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29/01/2021 | FRANCE | N°3

France | France, Tribunal de grande instance de Paris, Ct0196, 29 janvier 2021, 3


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS

3ème chambre 2ème section

No RG 18/06307
No Portalis 352J-W-B7C-CNANP

No MINUTE :

Assignation du :
22 mai 2018
JUGEMENT
rendu le 29 janvier 2021
DEMANDERESSES

S.A.S. VALEO SYSTEMES THERMIQUES
[Adresse 3]
[Adresse 3]
[Localité 1]

S.A.S. VALEO SERVICE
[Adresse 2]
[Localité 4]

représentées par Maître Grégoire DESROUSSEAUX de la SCP AUGUST et DEBOUZY et associés, avocats au barreau de PARIS, vestiaire #P0438

DÉFENDERESSES

SOCIÉTÉ NISSENS COOLING SOLUTI

ONS A/S
[Adresse 4]
[Localité 2]
DANEMARK

S.A.R.L. NISSEN FRANCE
[Adresse 1]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
[Localité 3]

représentées par Maître Denis MON...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS

3ème chambre 2ème section

No RG 18/06307
No Portalis 352J-W-B7C-CNANP

No MINUTE :

Assignation du :
22 mai 2018
JUGEMENT
rendu le 29 janvier 2021
DEMANDERESSES

S.A.S. VALEO SYSTEMES THERMIQUES
[Adresse 3]
[Adresse 3]
[Localité 1]

S.A.S. VALEO SERVICE
[Adresse 2]
[Localité 4]

représentées par Maître Grégoire DESROUSSEAUX de la SCP AUGUST et DEBOUZY et associés, avocats au barreau de PARIS, vestiaire #P0438

DÉFENDERESSES

SOCIÉTÉ NISSENS COOLING SOLUTIONS A/S
[Adresse 4]
[Localité 2]
DANEMARK

S.A.R.L. NISSEN FRANCE
[Adresse 1]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
[Localité 3]

représentées par Maître Denis MONEGIER DU SORBIER de l'AARPI HOYNG ROKH MONEGIER, avocats au barreau de PARIS, vestiaire #P0512

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Florence BUTIN, Vice-Présidente
Catherine OSTENGO, Vice-présidente
Emilie CHAMPS, Vice-Présidente

assistées de Géraldine CARRION, greffier

DÉBATS

A l'audience du 4 décembre 2020
tenue en audience publique

JUGEMENT

Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe
Contradictoire
en premier ressort

EXPOSE DU LITIGE

PRESENTATION DES PARTIES :

La société Valeo Systèmes Thermiques (ci-après VST) - filiale du groupe VALEO, équipementier automobile- a pour activité déclarée l'étude, la fabrication, la vente et la prestation de services concernant tous appareils, équipements et dispositifs mécaniques, électriques et électroniques de tous genres pour l'industrie en général et notamment l'industrie automobile.

Elle est titulaire de plusieurs brevets parmi lesquels notamment :
- le brevet français FR 2 902 511 (ci-après FR 511) déposé le 19 juin 2006 et délivré le 8 août 2008 ayant pour intitulé « boîte collectrice pour échangeur de chaleur et échangeur de chaleur comportant une telle boîte collectrice » qui a fait l'objet d'une limitation en date du 12 avril 2019.
- le brevet européen EP 1 150 087 (ci-après EP 087) déposé le 25 avril 2001 -sous priorité d'un brevet FR 0 005 414 délivré le 27 avril 2000- et délivré le 1er février 2006 ayant pour intitulé «échangeur de chaleur avec collecteur d'encombrement réduit, notamment pour véhicule automobile»
- le brevet français FR 2 929 386 (ci-après FR 386) déposé le 29 avril 2008 et délivré le 24 octobre 2014 ayant pour intitulé « module d'échange de chaleur muni de moyen d'assemblage, notamment pour véhicule automobile ».

Ces titres sont maintenus en vigueur par le paiement régulier des annuités dont les dernières ont été respectivement réglées les 30 juin 2020, 30 avril 2020 et 26 avril 2018.

La société Valeo Service est le distributeur exclusif sur le marché français des radiateurs VALEO, notamment celui des pièces de rechange pour véhicules automobiles.

Le groupe Nissens A/S (ou « Nissens ») est un équipementier automobile danois spécialisé dans la fabrication et la commercialisation de systèmes de refroidissement destinés au secteur industriel, au secteur des énergies renouvelables et au secteur automobile.

Il comprend la division « Nissens Cooling Solutions », spécialisée dans la fabrication et la commercialisation de systèmes de refroidissement destinés au secteur industriel et au secteur des énergies renouvelables et la division « Nissens Automotive », spécialisée dans la fabrication et la commercialisation de systèmes de refroidissement destinés au secteur automobile, et en particulier au marché des pièces de rechange automobiles.

A la suite d'une scission intervenue le 30 septembre 2018, la division Nissens Cooling Solutions est restée dans la société Nissens A/S, devenue Nissens Cooling Solutions A/S tandis que la division Nissens Automotive a été transférée le 30 septembre 2018 à une nouvelle entité, la société Nissens Automotive A/S.

Nissen France se présente comme la filiale française de Nissens Automotive.

LES AUTRES PROCEDURES EN COURS :

Parallèlement à la présente procédure, plusieurs filiales du groupe VALEO dont les sociétés VST et VALEO FRANCE ont fait assigner en concurrence déloyale et parasitaire les sociétés NISSEN FRANCE et NISSENS A/S devant le tribunal de commerce de Versailles aux fins notamment de voir juger que ces dernières commercialisent des radiateurs, condenseurs et intercoolers constituant des copies serviles des produits VALEO, dans des conditions laissant à penser qu'il s'agit de pièces d'origine.

Le tribunal de Versailles s'est dans un premier temps, déclaré partiellement incompétent puis, dans son jugement du 27 mai 2020, bien qu'ayant considéré que les défenderesses avaient commis des actes de concurrence déloyale tenant aux conditions de commercialisation de leurs produits, a jugé que ceux-ci ne constituaient pas des copies serviles des équipements VALEO et qu'il n'était pas rapporté la preuve d'un lien de causalité entre les actes délictueux et le préjudice allégué.

Les demanderesses ayant interjeté appel de cette décision, la procédure est actuellement pendante devant la cour d'appel de Versailles.

LE LITIGE :

Ayant découvert que les défenderesses proposaient à la vente une gamme complète de radiateurs et des intercoolers compatibles avec certains de ses radiateurs reproduisant selon elle les caractéristiques des revendications des brevets litigieux, directement sur le site internet de la société Nissens A/S et par l'intermédiaire de distributeurs français de pièces détachées automobiles, la société VST en a fait dresser procès-verbal de constat les 8, 9, 10 et 11 août 2017.

C'est dans ces conditions que les sociétés VST et VALEO FRANCE ont, par actes du 22 mai 2018, fait assigner devant ce tribunal la société NISSEN A/S et NISSEN FRANCE en contrefaçon des revendications de ses brevets.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 10 avril 2020, les sociétés VST et VALEO FRANCE présentent les demandes suivantes :

Vu les articles L.613-3 et suivants, L.615-1 et suivants du code de la propriété intellectuelle,
Vu le brevet français no FR 2 902 511 ;
Vu le brevet français no FR 2 929 386 ;
Vu la partie française du brevet européen no EP 1 150 087 ;
Vu l'article 1240 du code civil,
Vu les articles 699 et suivants du code de procédure civile ;

Concernant la validité des brevets :
- Dire que les revendications 1, 5, 6, 7 et 8 du brevet français no FR 2 902 511 sont valides ;
- Dire que les revendications 1, 3, 5, 7, et 9 du brevet européen no EP 1 150 087 sont valides ;
- Dire que les revendications 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 21 et 22 du brevet français no FR 2 929 386 sont valides ;

Concernant les actes de contrefaçon commis :
- Dire qu'en important, en vendant, en offrant à la vente et en mettant dans le commerce des radiateurs de références 63505 et 63689A, Nissens Cooling Solutions A/S (anciennement Nissens A/S) et Nissen France ont commis des actes de contrefaçon des revendications 1, 5, 6, 7 et 8 du brevet français no FR 2 902 511 selon l'article L. 613-3 du code de la propriété intellectuelle, engageant leur responsabilité civile ;

- Dire qu'en important, en vendant, en offrant à la vente et en mettant dans le commerce des radiateurs de références 65281A, 61875A, 67246, 63764, 617853, 63762, 67286, 652011, 65277, 60299, 65295, 632461, 61347, 61379, 63761, 67229, 61764, 637647, 639371, 63769, 61277, 61284, et 67285, Nissens Cooling Solutions A/S (anciennement Nissens A/S) et Nissen France ont commis des actes de contrefaçon des revendications 1 et 5 du brevet français no FR 2 902 511 selon l'article L. 613-3 du code de la propriété intellectuelle, engageant leur responsabilité civile ;

- Dire qu'en important, en vendant, en offrant à la vente et en mettant dans le commerce des radiateurs de références 67229 et 640012, Nissens Cooling Solutions A/S (anciennement Nissens A/S) et Nissen France ont commis des actes de contrefaçon des revendications 1, 3, 5, 7, et 9 de la partie française du brevet européen no EP 1 150 087 selon l'article L. 613-3 du code de la propriété intellectuelle, engageant leur responsabilité civile ;

- Dire qu'en important, en vendant, en offrant à la vente et en mettant dans le commerce des radiateurs de références 637617, 637647, 637608, 637607 et des intercoolers de références 96543, 96545 et 96546, Nissens Cooling Solutions A/S (anciennement Nissens A/S) et Nissen France ont commis des actes de contrefaçon des revendications 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 21 et 22 du brevet français no FR 2 929 386 selon l'article L. 613-3 du code de la propriété intellectuelle, engageant leur responsabilité civile ;

- Dire qu'en livrant et en offrant de livrer séparément des radiateurs de références 637617, 637647, 637608, 637607 et des intercoolers de références 96543, 96545 et 96546, Nissens Cooling Solutions A/S (anciennement Nissens A/S) et Nissen France ont commis des actes de contrefaçon Conclusions Valeo no 3 des revendications 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 21 et 22 du brevet français no FR 2 929 386 selon l'article L. 613-4 du code de la propriété intellectuelle, engageant leur responsabilité civile ;

En conséquence,

- Interdire aux sociétés Nissens Cooling Solutions A/S (anciennement Nissens A/S) et Nissen France la poursuite de ces actes de contrefaçon, directement ou indirectement, par l'intermédiaire de toute personne physique ou morale :
-et notamment la fabrication, l'offre, la mise dans le commerce, l'utilisation, l'importation, l'exportation, le transbordement, ou la détention aux fins précitées, ainsi que la livraison et l'offre de livraison, sur le ou à partir du territoire français, de tous produits mettant en oeuvre les revendications 1, 5, 6, 7 et 8 du brevet français FR 2 902 511, les revendications 1, 3, 5, 6, 7, et 9 de la partie française du brevet européen no EP 1 150 087 et les revendications 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 21 et 22 du brevet français FR 2 929 386,

-et notamment des radiateurs de références 65281A, 63505, 61875A, 63689A, 67246, 63764, 617853, 63762, 67286, 652011, 65277, 60299, 65295, 632461, 61347, 61379, 63761, 67229, 640012, 637617, 637647, 637608, 637607, 639371, 63769, 61277, 61284 et 67285 et des intercoolers de références 96543, 96545 et 96546, ainsi que tous autres radiateurs et intercoolers fournis à Nissens Cooling Solutions A/S (anciennement Nissens A/S) et Nissen France par le même fabricant que les radiateurs de références 65281A, 63505, 61875A, 63689A, 67246, 63764, 617853, 63762, 67286, 652011, 65277, 60299, 65295, 632461, 61347, 61379, 63761, 67229, 640012, 637617, 637647, 637608, 637607, 639371, 63769, 61277, 61284 et 67285 et les intercoolers de références 96543, 96545 et 96546, en particulier par la société chinoise Rnbc Zhejiang Nabaichuan Auto Parts Co. Ltd. et par la société chinoise Shanghai Delang Auto Parts Manufacturing Co. Ltd. ;

- Assortir cette interdiction d'une astreinte de 10 000 euros par infraction constatée, à compter de la signification du jugement à intervenir, étant précisé que chaque livraison, offre de livraison fabrication, offre, mise dans la commerce, utilisation, importation, exportation, transbordement ou détention à l'une quelconque de ces fins d'un produit contrefaisant constituera une infraction distincte ;

- Assortir en outre cette interdiction d'une astreinte de 10 000 euros par journée pendant laquelle les actes de contrefaçon se poursuivent après la signification du jugement à intervenir ;
- Ordonner la destruction des produits contrefaisants en possession des sociétés Nissens Cooling Solutions A/S (anciennement Nissens A/S) et Nissen France ou dont elles sont propriétaires, à leurs frais, et ce sous astreinte de 10 000 euros par jour de retard après la signification du jugement à intervenir ;

- Ordonner le rappel des circuits commerciaux des produits contrefaisants et la destruction de ceux-ci, aux seuls frais des sociétés Nissens Cooling Solutions A/S (anciennement Nissens A/S) et Nissen France et ce sous astreinte de 10 000 euros par jour de retard passé un délai d'une semaine après la signification du jugement à intervenir ;

- Ordonner, sous astreinte de 10 000 euros par jour de retard passé un délai d'un mois après la signification du jugement à intervenir, la production de tous documents ou informations détenus par les sociétés Nissens Cooling Solutions A/S (anciennement Nissens A/S) et Nissen France utiles pour déterminer l'origine et les réseaux de distribution des produits contrefaisants, et notamment :
a) les nom et adresse des producteurs, fabricants, distributeurs, fournisseurs et autres détenteurs antérieurs de tous produits mettant en oeuvre les revendications 1, 5, 6, 7 et 8 du brevet français FR 2 902 511, les revendications 1, 3, 5, 6, 7, et 9 de la partie française du brevet européen no EP 1 150 087 et les revendications 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 21 et 22 du brevet français FR 2 929 386, et notamment des radiateurs de références 65281A, 63505, 61875A, 63689A, 67246, 63764, 617853, 63762, 67286, 652011, 65277, 60299, 65295, 632461, 61347, 61379, 63761, 67229, 640012, 637617, 637647, 637608, 637607, 639371, 63769, 61277, 61284 et 67285 et des intercoolers de références 96543, 96545 et 96546, ainsi que des grossistes destinataires et des détaillants ;
b) les quantités produites, commercialisées, livrées, reçues ou commandées, ainsi que le prix obtenu pour ces produits ;
c) la marge brute réalisée pour ces produits ;
sous la certification d'un expert-comptable ou d'un commissaire aux comptes, détaillant les éléments retenus dans le calcul de la marge brute, et renvoyer l'affaire à telle audience qui plaira au Tribunal, afin de permettre aux sociétés Valeo Systèmes Thermiques et Valeo Service de conclure sur le montant total des dommages et intérêts en réparation des actes de contrefaçon ;

- Condamner les sociétés Nissens Cooling Solutions A/S (anciennement Nissens A/S) et Nissen France, prises in solidum, à payer à la société Valeo Systèmes Thermiques, à titre de provision sur les dommages-intérêts en réparation du préjudice financier résultant de la contrefaçon du brevet français no FR 2 902 511, du brevet français no FR 2 929 386 et de la partie française du brevet européen no EP 1 150 087, la somme forfaitaire de 500 000 euros (cinq cent mille euros), dans l'attente de la production des documents et informations ordonnée ;

- Condamner les sociétés Nissens Cooling Solutions A/S (anciennement Nissens A/S) et Nissen France, prises in solidum, à payer à la société Valeo Service, à titre de provision sur les dommages-intérêts en réparation du préjudice financier résultant de la contrefaçon du brevet français no FR 2 902 511, du brevet français no FR 2 929 386 et de la partie française du brevet européen no EP 1 150 087, la somme forfaitaire de 500 000 euros (cinq cent mille euros), dans l'attente de la production des documents et informations ordonnée ;

- Condamner les sociétés Nissens Cooling Solutions A/S (anciennement Nissens A/S) et Nissen France, prises in solidum, à payer à la société Valeo Systèmes Thermiques, à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice moral résultant de la contrefaçon du brevet français no FR 2 902 511, du brevet français no FR 2 929 386 et de la partie française du brevet européen no EP 1 150 087, la somme de 100 000 euros (cent mille euros) ;

- Rappeler que ces condamnations financières sont exécutoires de plein droit, nonobstant appel ;

- Ordonner la publication complète du jugement à intervenir sur le site internet habituel des sociétés Nissens A/S et Nissen France à l'adresse http://www.nissens.com, et ce avec un lien hypertexte apparent sur la première page dans une police d'une taille de 20 points au moins mentionnant :
« Les sociétés Nissens Cooling Solutions A/S (anciennement Nissens A/S) et Nissen France ont été condamnées par le Tribunal de grande instance de Paris pour contrefaçon des droits de propriété intellectuelle de la société Valeo Systèmes Thermiques » et ce pendant une durée minimale de six mois, aux seuls frais des sociétés Nissens A/S et Nissen France, sous astreinte de 10 000 euros par jour de retard à compter de la signification de la décision ;

- Autoriser les sociétés Valeo Systèmes Thermiques et Valeo Service à publier le jugement à intervenir sur leur site internet à l'adresse http://www.valeo.com ;

- Ordonner la publication par extraits du dispositif du jugement à intervenir dans cinq journaux choisis par les sociétés Valeo Systèmes Thermiques et Valeo Service, aux seuls frais avancés des sociétés Nissens Cooling Solutions A/S (anciennement Nissens A/S) et Nissen France, prises in solidum, à hauteur de 7 500 euros par publication, hors T.V.A. ;

- Dire et juger que le Tribunal sera juge de l'exécution du jugement à intervenir, en application de l'article L. 131-3 du Code des procédures civiles d'exécution, pour ce qui concerne la liquidation éventuelle des astreintes ;

- Condamner les sociétés Nissens Cooling Solutions A/S (anciennement Nissens A/S) et Nissen France, prises in solidum, à payer à la société Valeo Systèmes Thermiques la somme de 175 000 euros (cent soixante-quinze mille euros) au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

- Condamner les sociétés Nissens Cooling Solutions A/S (anciennement Nissens A/S) et Nissen France, prises in solidum, à payer à chacune la société Valeo Service la somme de 175 000 euros (cent soixante-quinze mille euros) au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Condamner les sociétés Nissens Cooling Solutions A/S (anciennement Nissens A/S) et Nissen France, prises in solidum, aux entiers dépens, lesquels incluront à tout le moins les frais engagés pour les constats d'achat, les constats internet et rapports d'analyse tomographique, à hauteur de 24 124 euros, à parfaire, et autoriser Maître Grégoire Desrousseaux à recouvrer les dépens dans les conditions prévues à l'article 699 du code de procédure civile ;

- Débouter les sociétés Nissens Cooling Solutions A/S (anciennement Nissens A/S) et Nissen France de l'ensemble de leurs demandes, fins et prétentions ;

- Ordonner l'exécution provisoire du jugement à intervenir, dans toutes ses dispositions nonobstant toute voie de recours et sans constitution de garantie ;

Les sociétés NISSEN A/S et NISSEN FRANCE présentent, aux termes de leurs dernières conclusions notifiées par voie électronique le 11 septembre 2020, les demandes suivantes :

Par application des textes susvisés, en particulier des articles L.611-1 à L.611-14, L.613-3, L.613-4, L614-12, L.615-1, L.615-5-2 et L.615-7 du code de la propriété intellectuelle, de l'article 1240 du code civil, des articles 52 à 56 et 138 de la convention sur le brevet européen ainsi qu'au vu des pièces énumérées sur le bordereau annexé aux présentes conclusions,

Sur le brevet FR 2 902 511 :

? Annuler les revendications 1, 5, 6, 7 et 8 dudit brevet pour insuffisance de description ;
? Annuler les revendications 1, 5, 6 et 8 dudit brevet pour défaut de nouveauté, ou, à titre subsidiaire, parce qu'elles n'impliquent pas d'activité inventive ;
? Annuler la revendication 7 dudit brevet parce qu'elle n'implique pas d'activité inventive ;
? Annuler les revendications 1, 5, 6, 7 et 8 dudit brevet pour extension de leur objet au-delà du contenu de la demande de brevet telle que déposée ;

Sur le brevet EP 1 150 087 :

? Annuler les revendications 1, 3, 5, 7 et 9 dudit brevet pour insuffisance de description ;
? Annuler les revendications 1, 3, 5, 7 et 9 dudit brevet défaut de nouveauté, ou, à titre subsidiaire, parce qu'elles n'impliquent pas d'activité inventive ;

Sur le brevet FR 2 929 386 :

? Annuler les revendications 1 à 13, 21 et 22 dudit brevet pour extension de leur objet au-delà du contenu de la demande de brevet telle que déposée ;
? Annuler les revendications 1 à 13, 21 et 22 dudit brevet pour défaut de nouveauté, et à titre subsidiaire parce qu'elles n'impliquent pas d'activité inventive ;

En conséquence,

? Rejeter les demandes des sociétés VALEO SYSTÈMES THERMIQUES et VALEO SERVICE tendant à faire juger que les sociétés NISSEN FRANCE et NISSENS A/S contrefont l'un quelconque des brevets FR 2 902 511, EP 1 150 087 et FR 2 929 386 ;
? Rejeter les demandes d'interdiction, de rappel des circuits commerciaux et de destruction des sociétés VALEO SYSTÈMES THERMIQUES et VALEO SERVICE, ainsi que les astreintes afférentes ;
? Rejeter les demandes d'exercice du droit d'information, de paiement de provision, d'exécution provisoire et de publication des sociétés VALEO SYSTÈMES THERMIQUES et VALEO SERVICE, ainsi que leurs demandes relatives aux dépens et à l'article 700 du code de procédure civile ;
? Prononcer l'irrecevabilité ou, à titre subsidiaire, rejeter les demandes indemnitaires des sociétés VALEO SYSTÈMES THERMIQUES et VALEO SERVICE ;
? Débouter les sociétés VALEO SYSTÈMES THERMIQUES et VALEO SERVICE de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions comme étant, si ce n'est irrecevables, à tout le moins mal fondées ;
Et, statuant sur les demandes reconventionnelles de Nissens, après avoir statué sur celle en nullité des brevets invoqués :
? Condamner les sociétés VALEO SYSTÈMES THERMIQUES et VALEO SERVICE pour concurrence déloyale résultant à tout le moins d'un abus de position dominante ;
? Condamner les sociétés VALEO SYSTÈMES THERMIQUES et VALEO SERVICE, pour procédure abusive, à payer in solidum un euro à chacune des sociétés NISSEN FRANCE et NISSENS A/S ;
? Ordonner la publication du jugement à intervenir :
? sur la page d'accueil des sites web des sociétés VALEO SYSTÈMES THERMIQUES et VALEO SERVICE, et notamment sur le site web www.valeo.com, en taille d'au moins 20 points, avec la mention suivante « Les sociétés VALEO SYSTÈMES THERMIQUES et VALEO SERVICE ont été condamnées en France pour des actes de concurrence déloyale résultant d'un abus de position dominante », en français et en anglais, pendant une durée minimale de six mois, et ce sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard ;
? dans les publications suivantes : le magazine en ligne Auto Motor Zubehör; le magazine Zepros Auto et le magazine MRA Professionnel, sans que le coût individuel de ces trois publications n'excède la somme de 10 000 euros hors taxes ; le coût de ces publications étant à la charge des sociétés VALEO SYSTÈMES THERMIQUES et VALEO SERVICE, qui l'avanceront ;
? S'entendre le tribunal rester juge de l'exécution du jugement à intervenir, en application de l'article L. 131-3 du code des procédures civiles d'exécution, pour ce qui concerne la liquidation éventuelle des astreintes ;
? Autoriser les sociétés NISSEN FRANCE ou NISSENS A/S à publier les motifs et le dispositif du jugement à intervenir sur leurs sites web, et notamment sur le site web www.nissens.com, pendant une période pouvant s'étendre jusqu'à six mois après le prononcé du jugement ;
? Condamner in solidum les sociétés VALEO SYSTÈMES THERMIQUES et VALEO SERVICE à prendre à leur charge, avec exécution provisoire, l'ensemble des frais engagés par les sociétés NISSEN FRANCE ou NISSENS A/S afin d'assurer leur défense dans le cadre de la présente procédure, et en particulier les honoraires et frais de leurs conseils, c'est-à-dire 200 000 € pour chacune des sociétés Nissens, à parfaire;
? Condamner les sociétés VALEO SYSTÈMES THERMIQUES et VALEO SERVICE à payer in solidum à chacune des sociétés NISSEN FRANCE et NISSENS A/S un euro de dommages et intérêts au titre de leur préjudice moral respectif ;
? Condamner les sociétés VALEO SYSTÈMES THERMIQUES et VALEO SERVICE à payer in solidum à chacune des sociétés NISSEN FRANCE et NISSENS A/S au titre de la concurrence déloyale dont elles ont été victimes, un montant égal à un euro ;
? Ordonner l'exécution provisoire du jugement à intervenir, nonobstant tout appel éventuel et sans qu'il y ait obligation de constituer une garantie ;
? Condamner les sociétés VALEO SYSTÈMES THERMIQUES et VALEO SERVICE aux dépens, lesquels pourront être recouverts directement par Maître Denis Monégier du Sorbier, en application de l'article 699 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 24 septembre 2020 et l'affaire plaidée les 3 et 4 décembre 2020.

Pour un exposé complet de l'argumentation des parties il est, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, renvoyé à leurs dernières conclusions précitées.

MOTIFS DE LA DECISION:

1 - DESCRIPTION DES BREVETS

1.1 L'objet du brevet FR 2 902 511 :

Le brevet français FR 511 porte sur une boîte collectrice utilisée notamment dans un radiateur de refroidissement c'est-à-dire dans un échangeur de chaleur qui, placé à l'avant d'un véhicule automobile, est exposé à des projections extérieures. Il porte également sur l'échangeur lui-même comportant une telle boîte collectrice.

Il est rappelé dans la partie descriptive du brevet que dans un échangeur de chaleur à écoulement vertical, c'est-à-dire dont les tubes sont verticaux pour permettre une circulation du liquide de refroidissement de haut en bas, les collets du collecteur pour 1'insertion des tubes d'échange de chaleur sont dirigés vers le haut, tandis que la gorge périphérique est dirigée vers le bas et un joint d'étanchéite est appliqué sous le collecteur, les manchons de ce joint dépassant au-dessus des collets respectifs.

La liaison des tubes avec la boite collectrice s'effectue par assemblage mécanique avec compression des manchons au moyen d'un outil communément appelé "olive", introduit axialement à l'intérieur des tubes qui va entraîner la formation d'une surépaisseur ou bourrelet de joint d'étanchéité dépassant faiblement des collets correspondants, jusqu'à une hauteur verticale inférieure à celle de la bordure surélevée du collecteur.

Cette configuration a pour conséquence que l'eau ou un autre liquide peut s'accumuler dans la cuvette délimitée par la bordure surélevée du collecteur et entraîner une corrosion par 1'extérieur du pied des tubes, susceptible de provoquer des fuites du liquide de refroidissement.

L'invention se propose de remédier à cet inconvénient en proposant une boite collectrice comportant un manchon avec une surépaisseur préformée appelée "tétine", se prolongeant suffisamment au-delà du collet pour que son extrémité se situe au moins à la hauteur de la bordure surélevée du collecteur, protégeant ainsi le pied des tubes de la corrosion.

Dans sa version limitée consistant en l'ajout d'une caractéristique dans la revendication 1 - les modifications en résultant étant soulignées par le tribunal pour une meilleure lisibilité du titre - le brevet se compose à cette fin de 8 revendications dont seules sont invoquées les suivantes :

1.Boîte collectrice pour échangeur de chaleur, comportant un collecteur (28) qui est muni de collets (36) pour l'insertion de tubes (14) d'échange de chaleur et qui est entouré par une bordure surélevée (38) délimitant une gorge périphérique (40), ladite boîte collectrice comportant un joint d'étanchéité (44) présentant des manchons (46) introduits respectivement dans les collets (36) du collecteur pour assurer à chaque fois l'étanchéité avec un tube (14) d'échange de chaleur, chaque manchon (46) dépassant au-delà du collet respectif, ledit collet se situant en-dessous d'une hauteur de la bordure surélevée,
caractérisée en ce que le manchon (46) se prolonge sur une hauteur suffisante au-delà du collet (36) pour que 1'extrémité (62) du manchon se situe au moins à la hauteur de la bordure surélevée (38) du collecteur (28).

5. Boite collectrice selon 1'une des revendications 1 à 4, caractérisée en ce qu'elle comprend en outre un couvercle (30) muni d'un talon périphérique (52) propre à être reçu dans la gorge périphérique (40) du collecteur en comprimant un bord (48) du joint d'étanchéite (44).

6. Échangeur de chaleur à écoulement vertical, caractérisé en ce qu'il comprend un faisceau de tubes (14) verticaux dont les extrémités inférieures débouchent dans une boite collectrice selon 1'une des revendications 1 a 5.

7. Échangeur de chaleur selon la revendication 6, caractérisé en ce que les tubes (14) du faisceau traversent un ensemble d'ailettes (16), et en ce que les extrémités des ailettes viennent au contact des manchons respectifs (46) du joint d'étanchéite (44) de la boite collectrice.

8. Échangeur de chaleur selon 1'une des revendications 6 et 7, caractérisé en ce qu'il est réalisé sous la forme d'un radiateur de refroidissement pour un moteur de véhicule automobile.

L'invention est notamment illustrée par les figures suivantes :

?Sur la portée du brevet :

A la faveur du grief allégué d'insuffisance de description, il est apparu que les parties s'opposaient en réalité sur la portée du brevet.

Ainsi, les défenderesses relèvent que seule une boîte collectrice utilisée en position inférieure est susceptible de définir une cuvette pouvant recevoir un liquide corrosif de nature à corroder les tubes et que le brevet FR511 ne comprend d'ailleurs aucun support permettant de supposer qu'une boîte collectrice autre qu'inférieure dans un échangeur de chaleur utilisé en écoulement vertical, pourrait résoudre un quelconque problème technique, alors qu'il le revendique.

Les demanderesses répliquent que dans l'art antérieur, les manchons ne dépassant que très légèrement des collets, la majeure partie du tube compris entre le collet et l'ailette est exposée à des projections extérieures qui peuvent attaquer le pied des tubes, indépendamment de leur accumulation et que l'invention vise donc à améliorer la protection du pied des tubes contre la corrosion.

Elle soutiennent que ce problème technique se pose d'autant plus dans le cas d'une boîte collectrice inférieure, où l'eau peut s'accumuler dans la cuvette délimitée par le collet et la bordure surélevée mais font valoir qu'une boîte collectrice étant conçue et fabriquée indépendamment de l'orientation dans laquelle elle sera effectivement utilisée, l'invention a pour objet de protéger le pied des tubes contre les projections extérieures de liquide, quelle que soit son orientation.

Sur ce,

Le brevet, dans sa partie descriptive indique que la boîte collectrice à laquelle se rapporte l'invention, « convient tout particulièrement comme boîte collectrice inférieure pour un échangeur de chaleur à écoulement vertical, c'est à dire dont les tubes sont verticaux pour permettre une circulation verticale d'un fluide par exemple de haut en bas » de sorte qu'il n'exclut a priori pas les boîtes collectrices inférieures et /ou les échangeurs à écoulement horizontal.

Cependant, il est plus loin exposé que « la boîte collectrice inférieure étant considérée dans sa position normale d'utilisation, c'est à dire en position horizontale, le niveau du bourrelet se trouve placé en-dessous du niveau de la bordure surélevée du collecteur » et la démonstration qui s'en suit ainsi que les illustrations l'accompagnant, portent exclusivement sur une boîte inférieure formant une cuvette dans laquelle le liquide vient s'accumuler. Si le rédacteur prend le soin de préciser que le problème de corrosion peut aussi se poser pour des boîtes « qui ne sont pas nécessairement des boîtes collectrices inférieures pour échangeurs de chaleur à écoulement vertical » il n'accompagne cette affirmation d'aucune démonstration de nature à éclairer l'homme du métier.

Il s'avère d'ailleurs que lorsqu'il est fait mention, dans la partie descriptive du brevet, de projections de liquides, celles-ci sont exclusivement présentées comme étant génératrices de l'accumulation desdits liquides dans la cuvette délimitée par la bordure surélevée du collecteur or, seule la configuration d'une boîte collectrice inférieure dans un échangeur à écoulement vertical est susceptible de présenter une cuvette dans laquelle le liquide viendra s'accumuler.

Une telle analyse est du reste, en adéquation avec la limitation qui a été apportée à la revendication 1 du brevet par l'ajout de la caractéristique selon laquelle le collet se situe en-dessous d'une hauteur de la bordure surélevée, que l'extrémité du manchon doit atteindre pour pouvoir assurer la protection du pied du tube. C'est bien en effet cette bordure surélevée au-dessus du collet qui va créer une cuvette dans laquelle le liquide va s'accumuler lorsque la boîte collectrice est en position inférieure et force est de constater que dans aucune autre position, supérieure ou latérale, la bordure surélevée ne pourra créer une telle cuvette.

Il s'ensuit que contrairement à ce que soutiennent les sociétés VST et VALEO SERVICES, l'invention se rapporte exclusivement à une boîte collectrice inférieure dans un échangeur de chaleur à écoulement vertical.

?Sur l'art antérieur pertinent :

Le brevet ne mentionne aucun document particulier mais aux termes de leurs écritures, les demanderesses le définissent comme une boîte collectrice pour échangeur de chaleur selon le préambule de la revendication 1 qu'elles illustrent de la façon suivante :

Les défenderesses, outre ce préambule, citent au titre de l'art antérieur, les six documents suivants :.
- le modèle d'utilité allemand DE 29504 526
- le modèle d'utilité allemand DE 200 16 331
- la demande de brevet français FR 2 789 759
- le modèle d'utilité allemand DE 297 04 913
- la demande de brevet français FR 2 712 385

Dans le rapport de recherche sont visés les brevets :
- DE 295 04 526 U1 (AUTOKUEHLER GMBH et CO KG) publié le 18 juillet 1996
- FR 2 873 800 A1 (VALEO THERMIQUE MOTEUR) publié le 3 février 2006
- FR 2 783 907 A1 (VALEO THERMiQUE MOTEUR) publié le 31 mars 2000
- FR 2 746 178 A1 (VALEO THERMIQUE MOTEUR) publié le 19 septembre 1997
- JP 59 029994 A (NTN TOYO BEARING CO LTD) publié le 17 février 1984
- GB 2 122 928 A (VALEO) publié le 25 janvier 1984.

L'art antérieur pertinent qu'il y a lieu de retenir est celui illustré par le document DE 295 04 526 qui divulgue un « échangeur de chaleur » en particulier pour véhicules automobiles comprenant un dispositif d'étanchéité.

1.2 L'objet du brevet FR 386

Le brevet français FR 386 porte sur un module d'échange de chaleur muni de moyens d'assemblage, notamment pour véhicules automobiles.

Il est rappelé dans la partie descriptive du brevet que lorsqu'un tel module comporte deux échangeurs, l'un principal et l'autre secondaire, ceux-ci sont généralement assemblés entre eux par 1'intermédiaire de leurs boites collectrices grâce à des pattes ou des brides fixées avec des vis ce, afin de constituer un ensemble prêt à être installé dans le véhicule automobile. Outre que vis et écrous sont sujets à oxydation, ils supposent l'utilisation d'un outillage et un tel système, qui constitue un ensemble rigide, s'avère peu adapté aux variations dimensionnelles subies par les échangeurs de chaleur du fait des contraintes thermiques auxquelles ils sont soumis.

L'invention se propose de pallier ces inconvénients par un dispositif constitué de moyens réalisant un encliquetage ou clipsage de la première boite collectrice de 1'un des deux échangeurs de chaleur sur la boite collectrice adjacente de 1'autre échangeur. Dans un tel système, les deux échangeurs sont assemblés au moyen de deux attaches dont 1'une comprend une extrémité qui vient s'engager dans un logement de positionnement et 1'autre, une extrémité de guidage s'engageant dans une bride de réception que comporte la première boite collectrice adjacente.

L'invention vise également à remédier aux inconvénients d'un assemblage selon l'antériorité DE 199 53 787 laquelle propose un dispositif d'assemblage des deux boites collectrices d'un échangeur de chaleur au moyen d'un couple de bras de fixation nécessitant un mouvement de pivotement ou d'arc-boutement et un positionnement précis pour permettre leur assemblage.

Dans un premier mode de réalisation, qui est seul opposé dans le cadre de la présente procédure, le rapprochement des deux boites collectrices s'effectue par un mouvement de translation et, en fin de course de celui-ci, le verrouillage se réalise automatiquement.

Dans le second mode de réalisation, l'assemblage s'effectue par coopération de la deuxième attache de la première boite collectrice avec la bride de réception de la première boite adjacente par un mouvement de basculement ou de rotation.

Le brevet se compose de 22 revendications, dont seules sont invoquées les suivantes :

1- Module d'échange de chaleur, comprenant un échangeur de chaleur principal et un échangeur de chaleur secondaire, dans lequel ces échangeurs de chaleur ont chacun un faisceau compris entre deux boites collectrices, et dans lequel ces échangeurs de chaleur sont assemblés entre eux par 1'intermédiaire de leurs boites collectrices,
- caractérisé en ce qu'une première boite collectrice (16 ; 94) de 1'un (10 ; 82) des échangeurs de chaleur comprend une première attache (30 ; 110) munie d'une extrémité de positionnement (32 ; 112) et une seconde attache (34 ; 116), espacée de la première attache, et munie d'une extrémité de guidage (36 ; 118) s'étendant dans une direction de guidage (Dl) , ladite extrémité de guidage présentant un profil choisi intégrant une languette de verrouillage (38 ; 128) élastiquement déformable s'étendant dans la direction de guidage et susceptible de se déformer dans une direction transversale à la direction de guidage et étant munie d'une dent de verrouillage (40 ; 134) ;
- en ce qu'une première boite collectrice adjacente (22 ; 88) de 1'autre (12 ; 80) des échangeurs de chaleur comprend un logement de positionnement (44 ; 98) aménagé pour recevoir 1'extrémité de positionnement (32 ; 112) de la première attache et une bride de réception (46 ; 100) , espacée dudit logement de positionnement, et agencée pour recevoir 1'extrémité de guidage (36 ; 118) de la deuxième attache par un mouvement de rapprochement mutuel dans la direction de guidage et comportant une butée pour recevoir la dent de verrouillage (40 ; 134) de la deuxième attache en fin de course du mouvement de rapprochement ;
- et en ce que 1'assemblage de 1'échangeur secondaire sur 1'échangeur principal s'effectue par un mouvement de translation dans la direction de guidage.

2- Module d'échange de chaleur selon la revendication 1, caractérisé en ce que 1'extrémité de positionnement (32 ; 112) et 1'extrémité de guidage (36 ; 118) sont propres à entourer une tubulure (26) de la première boite collectrice adjacente (22 ; 88) .

3- Module d'échange de chaleur selon la revendication 1 ou 2, caractérisé en ce que ladite tubulure (26) de la première boite collectrice adjacente (22) s'étendant selon un axe parallèle à 1'axe d'extension de ladite première boite collectrice adjacente (22).

4- Module d'échange de chaleur selon la revendication 1 à 3, caractérisé en ce que 1'extrémité de positionnement (32) de la première attache (30) s'étend dans une direction parallèle à la direction de guidage (Dl) de 1'extrémité de guidage (36) de 1'extrémité de la deuxième attache (34) , et en ce que positionnement (32) et 1'extrémité de guidage (36) sont propres a être reçues respectivement, et simultanément, dans le logement de positionnement (44) et dans un logement de guidage (48) de la bride de réception (16).

5- Module d'échange de chaleur selon la revendication 2 3 4, caractérisé en ce que 1'extrémité de positionnement (32) comprend un profil constant de forme sensiblement rectangulaire et en ce que le logement de positionnement (44) comprend un profil homologue.

6- Module d'échange de chaleur selon 1'une des revendications 2 à 5, caractérisé en ce que 1'extrémité de guidage (36) comprend un profil en L forme de deux branches perpendiculaires (50, 52) et en ce que la languette de verrouillage (38) s'étend à proximité immédiate des deux branches en étant inscrite dans le rectangle délimité par les deux branches.

7- Module d'échange de chaleur selon la revendication 6, caractérisé en ce que la languette de verrouillage présente un profil rectangulaire avec deux petits (38) côtés parallèles à 1'une (52) des branches du profil en L et deux grands cotes parallèles a 1'autre (50) des branches du profil en L.

8- Module d'échange de chaleur selon 1'une des revendications 2 à 1, caractérisé en ce que la première boite collectrice adjacente (22) comprend un bossage (64) avec une face d'entrée (66) et une face de sortie (68), à 1'opposé de la face d'entrée, et dans lesquelles débouchent le logement de positionnement (44) et le logement de guidage (48).

9- Module d'échange de chaleur selon la revendication 8, caractérisé en ce qu'en fin de course du mouvement de rapprochement, la dent de verrouillage (40) prend appui derrière la face de sortie (68).

10- Module d'échange de chaleur selon 1'une des revendications 6 et 1, caractérisé en ce que le bossage (64) s'étend de part et d'autre de la tubulure (26) de la première boite collectrice adjacente (22), en sorte que le logement de positionnement (44) et le logement de guidage (48) se situent de part et d'autre de cette tubulure (26).

11- Module d'échange de chaleur selon 1'une des revendications 2 à 10, caractérisé en ce que la première attache (30) et la seconde attache (34) sont formées en partie inférieure de la première boite collectrice (16), tandis que le logement de positionnement (44) et le logement de guidage (48) sont formes en partie supérieure de la première boite collectrice 30 adjacente (22) pour permettre un assemblage de 1'échangeur de chaleur principal (10) et de 1'échangeur de chaleur secondaire (12) dans une configuration superposée dans la direction verticale.

12- Module d'échange de chaleur selon 1'une des revendications 2 a 11, caractérisé en ce qu'une deuxième boite collectrice (18) de 1'un des échangeurs et une deuxième boite collectrice adjacente (24) de 1'autre des échangeurs sont munis de moyens de fixation par emboitement (70, 72).
13- Module d'échange de chaleur selon la revendication 12, caractérisé en ce que les moyens de fixation coopérants comprennent un tenon (70) et une mortaise (72) aptes à coopérer par emboitement dans la direction de guidage (Dl).

21- Module d'échange de chaleur selon l'une des revendications 1 à 20, caractérisé en ce que les boites collectrices de 1'échangeur de chaleur principal (10 ; 80) et les boites collectrices de 1'échangeur de chaleur secondaire (12 ; 82) sont formées par moulage d'une matière plastique.

22- Module d'échange de chaleur selon la revendication 21, caractérisé en ce que 1'échangeur de chaleur principal (10 ) ; 80) est un radiateur de refroidissement d'un moteur de véhicule automobile et en ce que 1'échangeur de chaleur secondaire (12 ; 82) est un refroidisseur d'air de suralimentation.

L'invention est illustrée notamment par les figures suivantes :

Comme précédemment indiqué, au titre de l'art antérieur pertinent, dans son introduction, le brevet mentionne le document DE 199 53 787.

Outre ce document, le rapport de recherche vise les brevets suivants :
- US 2005/008428 A1 (DESAI SAMEER ET AL) publié le 13 janvier 2005
- EP 0 890 811 A (BEHR GMBH et CO) publié le 13 janvier 1999
- EP 0 693 665 A (BEHR GMBH et CO) publié le 24 janvier 1996.

Les défenderesses citent pareillement le brevet allemand DE 199 53 787 en précisant que son équivalent en français est le document FR 2 800 863.

Le document US 2005/008428 A1 cité dans le rapport de recherche au titre de l'examen de la nouveauté sera retenu comme constituant l'art antérieur pertinent.

1.3 L'objet du brevet EP 087

Le brevet européen EP 087 porte sur un échangeur de chaleur -utilisé notamment dans les véhicules automobiles- comprenant un faisceau de tubes à ailettes et un collecteur qui présente une âme centrale, dans laquelle est aménagée au moins une rangée de trous bordés par des collets pour la réception des tubes du faisceau ainsi qu'une gorge périphérique raccordée à l'âme centrale par un bord replié.

Le brevet précise que dans la plupart des collecteurs connus de ce genre, le bord replié ainsi que les collets s'étendent généralement d'un même côté de l'âme centrale que la région des collets et que celle-ci étant éloignée du bord replié d'au moins 1 mm, la largeur du collecteur et donc son encombrement, en est augmenté d'autant.

L'invention propose un dispositif dans lequel chaque collet est sensiblement au contact dudit bord replié de manière à définir entre eux un jeu d'une valeur minimale comprise entre 0 et 1 mm.

Le brevet se compose de 9 revendications, dont seules sont invoquées les revendications suivantes :

1- Échangeur de chaleur du type comprenant un faisceau de tubes à ailettes et un collecteur (10) qui présente une âme centrale (12), dans laquelle est aménagée au moins une rangée de trous (14) bordes 10 par des collets (16) pour la réception des tubes (32) du faisceau, et une gorge périphérique (18) comprenant une paroi de fond (22) raccordée a ladite âme centrale (12) par un bord replie (20), caractérisé en ce que chaque collet (16) est sensiblement au contact dudit bord replie (20) de manière a définir entre eux un jeu (d) d'une valeur minimale.

3- Échangeur de chaleur selon l'une des revendications 1 et 2, caractérisé en ce que le bord replié (20) comprend deux tronçons (20a, 20b) parallèles entre eux et a la (aux) rangée(s) (R) de tubes (32) et en ce que chacun desdits tronçons est sensiblement au contact des collets (16).

5- Échangeur de chaleur selon l'une des revendications 1 à 4, caractérisé en ce que les extrémités (30) des tubes (32) sont reçues dans les collets (16) avec interposition d'un joint d'étanchéite (36).

7- Échangeur de chaleur selon l'une des revendications 1 à 6, caractérisé en ce que les collets (16) et les extrémités (30) des tubes (32) sont de forme générale circulaire.

9- Échangeur de chaleur selon l'une des revendications 1 à 8, caractérisé en ce qu'une ailette (34) est en contact avec le collecteur (10) dans la région de la gorge périphérique (18).

L'invention est notamment illustrée par les figures suivantes :

?Sur le problème technique :

Les parties s'opposent sur la définition du problème technique objectif à résoudre.

Selon la société VST, il est de « réduire la largeur d'un échangeur de chaleur » c'est à dire son encombrement. Elle précise à cet égard que le problème résolu par l'invention est la réduction de la distance entre deux tronçons d'un échangeur de chaleur, ce qui permet selon elle, in fine, de réduire la largeur du collecteur et constitue un avantage conséquent au regard de la diminution de la place dévolue aux équipements des véhicules automobiles plus particulièrement dans le compartiment moteur.

Selon les défenderesses, le problème technique est celui de la réduction de la largeur d'un échangeur de chaleur comprenant un espace mort entre les collets et le bord replié.

Bien que dans sa première partie, la description du brevet décrive un échangeur de chaleur présentant un espace mort entre les collets et le rebord replié que l'invention se propose de réduire à une valeur minimale, le problème technique objectif tel que formulé ensuite, est celui plus général de la réduction de la largeur d'un échangeur de chaleur par la suppression des espaces morts. Cette dernière définition sera donc retenue pour l'appréciation de la nouveauté et de l'activité inventive des revendications opposées.

?Sur l'art antérieur pertinent :

Dans son introduction, le brevet mentionne la demande de brevet FR 1 577 223 comme art antérieur le plus proche, lequel décrit un échangeur dans lequel le bord replié présente un contour de forme générale rectangulaire et deux tronçons longitudinaux qui s'étendent parallèlement aux grands côtés du collecteur et parallèlement à la (aux) rangé(es) des tubes et présentant entre les deux, un espace mort.

Il y a lieu de retenir au titre de l'art antérieur pertinent, ce brevet FR 1 577 223 qui n'est pas contesté par les défenderesses.

2-SUR L'HOMME DU METIER :

L'homme du métier est un spécialiste moyen du secteur technique dont relève l'invention, doté des connaissances théoriques et pratiques et de l'expérience qui peuvent normalement être attendues d'un professionnel du domaine concerné.

Selon les demanderesses, l'homme du métier est en l'espèce, pour les trois brevets litigieux, le spécialiste de la conception d'échangeurs de chaleur, notamment d'échangeurs de chaleur pour véhicules automobiles.

Cette définition non discutée par les défenderesses sera retenue par le tribunal.

3-VALIDITE DES BREVETS :

3.1- Validité du brevet FR 511

L'article L611-10 du code de la propriété intellectuelle dispose que "sont brevetables, dans tous les domaines technologiques, les inventions nouvelles impliquant une activité inventive et susceptibles d'application industrielle".

3.1.1- Sur le moyen tiré de l'insuffisance de description des revendications 1, 5, 6, 7 et 8:

Les défenderesses considèrent que la revendication 1 et partant, les revendications 5, 6, 7 et 8 qui sont dans sa dépendance, sont insuffisamment décrites. Elles font en premier lieu valoir que les manchons susceptibles de permettre la résolution du problème technique ne sont pas définis et relèvent à cet égard que la description du brevet FR511 n'enseigne pas que le manchon de l'art antérieur ne serait pas utilisable au sein d'un échangeur conçu selon la revendication 1.

En second lieu, elles font valoir que le brevet n'évoque les hauteurs exigées par la revendication 1 que dans le contexte d'une utilisation de la boîte collectrice en position inférieure d'un échangeur de chaleur monté en configuration d'écoulement vertical et que pour toute autre orientation de la boîte collectrice, ces hauteurs sont indéfinissables sur la seule base du brevet litigieux et des connaissances générales de l'homme du métier.

Les défenderesses enfin, font valoir deux arguments supplémentaires développés au soutien du moyen relatif au défaut d'activité inventive lesquels doivent cependant s'analyser comme venant au soutien de la demande en nullité pour insuffisance de description en ce qu'ils ont trait à l'absence de résolution du problème technique par l'invention telle qu'elle est décrite.

Les sociétés NISSENS en effet, rappellent que cette dernière a pour seul objet de remédier à la corrosion des pieds des tubes d'un échangeur de chaleur pouvant résulter d'une accumulation de liquide corrosif dans une cuvette délimitée par la bordure surélevée de la boîte collectrice et soutiennent que les figures 4 et 5 l'illustrant, apparaissent en contradiction avec la partie descriptive du brevet en ce que le manchon se termine non au niveau mais en-dessous de l'ailette laquelle se situe en-dessous du niveau de la bordure surélevée, de sorte que le liquide corrosif accumulé dans la cuvette formée par cette bordure, demeure au contact du pied du tube.

Elles ajoutent que l'objet des revendications invoquées n'est pas de nature à résoudre le problème de la corrosion du pied d'un tube, que ce soit par projection ou par accumulation, dès lors que lesdites revendications couvrent n'importe quelle forme de manchon et ne posent donc aucune restriction quant à sa forme.

Les demanderesses répliquent que le manchon de la revendication 1 est configuré pour assurer l'étanchéité avec un tube collecteur jusqu'à la hauteur de la bordure surélevée et que l'homme du métier lisant la description du brevet, est à même de choisir un manchon adéquat et d'exclure des manchons qui ne seraient pas appropriés.

Par ailleurs, selon les sociétés VTS et VALEO SERVICE, la partie descriptive du brevet associée à la figure 5, permet à l'homme du métier de comprendre que lorsque la boîte collectrice est une boîte collectrice inférieure, les hauteurs sont des hauteurs « verticales », qui pourraient être également qualifiées d'altitudes et que pour parvenir à résoudre le problème technique, il suffit que l'extrémité du manchon se situe au même niveau ou au-dessus de la hauteur verticale de la bordure surélevée, cette hauteur pouvant être aisément transposée par l'homme du métier lorsque la boîte collectrice est une boîte supérieure ou lorsque son orientation est horizontale.

Sur ce,

Aux termes de l'article L612-5 du code de la propriété intellectuelle "l'invention doit être exposée dans la demande de façon suffisamment claire et complète pour qu'un homme du métier puisse l'exécuter".

Un brevet est nul dès lors qu'il existe entre la description et les dessins d'une part et la revendication d'autre part, des contradictions telles qu'elles ne permettent pas à l'homme du métier d'exécuter l'invention. (Com. 5 mars 1991: Ann. propr. ind. 1993. 105; PIBD 1991. III. 469)

En l'espèce, selon les défenderesses, la revendication 1 ne permet pas à l'homme du métier de déterminer les formes de manchons qu'il peut ou non mettre en oeuvre car elle s'attache seulement à la position de l'extrémité dudit manchon.

Or, dans sa partie descriptive, le brevet indique que la compression des manchons s'effectuant par expansion radiale des tubes au moyen d'une "olive" introduite axialement à l'intérieur des tubes, il se forme une surépaisseur ou bourrelet qui dans l'art antérieur, s'étend faiblement au-delà des collets correspondants.

Il est exposé ensuite que dans l'invention, on réalise au contraire un manchon avec un bourrelet préformé, appelé "tétine", qui se prolonge suffisamment au-delà du collet pour que son extrémité se situe au moins à la hauteur de la bordure surélevée du collecteur.

Il est également précisé que l'extrémité de ce manchon présente une forme qui le différencie du bourrelet de l'art antérieur. Par référence à la figure 4, il est ainsi indiqué que la surépaisseur « est délimitée extérieurement par une paroi tronçonique qui va en s'évasant vers le collecteur, donc vers le bas, en partant de l'extrémité supérieure et qui se raccorde par un épaulement annulaire au corps de forme générale cylindrique que comporte le manchon ».

Ensuite, les défenderesses ne peuvent pertinemment soutenir que l'homme du métier n'est pas en mesure de déterminer lequel des manchons de la boîte collectrice est censé mettre en oeuvre la partie caractérisante de la revendication 1 au seul motif que d'après son préambule, le brevet précise qu'une boîte collectrice comporte « des manchons » alors que la partie caractérisante vise, sans autre précision « le manchon » dans la mesure où un spécialiste des échangeurs de chaleur ne peut ignorer qu'un tel dispositif comporte nécessairement une multitude de tubes, insérés respectivement dans les collets du collecteur via un manchon constituant une partie de joint d'étanchéité et qu'en conséquence, pour se prémunir de la corrosion du pied de chacun des tubes, l'ensemble des manchons devra présenter les caractéristiques de la revendication 1 du brevet.

L'homme du métier, qui est un spécialiste de la conception d'échangeurs de chaleur, est donc capable au moyen de ses connaissances professionnelles, et en tenant compte de l'ensemble des enseignements de la description ainsi que des dessins du brevet, plus particulièrement de la figure 4, de réaliser les manchons visés dans la revendication 1 de façon à ce qu'ils assurent la fonction d'étanchéité revendiquée.

Il sera à cet égard jugé que la description qui est faite par les défenderesses de la figure 5 ne peut être retenue en ce que leur analyse vise à remettre artificiellement en cause la partie descriptive de l'invention en procédant à une « surinterprétation » de l'illustration nécessairement schématique de l'invention. Ainsi en est-il lorsqu'elles écrivent que le manchon revendiqué, tel qu'illustré sur cette figure, est très légèrement en-dessous de la bordure surélevée et qu'à supposer qu'il soit effectivement à la même hauteur, le niveau de liquide corrosif dépassera la bordure surélevée lorsqu'il débordera et viendra corroder le tube puis restera en contact avec celui-ci par capillarité.

En effet, la description de cette figure précise que « le bourrelet se prolonge au moins jusqu'au niveau H formé par la bordure surélevée » c'est à dire à l'examen croisé des figures 3 et 5, au niveau de la première ailette -et non légèrement en-dessous comme prétendu par les défenderesses qui s'appuient pour ce faire sur un agrandissement du dessin - laquelle, en cas de débordement, bloquera nécessairement le liquide et l'empêchera donc d'atteindre le niveau supérieur du tube. En tout état de cause, l'invention ne prétend pas protéger le tube sur toute sa longueur mais uniquement son pied lequel est, même en cas de débordement, protégé par le manchon.

S'agissant du moyen relatif à l'orientation de l'échangeur de chaleur, il sera à titre liminaire relevé que dans la mesure où le tribunal considère que l'invention se rapporte exclusivement à une boîte collectrice inférieure dans un échangeur de chaleur à écoulement vertical, l'argument des défenderesses consistant à soutenir que pour toute autre orientation de la boîte collectrice, les hauteurs mentionnées dans le brevet sont indéfinissables pour l'homme du métier, apparaît sans objet.

Dans ces conditions, le terme « hauteur » se rapportant d'une part à la bordure surélevée et d'autre part au manchon, bien que non précisément défini par le brevet litigieux est aisément identifiable par l'homme du métier qui, à la lecture de la revendication 1, saura que le manchon doit se prolonger sur une hauteur suffisante pour atteindre celle de la bordure surélevée et ainsi protéger le pied du tube.

La revendication 1 ne souffre en conséquence pas d'un défaut de description.

L'argument des défenderesses selon lequel l'objet des revendications 5, 6, 7 et 8 est insuffisamment décrit car il ne remédie pas aux carences de la revendication 1 ou de celles dont elles sont également dépendantes apparaît inopérant au regard des développements précédents.

S'agissant de la revendication 6, leur argumentation supplémentaire -tenant au fait qu'elle décrit une utilisation indépendante de la structure de l'échangeur de chaleur- est inopérante dès lors que l'invention se rapporte effectivement à un « échangeur de chaleur à écoulement vertical, caractérisé en ce qu'il comprend un faisceau de tubes (14) verticaux dont les extrémités inférieures débouchent dans une boîte collectrice selon l'une des revendications 1 à 5 ».

Concernant la revendication 7, les défenderesses considèrent qu'elle encourt en outre la nullité pour insuffisance de description car elle ne divulgue pas de moyens propres à mettre en oeuvre la caractéristique selon laquelle les extrémités des ailettes viennent au contact des manchons respectifs. Or, c'est à juste titre que les demanderesses répliquent que la figure 5 illustre un échangeur de chaleur selon cette revendication conforme à la description qui en est faite en ces termes dans le brevet «(...) ce bourrelet se prolonge jusqu'à venir en appui avec les extrémités des ailettes, c'est-à-dire contre l'ailette, dans l'exemple située la plus basse (...) » de sorte que l'homme du métier est à même de réaliser un manchon selon cette revendication 7.

Il s'ensuit que la demande en nullité de ce chef ne peut être accueillie.

3.1.2- Sur le moyen tiré du défaut de nouveauté des revendications 1, 5, 6 et 8 :

Aux termes de l'article L611-11 du code de la propriété intellectuelle « une invention est considérée comme nouvelle si elle n'est pas comprise dans l'état de la technique.
L'état de la technique est constitué par tout ce qui a été rendu accessible au public avant la date de dépôt de la demande de brevet par une description écrite ou orale, un usage ou tout autre moyen.
Est également considéré comme compris dans l'état de la technique le contenu de demandes de brevet français et de demandes de brevet européen ou international désignant la France, telles qu'elles ont été déposées, qui ont une date de dépôt antérieure à celle mentionnée au second alinéa du présent article et qui n'ont été publiées qu'à cette date ou qu'à une date postérieure ».

Pour être comprise dans l'état de la technique et privée de nouveauté, l'invention doit se trouver toute entière et dans une seule antériorité au caractère certain avec les éléments qui la constituent, dans la même forme, avec le même agencement et le même fonctionnement en vue du même résultat technique.

Au soutien de leur demande en nullité pour défaut de nouveauté de la revendication 1, les sociétés défenderesses opposent outre l'art antérieur tel qu'il est illustré sur les figures 1 à 3, plusieurs antériorités.

3.1.3.1- défaut de nouveauté au regard de l'art antérieur décrit dans le brevet litigieux

Selon les défenderesses, la portée des revendications 1, 5, 6 et 8 est tellement large qu'elle englobe l'art antérieur tel qu'il est décrit dans le brevet.

Les sociétés VST et VALEO SERVICE ne contestent pas qu'outre le préambule de la revendication 1, les figures 2 et 3 illustrant l'art antérieur, divulguent la caractéristique selon laquelle le collet se situe en-dessous d'une hauteur de la bordure surélevée.

Les sociétés NISSENS A/S et NISSENS FRANCE soutiennent que la dernière caractéristique de cette revendication qui prévoit que « que le manchon (46) se prolonge sur une hauteur suffisante au-delà du collet (36) pour que 1'extrémité (62) du manchon se situe au moins à la hauteur de la bordure surélevée (38) du collecteur (28) » est également divulguée par les illustrations 2 et 3 susvisées.

Il résulte cependant de la partie descriptive du brevet que la figure 2 est ainsi commentée : « chaque manchon 46 possède un bourrelet 50 qui dépasse faiblement au-dessus du collet 36. On voit que ce collet se situe à une distance d'en dessous de la hauteur verticale H de la bordure surélevée, c'est à dire de son niveau horizontal ». La figure 3 pour sa part est notamment décrite en ces termes « la bordure surélevée 38 du collecteur délimite une cuvette susceptible de recevoir un liquide corrosif jusqu'à la hauteur H, c'est à dire susceptible de corroder les pieds des tubes dans une zone Z (identifiée par un petit cercle sur la figure 3) qui se situe au-dessus du bourrelet 50 et en dessous de l'ailette 16 la plus basse »

Dans l'art antérieur tel qu'illustré donc, le bourrelet dépasse du collet, situé en-dessous de la hauteur du bord surélevé, mais de façon insuffisante pour protéger le pied du tube de l'accumulation de liquide dans la cuvette formée entre le collet et le bord surélevé.

Au contraire, dans les figures 4 et 5 illustrant l'invention, le manchon se prolonge au-dessus du collet pour atteindre le niveau du bord surélevé de la boite collectrice ce qui correspond au libellé de la revendication 1. Dans une telle configuration, le manchon atteint contre le tube, le niveau supérieur de la cuvette et forme une protection contre l'accumulation de liquide.

Les figurent 2 et 3 illustrant l'art antérieur ne permettent donc pas de combattre la nouveauté de la revendication 1 du brevet FR 511. Les revendication 5, 6 et 8 étant dans la dépendance de la revendication 1, elles doivent être pareillement déclarées valides.

3.1.3.2- défaut de nouveauté au regard des documents DE 295 04 526, DE 200 16 331, FR 2 789 759 A1,DE 297 04 913 et FR 2 712 385

Si chacun de ces cinq brevets se rapporte à un échangeur de chaleur et concerne donc le même domaine technique que le brevet FR 511, il s'avère qu'aucun d'entre eux ne poursuit le même objectif qui pour rappel, est de proposer pour un échangeur à écoulement vertical, une boîte collectrice inférieure, dont la configuration du manchon va permettre de protéger le pied du tube de la corrosion générée par l'accumulation de liquide dans la cuvette formée entre le collet et la bordure surélevée :

- le brevet DE 295 04 526 porte sur un échangeur de chaleur comportant une plaque à tubes et une boîte collectrice ayant toutes deux un bord périphérique présentant une rainure circonférencielle. L'invention se propose d'assurer, au moyen d'un joint inséré dans la rainure, l'étanchéité de la circonférence de l'ensemble afin d'éviter que le liquide de refroidissement ne s'échappe de l'échangeur. Par ailleurs, la boîte collectrice est ici une boîte supérieure et non inférieure comme au cas d'espèce et la démonstration des défenderesses qui consiste à renverser le dessin représentant l'invention pour la comparer à celle du brevet FR 511 n'apparaît pas pertinente ;

- l'invention décrite dans le brevet DE 200 16 331 poursuit le même objectif que celui qui est visé dans le document DE 295 04 526 et y ajoute des moyens propres à éviter les mouvements de basculement ou de torsion de la partie basse de l'échangeur en proposant un système d'attache du collecteur au moyen de deux pattes qui enserrent l'échangeur sur ses parties latérales ;

- le brevet FR 2 789 759 A1 pour sa part, porte sur un échangeur de chaleur dans lequel le rebord périphérique de la boîte collectrice comporte un bourrelet d'arrêt qui est propre à pénétrer en premier dans le joint d'étanchéité lors de sa compression pour procurer une zone de déformation formant butée s'opposant à un déplacement latéral du rebord périphérique du fait des efforts exercés par les moyens de sertissage. Le but poursuivi par cette invention est de réduire l'encombrement de l'échangeur de chaleur en concevant un dispositif dans lequel la plaque collectrice n'a plus à comporter de gorge périphérique pour accueillir à la fois le pourtour du joint d'étanchéité et la totalité du rebord périphérique.

-l'invention, dans le brevet DE 297 04 913, concerne les moyens de fixation des parties latérales d'un échangeur de chaleur (pattes) comportant par ailleurs des tuyaux, chicanes et collecteurs reliés par soudure. Elle propose de remplacer ces pattes généralement fixées à l'extrémité des parties latérales de l'échangeur par soudure ou brasage, par un système de fixation par languettes présenté comme plus simple.

- enfin, le brevet FR 2 712 385 porte sur un échangeur de chaleur comprenant un collecteur en matière plastique et un fond métallique avec entre les deux, un joint d'étanchéité en forme de plaque disposé en périphérie dans la rainure du fond métallique. Il est précisé que lorsque le collecteur incurvé est placé sur le fond droit, le joint d'étanchéité est pincé si le pied du collecteur ne s'ajuste pas correctement dans la rainure du fond ce qui présente le risque d'une déformation ou d'un endommagement du joint et donc de défaut d'étanchéité de l'échangeur. Pour remédier à cet inconvénient, l'invention propose des moyens d'écartement sur le collecteur qui entourent le rebord dirigé vers le haut du fond métallique et produisent une force d'écartement qui supprime la courbure des côtés longitudinaux et adapte parfaitement le collecteur au fond métallique.

Faute de poursuivre le même résultat technique, aucun de ces brevets n'est donc pertinent pour détruire la nouveauté de la revendication no 1 du brevet FR 511. Les revendications 5, 6 et 8 étant dans sa dépendance, elle doivent être pareillement jugées valides.

3.1.3- Sur le moyen tiré du défaut d'activité inventive des revendications 1, 5, 6, 7 et 8 :

Les sociétés défenderesses soutiennent que le brevet no FR 511 est nul pour absence d'activité inventive car l'invention brevetée résulterait de manière évidente pour l'homme du métier d'abord de l'art antérieur décrit dans le brevet lui-même et ensuite, de plusieurs documents antérieurs.

Elles font valoir que le problème technique qui se pose à l'homme du métier consistant à protéger le pied d'un tube d'échangeur de chaleur contre la corrosion pouvant résulter de l'accumulation d'un liquide corrosif jusqu'au niveau d'une bordure surélevée, alors qu'un manchon le protège déjà jusqu'à son sommet, celui-ci sera nécessairement incité à prolonger le manchon au-delà du collet jusqu'à la hauteur délimitée par la bordure surélevée comme il est indiqué dans la revendication 1.
L'homme du métier, selon elles, aboutit ainsi de manière évidente à l'objet illustré en figure 5, à l'exception de la forme particulière du sommet du manchon dont elles rappellent qu'elle n'est pas requise par la revendication 1 du brevet litigieux.

Elle poursuivent en faisant valoir que l'objet des revendications 5 et 6 est, pour les mêmes raisons, dénué d'activité inventive de même que la revendication 7 qui ne fait que préciser que les ailettes viennent au contact des manchons respectifs. Quant à la revendication 8 dont l'objet ne se distingue de celui de la revendication 6 que par le fait que l'échangeur de chaleur est utilisé comme radiateur de refroidissement pour un moteur de véhicule automobile, elle n'implique selon elles pas davantage d'activité inventive.

Les demanderesses, qui rappellent que l'invention litigieuse résout le problème technique de l'amélioration de la protection des pieds des tubes contre la corrosion à partir de liquides pouvant atteindre cette zone, répliquent que les défenderesses reformulent de façon biaisée le problème technique dans la mesure où celui-ci énonce déjà une partie de la solution, à savoir la protection du pied de tube « jusqu'au niveau d'une bordure surélevée, alors qu'un manchon le protège déjà jusqu'à son sommet » ce qui démontre selon elles, que l'homme du métier ne pouvait à partir du seul état de la technique décrit dans le brevet FR 511, parvenir à l'invention.

Sur ce,

L'article L611-14 du code de la propriété intellectuelle dispose qu' une invention est considérée comme impliquant une activité inventive « si, pour un homme du métier, elle ne découle pas d'une manière évidente de l'état de la technique. Si l'état de la technique comprend des documents mentionnés au troisième alinéa de l'article L. 611-11, ils ne sont pas pris en considération pour l'appréciation de l'activité inventive ».

L'appréciation du caractère inventif implique de déterminer si eu égard à l'état de la technique l'homme du métier, au vu du problème que l'invention prétend résoudre, aurait obtenu la solution technique revendiquée par le brevet en utilisant ses connaissances professionnelles et en effectuant de simples opérations. L'activité inventive se définit au regard du problème spécifique auquel est confronté l'homme du métier.

Le problème technique décrit dans le brevet est celui de l'accumulation dans la cuvette délimitée par la bordure surélevée du collecteur, de liquides susceptibles d'attaquer les tubes par l'extérieur car le joint d'étanchéité qui est appliqué sous le collecteur, bien que formant un bourrelet après l'assemblage mécanique des tubes avec la boîte collectrice, ne dépasse que faiblement des collets et laisse donc à nu la région du tube se trouvant placée immédiatement au-dessus du bourrelet.

Dans l'art antérieur cité dans le brevet litigieux, le bourrelet n'est lié à aucun effet technique particulier puisqu'il est indiqué que c'est l'utilisation d'une « olive » qui provoque la compression du joint d'étanchéité de telle sorte que ses extrémités (appelées manchons) forment une surépaisseur qui va s'étendre au-delà des collets correspondants.

L'invention consiste donc à utiliser ce bourrelet à des fins d'isolation de la paroi extérieure des tubes qui, dans la configuration de la boîte collectrice telle que décrite, est exposée à la corrosion du fait de l'accumulation du liquide dans la cuvette formée entre le collet et la bordure surélevée de la boîte.

Bien que les demanderesses s'en défendent, l'homme du métier confronté à l'existence de cette cuvette génératrice de corrosion, n'avait pas d'autre alternative que de prolonger le manchon jusqu'à la hauteur de la bordure surélevée dans la mesure où il n'était pas possible de remonter le collet à cette hauteur au risque de voir le bourrelet -qui se serait nécessairement formé lors de sa compression- heurter et déformer l'ailette.

Il n'avait donc pas à faire preuve d'activité inventive puisqu'aucune autre option que celle qui est décrite dans l'invention ne s'offrait à lui et qu'il était incité pour ce faire, à utiliser le bourrelet préexistant.

En définitive, seule la forme particulière du sommet du manchon n'était pas divulguée mais dans la mesure où il est précisé dans le commentaire associé à la figure 4 que le joint de l'invention diffère essentiellement du joint de l'art antérieur par le fait que, dans l'invention, il se prolonge sur une hauteur suffisante au-delà du collet pour que son extrémité supérieure atteigne au moins la hauteur de la bordure surélevée du collecteur, sa forme spécifique qui facilite selon l'inventeur « un bon maintien du manchon en position » n'apparaît qu'accessoire et ne peut en conséquence traduire à elle seule, une quelconque activité inventive.

Il est dans ces conditions suffisamment démontré que la revendication 1 ne procède pas d'une activité inventive.

La revendication 5 qui porte sur une boîte collectrice selon l'une des revendications 1 comportant un couvercle ne procède pas davantage d'une activité inventive dès lors qu'un tel couvercle est représenté dans les figures 1 et 3 décrivant l'art antérieur.

La revendication 6 porte sur un échangeur de chaleur à écoulement vertical qui est pareillement décrit au titre de l'art antérieur dans le brevet litigieux (figure 1).

La revendication 7 précise que dans un échangeur tel que décrit à la revendication 6, les extrémités des ailettes viennent au contact des manchons respectifs du joint d'étanchéité de la boîte collectrice. Cette revendication se contente donc de reformuler les caractéristiques du manchon décrites dans la revendication 1.

Enfin, la revendication 8 qui porte sur un tel échangeur utilisé comme radiateur de refroidissement pour un moteur de véhicule automobile est également mentionnée au titre de l'art antérieur dans le brevet litigieux (ligne 30 à 35).

Au regard de l'ensemble de ces éléments, et sans qu'il soit nécessaire d'examiner les autres antériorités opposées par les défenderesses et le moyen tiré de l'extension du brevet au-delà de la demande, il convient de prononcer la nullité les revendications 1, 5, 6, 7 et 8 du brevet FR 511 pour défaut d'activité inventive.

Les demandes fondées sur la contrefaçon de ces revendications ne peuvent en conséquence prospérer.

3.2 Validité du brevet FR 386

3.2.1- Sur le moyen tiré de l'extension du brevet au-delà de la demande des revendications 1, 2, 3, 4, 13, 21 et 22 :

Les défenderesses exposent que la caractéristique selon laquelle « l'assemblage de l'échangeur secondaire sur l'échangeur principal s'effectue par un mouvement de translation dans la direction de guidage » n'était pas présente dans la revendication 1 telle que déposée et qu'elle a été ajoutée par la société VALEO mais que découlant de moyens et de contraintes absents de la revendication 1, son ajout étend l'objet du brevet litigieux au-delà du contenu de la demande telle que déposée. Elles ajoutent que considérée hors de son contexte, cette caractéristique pose plusieurs problèmes d'interprétation.

S'agissant de la revendication 2, outre le fait qu'elle est dans la dépendance de la première, elles considèrent que sa nouvelle version se rattache à un mode de réalisation très particulier alors que la demande de brevet n'avait pas prévu un autre mode de réalisation que celui comportant une fourche en U placée en bas à gauche. Elles relèvent par ailleurs que ce nouveau mode de réalisation requiert expressément que les deux échangeurs puissent être superposés verticalement, ce que la revendication 2 n'exige pas et font valoir que la suppression de la caractéristique tenant à la position relative des échangeurs sans que la description n'ait envisagé cette possibilité, constitue bien une extension de celle-ci au-delà du contenu de la demande.

Ensuite, elle exposent que le fait d'avoir créé la nouvelle revendication 3 -qui est dans la dépendance des revendications 1 et 2- en généralisant artificiellement un exemple particulier et en supprimant d'autres caractéristiques qui en faisaient partie, constitue parreillement une extension prohibée.

Elles terminent en soutenant que les revendications 4 à 13, 21 et 22 dépendant chacune, directement ou indirectement, à la fois de la revendication 1, de la revendication 2 et de la revendication 3, elles présentent toutes au moins trois motifs distincts d'annulation pour extension au-delà du contenu de la demande telle que déposée, hérités respectivement des revendications 1, 2 et 3.

Les demanderesses répliquent que la caractéristique relative à la translation ajoutée dans la revendication 1 trouve bien son support dans la partie descriptive du brevet tout comme la revendication 2 qui a été introduite en réponse au rapport de recherche. Elles soutiennent que le brevet ne divulgue pas de moyen supplémentaire tel qu'une fourche en U pour entourer la tubulure, mais au contraire que lorsque les attaches et l'âme viennent entourer la tubulure, celles-ci forment alors une fourche en U et enfin, que les positions relatives des deux échangeurs n'ont pas d'influence sur leur assemblage et donc sur la mise en oeuvre de l'invention.

S'agissant de la revendication 3, les sociétés VST et VALEO SERVICE font valoir que la caractéristique qu'elle contient tenant à la configuration de la tubulure de la première boite collectrice trouve son support dans les figures 1 à 6 du brevet et que l'homme du métier pouvait déduire de la demande telle que déposée que cette caractéristique s'appliquait directement et sans ambiguïté au contexte plus général.

Elles terminent en rappelant que l'extension d'une revendication n'entraîne pas toujours celle des revendications qui en dépendent de sorte que les défenderesses ne peuvent pertinemment conclure à la nullité des autres revendications invoquées au seul motif qu'elles sont dans la dépendance des revendications 1, 2 et/ou 3.

Sur ce,

Aux termes de l'article L613-25 du code de propriété intellectuelle « un brevet est déclaré nul par décision de justice:
[...]c) Si son objet s'étend au-delà du contenu de la demande telle qu'elle a été déposée ou, lorsque le brevet a été délivré sur la base d'une demande divisionnaire, si son objet s'étend au-delà du contenu de la demande initiale telle qu'elle a été déposée".

Comme le relève justement les demanderesses, cette disposition sanctionne le fait pour le breveté de modifier l'objet de la protection demandée au-delà de ce que l'homme du métier peut, à l'aide de ses seules connaissances générales, déduire à la date du dépôt objectivement, directement et sans ambiguïté de la demande telle que déposée qui s'entend de la description, des revendications et des dessins, le cas échéant en tenant compte d'éléments implicites pour l'homme du métier du fait de ses connaissances générales.

Il convient dans ces conditions, de déterminer si les modifications apportées en cours de procédure pouvaient être déduites objectivement par l'homme du métier de tous les éléments divulgués dans la demande déposée (description, revendications, dessins) sans introduction de tout élément technique qui n'y figure pas sauf si celui-ci découle clairement et sans ambiguïté de ce qui est explicitement mentionné.

L'INPI dans son rapport de recherche a considéré, par référence au document US 2005/008428 que toutes les caractéristiques techniques de la première revendication de la demande du brevet FR 386 étaient déjà connues à la suite de quoi, la société VALEO a procédé à la modification de celle-ci de manière à incorporer la caractéristique selon laquelle « l'assemblage de l'échangeur secondaire sur l'échangeur principal s'effectue par un mouvement de translation dans la direction de guidage » en précisant à l'INPI que cette caractéristique trouvait son support dans la partie descriptive du brevet tel que déposé.

Ce mouvement de translation correspond effectivement à la première forme de réalisation de l'invention dans laquelle « L'extrémité de positionnement et 1'extrémité de guidage s'étendent toutes les deux dans des directions parallèles, c'est-a-dire dans la direction de guidage, si bien qu'elles peuvent être introduites simultanément dans leurs logements respectifs, c'est-à-dire le logement de positionnement et le logement de guidage. Le rapprochement des deux boites collectrices s'effectue donc par un mouvement de translation et, en fin de course de ce mouvement de translation, le verrouillage s'effectue automatiquement » (pages 3-4 du brevet) ceci par opposition à la seconde forme de réalisation pour laquelle il est indiqué que «le rapprochement des deux boites collectrices ne s' effectue pas nécessairement par un mouvement de pure translation et (qu') il est possible de prévoir un mouvement de basculement » (page 4 du brevet).

Son ajout dans la revendication 1 ne constitue donc pas une extension de l'objet de la demande étant précisé que l'argument des défenderesses consistant à relever que la caractéristique relative au mouvement de translation n'est pas limitative est sans pertinence dans la mesure où l'extension s'apprécie par rapport à l'objet de la demande initiale et non par rapport au caractère restrictif ou pas de l'ajout.

Le déposant a par ailleurs ajouté une nouvelle revendication 2 ainsi libellé «Module d'échange de chaleur selon la revendication 1, caractérisé en ce que 1'extrémité de positionnement (32 ; 112) et 1'extrémité de guidage (36 ; 118) sont propres à entourer une tubulure (26) de la première boite collectrice adjacente (22 ; 88) »

Elle est venue se substituer au texte suivant « Module d'échange de chaleur selon la revendication 1, caractérisé en ce que 1'extrémité de positionnement (32) de la première attache (30) s'étend dans une direction parallèle à la direction de guidage (Dl) de 1'extrémité de guidage (36) de la deuxième attache (34) , et en ce que 1'extrémité de positionnement (32) et 1'extrémité de guidage (36) sont propres à être reçues respectivement, et simultanément, dans le logement de positionnement (44) et dans un logement de guidage (48) de la bride de réception (16) » considérée comme dépourvue de nouveauté par l'INPI.

Aucune extension de l'objet de la demande n'apparaît caractérisée dès lors que la caractéristique additionnelle selon laquelle les deux extrémités, respectivement de positionnement et de guidage sont propres à entourer la tubulure de la première boite collectrice adjacente était présente dans la revendication 8 dans sa rédaction initiale en ces termes « le bossage (64) s'étend de part et d'autre d'une tubulure (26) de la première boite collectrice adjacente (22), en sorte que le logement de positionnement (44) et le logement de guidage (48) se situent de part et d'autre de cette tubulure », cette revendication reprenant l'exemple tel que décrit dans le brevet (page 10-11 ligne 32 à 39).

Quant à la modification de la revendication 3, elle consiste en l'ajout de la caractéristique selon laquelle « ladite tubulure de la première boite collectrice adjacente s'étendant selon un axe parallèle à l'axe d'extension de ladite première boite collectrice adjacente ».

Les parties s'accordent sur le fait qu'il convient de lire « la première boite collectrice adjacente (22) s'étend » et non pas « s'étendant ».

Sur le fond, les demanderesses font valoir que cette revendication 3 trouve son support dans les figures 1 à 6 du brevet desquelles il peut être déduit que la tubulure de la première boite collectrice s'étend bien selon un axe parallèle à l'axe d'extension de cette boite.

A l'examen de la figure 1 ci-dessous, il apparaît en effet clairement que la tubulure (26) s'étend parallèlement à la boîte collectrice adjacente (20).

L'homme du métier était donc en mesure de déduire de cette figure la caractéristique décrite dans le nouvelle revendication 3.

Les revendications 4 à 13, 21 et 22 dépendant chacune, directement ou indirectement, à la fois de la revendication 1, de la revendication 2 et de la revendication 3 pour lesquelles il n'est opposé aucune caractéristique additionnelle susceptible de constituer une extension de l'objet de la demande de brevet, elles doivent être pareillement jugées valides.

3.2.2- Sur le moyen tiré du défaut de nouveauté des revendications 1, 2, 3, 4, 13, 21 et 22 :

3.2.2.1- Défaut de nouveauté par rapport à DE 787 (FR 863)

Le document DE 199 53 787 (FR 2 800 863 dans sa version française) se rapporte à un dispositif d'assemblage des deux boites collectrices d'un échangeur de chaleur au moyen d'un couple de bras de fixation nécessitant un mouvement de pivotement ou d'arc-boutement et un positionnement précis pour permettre 1'assemblage.

Dans ce dispositif un premier bras de fixation (10) est pourvu d'une patte terminale (11) qui fait saillie environ à angle droit de l'extrémité extérieure du bras de fixation tandis qu'un second bras de fixation (21) est pourvu d'un crochet d'encliquetage (22). Il est précisé que les bras sont relativement longs pour maintenir à distance le second radiateur du premier.

Le brevet précise que grâce à cette configuration, le radiateur secondaire peut être présenté de manière simple, par ses premiers bras de fixation dans une position oblique par rapport au plan du premier radiateur, avant de le faire pivoter jusqu'à ce que le deuxième bras de fixation s'enclenche. Il est ainsi notamment illustré :

Les objectifs poursuivis par le brevet DE 199 53 787 s'apparentent à ceux définis par le brevet objet du litige, en ce qu'ils visent une facilité de montage sans vis ni écrou mais, alors que dans l'invention litigieuse, la revendication 1 précise que1'assemblage de la première boite collectrice de 1'un des échangeurs de chaleur sur la boite collectrice adjacente de 1'autre des échangeurs de chaleur s'effectue par 1'intermédiaire de deux attaches dont 1'une comprend une extrémité de positionnement qui vient s'engager dans un logement de positionnement et dont 1'autre comprend une extrémité de guidage propre à s'engager dans une bride de réception et que cette extrémité de guidage intègre une languette de verrouillage par encliquetage ou clipsage par opposition, il est précisé dans le brevet DE 199 53 787 que l'assemblage se fait au moyen de deux bras de fixation chacun comprenant un seul moyen de fixation, l'un étant pourvu d'un crochet d'encliquetage.

Il ne décrit donc pas sur le premier bras, deux attaches comme dans le brevet FR 386 pour lequel les moyens de fixation coopérants (c'est à dire situés au niveau du côté opposé des deux attaches décrites ci-dessus) comprenant un tenon et une mortaise qui fonctionnent par emboitement dans la direction de guidage sont décrits dans la revendication 13.

Le brevet DE 199 53 787 ne permet donc pas de combattre la nouveauté du brevet FR 386.

3.2.2.2- Défaut de nouveauté par rapport à US 4 997 033( correspondant au brevet allemand DE 39 18 176)

L'invention concerne ici un échangeur de chaleur comprenant un refroidisseur air-eau pour l'eau de refroidissement et un refroidisseur air-air pour refroidir l'air de suralimentation comprimé conçu de telle sorte que l'installation et la maintenance puissent être réalisées rapidement, avec un minimum d'effort et sans outils. Pour ce faire, le refroidisseur air-air est disposé dans la direction d'écoulement de l'air, de préférence devant le refroidisseur air-eau qui présente des saillies de fixation latérales et/ou des évidements (3) pour la fixation à un cadre porteur, en particulier d'un véhicule, et un moyen supplémentaire de fixation (5, 5' et 5'') :

Dans la mesure où il est indiqué dans la partie descriptive que pour le montage du refroidisseur air air 2, aucun outil n'est requis car celui-ci est simplement placé devant et au-dessus du refroidisseur air eau 1 et abaissé (dans un mouvement de translation donc vertical), cette invention diffère du brevet FR 386 qui prévoit que « 1'assemblage des échangeurs s'effectue par un mouvement de translation dans la direction Dl au cours duquel le tenon et la mortaise viennent s'emboiter et les attaches viennent s'engager dans leurs logements respectifs jusqu'à encliquetage en fin de course » ce qui correspond à un mouvement de translation nécessairement horizontal. Indépendamment donc des éléments structurels des deux dispositifs, leur agencement est donc différent de telle sorte que ce brevet US 4 997 033 ne permet pas davantage de combattre la nouveauté du brevet FR 386.

3.2.2.3- Défaut de nouveauté par rapport à US 428

Considérant que l'ajout dans la revendication de la caractéristique relative à l'assemblage par translation n'est pas limitative, les défenderesses opposent au brevet FR 386, le brevet US 428 sur lequel l'INPI s'était fondé pour considérer que la demande initiale ne remplissait pas les conditions de brevetabilité, l'objet des revendications 1 à 5, 10, 12 à 14, 19 et 20 n'étant pas conforme au critère de nouveauté.

L'INPI dans son rapport de recherche considère en effet que toutes les caractéristiques techniques de la première revendication du brevet FR 386 sont déjà connues.

Pour échapper à ce grief, la société VALEO a ajouté une dernière caractéristiques qui précise que « 1'assemblage de 1'échangeur secondaire sur 1'échangeur principal s'effectue par un mouvement de translation dans la direction de guidage ». Or, le rapport de recherche précise que dans le brevet US 428, l'assemblage des deux échangeurs se fait par « un mouvement de rapprochement mutuel dans la direction de guidage » et que le deuxième élément de fixation « comporte une butée pour recevoir la dent de verrouillage du deuxième élément femelle en fin de course du mouvement de rapprochement » ce qui correspond exactement au mouvement de translation décrit dans la caractéristique ajoutée. Celle-ci ne présente donc aucune nouveauté puisqu'elle était déjà décrite dans l'antériorité.

Dans ces conditions, l'ensemble des caractéristiques de la revendication 1 apparaissent dépourvues de nouveauté.

Les revendications suivantes, dépendantes de la revendication 1 ne comportent aucune caractéristique additionnelle pouvant être qualifiée de nouvelle.

Dès lors, sans qu'il soit nécessaire d'examiner le moyen relatif au défaut d'activité inventive, les revendications 1, 2, 3, 4, 13, 21 et 22 doivent être annulées.

Les demandes fondées sur la contrefaçon de ces revendications seront en conséquence rejetées.

3.3- Validité du brevet EP 087

L'article 52 de la convention de Munich dispose que « les brevets européens sont délivrés pour toute invention dans tous les domaines technologiques, à condition qu'elle soit nouvelle, qu'elle implique une activité inventive et qu'elle soit susceptible d'application industrielle ».

3.3.1- Sur le moyen tiré de l'insuffisance de description des revendications 1 ,3, 5, 7 et 9 :

Les défenderesses font en premier lieu valoir que les revendications 1 à 9 du brevet EP 087 exigent d'une part que les échangeurs de chaleur auxquels elles se rapportent comprennent « au moins une rangée de trous bordés par des collets » et d'autre part, que « chaque collet [soit] sensiblement au contact dudit bord replié » alors que selon elles, la partie descriptive et les figures n'exposent que le cas d'un échangeur de chaleur mono-rang. Elles considèrent en conséquence que l'objet des revendications est insuffisamment décrit car, dans le cas d'un échangeur à trois rangs ou plus, l'homme du métier ne peut comprendre comment les collets situés ailleurs que sur les rangées extrêmes peuvent être «sensiblement au contact» d'un bord replié.

En second lieu, les défenderesses soutiennent que le brevet litigieux, en revendiquant un jeu minimal non défini sans préciser les dimensions de l'échangeur concerné, ne met pas l'homme du métier en mesure de déterminer, en fonction de la taille de l'échangeur, la dimension du jeu qui permettrait de le considérer comme minimal tel que revendiqué et que cet espace selon l'invention pourrait être nul ce qui est en contradiction avec la description qui indique que « le collet et le bord replié viennent au contact l'un de l'autre ou sensiblement au contact l'un de l'autre ».

Selon les sociétés VST et VALEO FRANCE, si une lecture littérale de la revendication 1 pourrait amener un lecteur profane à en déduire que chaque collet de chaque rangée devrait être en contact avec un bord replié, l'homme du métier, l'interprétant à la lumière de la description, pourra aisément déduire que l'invention traite uniquement le cas des collets d'une rangée de trous, positionnée le long d'un bord replié, c'est-à-dire déjà en contact avec ce bord replié.

Elle font par ailleurs valoir que l'homme du métier qui connait les contraintes techniques et/ou mécaniques d'un échangeur, les prendra en compte dans l'interprétation de la revendication 1 et donc, ne retiendra pas « le jeu de valeur minimale » comme pouvant être nul.

Sur ce,

L'article 138-1-b) de la CBE dispose que le brevet européen est déclaré nul par les tribunaux d'un État contractant « si le brevet européen n'expose pas l'invention de façon suffisamment claire et complète pour qu'un homme du métier puisse l'exécuter ».

En l'espèce, il est indiqué dans la description du brevet que dans l'art antérieur « le bord replié présente un contour de forme générale rectangulaire et qu'il présente notamment deux tronçons longitudinaux qui s'étendent parallèlement aux grands côtés du collecteur et à la (aux) rangée(s) des tubes ». (§ 12)

Certes, dans le seul exemple d'échangeur illustré dans le brevet (figure 2) celui-ci ne comporte qu'une seule rangée de tubes dont chacun est nécessairement au contact des bords repliés mais au paragraphe 44 de la partie descriptive, il est précisé que l'invention peut s'appliquer à des échangeurs de chaleur comportant une ou plusieurs rangées de tubes -comme cela est d'ailleurs indiqué dans la revendication 1- et l'homme du métier qui connaît la configuration d'un échangeur de chaleur et n'ignorent donc pas que seules les rangées extérieures de collets sont situées à proximité de la gorge périphérique saura qu'il convient de réduire le seul espacement situé entre chacun des collets de ces seules rangées extérieures et le bord replié.

L'insuffisance de description n'apparaît donc pas caractérisée à cet égard.

Ensuite, si la revendication 1 indique que chaque collet est sensiblement au contact du bord replié de manière à définir entre eux un jeu d'une « valeur minimale » dans sa partie descriptive, le brevet précise que « dans la plupart des collecteurs connus de ce genre, le bord replié ainsi que les collets s'étendent généralement d'un même côté de l'âme centrale et (que), jusqu'à présent, la région des collets, qui se trouve la plus proche du bord replié, est à une distance qui, habituellement, ne peut descendre en dessous d'une valeur de l'ordre de 1 mm » (§11) et le paragraphe 18 précise que la valeur de ce jeu est « avantageusement comprise entre 0 et 1 mm » ce qui exclut qu'elle puisse être nulle. Dans le cas contraire en effet, le rédacteur n'aurait pas utilisé la préposition « entre » qui implique nécessairement un intervalle et donc une valeur supérieure à zéro.

L'homme du métier qui, comme le soutiennent justement les demanderesses connait les contraintes techniques d'un échangeur, sera donc en mesure de déterminer l'espacement minimal-lequel est nécessairement supérieur à zéro- pouvant être mis en oeuvre en fonction de la taille dudit échangeur.

La demande en nullité de ce chef de la revendication 1 ne peut donc être accueillie, de même que celle des revendications 3, 5, 7 et 9 qui sont dans sa dépendance.

3.3.2- Sur le moyen tiré du défaut de nouveauté des revendications 1 ,3, 5, 7 et 9 :

3.3.2.1 - Défaut de nouveauté au regard de l'art antérieur décrit dans le brevet litigieux

Les défenderesses font valoir que la partie caractérisante de la revendication 1 doit être interprétée comme ne se distinguant de l'art antérieur que par la distance de chaque collet du bord replié qui doit être comprise entre 0 mm et une valeur « faible » mais supérieure à 1 mm et que dans l'état de la technique tel qu'il est admis par l'inventeur lui-même, cette distance « habituellement, ne peut descendre en dessous d'une valeur de l'ordre de 1mm » ce qui implique que pour certains collecteurs connus, elle descend -moins habituellement- en dessous d'une valeur de l'ordre de 1 mm et qu'à tout le moins, elle atteint parfois une valeur de l'ordre de 1 mm -valeur couverte par la revendication 1- de sorte que cette revendication apparaît privée de nouveauté.

Elles soutiennent que ce défaut s'applique pareillement à la revendication 2, qui précise seulement que le jeu est compris entre 0 et 1 mm ainsi qu'aux revendications 3, 5, 7 et 9 qui décrivent seulement un bord replié de la gorge périphérique, des tubes et des collets d'une plaque collectrice connus de l'art antérieur.

Les demanderesses rappellent qu'il convient de lire la revendication 1 en combinaison avec la description et que lorsque elle a rédigé la demande EP 087, elle entendait couvrir un jeu minimal, compris entre 0 et 1 mm, qu'elle n'a donc pas pu écrire dans la partie descriptive que « jusqu'à présent, la région des collets, qui se trouve la plus proche du bord replié, est à une distance qui, habituellement, ne peut descendre en dessous d'une valeur de l'ordre de 1mm » en sachant qu'un jeu minimal serait déjà connu et que le terme « habituellement » doit être interprété en ce sens que parmi les réalisations connues on ne trouve pas un jeu inférieur à 1 mm ce qui est d'ailleurs confirmé par le fait que les défenderesses ne produisent aucune antériorité contredisant cette interprétation.

Sur ce,

Dans sa partie descriptive, le brevet FR 087 indique « dans la plupart des collecteurs connus de ce genre, le bord replié ainsi que les collets s'étendent généralement d'un même côté de l'âme centrale et, jusqu'à présent, la région des collets, qui se trouve la plus proche du bord replié, est à une distance qui, habituellement, ne peut descendre en dessous d'une valeur de l'ordre de 1mm » et fait le constat qu'il existe donc dans l'art antérieur « un espace mort entre les collets et le bord replié » que l'invention se propose de réduire au maximum avec un échangeur « dans lequel chaque collet est sensiblement au contact dudit bord replié de manière à définir entre eux un jeu d'une valeur minimale ».

Dès lors la revendication 1 qui doit être interprétée à la lumière de cette description vise nécessairement un échangeur de chaleur dans lequel chaque collet est le plus proche possible du bord replié c'est à dire à une distance aussi minimale que les contraintes techniques le permettent et donc en tout état de cause, inférieure à ce qui est connu de l'art antérieur.

Il s'ensuit que l'état de la technique tel qu'il est décrit dans le brevet EP 087 ne permet pas de combattre la nouveauté de sa revendication 1. Les revendications 2, 3, 5, 7 et 9 qui sont dans sa dépendance seront par conséquent également validées.

3.3.2.2 - défaut de nouveauté au regard de FR042

Le brevet FR 042 propose un échangeur de chaleurs « présentant un écartement plus faible entre les tubes ». Pour ce faire, il est indiqué que les collerettes disposées les unes à côté des autres doivent être formées et dirigées alternativement vers le côté air et vers le côté eau de telle sorte que la distance entre elles soit réduite au maximum.

Le problème technique posé de façon générale est donc le même que celui qui est décrit dans le brevet EP 087 puisqu'il concerne la réduction de la taille de l'échangeur de chaleur mais la solution est différente en ce sens que le brevet FR 042 se propose non de réduire la distance entre les collets et le bord replié de la boîte collectrice mais entre chacun des collets en les décalant les uns par rapport aux autres et en les installant les uns vers le haut, les autres vers le bas.

Pour soutenir que cette invention divulgue la réduction de la distance des collets avec le bord replié de la boite, les défenderesses s'appuient sur la figure 4a qui montre selon elles, le même écart minimal existant entre chacun des collets et entre ces derniers et le bord replié. C'est toutefois à juste titre que la société VST et la société VALEO répliquent que le document FR 042 n'indique jamais la relation entre ces deux distances et que d'autre figures du brevet, notamment la 3b démontrent que l'écartement entre les collerettes de tubes adjacents peut être totalement différent et même largement inférieur à celui existant avec le bord replié :

(les espaces respectifs ont été matérialisés par les parties)

Ce document FR 42 ne peut donc combattre la nouveauté de la revendication 1 du brevet litigieux et de ses revendications dépendantes.

3.3.3- Sur le moyen tiré du défaut d'activité inventive des revendications 1 ,3, 5, 7 et 9 ::

L'article 56 de la CBE dispose qu' « une invention est considérée comme impliquant une activité inventive si, pour un homme du métier, elle ne découle pas d'une manière évidente de l'état de la technique ».

3.3.3.1- Défaut d'activité inventive intrinsèque

Selon les défenderesses, le simple fait de poser le problème technique rend la solution évidente en ce sens que face à un échangeur de largeur inutilement grande, l'homme du métier est incité à supprimer spontanément les espaces morts tels qu'ils sont décrits dans le brevet EP 387 lui-même, ce qui le prive d'activité inventive.

La société VST réplique que le problème technique est celui de la réduction de l'encombrement d'un échangeur de chaleur et non celui de la « largeur d'un échangeur de chaleur comprenant un espace mort entre les collets et le bord replié » comme prétendu par les défenderesses.

Sur ce,

Un collecteur d'échangeur de chaleur présentant une âme centrale, est muni de collets pour l'insertion de tubes d'échange de chaleur et il est entouré par une bordure surélevée délimitant une gorge périphérique, raccordée à l'âme centrale par un bord replié. Cet échangeur peut comporter une ou plusieurs rangées de tubes. Dans le brevet EP 387 la figure ci-dessous représente un dispositif mono-rang :

Pour rappel, le problème technique est celui de la réduction de la largeur d'un tel échangeur de chaleur par la suppression des espaces morts. A cette fin, le brevet EP 387 qui a identifié au niveau du collecteur, la distance séparant les collets du bord replié comme un espace mort propose, aux termes de sa revendication 1, un échangeur de chaleur « caractérisé en ce que chaque collet est sensiblement au contact dudit bord replié de manière à définir entre eux un jeu d'une valeur minimale ».

La réduction de l'encombrement d'un échangeur de chaleur par la suppression des espaces morts est déjà connue de l'art antérieur. Elle se retrouve notamment dans le brevet FR 042 -précédemment examiné dans le cadre de la discussion relative à la nouveauté du brevet litigieux- qui propose un échangeur de chaleur « ayant une capacité plus élevée et présentant en particulier un écartement plus faible entre les tubes » permettant donc de maîtriser son encombrement malgré l'augmentation du nombre de tubes.

Or, la seule sélection d'un espace mort dans un collecteur n'apparaît pas inventive dès lors que la structure de l'échangeur telle que décrite ci-dessus n'offre à l'homme du métier qu'une seule alternative : soit il réduit l'espacement entre les tubes - option divulguée par le brevet FR 042 - soit il réduit à son minimum la distance entre le(s) collet(s) et le bord replié.

Il apparaît donc, que la revendication 1 qui se contente de décrire cette seconde alternative découle de manière évidente de l'état de la technique. Elle ne procède donc pas d'une activité inventive.

S'agissant des revendication dépendantes 3, 5, 7 et 9, si comme le relèvent pertinemment les demanderesses, il n'est pas développé d'argumentaire supplémentaire spécifique à leur égard, l'activité inventive des caractéristiques qui y sont décrites est toutefois remise en cause par les antériorités opposées à la revendication 1 ou dans le cadre de l'examen des deux précédents brevets litigieux.

Ainsi, la revendication 3 se borne à expliciter le résultat obtenu par la mise en oeuvre de la revendication 1 et la revendication 5 relative à la configuration du collet pourvu d'un joint d'étanchéité est illustré par la figure 4a du brevet FR 042. La revendication 7 précise pour sa part que chaque tube est de forme circulaire ce qui est le cas tant dans le brevet FR 042 que dans le document FR 385. Enfin, la caractéristique décrite à la revendication 9 tenant à la localisation des ailettes de l'échangeur en contact avec le collecteur est enseignée par le brevet FR 385.

Au regard de l'ensemble de ces éléments, les demandes fondées sur la contrefaçon des revendications 1, 3, 5, 7, et 9 du brevet EP 387 ne peuvent prospérer.

4- DEMANDES RECONVENTIONNELLES EN CONCURRENCE DELOYALE:

Les sociétés NISSENS demandent à titre reconventionnel que le harcèlement auquel la société VST se livre selon elles, à leur encontre sur la base de ses brevets, soit jugé constitutif de concurrence déloyale en tant qu'il procède d'un abus de position dominante au sens de l'article L.420-2 du code de commerce et soutiennent que cette attitude constitue une faute au sens de l'article 1240 du code civil.

Elles font valoir que la présente procédure s'inscrit dans une stratégie plus large de « minage » qui consiste à déposer chaque année plusieurs centaines de brevets dans le seul but de pouvoir ensuite poursuivre ses concurrents en contrefaçon et ainsi paralyser leur activité, ce alors qu'elle ne peut ignorer la faiblesse voire la nullité desdits brevets.

Elles rappellent que le principe est celui de la liberté du commerce et de l'industrie qui permet de reproduire librement, même à l'identique, des produits existants et que le brevet n'est une exception à cette règle que dans la mesure où il concerne une invention apportant une solution technique -qui soit tout à la fois nouvelle et inventive- à un problème technique.

Elles font à cet égard valoir que les fixations décrites par le brevet FR 386 étaient connues au jour de son dépôt et qu'il vise en réalité, de manière déguisée, à protéger l'interface entre deux échangeurs assemblés l'un à l'autre dans un véhicule, ce qui aboutit à interdire -à défaut d'une licence- l'accès au marché des échangeurs de rechange.

Elles considèrent qu'à supposer même que cette interface ait été brevetable, elle aurait constitué une facilité essentielle (ou « intrant essentiel ») entre deux échangeurs assemblés l'un à l'autre dans un véhicule, ce au sens de l'article 101 du règlement no461/2010 en date du 27 mai 2010 relatif au principe de la prohibition des ententes entre les entreprises. Elles ajoutent que la société VST devrait même être tenue de laisser l'accès à ces interfaces à des conditions raisonnables et non discriminatoires (dites « FRAND ») ce qu'elle ne fait pas puisqu'elle se maintient indûment en situation de monopole sur le marché des échangeurs de rechange au moyen de son brevet FR 386.

La société VST réplique que les brevets FR 386, FR 511, et EP 087 ayant été déposés avant 2014, à une époque où elle ne déposait que peu de brevets dans les systèmes thermiques, cela suffit à écarter toute volonté de « minage » du marché et qu'en tout état de cause, ce sont ses investissements massifs dans la recherche et le développement qui lui permettent de diffuser sur le marché, de très nombreux produits innovants.

Elle fait par ailleurs valoir que l'allégation selon laquelle le brevet FR 386 ne résout aucun problème technique est fausse, qu'il n'est pas démontré qu'elle se trouve en situation de position dominante et que le brevet est une exception à la notion d' « interface essentielle » invoquée par les défenderesses, sans quoi les dispositions de l'article L. 613-4 du code de la propriété intellectuelle relatives à la fourniture de moyens seraient privées de toute signification.

Sur ce,

Les défenderesses fondent leur demande en concurrence déloyale d'une part sur les conditions de délivrance des trois brevets litigieux et d'autre part sur la stratégie plus générale adoptée par la société VALEO en matière de dépôt de brevets.

4.1 Sur les griefs tenant aux conditions de délivrance des brevets litigieux

La concurrence déloyale, fondée sur le principe général de responsabilité édicté par l'article 1240 du code civil, consiste dans des agissements s'écartant des règles générales de loyauté et de probité professionnelle applicables dans les activités économiques et régissant la vie des affaires tels que ceux créant un risque de confusion avec les produits ou services offerts par un autre opérateur. Les actes de concurrence déloyale sont sanctionnés au titre de la responsabilité de droit commun lorsqu'ils excèdent les limites admises dans l'exercice des activités économiques, au nom du principe de la liberté du commerce. Ils supposent la caractérisation d'une faute génératrice d'un préjudice.

En l'espèce, il sera à titre liminaire rappelé que le seul fait que les revendications des brevets FR 511, FR 386 et EP 087 opposées aux défenderesses dans le cadre de la procédure en contrefaçon aient été annulées ne peut suffire à caractériser une faute étant relevé que les titres ayant été délivrés par l'INPI ou l'OEB, cela leur conférait une présomption de validité.

Les défenderesses font plus particulièrement valoir s'agissant du brevet FR 511, que la société VST ne pouvait ignorer que l'invention était privée de nouveauté dans la mesure où l'un des brevets dont elle est titulaire en constituait une antériorité (FR 759).

Outre le fait que les revendications du brevet FR 511 n'ont pas été annulées pour défaut de nouveauté mais d'activité inventive, il ressort des écritures de la demanderesse qu'elle a justement entendu limiter la portée de la revendication 1 dans le but de la différencier des antériorités, notamment du brevet FR 759 qui visait un échangeur de chaleur dont le collet se situait au-dessus de la hauteur de la bordure surélevée. L'argument des défenderesses apparaît donc inopérant.

S'agissant du brevet FR 386, les sociétés NISSENS soutiennent que pour en obtenir la délivrance la société VST a dissimulé à l'INPI plusieurs modifications qu'elles a apportées aux revendications (plus particulièrement des revendications14 et 20) enfreignant ce faisant, les dispositions du code de la propriété intellectuelle et qu'elle a par ailleurs introduit une nouvelle caractéristique dans la revendication 1 tenant au mouvement de translation par opposition à un mouvement de pivotement, ce dernier étant pourtant plus avantageux.

Selon l'INPI, les revendications 14 et 20 telles que déposées étaient dépourvues de nouveauté ce qui a amené la société VALEO à les réécrire sans que cette modification n'apparaisse clairement dans le courrier qu'elle lui a adressé en réponse au rapport de recherche. Toutefois, ce grief n'apparaît pas susceptible de caractériser un acte de concurrence déloyale et il n'est pas démontré que la nouvelle revendication 14 n'est pas conforme aux dispositions de l'article R 612-7-1 du code de la propriété intellectuelle. Enfin, s'il a été jugé que la caractéristique tenant à l'assemblage par un mouvement de translation était dépourvue de nouveauté, il n'a pas été établi qu'elle ne présentait aucun avantage par rapport à un mouvement de pivotement.

Enfin, il ne peut être pertinemment reproché à la société VALEO d'avoir déposé son brevet EP 387 au motif que ses caractéristiques étaient connues dans l'art antérieur alors que les revendications opposées ont été annulées non pour défaut de nouveauté mais pour défaut d'activité inventive.

4.2-Sur l'abus de position dominante

Il sera en premier lieu rappelé que l'article 101 du traité pour le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE) -auquel se réfère le considérant no13 du réglement no461/2010- disposant que "sont incompatibles avec le marché intérieur et interdits tous accords entre entreprises, toutes décisions d'associations d'entreprises et toutes pratiques concertées, qui sont susceptibles d'affecter le commerce entre États membres et qui ont pour objet ou pour effet d'empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence à l'intérieur du marché commun [...] » est inapplicable en l'espèce en ce qu'il concerne des accords, pratiques concertées et décisions d'associations d'entreprises restrictifs de concurrence et non le comportement unilatéral d'une entreprise lequel est régi par l'article 102 du même traité qui dispose qu'est "incompatible avec le marché intérieur et interdit, dans la mesure où le commerce entre États membres est susceptible d'en être affecté, le fait pour une ou plusieurs entreprises d'exploiter de façon abusive une position dominante sur le marché intérieur ou dans une partie substantielle de celui-ci ».

Dès lors que les défenderesses font valoir que le comportement de la société VALEO constitue un abus de position dominante il convient au regard des dispositions de l'article 12 du code de procédure civile, de restituer aux faits leur exacte qualification juridique et donc de faire application de l'article 102 susvisé.

Or, si la stratégie de thésaurisation des brevets est susceptible de constituer un abus de position dominante puisqu'elle peut avoir pour but et conséquence de verrouiller le marché et donc d'empêcher les concurrents d'y accéder, encore faut-il que la société qui y recourt soit effectivement en position dominante or en l'espèce, force est de constater que les sociétés NISSENS ne produisent aucun élément permettant d'établir que la société VALEO jouit sur le marché de la rechange des échangeurs de chaleur, d'une position dominante. Au contraire, il résulte de sa pièce no64 que pour deux des radiateurs allégués de contrefaçon la part de marché détenue par la société VALEO est respectivement de 6 et 2 %. En tout état de cause, la présente procédure qui ne concerne que trois brevets ne permettrait pas d'établir la réalité de la stratégie qui lui est imputée. Par ailleurs, il ne résulte pas du jugement du tribunal judiciaire de Versailles en date du 27 mai 2020, comme le soutiennent les défenderesses, que la société VALEO serait en position dominante sur le marché français de la rechange.

Enfin, si L'article L420-1 du code du commerce dispose notamment qu'« Est (en outre) prohibée, dès lors qu'elle est susceptible d'affecter le fonctionnement ou la structure de la concurrence, l'exploitation abusive par une entreprise ou un groupe d'entreprises de l'état de dépendance économique dans lequel se trouve à son égard une entreprise cliente ou fournisseur », le moyen développé dans ce cadre par les sociétés NISSENS au motif que le brevet EP 386 constituerait une facilité essentielle étant développé à titre subsidiaire, dans l'hypothèse où il serait déclaré valide, il n'y a pas lieu de l'examiner.

Au regard de l'ensemble de ces éléments les demandes formées au titre de la concurrence déloyale seront rejetées.

5-DEMANDE DE DOMMAGES ET INTERETS POUR PROCEDURE ABUSIVE

Les défenderesses soutiennent que la demande d'interdiction formulée par les sociétés VST et VALEO SERVICE repose sur des brevets dont elle ne pouvait ignorer qu'ils étaient nuls et n'avait d'autre objectif que de l'évincer du marché des échangeurs de chaleur. Elle sollicite en conséquence outre des dommages et intérêts à hauteur d'un euro, une mesure de publication et la prise en charge de ses frais irrépétibles.

Les demanderesses répliquent qu'il n'existe aucun abus à solliciter, sur la base de brevets dûment délivrés par l'INPI ou l'OEB la cessation d'actes de contrefaçon mettant en péril les investissements réalisés pour le développement de produits mettant en oeuvre leurs inventions et l'image de la société.

Sur ce,

La faculté d'agir en justice est un droit ne pouvant être limité que s'il s'avère avoir uniquement été exercé dans une intention de nuire, ou sur la base d'une erreur grossière d'appréciation du demandeur dont il est manifeste qu'il ne pouvait se méprendre sur le bien-fondé de ses prétentions.

La société VALEO qui a agi sur le fondement de titres délivrés par l'INPI ou l'OEB ne peut être tenue à des dommages et intérêts de ce chef.

Par ailleurs, la prise en charge des frais irrépétibles a vocation à être examinée dans le cadre des demandes formées au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Les prétentions formées au titre de la procédure abusive ne peuvent donc qu'être rejetées.

6-DEMANDES RELATIVES AUX FRAIS DU LITIGE ET AUX CONDITIONS D'EXECUTION DE LA DECISION :

Les demanderesses, partie perdante, supporteront la charge des dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Elle doivent en outre être condamnées à verser aux défenderesses qui ont dû exposer des frais irrépétibles pour faire valoir leurs droits, une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile qu'il est équitable de fixer à la somme de 200 000 euros.

L'exécution provisoire étant justifiée au cas d'espèce et compatible avec la nature du litige, elle sera ordonnée.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal, statuant publiquement par jugement mis à disposition au greffe, contradictoire et en premier ressort,

PRONONCE la nullité des revendications 1, 5, 6, 7 et 8 du brevet FR 2 902 511 pour défaut d'activité inventive ;

PRONONCE la nullité des revendications 1 à 13, 21 et 22 du brevet FR 2 929 386 pour défaut de nouveauté ;

DIT que la décision une fois définitive sera transmise à l'INPI pour être inscrite au registre national des brevets à l'initiative de la partie la plus diligente ;

PRONONCE la nullité des revendications 1, 3, 5, 7 et 9 du brevet EP 1 150 087 pour défaut de nouveauté ;

DIT que la décision une fois définitive sera transmise à l'OEB pour être inscrite au registre européen des brevets à l'initiative de la partie la plus diligente ;

REJETTE les demandes fondées sur la contrefaçon des brevets litigieux ;

DEBOUTE les sociétés NISSENS et NISSENS COOLING SOLUTIONS A/S de leurs demandes fondées sur la concurrence déloyale ;

DEBOUTE les sociétés NISSENS et NISSENS COOLING SOLUTIONS A/S de leurs demandes fondées sur la procédure abusive ;

CONDAMNE les sociétés VALEO SYSTEMES THERMIQUES et VALEO SERVICE à verser 200 000 euros aux sociétés NISSENS et NISSENS COOLING SOLUTIONS A/S ensemble, au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE les sociétés VALEO SYSTEMES THERMIQUES et VALEO SERVICE aux dépens qui seront recouvrés par Maître Denis Monégier du Sorbier, en application de l'article 699 du code de procédure civile.

Fait et jugé à Paris le 29 janvier 2021.

Le GreffierLe Président


Synthèse
Tribunal : Tribunal de grande instance de Paris
Formation : Ct0196
Numéro d'arrêt : 3
Date de la décision : 29/01/2021

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.grande.instance.paris;arret;2021-01-29;3 ?
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