus du signe , porté atteinte à la renommée :
-des marques de l'Union européenne No49 262 et BOSS No49 221,
-de la marque française BOSS No 1 414 947.

En conséquence,

- FIXER la créance de la société Hugo Boss Trade Mark Management GmbH et Co KG au passif de la société KARTEX CREATION CONCEPTION à la somme de 15.000 euros pour chacune des marques auxquelles il a été porté atteinte à leur renommée, à savoir au total la somme de 45.000 euros, sauf à parfaire, à titre de dommages et intérêts.

À TITRE INFINIMENT SUBSIDIAIRE

- DIRE ET JUGER que la société KARTEX CREATION CONCEPTION a, par l'acquisition et l'importation en France de 47.648 paires de chaussettes dont les emballages sont revêtus du signe , commis des actes de parasitisme en usurpant les caractéristiques visuelles, phonétiques et conceptuelles de la marque No49 262.

En conséquence,

FIXER la créance de la société Hugo Boss Trade Mark Management GmbH et Co KG au passif de la société KARTEX CREATION CONCEPTION à la somme de 20.000 euros, sauf à parfaire, à titre de dommages et intérêts en réparation des actes de parasitisme.

EN TOUTE HYPOTHESE :

- FAIRE INTERDICTION à la société KARTEX CREATION CONCEPTION :
-dans l'Espace Économique Européen, pour ce qui concerne les marques de l'Union européenne No49 262 et BOSS No49 221,
-sur le territoire français, pour ce qui concerne la marque française BOSS No1 414 947, de faire tout usage illicite de ces marques à compter de la signification du jugement à intervenir, sous astreinte de 1.000 euros par infraction et par jour, tout jour supplémentaire constituant une infraction distincte.

- CONDAMNER la société KARTEX CREATION CONCEPTION et Maître [P], es qualité à payer aux sociétés Hugo Boss Trade Mark Management GmbH et Co KG et Hugo Boss France, une somme de 15.000 euros, en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.

- ORDONNER l'exécution provisoire du jugement à intervenir nonobstant appel et constitution de garantie.

- FIXER la créance de la société Hugo Boss Trade Mark Management GmbH et Co KG et de la société Hugo Boss France au passif de la société KARTEX CREATION CONCEPTION à hauteur des entiers dépens, en ce compris les frais des saisies-contrefaçon opérées le 11 mars 2019, dont distraction directe au profit de Maître Christophe Chapoullié, en application des dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.

Dans ses dernières conclusions signifiées par voie électronique le 24 juillet 2020, Maître [P] ès qualité de mandataire liquidateur de la société KARTEX demande au tribunal de :

-Déclarer irrecevables et en tous les cas non fondées l'ensemble des demandes, fins et conclusions formées tant à la requête de la société HUGO BOSS TRADE MARK MANAGEMENT GMBH qu'à la requête de HUGO BOSS FRANCE, et ce avec toutes suites et conséquences de droit ;

- Débouter les sociétés HUGO BOSS TRADE MARK MANGEMENT GMBH et HUGO BOSS FRANCE de l'ensemble de leurs moyens de défense au fond, fin de non recevoir et autres, et ce avec toutes suites et conséquences de droit.

Vu les dispositions des articles L 622-21 et L 622-22 du Code de Commerce,

-Déclarer irrecevable l'action initiée à la requête des sociétés HUGO BOSS dès lors que celle-ci l'a été postérieurement au jugement de redressement judiciaire en date du 11.03.2019 rendu à l'égard de KARTEX CREATION CONCEPTION ;

-Déclarer par voie de conséquence irrecevable les demandes formées par les sociétés HUGO BOSS TRADE MARK MANGEMENT GMBH et HUGO BOSS FRANCE pour cette première raison, et ce avec toutes suites et conséquences de droit.

Vu la déclaration de créance, ou réputée telle, faite par les sociétés HUGO BOSS par courrier recommandé AR en date du 29.04.2019,

-Déclarer nulle et de nul effet et inexistante cette déclaration de créance, et ce avec toutes suites et conséquences de droit ;
-Dire et juger que cette déclaration de créance ne pouvait être formulée à titre « provisionnel » ;

-Dire par ailleurs que cette déclaration de créance ne pouvait être formulée à titre « principal », puis « subsidiaire » et enfin « infiniment subsidiaire » et ce avec toutes suites et conséquences de droit ;

-Dire et juger que, en procédant à déclaration de créance à titre « chirographaire », les sociétés HUGO BOSS TRADE MARK MANAGEMENT GMBH et HUGO BOSS FRANCE ont renoncé implicitement mais nécessairement à se prévaloir de la saisie contrefaçon pratiquée à leur requête ou à leur demande, et ce avec toutes suites et conséquences de droit.

Vu les opérations de saisie contrefaçon initiées le 11.03.2019,
Vu les dispositions du II de l'article L 622-21 du Code de Commerce aux termes desquelles le jugement d'ouverture arrête toute procédure d'exécution de la part des créanciers dont la créance est née antérieurement au jugement d'ouverture,
Vu les dispositions des articles R 621-4, R 631-7 et (ou) R 641-1 du Code de Commerce,

- Ordonner l'annulation pure et simple des opérations de saisie contrefaçon et notamment du PV de saisie contrefaçon en date du 11.03.2019, et ce avec toutes suites et conséquences de droit ;

- Condamner solidairement ou in solidum les sociétés HUGO BOSS à restitution des 47 658 paires de chaussettes sous la marque « BOGOSS » propriété de KARTEX CREATION CONCEPTION se trouvant en les locaux des Douanes de Maubeuge, et ce sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard à compter de la signification du jugement à intervenir, et jusqu'à parfaite restitution, et ce avec toutes suites et conséquences de droit.

- Dire n'y avoir lieu à quelque risque de « confusion » que ce soit entre les marques propriété des sociétés HUGO BOSS et la marque incriminée « BOGOSS », et ce avec toutes suites et conséquences de droit ;

-Dire par voie de conséquence n'y avoir matière à action en contrefaçon ou action en concurrence déloyale, et ce avec toutes suites et conséquences de droit.

Vu les réclamations pécuniaires formées par les sociétés HUGO BOSS,

-Dire que celles-ci ne sauraient justifier d'un quelconque préjudice ou d'une quelconque atteinte à la renommée des marques dont elles sont propriétaires ;

-Débouter par voie de conséquence les sociétés HUGO BOSS de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions au titre des réparations pécuniaires alléguées.

-Condamner solidairement ou in solidum la Société HUGO BOSS TRADE MARK MANAGEMENT GMBH et HUGO BOSS FRANCE au paiement d'une indemnité de 5 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du CPC ;

- Ordonner l'exécution provisoire du jugement à intervenir, nonobstant opposition ou appel et sans caution ;

- Condamner enfin solidairement ou in solidum les sociétés HUGO BOSS aux entiers dépens de la présente instance, et en prononcer distraction au profit de la SELARL CABINET SEVELLEC-DAUCHEL, Avocats aux offres de droit.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 12 novembre 2020 et l'affaire plaidée le 7 janvier 2021.

Pour un exposé complet de l'argumentation des parties il est, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, renvoyé à leurs dernières conclusions précitées.

MOTIFS

1- Sur la recevabilité des demandes compte-tenu de l'ouverture de la procédure de redressement judiciaire

Maître [P] ès qualités, fait valoir que l'assignation ayant été délivrée le 09 avril 2019, donc postérieurement à l'ouverture de la procédure de redressement judiciaire, l'action ou à tout le moins les demandes de nature pécuniaire, doivent être déclarés irrecevables au regard de l'article L 622-21 du code de commerce.

Les sociétés HUGO BOSS répliquent que leurs demandes n'ayant pas pour objet d'obtenir la condamnation de la société KARTEX à payer une somme d'argent, elles ne sauraient être déclarées irrecevables.

Sur ce,

Il résulte de l'article 622-21 du code de commerce que le jugement d'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire interrompt ou interdit toute action en justice tendant à la condamnation du débiteur au paiement d'une somme d'argent.

Il s'en déduit que les demandes autres que pécuniaires doivent être jugées recevables or au cas d'espèce, les sociétés HUGO BOSS sollicitent à titre principal du tribunal d'une part, qu'il dise que la société KARTEX a commis des actes de contrefaçon et des actes de concurrence déloyale et d'autre part, qu'il fixe leurs créances au passif de celle-ci. A titre subsidiaire, elles sollicitent la fixation de leur créance au titre d'atteintes aux marques renommées ou du parasitisme et en tout état de cause, elles requièrent une mesure d'interdiction. Force est de constater qu'aucune de ces demandes n'a pour objet la condamnation de la société KARTEX à payer une somme d'argent.

Il s'ensuit qu'elles doivent être déclarées recevables.

2- Sur la validité de la déclaration de créances

Maître [P] ès qualités, conteste la régularité de la déclaration de créances effectuée par les demanderesses en relevant que celle-ci porte sur des montants provisionnels, qu'elle a été faite à titre chirographaire et tout à la fois, à titre principal et subsidiaire.

Les sociétés HUGO BOSS répliquent que seule compte leur volonté non équivoque de réclamer à titre définitif les sommes indiquées ce que révèle selon elles, leur déclaration de créance.

Sur ce,

L'article L 622-22 du code de commerce dispose qu'en cas d'ouverture d'une procédure judiciaire, les instances en cours sont «interrompues» jusqu'à ce que le créancier poursuivant ait procédé à la déclaration de sa créance. L'appréciation de la régularité d'une déclaration de créance est, par application des dispositions de l'article L 624-2 du même code, de la compétence du juge-commissaire.

Il convient donc en l'espèce, de dire que le tribunal saisi du fond du litige n'est pas compétent pour statuer sur la régularité de la déclaration de créance des sociétés BOSS.

3- Sur la validité des opérations de saisie contrefaçon

Le mandataire liquidateur, qui relève que le procès-verbal de saisie contrefaçon a été établi à la même date que celle de l'ouverture de la procédure judiciaire, considère que cet acte, qui selon lui a entraîné la saisie ou à tout le moins l'immobilisation des produits dont la société KARTEX était propriétaire, doit être annulé de sorte que lesdits produits doivent être restitués. Il ajoute que la déclaration de créance aurait dû être faite à titre «privilégié» et viser la «sûreté» dont les demanderesses bénéficient par suite du «droit de rétention» mis en oeuvre à la suite de l'exercice de la «saisie contrefaçon» et qu'à défaut, celles-ci sont réputées avoir renoncé à la «saisie contrefaçon».

Les sociétés BOSS rappellent que l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire suspend ou interdit l'exécution de toute mesure par un créancier ayant pour objet ou pour effet de contraindre le débiteur à exécuter ses obligations à son égard et ce, à compter du jour du prononcé du jugement d'ouverture mais non les procédures à finalité uniquement probatoire, comme celle de la saisie contrefaçon. Elles ajoutent que Maître [P] opère une confusion erronée entre la retenue douanière, la « saisie-contrefaçon » et la « saisie douanière » et qu'en conséquence la demande de restitution qu'il formule à leur encontre apparaît mal dirigée.

Sur ce,

L'article L622-21 du code de commerce dispose que le jugement d'ouverture d'une procédure judiciaire « arrête ou interdit également toute procédure d'exécution de la part de ces créanciers tant sur les meubles que sur les immeubles ainsi que toute procédure de distribution n'ayant pas produit un effet attributif avant le jugement d'ouverture.»
L'article L 716-4-7 du code de la propriété intellectuelle dispose que "la contrefaçon peut être prouvée par tous moyens. A cet effet, toute personne ayant qualité pour agir en contrefaçon est en droit de faire procéder en tout lieu et par tous huissiers, «le cas échéant» assistés d'experts désignés par le demandeur, en vertu d'une ordonnance rendue sur requête par la juridiction civile compétente, soit à la description détaillée, avec ou sans prélèvement d'échantillons, soit à la saisie réelle des produits ou services prétendus contrefaisants ainsi que de tout document s'y rapportant. L'ordonnance peut autoriser la saisie réelle de tout document se rapportant aux produits et services prétendus contrefaisants en l'absence de ces derniers.
La juridiction peut ordonner, aux mêmes fins probatoires, la description détaillée ou la saisie réelle des matériels et instruments utilisés pour fabriquer ou distribuer les produits ou fournir les services prétendus contrefaisants (...) ».

En l'espèce, il n'est pas contesté que les opérations de saisie contrefaçon ont été réalisées le 11 mars 2019, jour de l'ouverture de la procédure de redressement judiciaire et donc que la société KARTEX bénéficiait à cette date, des dispositions de l'article L622-21 précité.

Toutefois, comme le relèvent justement les sociétés BOSS, la procédure de saisie contrefaçon est une mesure probatoire et lorsque l'huissier dresse un constat de l'atteinte à la marque dans un procès-verbal auquel sont éventuellement joints des échantillons des produits contrefaits, il agit dans le cadre d'une saisie descriptive. Seule la saisie intégrale du stock allégué de contrefaçon est susceptible de faire perdre à la saisie contrefaçon son caractère probatoire et de la faire dégénérer en mesure d'exécution.

L'ordonnance du 7 mars 2019 autorisait l'huissier instrumentaire à faire procéder à la « saisie descriptive de chacun des différents modèles de paires de chaussettes et leurs emballages comportant le signe BOGOSS arguées de contrefaçon » ainsi qu'à la « la saisie réelle de trois exemplaires de chacun des différents modèles de paires de chaussettes et leurs emballages comportant la mention « BOGOSS argués de contrefaçon, qui (devaient être) remis au conseil de la requérante pour l'administration de la preuve, celui-ci étant déclaré gardien de ces produits ».

Il résulte du procès-verbal qui s'en est suivi que l'huissier a effectivement procédé à la description, dans les locaux de la Direction Régionale des Douanes de Maubeuge-Bavay du stock de chaussettes alléguées de contrefaçon et opéré une saisie réelle de trois exemplaires de chacun des quatre modèles différents qu'il a recensé.

Cette opération a donc consisté en une simple saisie descriptive comportant le prélèvement d'échantillons et ne peut être assimilée à une mesure d'exécution telle que visée à l'article L 622-21 du code de commerce.

La demande d'annulation du procès-verbal de saisie contrefaçon sera en conséquence rejetée.

Enfin, c'est également à bon droit que les sociétés HUGO BOSS rappellent que la saisie contrefaçon ne permet pas à son bénéficiaire de contraindre un débiteur à exécuter une obligation, mais seulement d'établir un fait juridique et qu'elle ne peut en conséquence, ouvrir un droit de rétention à son profit. En tout état de cause, des marchandises objet d'une saisie contrefaçon, du fait de leur supposé caractère illicite, ne peuvent donner lieu à rétention.(Cass. com., 26 oct. 1999 : Bull. civ. IV, no 185).

Dans ces conditions, la demande en restitution des chaussettes formée contre la société BOSS qui n'en est pas la détentrice, ne peut qu'être rejetée et dans la mesure où celle-ci ne bénéficiait pas d'une sûreté, il ne peut être considéré qu'elle a renoncé à la saisie contrefaçon au seul motif que la déclaration de créances a été faite à titre chirographaire.

4- Sur les demandes formulées au titre des actes de contrefaçon par imitation

La société BOSS qui soutient que les chaussettes arguées de contrefaçon correspondent strictement aux biens visés dans la classe 25 lors du dépôt de la marque française No 1 414 947 et sont très similaires aux « vêtements » désignés dans la même classe, par les marques No 49 221 et No 49 262, considèrent que le signe semi-figuratif BOGOSS apposé sur l'emballage des chaussettes saisies constitue l'imitation des trois marques dont elle est titulaire.

Le mandataire liquidateur réplique que les quelques similarités existant entre les marques opposées ne sont pas suffisantes pour engendrer auprès du public pertinent, un risque de confusion.

Sur ce,

L'article L 713-3 du code de la propriété intellectuelle dispose dans sa version applicable au litige que « sont interdits, sauf autorisation du propriétaire, s'il peut en résulter un risque de confusion dans l'esprit du public :
(?)
b) L'imitation d'une marque et l'usage d'une marque imitée, pour des produits ou services identiques ou similaires à ceux désignés dans l'enregistrement. »

En application de l'article 9 du règlement (UE) 2017/1001 du parlement européen et du conseil du 14 juin 2017 sur la marque de l'Union européenne :

« 1. L'enregistrement d'une marque de l'Union européenne confère à son titulaire un droit exclusif.
2. Sans préjudice des droits des titulaires acquis avant la date de dépôt ou la date de priorité d'une marque de l'Union européenne, le titulaire de cette marque de l'Union européenne est habilité à interdire à tout tiers, en l'absence de son consentement, de faire usage dans la vie des affaires d'un signe pour des produits ou services lorsque:
a) ce signe est identique à la marque de l'Union européenne et est utilisé pour des produits ou des services identiques à ceux pour lesquels la marque de l'Union européenne est enregistrée;
b) ce signe est identique ou similaire à la marque de l'Union européenne et est utilisé pour des produits ou services identiques ou similaires aux produits ou services pour lesquels la marque de l'Union européenne est enregistrée, s'il existe un risque de confusion dans l'esprit du public; le risque de confusion comprend le risque d'association entre le signe et la marque;
c) ce signe est identique ou similaire à la marque de l'Union européenne, indépendamment du fait que les produits ou services pour lesquels il est utilisé soient identiques, similaires ou non similaires à ceux pour lesquels la marque de l'Union européenne est enregistrée, lorsque celle-ci jouit d'une renommée dans l'Union et que l'usage de ce signe sans juste motif tire indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de la marque de l'Union européenne ou leur porte préjudice.

L'appréciation de la contrefaçon implique de rechercher si, au regard des degrés de similitude entre les signes et les produits et/ou services désignés, il existe un risque de confusion comprenant un risque d'association dans l'esprit du public concerné, lequel doit être apprécié en tenant compte de tous les facteurs pertinents du cas d'espèce.

L'identité des produits désignés dans la classe 25, s'agissant de la marque No 1 414 947 et leur très forte similitude, s'agissant des marques No 49 221 et No 49 262 avec les produits saisis, n'est pas discutée.

L'appréciation de la similitude visuelle, auditive et conceptuelle des signes doit être fondée sur l'impression d'ensemble produite par ceux-ci en tenant compte, notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants.

Il sera par ailleurs rappelé que la comparaison doit s'opérer au regard des signes tels que déposés indépendamment des conditions dans lesquelles ils sont exploités. Il s'ensuit que la société HUGO BOSS ne peut pertinemment fonder ses demandes sur le fait que l'expression « beau gosse » -ou ses transcriptions phonétiques- est régulièrement associée aux visages masculins prêtant leur image aux marques Hugo Boss.

Les deux marques verbales française no1414947 et de l'Union européenne no 49221 sont composées de quatre lettres formant le terme « BOSS ».

D'un point de vue visuel, dans le signe BOGOSS les lettres « GO » ont été insérées entre d'une part la syllabe « BO » et d'autre part, les deux lettres SS. Il est donc composé de deux syllabes et non d'une seule, ce qui d'un point de vue phonétique en modifie le rythme même si du fait de la présence des lettres O et S, la sonorité des deux signes opposés reste voisine.

D'un point de vue intellectuel, alors que le signe BOSS renvoie au patronyme du fondateur de l'entreprise, le vocable « BOGOSS » fait référence à l'expression « beau gosse » , ce qui n'est pas contesté par les demanderesses. Cette importante différence conceptuelle atténue significativement les similitudes visuelles et phonétiques précédemment relevées.

Dans la marque semi figurative de l'Union européenne no49262 d'un point de vue visuel, l'élément dominant est le terme BOSS qui, inscrit dans une taille de police plus grande, surplombe l'ensemble « hugo boss » :

Par comparaison, le signe BOGOSS est constitué d'un terme unique mais il se trouve inscrit sur les emballages des produits saisis dans une police comparable à celle qui est utilisée pour le terme « BOSS » dans la marque déposée.

D'un point de vue phonétique, cette dernière implique une répétition du terme BOSS ce qui lui confère un rythme différent de celui du signe allégué de contrefaçon et va être perçu auprès du public comme un effet de résonnance insistant sur la présentation du nom patronymique.

Enfin, conceptuellement les observations relatives aux marques no1414947 et 49221 sont transposables.

Au regard de ces multiples différences, il ne peut être considéré que le public pertinent qui doit être ici défini comme de jeunes gens sensibles aux courants de la mode et aux vêtements de marque, soit susceptible d'attribuer aux chaussettes arborant le signe BOGOSS la même origine que les produits de marques BOSS.

Le risque de confusion allégué n'est donc pas caractérisé, de sorte que les demandes de la société BOSS sur ce fondement, n'ont pas lieu d'être accueillies.

5- Atteinte à la marque de renommée

La société HUGO BOSS qui soutient que ses marques bénéficient d'une grande renommée, comme cela a pu être précédemment jugé pour sa marque internationale éponyme, fait subsidiairement valoir que du fait de leur très grande proximité verbale, visuelle et conceptuelle avec le signe BOGOSS il se créé entre les deux un lien injustifié, renforcé par l'association d'idée entre l'expression « BEAU GOSSE » ou « BOGOSS » rattachée dans l'esprit du public, aux marques Hugo Boss.

Le mandataire liquidateur réplique qu'il n'a pu être porté atteinte à la renommée des marques litigieuses dès lors que les chaussettes alléguées de contrefaçon n'ont pas quitté les entrepôts des douanes françaises.

Sur ce,

L'article 9 §2 c) du règlement (UE) no2017/1001 dans sa version issue du règlement (UE) 2015/2424 dispose que :

« 1. L'enregistrement d'une marque de l'Union européenne confère à son titulaire un droit exclusif.
2. Sans préjudice des droits des titulaires acquis avant la date de dépôt ou la date de priorité d'une marque de l'Union européenne, le titulaire de cette marque de l'Union européenne est habilité à interdire à tout tiers, en l'absence de son consentement, de faire usage dans la vie des affaires d'un signe pour des produits ou services lorsque:
(...)
c) ce signe est identique ou similaire à la marque de l'Union européenne, indépendamment du fait que les produits ou services pour lesquels il est utilisé soient identiques, similaires ou non similaires à ceux pour lesquels la marque de l'Union européenne est enregistrée, lorsque celle-ci jouit d'une renommée dans l'Union et que l'usage de ce signe sans juste motif tire indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de la marque de l'Union européenne ou leur porte préjudice ».

En l'espèce, sans même qu'il soit nécessaire de rechercher si les marques litigieuses bénéficient d'une renommée leur permettant de bénéficier de la protection visée à l'article 9 précité il suffira, pour rejeter les demandes formées sur ce fondement, de relever qu'au cas d'espèce, les différences visuelle, sonore et surtout conceptuelle entre les signes opposés sont trop importantes pour que le signe litigieux puisse être considéré comme identique ou similaire aux marques opposées.

6- Actes de parasitisme

A titre infiniment subsidiaire, la société HUGO BOSS soutient que la société KARTEX a usurpé « sans bourse délier » l'identité visuelle et l'association d'idée de cette marque afin de se placer dans son sillage et de profiter de son image et de sa très forte attractivité pour des articles de prêt-à-porter, tels que des chaussettes et ainsi faciliter leur commercialisation. Elle ajoute que l'usurpation du graphisme spécifique de la marque No49 262 par le signe BOGOSS constitue également un acte de parasitisme.

Le mandataire liquidateur conclut au rejet des demandes formées à ce titre en relevant qu'en l'absence de commercialisation des chaussettes litigieuses, la société BOSS n'a subi aucun préjudice.

Sur ce,

Il résulte des articles 1240 et 1241 du code civil que tout fait quelconque de l'homme qui cause à autrui un dommage oblige celui par la faute duquel il est arrivé à la réparer, chacun étant responsable du dommage qu'il a causé non seulement par son fait mais encore par sa négligence ou par son imprudence.

Le parasitisme est constitué lorsqu'une personne physique ou morale, à titre lucratif et de façon injustifiée, copie une valeur économique d'autrui, individualisée et procurant un avantage concurrentiel, fruit d'un savoir-faire, d'un travail intellectuel et d'investissements.

En l'espèce, la société BOSS justifie par la production de plusieurs articles de journaux (pièces DEM 26.1 à 26.8) de l'utilisation dans ses campagnes de communication, de l'expression « Beaux gosses » ou « Bogosses » ce, depuis une dizaine d'années. La reprise de ce concept par la société KARTEX pour commercialiser des chaussettes constitue incontestablement un acte parasitaire.

Toutefois, un tel acte n'est susceptible d'être indemnisé qu'à la condition d'avoir entraîné un préjudice or en l'espèce, il est constant que les produits litigieux ont été appréhendés par les services des douanes avant leur commercialisation et donc leur présentation au public de sorte qu'aucun préjudice n'a pu être supporté par la société BOSS en lien avec l'utilisation du signe BOGOSS par la société KARTEX.

Les demandes formées au titre du parasitisme seront en conséquence rejetées.

7- Sur les actes de concurrence déloyale

La société HUGO BOSS FRANCE soutient que les actes de contrefaçon reprochés à la société KARTEX constituent à son égard des actes de concurrence déloyale.

Maître [P], ès qualité, réplique qu'en l'absence de risque de confusion, il ne peut être attribué à la société KARTEX le moindre acte de concurrence déloyale.

Sur ce,

La concurrence déloyale, fondée sur le principe général de responsabilité édicté par l'article 1240 du code civil, consiste dans des agissements s'écartant des règles générales de loyauté et de probité professionnelle applicables dans la vie des affaires tels que ceux créant un risque de confusion avec les produits ou services offerts par un autre. Elle suppose la caractérisation d'une faute génératrice d'un préjudice.

En l'espèce, les demandes de la société HUGO BOSS FRANCE exclusivement fondées sur les actes de contrefaçon imputés à la société KARTEX qui n'ont pas été retenus, ne peuvent qu'être rejetées.

8-frais du litige et conditions d'exécution de la décision

Les sociétés HUGO BOSS et HUGO BOSS FRANCE parties perdantes, supporteront la charge des dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Elles doivent en outre être condamnées à verser à Maître [P] ès qualité, qui a dû exposer des frais irrépétibles pour faire valoir ses droits, une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile qu'il est équitable de fixer à la somme de 5000 euros.

L'exécution provisoire compatible avec la solution du litige sera ordonnée.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal, statuant publiquement par jugement mis à disposition au greffe, contradictoire et en premier ressort,

DECLARE les sociétés HUGO BOSS TRADE MARK MANAGEMENT GMBH et CO KGet HUGO BOSS FRANCE recevables en leurs demandes ;

SE DECLARE incompétent pour statuer sur la régularité de la déclaration de créances des sociétés HUGO BOSS TRADE MARK MANAGEMENT GMBH et CO KGet HUGO BOSS FRANCE ;

VALIDE le procès verbal de saisie contrefaçon en date du 11 mars 2019 ;

DEBOUTE la société HUGO BOSS TRADE MARK MANAGEMENT GMBH et CO KG de ses demandes fondées sur la contrefaçon des marques française no1414947 et de l'Union européenne no 49221 et no49262 ;

DEBOUTE la société HUGO BOSS TRADE MARK MANAGEMENT GMBH et CO KG de ses demandes fondées sur l'atteinte à la marque de renommée ;

DEBOUTE la société HUGO BOSS TRADE MARK MANAGEMENT GMBH et CO KG de ses demandes fondées sur le parasitisme ;

DEBOUTE la société HUGO BOSS FRANCE de ses demandes fondées sur la concurrence déloyale ;

DEBOUTE Maître [N] [P] ès qualités de mandataire liquidateur de la société KARTEX CREATION CONCEPTION de sa demande en restitution des marchandises objet de la saisie contrefaçon du 19 mars 2019 ;

CONDAMNE la société HUGO BOSS TRADE MARK MANAGEMENT GMBH et CO KG et la société HUGO BOSS FRANCE à payer à Me [N] [P] ès qualités de mandataire liquidateur de la société KARTEX CREATION CONCEPTION une somme de 5000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la société HUGO BOSS TRADE MARK MANAGEMENT GMBH et CO KGet la société HUGO BOSS FRANCE aux dépens qui seront recouvrés par la SELARL CABINET SEVELLEC-DAUCHEL en application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;

ORDONNE l'exécution provisoire.

Fait et jugé à Paris le 12 février 2021.

Le GreffierLe Président


Synthèse
Tribunal : Tribunal de grande instance de Paris
Formation : Ct0196
Numéro d'arrêt : 3
Date de la décision : 12/02/2021

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.grande.instance.paris;arret;2021-02-12;3 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award