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04/06/2020 | FRANCE | N°17/14422

France | France, Tribunal de grande instance de Paris, Ct0196, 04 juin 2020, 17/14422


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS

3ème chambre 1ère section

No RG 17/14422 -
No Portalis 352J-W-B7B-CLRCF

No MINUTE :

Assignation du :
09 octobre 2017

JUGEMENT
rendu le 04 juin 2020
DEMANDERESSES

Société ADIDAS AG
[Adresse 1]
[Localité 1] (ALLEMAGNE)

Société ADIDAS FRANCE
[Adresse 2]
[Localité 2]

représentée par Me Emmanuel LARERE de l'AARPI GIDE LOYRETTE NOUEL, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #T03

DÉFENDERESSE

Société ZV FRANCE
[Adresse 3]
[Localité 3]

repré

sentée par Me Pascal WILHELM de la SELAS WILHELM et ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #K0024

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Nathalie SABOTIER, 1ère vice-pr...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS

3ème chambre 1ère section

No RG 17/14422 -
No Portalis 352J-W-B7B-CLRCF

No MINUTE :

Assignation du :
09 octobre 2017

JUGEMENT
rendu le 04 juin 2020
DEMANDERESSES

Société ADIDAS AG
[Adresse 1]
[Localité 1] (ALLEMAGNE)

Société ADIDAS FRANCE
[Adresse 2]
[Localité 2]

représentée par Me Emmanuel LARERE de l'AARPI GIDE LOYRETTE NOUEL, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #T03

DÉFENDERESSE

Société ZV FRANCE
[Adresse 3]
[Localité 3]

représentée par Me Pascal WILHELM de la SELAS WILHELM et ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #K0024

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Nathalie SABOTIER, 1ère vice-présidente adjointe
Gilles BUFFET, Vice président
Laurence BASTERREIX, Vice-présidente

assistés de Caroline REBOUL, Greffier,

DÉBATS

A l'audience du 20 janvier 2020 tenue en audience publique devant Nathalie SABOTIER et Gilles BUFFET, juges rapporteurs, qui, sans opposition des avocats, ont tenu seuls l'audience, et, après avoir entendu les conseils des parties, en ont rendu compte au Tribunal, conformément aux dispositions de l'article 786 du Code de Procédure Civile.
Après clôture des débats, avis a été donné aux avocats que le jugement serait rendu publiquement par mise à disposition au greffe le 26 mars 2020.
Par application de la loi no 2020-290 du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de Covid-19, et de l'ordonnance de roulement modificative du président du tribunal judiciaire de Paris du 16 mars 2020 prise dans le cadre du plan de continuation de l'activité de cette juridiction, en date du 15 mars 2020 , le délibéré a été prorogé à ce jour.

JUGEMENT

Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe
Contradictoire
en premier ressort

EXPOSÉ DU LITIGE :

Le groupe ADIDAS crée et commercialise dans le monde entier des vêtements et articles de sport.
La société ADIDAS AG est notamment propriétaire des marques suivantes :
- une marque figurative de l'Union européenne no003517588 déposée le 3 novembre 2003 dûment renouvelée, pour désigner les produits suivants relevant de la classe 25 "vêtements ; chaussures ; chapellerie", constituée de trois bandes équidistantes, parallèles, de même longueur et de même largeur appliquées sur un haut de vêtement avec la couleur duquel elles contrastent;

- une marque figurative de l'Union européenne no003517661 déposée le 3 novembre 2003 dûment renouvelée, pour désigner les vêtements relevant de la classe 25, constituée de trois bandes équidistantes, parallèles, de même longueur et de même largeur appliquées sur un bas de vêtement avec la couleur duquel elles contrastent ;

- une marque française figurative no1280280 déposée le 25 juillet 1984 en renouvellement d'un précédent dépôt et dûment renouvelée, pour désigner les survêtements relevant de la classe 25

La société ADIDAS a constaté que la société ZV France commercialisait dans ses boutiques et sur son site internet, au titre de la collection automne - hiver 2016, une veste et un pantalon comportant le long des manches et des jambes deux bandes parallèles contrastantes avec la couleur du produit, et ce, sous la référence "sweat-shirt cosy néo deluxe" et "pantalon porte":

Au titre de la collection printemps - été 2017, la société ZV France a également commercialisé un pantalon "poème deluxe"comportant le long des jambes deux bandes parallèles contrastantes:

Ce pantalon était toujours commercialisé en 2018.

Estimant que ces produits portaient atteinte à leurs marques, les sociétés ADIDAS AG et ADIDAS France ont fait assigner la société ZV France, par acte du 9 octobre 2017, devant le tribunal de grande instance (devenu le 1er janvier 2020, le tribunal judiciaire) de Paris en contrefaçon de marques, pour atteintes à la renommée de leurs marques et en concurrence déloyale.

Par une ordonnance du 20 décembre 2018, le juge de la mise en état a :
- Ordonné à la société ZV France de communiquer aux sociétés ADIDAS AG et ADIDAS France, sous astreinte de 500 ? par jour de retard courant à compter du trentième jour suivant la signification de la présente ordonnance, et pendant une durée de six mois, une attestation d'un expert-comptable ou du commissaire aux comptes de la société, reprenant les informations suivantes relatives aux produits litigieux référencés"sweat-shirt cosy néo deluxe", "pantalon porte" et "pantalon poème deluxe", désormais appelé "pantalon poème" :
* le chiffre d'affaires réalisé pour chacun des produits litigieux, en tous coloris, dans l'Union européenne à l'exception de l'Allemagne, au jour du prononcé de l'ordonnance à intervenir;
* la marge réalisée pour chacun des produits litigieux, en tous coloris, dans l' Union européenne à l'exception de l'Allemagne, au jour du prononcé de l'ordonnance à intervenir ;

- S'est réservé la liquidation de l'astreinte ;
- Rejeté les autres demandes des sociétés ADIDAS AG et ADIDAS France ;
- Réservé les dépens et les demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- Renvoyé l'affaire à une audience de mise en état ultérieure.

Dans leurs dernières conclusions récapitulatives no3 en date du 19 septembre 2019, les sociétés ADIDAS AG et ADIDAS FRANCE sollicitent du tribunal, au visa des articles L. 713-3, L. 716-1, L. 716-8 et L. 716-9, L. 716-14, L.716-15 et L.717-1 du code de la propriété intellectuelle , 1240 du code civil, et 9 du Règlement sur la marque de l'Union européenne no 2017/1001 du 14 juin 2017, de :

A titre principal :

- Dire que la détention, l'offre à la vente et la vente de vêtements reproduisant illicitement les marques de l'Union européenne no 003517588 et no003517661 et française no 1 280 280 de la société ADIDAS AG, constituent des actes de contrefaçon au sens des dispositions légales précitées ;

- Dire qu'en détenant, offrant à la vente et en vendant des vêtements contrefaisant les marques de la société ADIDAS AG, la société ZV France a commis des actes de concurrence déloyale au préjudice de la société adidas France ;

En conséquence,

- Condamner la société ZV France à payer à la société ADIDAS AG la somme de 1.245.565 euros au titre des bénéfices indûment réalisés du fait de la contrefaçon des marques de l'Union européenne no 003517588 et no003517661 et française no 1 280 280 ;

- Condamner la société ZV France à payer à la société ADIDAS AG la somme de cinquante mille euros (50.000 ?) en réparation de son préjudice moral du fait de la contrefaçon des marques de l'Union européenne no 003517588 et no003517661 et française no 1 280 280 ;

- Condamner la société ZV France à payer à la société ADIDAS France la somme de cent cinquante mille euros (150.000 ?) en réparation du préjudice économique qu'elle a subi, du fait du manque à gagner commercial et du détournement de sa clientèle en raison de la commercialisation des produits litigieux ;

Subsidiairement :

- Dire et juger qu'en utilisant des signes portant atteinte aux marques renommées de l'Union européenne no 003517588 et no 003517661 et française no 1 280 280, ZV France a exploité, de façon injustifiée, les marques précitées et leur a porté préjudice, de sorte qu'elle a engagé sa responsabilité au regard des articles L.713-5 et L.717-1 du code de la propriété intellectuelle et de l'article 9 du Règlement sur la marque de l'Union européenne no 2017/1001 du 14 juin 2017 tel qu'ils doivent être appliqués conformément à la jurisprudence de la CJUE ;

En conséquence,

- Condamner la société ZV France à payer à la société adidas AG la somme de 1.245.565 euros à la société ADIDAS AG en réparation du préjudice subi du fait de l'atteinte aux marques renommées de l'Union européenne no 003517588 et no003517661 et française no 1 280 280 ;

En toute hypothèse,

- Faire interdiction à la société ZV France, sur le territoire de l'Union européenne à l'exception de l'Allemagne, d'une part, de continuer à détenir et distribuer les pantalons et vestes litigieux revêtus de deux bandes le long des jambes et des manches, dans tous coloris, d'autre part d'apposer ou de faire apposer sur des vêtements des signes imitant ou reproduisant les marques de l'Union européenne no 003517588 et no003517661 et française no 1 280 280 de la société ADIDAS AG, sous quelque forme que ce soit, de fabriquer, d'importer, de détenir, de promouvoir, d'offrir à la vente et de vendre des produits reproduisant ou imitant ces marques, chacune de ces interdictions étant assortie d'une astreinte définitive de cent cinquante euros (150 ?) par infraction constatée à compter de la signification de la décision à intervenir ;

- Ordonner le rappel des circuits commerciaux, pour le territoire de l'Union européenne à l'exception de l'Allemagne, aux frais de la défenderesse et sous astreinte de cinq cents euros (500 ?) par jour de retard, à compter du quinzième jour suivant la signification du jugement à intervenir, de tous les produits litigieux, dans tous coloris, publicités et autres matériels de vente imitant ou reproduisant les marques précitées de la société ADIDAS AG, en la possession de la société ZV France ou de tout tiers ;

- Ordonner la destruction, aux frais de la société ZV France, sous contrôle d'un huissier de justice, et sous astreinte de cent cinquante euros (150 ?) par jour de retard à compter du vingtième jour suivant la signification du jugement à intervenir, de l'ensemble des produits contrefaisants, dans tous coloris, et, le cas échéant, des publicités et autres matériels de vente reproduisant ou imitant les marques de l'Union européenne no 003517588 et no003517661 et française no 1 280 280 de la société ADIDAS AG ;

- Dire et juger que le Tribunal de grande instance de Paris sera compétent pour connaître de la liquidation des astreintes qu'il aura ordonnées ;

- Ordonner la publication, aux frais de la société ZV France, du jugement à intervenir dans trois journaux ou magazines au choix d'ADIDAS AG et d'ADIDAS France, dans la limite de cinq mille euros hors taxe (5.000 ? H.T.) par insertion ;

- Condamner la société ZV France à rembourser aux sociétés ADIDAS AG et ADIDAS France la somme de quinze mille six cent euros (15.600 ?) correspondant aux deux sondages de confusion réalisés par l'institut [Établissement 1], et à leur verser la somme de cinquante mille euros (50.000 ?) chacune au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Condamner la société ZV France aux entiers dépens qui seront recouvrés par Maître Emmanuel Larere, avocat, conformément à l'article 699 du code de procédure civile ;

- Ordonner l'exécution provisoire de la décision à intervenir, nonobstant appel et sans constitution de garantie.

Dans ses dernières conclusions récapitulatives no4 en date du 03 octobre 2019, la société ZV FRANCE demande du tribunal, au visa des articles L. 713-3, L. 716-1, L. 716-8 et L. 716-9, L. 716-14 et L.716-15 du code de la propriété intellectuelle , 1240 du code civil, et 9 du Règlement sur la marque de l'Union européenne no 2017/1001 du 14 juin 2017, de :

- Débouter les sociétés ADIDAS AG et ADIDAS France de toutes leurs demandes, fins et prétentions ;

En tout état de cause,

- Renvoyer la présente affaire devant la Cour de justice de l'Union européenne pour interprétation de l'article 9, paragraphe 2 du règlement no2017/1001 du 14 juin 2007 sur la marque de l'Union européenne ;

- Condamner solidairement les sociétés ADIDAS AG et ADIDAS France à verser à la société ZV FRANCE la somme de 100.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Condamner solidairement ADIDAS AG et ADIDAS France aux entiers dépens qui seront directement recouvrés par la SELAS WILHELM et ASSOCIES, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

L'instruction de l'affaire a été clôturée par une ordonnance du 8 octobre 2019.

MOTIFS DE LA DÉCISION

1o) Sur le renvoi à la Cour de Justice de l'Union Européenne d'une question préjudicielle:

La société ZV FRANCE sollicite le renvoi d'une question préjudicielle à la Cour de justice de l'Union Européenne portant sur l'interprétation de l'article 9 paragraphe 2 du règlement sur la marque de l'Union européenne no 2017/1001 du 14 juin 2017. La défenderesse soutient en effet qu'il existe une incertitude quant au risque de confusion généré par l'apposition ornementale d'un signe similaire mais non identique à une marque de l'Union européenne antérieure. Elle ajoute que les juridictions nationales n'ont pas une jurisprudence harmonisée en la matière, ce qui nécessite selon elle l'intervention de la Cour de justice afin de donner une interprétation uniforme de l'article 9 du Règlement sur les marques de l'Union Européenne, respectueuse du principe de la libre concurrence.

Les demanderesses répliquent que la jurisprudence de la Cour est parfaitement claire en ce sens qu'elle n'a jamais admis, au titre de la libre concurrence, l'utilisation d'un signe similaire à une marque dans des conditions génératrices d'un risque de confusion, au motif que cela reviendrait à priver le titulaire de la marque de la protection offerte par le Règlement sur les marques de l'Union Européenne. Les sociétés ADIDAS ajoutent qu'il n'existe aucune difficulté d'interprétation du droit de l'Union, la Cour ayant considéré qu'en présence d'un risque de confusion, ce qu'il appartient aux juridictions nationales de rechercher, le titulaire d'une marque est fondé à interdire l'usage d'un signe imitant cette marque.

Sur ce,

Selon l'article 267 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne "La Cour de justice de l'Union européenne est compétente pour statuer, à titre préjudiciel :
a) sur l'interprétation des traités,
b) sur la validité et l'interprétation des actes pris par les institutions, organes ou organismes de l'Union.
Lorsqu'une telle question est soulevée devant une juridiction d'un des États membres, cette juridiction peut, si elle estime qu'une décision sur ce point est nécessaire pour rendre son jugement, demander à la Cour de statuer sur cette question.
Lorsqu'une telle question est soulevée dans une affaire pendante devant une juridiction nationale dont les décisions ne sont pas susceptibles d'un recours juridictionnel de droit interne, cette juridiction est tenue de saisir la Cour.
Si une telle question est soulevée dans une affaire pendante devant une juridiction nationale concernant une personne détenue, la Cour statue dans les plus brefs délais."

Par un arrêt du 6 octobre 1982 (Srl CILFIT et Lanificio di Gavardo SpA contre Ministère de la santé, Aff. 283/81), la Cour de justice des Communautés Européenne a dit pour droit que :

"13 Il y a lieu de rappeler a ce sujet que la cour a déclaré dans son arrêt du 27 mars 1963 (28 à 30/62, Da Costa, recueil p . 75 ) que si l'article 177, dernier alinéa, oblige sans aucune restriction les juridictions nationales dont les décisions ne sont pas susceptibles d'un recours juridictionnel de droit interne à soumettre à la cour toute question d'interprétation soulevée devant elles, l'autorité de l'interprétation donnée par celle-ci en vertu de l'article 177 peut cependant priver cette obligation de sa cause et la vider ainsi de son contenu ; qu'il en est notamment ainsi quand la question soulevée est matériellement identique a une question ayant déjà fait l'objet d'une décision a titre préjudiciel dans une espèce analogue.

14 Le même effet , en ce qui concerne les limites de l'obligation formulée par l'article 177, alinéa 3, peut résulter d ' une jurisprudence établie de la cour résolvant le point de droit en cause , quelle que soit la nature des procédures qui ont donne lieu à cette jurisprudence, même à défaut d ' une stricte identité des questions en litige.

15 Il reste cependant entendu que, dans toutes ces hypothèses, les juridictions nationales, y compris celles visées a l'article 3, de l'article 177, conservent l'entière liberté de saisir la cour si elles l'estiment opportun.

16 Enfin , l'application correcte du droit communautaire peut s'imposer avec une évidence telle qu'elle ne laisse place à aucun doute raisonnable sur la manière de résoudre la question posée. Avant de conclure à l'existence d'une telle situation, la juridiction nationale doit être convaincue que la même évidence s'imposerait également aux juridictions des autres Etats membres et à la Cour de justice. Ce n'est que si ces conditions sont remplies que la juridiction nationale pourra s'abstenir de soumettre cette question à la cour et la résoudre sous sa propre responsabilité."

Il résulte en outre de l'article 1er, paragraphe 5, des Recommandations de la Cour à l'attention des juridictions nationales, relatives à l'introduction de procédures préjudicielles (2018/C 257/01) que :

"5. Les juridictions des États membres peuvent saisir la Cour d'une question portant sur l'interprétation ou la validité du droit de l'Union lorsqu'elles estiment qu'une décision de la Cour sur ce point est nécessaire pour rendre leur jugement (voir l'article 267, deuxième alinéa, TFUE).
Un renvoi préjudiciel peut notamment s'avérer particulièrement utile lorsqu'est soulevée, devant
la juridiction nationale, une question d'interprétation nouvelle présentant un intérêt général pour l'application uniforme du droit de l'Union ou lorsque la jurisprudence existante ne paraît pas fournir l'éclairage nécessaire dans un cadre juridique ou factuel inédit."

La société ZV FRANCE demande au tribunal de poser à la Cour la question préjudicielle suivante :

"L'article 9, paragraphe 2 du RMUE doit-il être interprété en ce sens que, au regard du principe fondamental de la libre concurrence et en particulier de libre circulation, protégé par le droit de l'Union, l'usage habituel du secteur dans lequel s'insère une marque doit être pris en compte dans l'examen de l'existence d'un risque de confusion et de la perception d'un signe similaire par le public pertinent afin d'éviter que le titulaire de la marque puisse s'arroger un monopole sur un genre figuratif qui irait au-delà de la sauvegarde essentielle de ses droits ?"

La société ZV FRANCE demande en substance la transmission à la Cour d'une question portant sur le point de savoir si certains signes ne devraient pas rester disponibles aux fins d'utilisation par l'ensemble des opérateurs à titre de décor selon l'usage habituel d'un secteur professionnel et ce, nonobstant leur enregistrement en qualité de marque.

Ainsi que le relèvent à juste titre les sociétés ADIDAS, la Cour de justice de l'Union européenne a déjà répondu à cette question, interprétant les dispositions identiques au Règlement sur la marque de l'Union européenne issues de la directive 89/104/CEE du Conseil, du 21 décembre 1988, rapprochant les législations des États membres sur les marques.

En effet, par un arrêt du 10 avril 2008 ( aff. C-102/07, Adidas AG, adidas Benelux BV contre Marca Mode CV, CetA Nederland CV, HetM Hennes et Mauritz Netherlands BV, Vendex KBB Nederland BV), la Cour de justice de l'Union européenne a dit pour droit que :

"34. A cet égard, il convient de relever que la perception par le public d'un signe comme constituant un ornement ne saurait faire obstacle à la protection conférée par l'article 5, paragraphe 1, sous b), de la directive lorsque, malgré son caractère décoratif, ledit signe présente une similitude avec la marque enregistrée telle que le public concerné est susceptible de croire que les produits proviennent de la même entreprise ou, le cas échéant, d'entreprises liées économiquement. (...)

43. Force est de constater que l'impératif de disponibilité est étranger tant à l'appréciation du degré de similitude entre la marque renommée et le signe utilisé par le tiers qu'au lien qui pourrait être fait par le public concerné entre ladite marque et ledit signe. Il ne saurait donc constituer un élément pertinent pour vérifier si l'usage du signe tire indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de la marque ou leur porte préjudice. (...)

47. Toutefois, l'impératif de disponibilité ne saurait en aucun cas constituer une limitation autonome des effets de la marque s'ajoutant à celles expressément prévues à l'article 6, paragraphe 1, sous b), de la directive. Il convient à cet égard de souligner que, pour qu'un tiers puisse invoquer les limitations des effets de la marque contenues à l'article 6, paragraphe 1, sous b), de la directive et se prévaloir dans ce contexte de l'impératif de disponibilité qui sous-tend cette disposition, il faut que l'indication utilisée par lui soit, comme l'exige ladite disposition, relative à l'une des caractéristiques du produit commercialisé ou du service fourni par ce tiers (voir, en ce sens, arrêts Windsurfing Chiemsee, précité, point 28, et du 25 janvier 2007, Adam Opel, C-48/05, Rec. p. I-1017, points 42 à 44). (...)

48. En l'espèce, il ressort de la décision de renvoi et des observations présentées par les concurrents d'adidas devant la Cour que ces derniers invoquent comme justification de l'utilisation des motifs à deux bandes litigieux le caractère purement décoratif de ceux-ci. Il s'ensuit que l'apposition, par ces concurrents, de motifs à bandes sur des vêtements ne vise pas à fournir une indication relative à l'une des caractéristiques de ces produits."

Il ressort de cette décision que la Cour a expressément retenu que la contrefaçon pouvait résulter de l'usage d'un "simple" décor dès lors qu'il en résultait, en raison de sa proximité avec une marque enregistrée, un risque de confusion dans l'esprit du public pertinent et/ou une atteinte à la marque renommée, s'il résultait de l'usage de ce décor un risque de lien avec la marque dans l'esprit des consommateurs.

Il n'est fait état d'aucune décision d'une juridiction interne s'écartant significativement de ces principes, y compris la décision rendue par le tribunal de Bologne (pièce ZV FRANCE no13) qui, au vu des circonstances de l'affaire, a écarté tout risque de confusion résultant de l'usage d'un décor à deux bandes sur le côté d'une chaussure, comme de lien aux fins de tirer partie de la renommée des marques ADIDAS.

La demande aux fins de transmission d'une question préjudicielle sera donc rejetée.

2o) Sur la contrefaçon des marques figuratives no 003517588, no 003517661 et no1280280:

La société ADIDAS AG soutient que l'apposition sur des vêtements de type sportif de deux bandes parallèles reprend sans aucune nécessité technique, commerciale ou esthétique, la géométrie, les proportions et le contraste propres aux marques ADIDAS, générant ainsi un risque évident de confusion dans l'esprit des consommateurs. Elle ajoute que ce risque est d'autant plus élevé du fait de la notoriété des marques ADIDAS et réfute l'argument selon lequel l'apposition du signe litigieux serait faite à des fins exclusivement décoratives.

La société ZV FRANCE réplique que l'utilisation de deux bandes répond à un objectif purement ornemental et ne constitue en aucun cas une utilisation à titre de marque des signes de la société ADIDAS AG. Elle soutient également que la société ADIDAS ne peut pas s'arroger un monopole sur un genre figuratif reprenant les codes des galons militaires et appartenant au fonds commun de la mode. En tout état de cause, elle fait valoir qu'il n'existe aucun risque de confusion, des différences substantielles permettant au consommateur de distinguer les produits des sociétés ZV FRANCE de ceux des sociétés ADIDAS. Elle ajoute que la notoriété d'une marque ne suffit pas à établir automatiquement l'existence d'un risque de confusion dans l'esprit du consommateur.

Sur ce,

Selon l'article L.717-1 du code de la propriété intellectuelle, dans sa version alors applicable (antérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance no 2019-1169 du 13 novembre 2019), «Constitue une contrefaçon engageant la responsabilité civile de son auteur la violation des interdictions prévues aux articles 9, 10, 11et 13 du règlement (CE) 40/94 du Conseil du 20 décembre 1993 sur la marque communautaire ».

Le règlement (CE) 40/94 du Conseil du 20 décembre 1993 sur la marque communautaire a été codifié à droit constant par le règlement(CE) 207/2009 du Conseil du 26 février 2009 sur la marque communautaire, puis par le règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil du 14 juin 2017 sur la marque de l'Union européenne. Aux termes de l'article 9 § 1 et 2, de ce texte :

"1. L'enregistrement d'une marque de l'Union européenne confère à son titulaire un droit exclusif.

2. Sans préjudice des droits des titulaires acquis avant la date de dépôt ou la date de priorité d'une marque de l'Union européenne, le titulaire de cette marque de l'Union européenne est habilité à interdire à tout tiers, en l'absence de son consentement, de faire usage dans la vie des affaires d'un signe pour des produits ou services lorsque : (...)

b) ce signe est identique ou similaire à la marque de l'Union européenne et est utilisé pour des produits ou services identiques ou similaires aux produits ou services pour lesquels la marque de l'Union européenne est enregistrée, s'il existe un risque de confusion dans l'esprit du public; le risque de confusion comprend le risque d'association entre le signe et la marque ;"

Ces dispositions sont équivalentes à celles de l'article 5 § 1 de la directive 2008/95/CE du 22 octobre 2008, qui a codifié la directive 89/104/CEE du 21 décembre 1988 rapprochant les législations des Etats membres sur les marques, et dont l'article L.713-3 du code de la propriété intellectuelle ci-dessous réalise la transposition en droit interne.

Ainsi, selon l'article L.713-3 du code de la propriété intellectuelle, dans sa version antérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance no 2019-1169 du 13 novembre 2019, "Sont interdits, sauf autorisation du propriétaire, s'il peut en résulter un risque de confusion dans l'esprit du public:(...)

b) L'imitation d'une marque et l'usage d'une marque imitée, pour des produits ou services identiques ou similaires à ceux désignés dans l'enregistrement."

Interprétant les dispositions de l'article 5 § 1 de la Directive, la Cour de Justice des Communautés européennes a, par un arrêt du 22 juin 1999 ( Lloyd Schuhfabrik Meyer et Co. GmbH contre Klijsen Handel BV, Aff. C-342/97), dit pour doit que :

"17 Selon la jurisprudence de la Cour, constitue un risque de confusion au sens de l'article 5, paragraphe 1, sous b), de la directive le risque que le public puisse croire que les produits ou services en cause proviennent de la même entreprise ou, le cas échéant, d'entreprises liées économiquement (voir, en ce sens, arrêts SABEL, précité, points 16 à 18, et du 29 septembre 1998, Canon, C-39/97, Rec. p. I-5507, point 29). Il découle du libellé même de l'article 5, paragraphe 1, sous b), que la notion de risque d'association n'est pas une alternative à la notion de risque de confusion, mais sert à en préciser l'étendue (voir, en ce sens, arrêt SABEL, précité, points 18 et 19).

18 Selon cette même jurisprudence, l'existence d'un risque de confusion dans l'esprit du public doit être appréciée globalement en tenant compte de tous les facteurs pertinents du cas d'espèce (voir, en ce sens, arrêt SABEL, précité, point 22).

19 Cette appréciation globale implique une certaine interdépendance entre les facteurs pris en compte, et notamment la similitude des marques et celle des produits ou services couverts. Ainsi, un faible degré de similitude entre les produits ou services couverts peut être compensé par un degré élevé de similitude entre les marques, et inversement. L'interdépendance entre ces facteurs trouve en effet expression au dixième considérant de la directive, selon lequel il est indispensable d'interpréter la notion de similitude en relation avec le risque de confusion dont l'appréciation, quant à elle, dépend notamment de la connaissance de la marque sur le marché et du degré de similitude entre la marque et le signe et entre les produits ou services désignés (voir arrêt Canon, précité, point 17).

20 Par ailleurs, comme le risque de confusion est d'autant plus élevé que le caractère distinctif de la marque antérieure s'avère important (arrêt SABEL, précité, point 24), les marques qui ont un caractère distinctif élevé, soit intrinsèquement, soit en raison de la connaissance de celles-ci sur le marché, jouissent d'une protection plus étendue que celles dont le caractère distinctif est moindre (voir arrêt Canon, précité, point 18).

21 Dès lors, aux fins de l'article 5, paragraphe 1, sous b), de la directive, il peut exister un risque de confusion, malgré un faible degré de similitude entre les marques, lorsque la similitude des produits ou services couverts par celles-ci est grande et que le caractère distinctif de la marque antérieure est fort (voir, en ce sens, arrêt Canon, précité, point 19).

22 Pour déterminer le caractère distinctif d'une marque et, partant, évaluer si elle a un caractère distinctif élevé, la juridiction nationale doit apprécier globalement l'aptitude plus ou moins grande de la marque à identifier les produits ou services pour lesquels elle a été enregistrée comme provenant d'une entreprise déterminée et donc à distinguer ces produits ou services de ceux d'autres entreprises (voir, en ce sens, arrêt du 4 mai 1999, Windsurfing Chiemsee, C-108/97 et C-109/97, non encore publié au Recueil, point 49).

23 Lors de cette appréciation, il convient de prendre en considération notamment les qualités intrinsèques de la marque, y compris le fait qu'elle est ou non dénuée de tout élément descriptif des produits ou services pour lesquels elle a été enregistrée, la part de marché détenue par la marque, l'intensité, l'étendue géographique et la durée de l'usage de cette marque, l'importance des investissements réalisés par l'entreprise pour la promouvoir, la proportion des milieux intéressés qui identifie les produits ou les services comme provenant d'une entreprise déterminée grâce à la marque ainsi que les déclarations de chambres de commerce et d'industrie ou d'autres associations professionnelles (voir arrêt Windsurfing Chiemsee, précité, point 51).

24 Il en découle qu'il ne saurait être indiqué de façon générale, par exemple en recourant à des pourcentages déterminés relatifs au degré de connaissance de la marque dans les milieux concernés, quand une marque a un caractère distinctif fort (voir, en ce sens, arrêt Windsurfing Chiemsee, précité, point 52).

25 En outre, l'appréciation globale du risque de confusion doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, auditive ou conceptuelle des marques en cause, être fondée sur l'impression d'ensemble produite par celles-ci, en tenant compte en particulier de leurs éléments distinctifs et dominants. En effet, il ressort du libellé de l'article 5, paragraphe 1, sous b), de la directive, aux termes duquel «... il existe, dans l'esprit du public, un risque de confusion...», que la perception des marques qu'a le consommateur moyen de la catégorie de produits ou services en cause joue un rôle déterminant dans l'appréciation globale du risque de confusion. Or, le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails (voir, en ce sens, arrêt SABEL, précité, point 23).

26 Aux fins de cette appréciation globale, le consommateur moyen de la catégorie de produits concernée est censé être normalement informé et raisonnablement attentif et avisé (voir, en ce sens, arrêt du 16 juillet 1998, Gut Springenheide et Tusky, C-210/96, Rec. p. I-4657, point 31). Cependant, il convient de tenir compte de la circonstance que le consommateur moyen n'a que rarement la possibilité de procéder à une comparaison directe des différentes marques mais doit se fier à l'image non parfaite qu'il en a gardée en mémoire. Il échet également de prendre en considération le fait que le niveau d'attention du consommateur moyen est susceptible de varier en fonction de la catégorie de produits ou services en cause.

27 Afin d'apprécier le degré de similitude existant entre les marques concernées, la juridiction nationale doit déterminer leur degré de similitude visuelle, auditive et conceptuelle et, le cas échéant, évaluer l'importance qu'il convient d'attacher à ces différents éléments, en tenant compte de la catégorie de produits ou services en cause et des conditions dans lesquelles ils sont commercialisés."

Sur la comparaison des produits et services :

Afin de déterminer si les produits et/ou services sont similaires, il y a lieu de tenir compte de tous les facteurs pertinents qui caractérisent le rapport entre les produits ou services. Ces facteurs incluent, en particulier, leur nature, leur destination, leur utilisation ainsi que leur caractère concurrent ou complémentaire.

Il est en l'occurrence constant que les marques concernées désignent les vêtements et chaussures et que de la même manière la société défenderesse produit des vêtements et des accessoires de mode. Les produits concernés sont donc, pour partie au moins, similaires.

Sur la comparaison des signes :

S'agissant de signes exclusivement figuratifs, la comparaison auditive des signes est impossible.

D'un point de vue visuel, les marques de la société ADIDAS sont constituées de trois bandes équidistantes, parallèles, de même longueur, de même largeur et d'une même couleur contrastante avec celle du vêtement sur lequel elles sont appliquées. Ces bandes sont apposées sur la partie latérale des manches d'une veste de sport ou les jambières d'un pantalon de sport.

Quant aux signes litigieux, ils consistent en deux bandes parallèles, de largeur légèrement différente et de couleurs légèrement différentes, pareillement appliquées sur la partie latérale des manches d'une veste ou les jambières d'un pantalon.

Même en prenant en compte le souvenir imparfait que laissent aux consommateurs les signes exclusivement figuratifs, la similitude visuelle entre les signes et les marques apparaît moyenne.

Les marques ADIDAS n'évoquent en outre aucun concept spécifique, tandis que les signes réalisés dans une matière incorporant du métal brillant et apposés sur les pantalons de la société ZV FRANCE, dont la jambière n'est pas terminée par un élastique aux fins de resserrer le pantalon sur la cheville, évoquent des galons militaires.

La même signification ne peut toutefois être attribuée aux signes figurant sur la veste, vu sa forme, non plus que sur le pantalon désormais référencé "pantalon poème".

Il s'en déduit que les signes sont conceptuellement distincts ou qu'aucune comparaison au plan intellectuel n'est possible.

Il convient d'en conclure que les signes en litige présentent une similarité, exclusivement visuelle, moyenne.

Cette similitude moyenne est toutefois compensée par la très grande notoriété des marques ADIDAS auprès du public pertinent français comme européen, en raison notamment de son exploitation massive depuis de nombreuses années.

Sur le public pertinent :

Le public pertinent est en l'occurrence constitué des acheteurs d'articles de mode d'un certain prix au vu du positionnement respectif des parties, en particulier celui de la société ZV FRANCE (pièce ZV FRANCE no2). Il s'agit d'un public particulièrement attentif aux tendances de la mode et sensible aux différences entre les produits proposés par les marques.

Il résulte de ces éléments, pris dans leur ensemble, que les différences entre les signes, même pour partie compensées par la relative similitude des produits concernés (les produits argués de contrefaçon n'étant pas des articles de sport) et la grande notoriété des marques dites "aux trois bandes" des sociétés ADIDAS, que tout risque que le public pertinent, dont l'attention est particulièrement élevée, identifie les produits marqués et ceux de la société ZV FRANCE comme provenant de la même entreprise ou d'entreprises économiquement liées, apparaît exclu.

De ce point de vue, le sondage versé aux débats par les sociétés ADIDAS, réalisé indépendamment de tous les facteurs concrets et pertinents propres au cas d'espèce, apparaît dépourvu de force probante du chef de l'appréciation du risque de confusion.

Les demandes fondées sur la contrefaçon et celles fondées sur les faits distincts de la contrefaçon seront donc rejetées.

3o) Sur l'atteinte aux marques renommées no 003517588, no 003517661 et no1280280 :

La société ADIDAS AG soutient que les marques de l'Union européenne jouissent d'une protection particulière du fait de leur renommée. Ainsi l'apposition par ZV FRANCE de deux bandes parallèles sur leurs vêtements évoquent les marques aux trois bandes de la société ADIDAS AG au sens des articles 9.2 c) du règlement sur les marques de l'Union Européenne et L.713-5 du code de la propriété intellectuelle, de sorte que le risque d'association est caractérisé.

La société ZV FRANCE réplique que l'article 9.2 c) du règlement sur les marques de l'Union Européenne pose comme condition l'existence d'un bénéfice indu tiré de la renommée de la marque et que la marque "Zadig et Voltaire" jouit d'une importante renommée dans le domaine des vêtements haut de gamme, de sorte qu'elle ne tire aucun profit indû de la renommée des marques ADIDAS.

Sur ce,

Le règlement (CE) 40/94 du Conseil du 20 décembre 1993 sur la marque communautaire a été codifié à droit constant par le règlement(CE) 207/2009 du Conseil du 26 février 2009 sur la marque communautaire, puis par le règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil du 14 juin 2017 sur la marque de l'Union européenne qui, aux termes de l'article 9 § 1 et 2, dispose que :

"2. Sans préjudice des droits des titulaires acquis avant la date de dépôt ou la date de priorité d'une marque de l'Union européenne, le titulaire de cette marque de l'Union européenne est habilité à interdire à tout tiers, en l'absence de son consentement, de faire usage dans la vie des affaires d'un signe pour des produits ou services lorsque : (...)

c) ce signe est identique ou similaire à la marque de l'Union européenne, indépendamment du fait que les produits ou services pour lesquels il est utilisé soient identiques, similaires ou non similaires à ceux pour lesquels la marque de l'Union européenne est enregistrée, lorsque celle-ci jouit d'une renommée dans l'Union et que l'usage de ce signe sans juste motif tire indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de la marque de l'Union européenne ou leur porte préjudice."

Ces dispositions sont équivalentes à celles de l'article 5 § 2 de la directive 2008/95/CE du 22 octobre 2008, qui a codifié la directive 89/104/CEE du 21 décembre 1988 rapprochant les législations des Etats membres sur les marques, et dont l'article L.713-5 du code de la propriété intellectuelle réalise la transposition en droit interne.

Ainsi, selon l'article L.713-5 du code de la propriété intellectuelle, dans sa version antérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance no 2019-1169 du 13 novembre 2019, "La reproduction ou l'imitation d'une marque jouissant d'une renommée pour des produits ou services non similaires à ceux désignés dans l'enregistrement engage la responsabilité civile de son auteur si elle est de nature à porter préjudice au propriétaire de la marque ou si cette reproduction ou imitation constitue une exploitation injustifiée de cette dernière.
Les dispositions de l'alinéa précédent sont applicables à la reproduction ou l'imitation d'une marque notoirement connue au sens de l'article 6 bis de la convention de Paris pour la protection de la propriété industrielle précitée."

Interprétant les dispositions de l'article 5 § 2 de la Directive, la Cour de Justice de l'Union européenne a, par un arrêt du 27 novembre 2008 (Intel Corporation Inc. Contre CPM United Kingdom Ltd, Aff. C-252/07), dit pour droit que :

"24 Il y a lieu de constater que les articles 4, paragraphe 4, sous a), et 5, paragraphe 2, de la directive sont libellés en des termes en substance identiques et visent à conférer la même protection aux marques renommées.

25 Partant, l'interprétation de l'article 5, paragraphe 2, de la directive donnée par la Cour dans l'arrêt Adidas-Salomon et Adidas Benelux, précité, vaut également pour l'article 4, paragraphe 4, sous a), de la directive (voir, en ce sens, arrêt du 9 janvier 2003, Davidoff, C-292/00, Rec. p. I-389, point 17).

Sur la protection conférée par l'article 4, paragraphe 4, sous a), de la directive

26 L'article 4, paragraphe 4, sous a), de la directive instaure, en faveur des marques renommées, une protection plus étendue que celle prévue au paragraphe 1 du même article. La condition spécifique de cette protection est constituée par un usage sans juste motif de la marque postérieure qui tire ou tirerait indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de la marque antérieure ou leur porte ou porterait préjudice (voir en ce sens, s'agissant de l'article 5, paragraphe 2, de la directive, arrêts Marca Mode, précité, point 36; Adidas-Salomon et Adidas Benelux, précité, point 27, ainsi que du 10 avril 2008, adidas et adidas Benelux, C-102/07, non encore publié au Recueil, point 40).

27 Les atteintes contre lesquelles l'article 4, paragraphe 4, sous a), de la directive assure ladite protection en faveur des marques renommées sont, premièrement, le préjudice porté au caractère distinctif de la marque antérieure, deuxièmement, le préjudice porté à la renommée de cette marque et, troisièmement, le profit indûment tiré du caractère distinctif ou de la renommée de ladite marque.

28 Un seul de ces trois types d'atteinte suffit pour que ladite disposition soit d'application.

29 S'agissant plus particulièrement du préjudice porté au caractère distinctif de la marque antérieure, également désigné sous les termes de «dilution», de «grignotage» ou de «brouillage», ce préjudice est constitué dès lors que se trouve affaiblie l'aptitude de cette marque à identifier les produits ou les services pour lesquels elle est enregistrée et utilisée comme provenant du titulaire de ladite marque, l'usage de la marque postérieure entraînant une dispersion de l'identité de la marque antérieure et de son emprise sur l'esprit du public. Tel est notamment le cas lorsque la marque antérieure, qui suscitait une association immédiate avec les produits ou les services pour lesquels elle est enregistrée, n'est plus en mesure de le faire.

30 Les atteintes visées à l'article 4, paragraphe 4, sous a), de la directive, lorsqu'elles se produisent, sont la conséquence d'un certain degré de similitude entre les marques antérieure et postérieure, en raison duquel le public concerné effectue un rapprochement entre ces deux marques, c'est-à-dire établit un lien entre celles-ci, alors même qu'il ne les confond pas (voir, s'agissant de l'article 5, paragraphe 2, de la directive, arrêts précités General Motors, point 23; Adidas-Salomon et Adidas Benelux, point 29, ainsi que adidas et adidas Benelux, point 41).

31 À défaut d'un tel lien dans l'esprit du public, l'usage de la marque postérieure n'est pas susceptible de tirer indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de la marque antérieure, ou de leur porter préjudice.

32 Toutefois, l'existence d'un tel lien ne saurait suffire, à elle seule, à conclure à l'existence de l'une des atteintes visées à l'article 4, paragraphe 4, sous a), de la directive, lesquelles constituent, ainsi qu'il a été relevé au point 26 du présent arrêt, la condition spécifique de la protection des marques renommées prévue par cette disposition.

Sur le public pertinent

33 Le public à prendre en considération afin de déterminer si l'enregistrement de la marque postérieure est susceptible d'être annulé en application de l'article 4, paragraphe 4, sous a), de la directive varie en fonction du type d'atteinte allégué par le titulaire de la marque antérieure.

34 En effet, d'une part, tant le caractère distinctif que la renommée d'une marque doivent être appréciés par rapport à la perception qu'en a le public pertinent, qui est constitué par le consommateur moyen des produits ou des services pour lesquels cette marque est enregistrée, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé (s'agissant du caractère distinctif, voir arrêt du 12 février 2004, Koninklijke KPN Nederland, C-363/99, Rec. p. I-1619, point 34; s'agissant de la renommée, voir, en ce sens, arrêt General Motors, précité, point 24).

35 Partant, l'existence des atteintes constituées par le préjudice porté au caractère distinctif ou à la renommée de la marque antérieure doit être appréciée dans le chef du consommateur moyen des produits ou des services pour lesquels cette marque est enregistrée, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé.

36 D'autre part, s'agissant de l'atteinte constituée par le profit indûment tiré du caractère distinctif ou de la renommée de la marque antérieure, dans la mesure où ce qui est prohibé est l'avantage tiré de cette marque par le titulaire de la marque postérieure, l'existence de ladite atteinte doit être appréciée dans le chef du consommateur moyen des produits ou des services pour lesquels la marque postérieure est enregistrée, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé.

Sur la preuve

37 Aux fins de bénéficier de la protection instaurée par l'article 4, paragraphe 4, sous a), de la directive, le titulaire de la marque antérieure doit rapporter la preuve que l'usage de la marque postérieure «tirerait indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de la marque antérieure ou qu'il leur porterait préjudice».

38 À cette fin, le titulaire de la marque antérieure n'est pas tenu de démontrer l'existence d'une atteinte effective et actuelle à sa marque au sens de l'article 4, paragraphe 4, sous a), de la directive. En effet, lorsqu'il est prévisible qu'une telle atteinte découlera de l'usage que le titulaire de la marque postérieure peut être amené à faire de sa marque, le titulaire de la marque antérieure ne saurait être obligé d'en attendre la réalisation effective pour pouvoir faire interdire ledit usage.

Le titulaire de la marque antérieure doit toutefois établir l'existence d'éléments permettant de conclure à un risque sérieux qu'une telle atteinte se produise dans le futur.

39 Lorsque le titulaire de la marque antérieure est parvenu à démontrer l'existence soit d'une atteinte effective et actuelle à sa marque au sens de l'article 4, paragraphe 4, sous a), de la directive, soit, à défaut, d'un risque sérieux qu'une telle atteinte se produise dans le futur, il appartient au titulaire de la marque postérieure d'établir que l'usage de cette marque a un juste motif.

Sur la première question, sous i), et la deuxième question

40 Par sa première question, sous i), et par sa deuxième question, la juridiction de renvoi demande, en substance, quels sont les critères pertinents aux fins d'apprécier s'il existe un lien, au sens de l'arrêt Adidas-Salomon et Adidas Benelux, précité (ci-après un «lien»), entre la marque renommée antérieure et la marque postérieure dont l'annulation est demandée.

41 L'existence d'un tel lien doit être appréciée globalement, en tenant compte de tous les facteurs pertinents du cas d'espèce (voir, s'agissant de l'article 5, paragraphe 2, de la directive, arrêts précités Adidas-Salomon et Adidas Benelux, point 30, ainsi que adidas et adidas Benelux, point 42).

42 Parmi ces facteurs peuvent être cités :
- le degré de similitude entre les marques en conflit ;
- la nature des produits ou des services pour lesquels les marques en conflit sont respectivement enregistrées, y compris le degré de proximité ou de dissemblance de ces produits ou services ainsi que le public concerné ;
- l'intensité de la renommée de la marque antérieure ;
- le degré de caractère distinctif, intrinsèque ou acquis par l'usage, de la marque antérieure;
- l'existence d'un risque de confusion dans l'esprit du public.

43 À cet égard, il convient d'apporter les précisions suivantes.

44 S'agissant du degré de similitude entre les marques en conflit, plus celles-ci sont similaires, plus il est vraisemblable que la marque postérieure évoquera, dans l'esprit du public pertinent, la marque antérieure renommée. Tel est le cas a fortiori lorsque lesdites marques sont identiques.

45 Toutefois, l'identité entre les marques en conflit et, a fortiori, leur simple similitude ne suffisent pas à conclure à l'existence d'un lien entre ces marques.

46 En effet, il se peut que les marques en conflit soient enregistrées respectivement pour des produits ou des services pour lesquels les publics concernés ne se chevauchent pas.

47 Il convient par ailleurs de rappeler que la renommée d'une marque s'apprécie par rapport au public concerné par les produits ou les services pour lesquels cette marque a été enregistrée. Or, il peut s'agir soit du grand public, soit d'un public plus spécialisé (voir arrêt General Motors, précité, point 24).

48 Il ne saurait donc être exclu que le public concerné par les produits ou les services pour lesquels la marque antérieure a été enregistrée soit tout à fait distinct de celui concerné par les produits ou les services pour lesquels la marque postérieure a été enregistrée et que la marque antérieure, quoique renommée, soit inconnue du public visé par la marque postérieure. En pareil cas, le public visé par chacune des deux marques peut n'être jamais confronté à l'autre marque, de sorte qu'il n'établira aucun lien entre ces marques.

49 En outre, même si les publics concernés par les produits ou les services pour lesquels les marques en conflit sont respectivement enregistrées sont les mêmes ou se chevauchent dans une certaine mesure, lesdits produits ou services peuvent être si dissemblables que la marque postérieure sera insusceptible d'évoquer la marque antérieure dans l'esprit du public pertinent.

50 Dès lors, la nature des produits ou des services pour lesquels les marques en conflit ont été respectivement enregistrées doit être prise en considération aux fins d'apprécier l'existence d'un lien entre ces marques.

51 Il convient également de souligner que certaines marques peuvent avoir acquis une renommée telle qu'elle va au-delà du public concerné par les produits ou les services pour lesquelles ces marques ont été enregistrées.

52 Dans une telle hypothèse, il est possible que le public concerné par les produits ou les services pour lesquels la marque postérieure est enregistrée effectue un rapprochement entre les marques en conflit alors même qu'il serait tout à fait distinct du public concerné par les produits ou les services pour lesquels la marque antérieure a été enregistrée.

53 Dès lors, aux fins d'apprécier l'existence d'un lien entre les marques en conflit, il peut être nécessaire de prendre en considération l'intensité de la renommée de la marque antérieure, afin de déterminer si cette renommée s'étend au-delà du public visé par cette marque.

54 De même, plus la marque antérieure présente un caractère distinctif fort, qu'il soit intrinsèque ou acquis par l'usage qui a été fait de cette marque, plus il est vraisemblable que, confronté à une marque postérieure identique ou similaire, le public pertinent évoque ladite marque antérieure.

55 Dès lors, aux fins d'apprécier l'existence d'un lien entre les marques en conflit, il convient de prendre en considération le degré de caractère distinctif de la marque antérieure.

56 À cet égard, dans la mesure où l'aptitude d'une marque à identifier les produits ou les services pour lesquels elle est enregistrée et utilisée comme provenant du titulaire de ladite marque et, partant, son caractère distinctif sont d'autant plus forts que cette marque est unique ? c'est-à-dire, s'agissant d'une marque verbale telle qu'INTEL, que le mot dont elle est constituée n'a été utilisé par qui que ce soit pour quelque produit ou service que ce soit hormis par le titulaire de cette marque pour les produits et services qu'il commercialise ?, il convient de vérifier si la marque antérieure est unique ou essentiellement unique.

57 Enfin, un lien entre les marques en conflit est nécessairement établi en cas de risque de confusion, c'est-à-dire lorsque le public pertinent croit ou est susceptible de croire que les produits ou services commercialisés sous la marque antérieure et ceux commercialisés sous la marque postérieure proviennent de la même entreprise ou d'entreprises économiquement liées [voir en ce sens, notamment, arrêts du 22 juin 1999, Lloyd Schuhfabrik Meyer, C-342/97, Rec. p. I-3819, point 17, et du 12 juin 2008, O2 Holdings et O2 (UK), C-533/06, non encore publié au Recueil, point 59].

58 Toutefois, ainsi qu'il ressort des points 27 à 31 de l'arrêt Adidas-Salomon et Adidas Benelux, précité, la mise en ?uvre de la protection instaurée par l'article 4, paragraphe 4, sous a), de la directive n'exige pas l'existence d'un risque de confusion.

59 La juridiction de renvoi demande plus particulièrement si les circonstances énumérées aux points a) à d) de la première question préjudicielle suffisent à conclure à l'existence d'un lien entre les marques en conflit.

60 S'agissant de la circonstance visée au point d) de cette question, le fait que la marque postérieure évoque la marque antérieure dans l'esprit du consommateur moyen, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé, équivaut à l'existence d'un tel lien."

La renommée des marques de la sociétés ADIDAS AG n'est pas contestée et résulte amplement des pièces produites aux débats. Elle sera donc retenue.

Ainsi qu'il a été vu, la ressemblance entre ces marques et les signes est exclusivement visuelle et apparaît moyenne.

Cette moyenne similitude est néanmoins compensée par la particulière renommée des marques "aux trois bandes" des sociétés ADIDAS et leur forte distinctivité acquise par l'usage intensif qui en a été fait, ainsi que par la similitude des produits concernés (des vêtements), de sorte que le risque que les deux bandes contrastantes sur toute la longueur d'une jambière ou d'une manche, utilisées par la société ZV FRANCE, évoquent, auprès des consommateurs, les trois bandes pareillement positionnées sur les vêtements de la société ADIDAS AG, apparaît évident.

L'existence d'un tel risque de lien est d'ailleurs corroborée par les pièces versées aux débats par la société ZV FRANCE elle-même : "Au même titre que la jupe en jean, le pantalon à bandes signe un come-back remarqué cette saison, dans sa version sporstwear en hommage au fameux jogging trois bandes d'Adidas ou sa version smoking à bandes latérales contrastées." (Extrait d'un dossier paru dans Le Figaro Madame du 30/01/2017 - pièce ZV FRANCE no6), l'auteur de cet article, dont l'opinion apparaît révélatrice de la perception du public pertinent, faisant un lien - sans faire aucune confusion - entre certains "décors" constitués de deux bandes latérales contrastantes appliquées sur des jambières et des manches, et les marques de la société ADIDAS AG.

Il en résulte l'existence d'une atteinte à la renommée des marques ADIDAS (l'usage des bandes empruntant à la renommée des marques leur association immédiate au sport), ainsi qu'à leur caractère distinctif (un tel usage des bandes dilue la distinctivité des marques de la société ADIDAS AG portant ainsi atteinte à ses investissements publicitaires, peu important à cet égard le positionnement haut de gamme de la défenderesse), tandis qu'aucun juste motif n'est expressément invoqué par la société ZV FRANCE, de nombreux autres opérateurs économiques étant au demeurant parvenus à s'inscrire dans la tendance de la mode en s'éloignant suffisamment des marques de la demanderesse.

L'atteinte portée à la renommée des marques ADIDAS par l'usage des signes litigieux étant établie, elle justifie les mesures d'interdiction sollicitées qui seront prononcées selon les modalités précisées au dispositif.

La demande indemnitaire présentée par la société ADIDAS apparaît de la même manière fondée. L'atteinte à la fonction de publicité de la marque et aux investissements de l'entreprise dans ce domaine, justifie la condamnation de la société ZV FRANCE au paiement de la somme forfaitaire de 300.000 euros.

Ces mesures réparant suffisamment le préjudice subi, la demande de publication de la présente décision sera rejetée.

Partie perdante au sens de l'article 696 du code de procédure civile, la société ZV FRANCE sera condamnée aux dépens, ainsi qu'à payer à la société ADIDAS AG la somme de 50.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Nécessaire et compatible avec la nature de l'affaire, l'exécution provisoire sera ordonnée, sauf en ce qui concerne la destruction des produits, compte tenu de son caractère irréversible.

PAR CES MOTIFS,

Statuant publiquement par mise à disposition au greffe, contradictoirement et en premier ressort,

Le tribunal,

DIT n'y avoir lieu à transmission d'une question préjudicielle à la Cour de justice de l'Union européenne ;

DIT qu'en détenant et distribuant des pantalons et vestes revêtus de deux bandes contrastantes le long des jambes et des manches notamment sous les références "sweat-shirt cosy néo deluxe", "pantalon porte" et "pantalon poème deluxe", désormais appelé "pantalon poème", la société ZV FRANCE a porté atteinte à la renommée ainsi qu'au caractère distinctif des marques de l'Union européenne no 003517588 et no003517661 et française no 1 280 280, dont la société ADIDAS AG est propriétaire ;

FAIT DÉFENSE à la société ZV FRANCE de poursuivre ces agissements sur l'ensemble du territoire de l'Union européenne, à l'exception de l'Allemagne, et ce, sous astreinte de 150 ? par infraction constatée prenant effet à l'expiration d'un délai de deux mois suivant la signification de la présente décision et pendant six mois ;

ORDONNE, pour l'ensemble du territoire de l'Union européenne à l'exception de l'Allemagne, le rappel des circuits commerciaux, aux frais de la société ZV FRANCE, de tous les produits litigieux, et ce, sous astreinte de 500 ? par jour de retard prenant effet à l'expiration d'un délai de deux mois suivant la signification de la présente décision et pendant six mois ;

SE RESERVE la liquidation des astreintes ;

ORDONNE, une fois la présente décision passée en force de chose jugée, la destruction de l'ensemble des produits litigieux, aux frais de la société ZV FRANCE, sous contrôle d'un huissier de justice ;

CONDAMNE la société ZV FRANCE à payer à la société ADIDAS AG la somme de 300.000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation de l'atteinte portée au caractère distinctif de ses marques ;

REJETTE les demandes fondées sur la contrefaçon des marques, sur les actes distincts de la contrefaçon, ainsi que les demandes de remboursement des frais de réalisation de sondages et de publication de la présente décision, formulées par les sociétés ADIDAS AG et ADIDAS FRANCE ;

CONDAMNE la société ZV FRANCE aux dépens et autorise Maître Emmanuel Larere, avocat, à recouvrer directement ceux dont il aurait fait l'avance sans avoir reçu provision conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la société ZV FRANCE à payer à la société ADIDAS AG la somme de 50.000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

ORDONNE l'exécution provisoire de la présente décision, à l'exception de la mesure de destruction des produits de la société ZV FRANCE.

Fait et jugé à Paris le 04 juin 2020.

La GreffièreLa Présidente


Synthèse
Tribunal : Tribunal de grande instance de Paris
Formation : Ct0196
Numéro d'arrêt : 17/14422
Date de la décision : 04/06/2020

Analyses

risque de lien avec une marque de renommée / contrefaçon de marque


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.grande.instance.paris;arret;2020-06-04;17.14422 ?
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