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04/07/2007 | FRANCE | N°05/06005

France | France, Tribunal de grande instance de Paris, Ct0196, 04 juillet 2007, 05/06005


T R I B U N A L
D E GRANDE
I N S T A N C E
D E P A R I S

3ème chambre 3ème section

No RG :
05 / 06005

No MINUTE :

Assignation du :
07 Avril 2005

JUGEMENT
rendu le 04 Juillet 2007

DEMANDERESSE

S.A.R.L. NEFERTITI PRODUCTION
97 rue de JAVEL
75015 PARIS

représentée par Me Basile ADER, avocat au barreau de PARIS, vestiaire T. 1111

DÉFENDERESSES

S.A.R.L. DES FILMS A. CHAMPEAUX " FAC TELEVISION " EQUATOR EDITIONS
Le Prisme, CP 76
Parc Innovation Bretagne Sud
56038 VANNES r>
représentée par Me FABRICE GOGUEL NYEGAARD, avocat au barreau de PARIS, vestiaire P0111

Madame Françoise C... DE D...
...
83740 LA CADIERE D A...

T R I B U N A L
D E GRANDE
I N S T A N C E
D E P A R I S

3ème chambre 3ème section

No RG :
05 / 06005

No MINUTE :

Assignation du :
07 Avril 2005

JUGEMENT
rendu le 04 Juillet 2007

DEMANDERESSE

S.A.R.L. NEFERTITI PRODUCTION
97 rue de JAVEL
75015 PARIS

représentée par Me Basile ADER, avocat au barreau de PARIS, vestiaire T. 1111

DÉFENDERESSES

S.A.R.L. DES FILMS A. CHAMPEAUX " FAC TELEVISION " EQUATOR EDITIONS
Le Prisme, CP 76
Parc Innovation Bretagne Sud
56038 VANNES

représentée par Me FABRICE GOGUEL NYEGAARD, avocat au barreau de PARIS, vestiaire P0111

Madame Françoise C... DE D...
...
83740 LA CADIERE D AZUR

représentée par Me Gauthier MOREUIL, avocat au barreau de DE PARIS, vestiaire M 804

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Elisabeth BELFORT, Vice-Président, signataire de la décision
Agnès THAUNAT, Vice-Président
Michèle PICARD, Vice-Président,

assistée de Marie-Aline PIGNOLET, Greffier, lors des débats et de Mme BELLON lors du prononcé, signataire de la décision

DEBATS

A l'audience du 22 Mai 2007
tenue en audience publique

JUGEMENT

Prononcé en audience publique
Contradictoire
en premier ressort

I-RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE :

Monsieur Bernard C..., décédé en 1994, était un navigateur célèbre notamment pour avoir effectué un tour du monde en solitaire sur son voiler JOSHUA dans le cadre de la course du Golden Globe en 1968-1969. Lors de ce périple il a filmé son tour du monde avec une caméra 16mm et enregistré ses impressions sur cassette audio.

Madame Françoise C... DE D... est la première épouse du navigateur Bernard C.... Elle a réalisé et produit un film intitulé " La mer " d'une durée de 53 minutes relatif au tour du monde de son mari. Elle diffuse ce film depuis 1970 sous son nom lors de projections publiques dans le cadre de conférences.

Les droits d'exploitation et de réalisation d'un film intitulé " Voyage au bout de la mer " à partir des images qu'il avait prises pendant son tour du monde ont été cédés par Bernard C... à la société TELEHACHETTE pour une durée de quinze ans. Le 28 mars 1990 Monsieur C... était autorisé à récupérer ses films originaux et il les cédait alors à la société italienne INCONTRI NAUTICI pour une nouvelle durée de quinze ans expirant le 18 mars 2005.A son décès le 16 juin 1994 Monsieur C... laissait pour légataire universel son fils Stéphan C... qui recueillait le fonds d'images de son père et notamment les droits du contrat passé avec la société INCONTRI NAUTICI. Le 10 mai 2004 cette dernière cédait, avec l'accord de Stéphan C..., à la société FAC TELEVISION le droit de réaliser un DVD intitulé " Bernard C...-Itinéraire d'un marin de légende " avec les images du tour du monde.A l'issue du contrat, le 18 mars 2005 Monsieur Stéphan C... cédait le droits à la société FAC TELEVISION jusqu'au 31 mars 2025. Dans cette convention étaient également cédés les droits d'exploitation du fond C... définis dans le contrat, soit les enregistrements audio, cinématographique, vidéo et photographiques réalisés par Bernard C....

La société NEFERTITI Production est une société de production audiovisuelle créée en 1986 spécialisée dans le domaine maritime et notamment la voile.

Au cours de l'année 2000, Françoise C... proposait à la société NEFERTITI de diffuser deux films documentaires intitulés " La mer " et " Bateau et capitaine " qu'elle avait scénarisés, réalisés et produits.C'est ainsi qu'un contrat a été signé le 7 juin 2000 par lequel Madame C... confiait pour une durée de cinq ans à la société NEFERTITI le mandat d'exploiter ces deux films pour le monde entier à titre exclusif pour les exploitations primaires et dérivées et à titre non exclusif pour les exploitations secondaires.

Puis par contrat du 27 avril 2004 Madame C... cédait à titre exclusif à la société NEFERTITI l'ensemble des droits patrimoniaux sur le film " La mer " pour le monde entier et pour la durée légale de protection des droits d'auteurs. Le DVD à éditer devait comporter également des bonus tels qu'une interview de Madame C... et des interviews de marins. Il y a lieu à ce stade de constater que l'exemplaire de ce contrat détenu et produit par Madame C... est daté du 27 avril 2004 alors que celui détenu et produit par la société NEFERTITI est daté du 2 avril 2004. Le tribunal retiendra la date du 27 avril 2004 qui apparaît la plus vraisemblable puisqu'elle correspond à celle d'un Protocole transactionnel signé par les parties et concernant le contrat de cession précédant. En tout état de cause il n'y a pas de contestation sur le contenu du contrat.

La société NEFERTITI constatait peu de temps après que le DVD publié le 21 mai 2004 intitulé " Bernard C..., Itinéraire d'un marin de légende " dans la collection " Aventures maritimes " par EQUATOR EDITIONS, enseigne de la société FAC TELEVISION, comprenait un film intitulé " La longue route " qui reproduisait à l'identique plusieurs séquences du film " La mer ". Un procès verbal de constat était dressé le 30 mars 2005 dont il ressortait que le DVD était offert à la vente sur le site internet de la société FAC TELEVISION qui le présentait comme constitué " des images originales tournées par Bernard C... durant son tour du monde mythique de 1968 ".

C'est ainsi que la société NEFERTITI faisait assigner la société des FILMS A. CHAMPEAUX EQUATOR EDITIONS (ci-après FAC TELEVISION) et Madame Françoise C... DE D... par actes d'huissier délivrés les 11 avril 2005.

Dans ses dernières conclusions signifiées le 13 mars 2007 la société NEFERTITI demande au tribunal de constater que la société FAC TELEVISION a commis des actes de contrefaçon et de parasitisme, de constater que la clause résolutoire de l'article 11 du contrat du 27 avril 2004 n'a pas été mise en oeuvre de bonne foi par Madame C... et en conséquence que le contrat n'est pas résolu, de constater que Madame C... a manqué à son obligation de bonne foi et lui doit garantie du paiement de tout préjudice en ce compris les frais irrépétibles et les dépens et les remboursements de toutes les sommes TTC que NEFERTITI lui a versées en exécution du contrat du 27 avril 2004, de prononcer la résiliation du contrat de cession de droits du 2 avril 2004 aux torts exclusifs de Madame C..., à titre subsidiaire si le tribunal constatait l'exécution de la condition résolutoire en application de l'article 11 du contrat de dire et juger que le contrat est résolu aux torts exclusifs de Madame C..., de dire que le contrat n'est pas résolu rétroactivement mais à compter du 4 novembre 2005, à titre infiniment subsidiaire dire et juger que Madame C... doit, nonobstant la résolution rétroactive du contrat du 27 avril 2004 garantie à NEFERTITI contre l'éviction de son propre fait, en toute hypothèse constater que Madame C... doit garantie à la société NEFERTITI du paiement de tout préjudice, ordonner le remboursement par Madame C... de l'intégralité des sommes TTC que NEFERTITI lui a versées en exécution du contrat du 2 avril 2004, faire interdiction à la société FAC TELEVISION d'utiliser les séquences audiovisuelles du film " La mer " dont elle est titulaire exclusif sous astreinte, condamner solidairement les défendeurs à lui payer la somme de 40. 000 euros tous préjudices confondus, ordonner la publication du jugement, ordonner l'exécution provisoire du jugement et les condamner solidairement au paiement de la somme de 5. 000 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Madame Françoise C... DE D... a signifié ses dernières conclusions le 19 février 2007. Elle demande au tribunal à titre principal de déclarer irrecevable l'ensemble des demandes de la société NEFERTITI à son encontre, à titre subsidiaire de la débouter de l'ensemble de ses demandes, à titre reconventionnel de dire que le contrat du 2 avril 2004 a été valablement résolu de plein droit par Madame C... par courrier du 28 octobre 2005, de dire que cette résolution est intervenue aux torts exclusifs de la société NEFERTITI, de dire que celle ci a opposé une résistance abusive et injustifiée à la restitution de l'ensemble des éléments nécessaires à l'exploitation et à la conservation du film " La mer ", en conséquence la condamner à lui payer la somme de 55. 000 euros ou à tout le moins de 52. 500 euros à titre de dommages et intérêts, d'ordonner la compensation de cette somme avec le montant total des sommes versées par la société NEFERTITI dans le cadre de l'exécution du contrat, d'ordonner à la société NEFERTITI de restituer à ses frais l'ensemble des éléments nécessaires à l'exploitation et à la conservation du film " La mer ", soit le master original et l'ensemble des copies réalisées sous astreinte, au surplus dire que la société NEFERTITI en introduisant la présente instance a commis un abus de droit, de dire que cet abus lui a causé un préjudice indéniable et en conséquence la condamner à lui payer la somme de 10. 000 euros pour procédure abusive, la condamner à lui payer la somme de 5. 000 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile et ordonner l'exécution provisoire de la décision.

La société FAC TELEVISION a signifié ses dernières conclusions le 4 octobre 2006. Elle demande au tribunal de dire que la société NEFERTITI est dépourvue de qualité à agir en contrefaçon à défaut de disposer des droits sur les séquences prétendument contrefaites et d'en justifier, en conséquence de la déclarer irrecevable en son action en contrefaçon, de dire qu'elle est mal fondée en son action en agissements parasitaires en conséquence l'en débouter, à titre reconventionnel de la condamner à lui payer la somme de 10. 000 euros en réparation des préjudices liés à la désorganisation de la société FAC TELEVISION, la somme de 49. 681,13 euros en réparation des préjudices commerciaux, d'ordonner la publication du jugement dans le quotidien " OUEST FRANCE " et les magazines " VOILES ET VOILIERS " et " LOISIRS NAUTIQUES ", d'ordonner l'exécution provisoire de la décision et de la condamner au paiement de la somme de 5. 000 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

II-SUR CE :

* Sur la recevabilité de la société NEFERTITI :

La société FAC TELEVISION fait valoir que la société NEFERTITI est irrecevable pour défaut de qualité à agir en contrefaçon en l'absence de droits sur l'oeuvre de Bernard C....

Le tribunal relève que la société NEFERTITI a acquis les droits patrimoniaux sur le film de Françoise C... intitulé " La mer " suivant contrat conclu entre les parties le 27 avril 2004. Il en résulte que la société NEFERTITI a bien qualité à intenter une action en contrefaçon de ses droits patrimoniaux sur ce film.

Madame Françoise C... de D... soulève également l'irrecevabilité des demandes de la société NEFERTITI à son encontre du fait de la résolution du contrat aux torts de la société NEFERTITI du contrat du 27 avril 2004.

Le tribunal note que la société NEFERTITI conteste la résolution du contrat et éventuellement sa rétroactivité. Cet argument ressort en conséquence du bien fondé des demandes et non de leur recevabilité.

* Sur la contrefaçon :

La société NEFERTITI expose qu'elle a régulièrement acquis les droits de Madame C..., ce qui n'est pas contesté, la question de la résolution postérieure du contrat étant examinée à part. Dès lors elle estime que la société FAC TELEVISION a commis des actes de contrefaçon en reprenant des images et séquences de ce film.

La société FAC TELEVISION soutient qu'elle ne peut avoir commis d'actes de contrefaçon car elle a régulièrement acquis les droits sur les films de Bernard C... et elle justifie d'une chaîne de cessions.

Il ressort des pièces versées aux débats, soit le contrat passé entre Bernard C... et la société TELEHACHETTE le 19 mai 1970, le contrat passé entre Bernard C... et la société INCONTRI NAUTICI le 18 mars 1990 et enfin le contrat tripartite passé entre Stephan C..., la société INCONTRI NAUTICI et la société FAC TELEVISION le 10 mai 2004 que cette dernière détient les droits patrimoniaux sur l'oeuvre de Bernard C....

Elle ne peut donc être responsable d'actes de contrefaçon sur les images de Bernard C....

Cependant, le tribunal constate que certaines séquences du film de Bernard C..., " La longue route " se retrouvent effectivement dans le film de Françoise C... " La mer ". Il apparaît au vu de l'explication donnée par les parties en présence que Madame C..., après le périple de son mari, a récupéré à la demande de celui-ci les pellicules et les bandes sonores qu'il avait tournées et enregistrées et qu'elles les a partiellement intégrées avec son autorisation à son propre film en y ajoutant par ailleurs d'autres séquences tournées par elle.L'autorisation de Bernard C... est attestée par des courriers qu'il envoyait à son épouse et qui sont dénués d'ambiguïté.

Il en résulte que les deux films en présence comportent bien des séquences identiques tournées par Bernard C... mais sans que cela constitue une contrefaçon, Bernard C... n'ayant donné aucune exclusivité d'exploitation à son épouse.

Outre les images tournées par Bernard C... la société NEFERTITI fait valoir que le film " La longue route " reprend également des images tournées par Françoise C... et dont elle est le titulaire exclusif. Cela serait particulièrement flagrant pour certaines scènes où apparaît Bernard C... et qu'il n'aurait donc pu prendre lui-même, de même que pour certaines séquences où le cadrage et les plans changent dans une même séquence.

La société NEFERTITI ne précise pas quelles sont exactement ces séquences qui auraient été tournées par Françoise C... et cette dernière ne revendique la titularité d'aucune des séquences du film de FAC TELEVISION.

Il appartient à la société NEFERTITI d'établir la titularité de ses droits sur ces images ce qu'elle ne fait pas faute d'une analyse précise. Le tribunal note à cet égard que la société FAC TELEVISION soutient que d'autres navigateurs avaient également filmé leur tour du monde à la même époque et donc que cela était possible. Enfin, quand bien même Bernard C... n'aurait pas tourné les séquences litigieuses aucune pièce produite n'indique que ce serait Françoise C... qui les aurait tournées.

Il convient en conséquence de débouter la société NEFERTITI de sa demande en contrefaçon.

* Sur la résiliation du contrat :

Françoise C... fait valoir qu'elle a fait agir la clause résolutoire de l'article 11 du contrat du 27 avril 2004 de sorte que ce contrat a été résolu de plein droit le 28 octobre 2005.

La société NEFERTITI soutient que le jeu de la clause résolutoire doit être écarté car Madame C... n'est pas de bonne foi. Cette dernière qui a prétendu lors de la signature du contrat détenir des droits exclusifs sur le film " La mer " n'a jamais répondu à sa demande consistant à déterminer la propriété des images exploitées par la société FAC TELEVISION et elle ne lui a jamais fourni d'éléments établissant qu'elle était bien titulaire des droits.C'est pourquoi elle n'a pas diffusé le film dont elle avait pourtant acquis les droits exclusifs.

Le tribunal a déjà rappelé la genèse du film " La mer " qui comprend des images de Bernard C.... Ce film n'en est cependant pas moins une oeuvre originale de Françoise C... et il n'est en conséquence pas contestable que la société NEFERTITI avait donc bien régulièrement acquis les droits exclusifs sur cette oeuvre.

Il y a lieu de rappeler que les parties avaient signé en juin 2000 un premier contrat de cession des droits d'exploitation primaire et dérivée dans le monde entier. Une première dissension est alors apparue, Madame C... estimant que la société NEFERTITI n'avait pas rempli ses obligations en l'absence d'exploitation dérivée et d'exploitation à l'étranger.C'est ainsi qu'un protocole transactionnel est intervenu le 27 avril 2004 par lequel Madame C... renonçait à solliciter des dommages et intérêts et la société NEFERTITI renonçait à solliciter le remboursement des frais de post production du film dont le montant s'élevait à 14. 916,16 euros.

Le jour même était signé un nouveau contrat de cession des droits sur le film.

Aux termes de l'article 4. 2 du contrat la société NEFERTITI s'engageait à verser à Madame C... la somme de 27. 500 euros HT à titre de minimum garanti.L'article 5. 1 du contrat prévoyait un versement en3 fois, soit la somme de 15. 244 euros à la signature du contrat, puis 6. 128 euros HT au plus tard le 30 octobre 2004 et enfin 6. 128 euros HT au plus tard le 30 avril 2005.

Devant la carence de la société NEFERTITI, Madame C... la mettait en demeure d'effectuer le second versement par courrier du 4 novembre 2004. La société NEFERTITI procédait alors au paiement. Dans ce même courrier Madame C... mettait également en demeure la société NEFERTITI d'exploiter le film, étant précisé que l'année 2004 marquait le dixième anniversaire de la disparition de Bernard C....

Le 22 juillet 2004 la société NEFERTITI adressait au conseil de Madame C... un courrier qui lui demandait " de faire le nécessaire auprès de FAC TELEVISION afin que nous puissions déterminer la propriété des images exploitées dans ce DVD produit par FAC TELEVISION ". Le 30 juillet le conseil de Madame C... répliquait en indiquant à la société NEFERTITI qu'elle ne pouvait défendre ses intérêts qui pouvaient être en contradiction avec ceux de sa cliente.

Puis la société NEFERTITI assignait en intervention forcée Madame C... par acte du 11 avril 2005.

Le 14 mai 2005 Madame C... adressait une nouvelle mise en demeure à la société NEFERTITI aux fins de procéder au troisième versement et aux fins d'exploiter le film.

Cette dernière n'ayant pas répondu, par courrier recommandé du 28 octobre 2005 Madame C... mettait en oeuvre la clause résolutoire de l'article 11 du contrat.

L'article 11 du contrat de cession de droits du 27 avril 2004 stipule que " En cas de manquement, par l'une des Parties, à l'une quelconque de ses obligations au titre du Contrat, non réparé dans un délai d'un mois à compter d'une mise en demeure adressé par l'autre partie par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, cette dernière aura la faculté de résoudre immédiatement et de plein droit le Contrat par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, sans préjudice de tous dommages et intérêts. "

La société NEFERTITI ne conteste pas ne pas avoir effectué le 3ème versement et ne pas avoir exploité le film. Son argument selon lequel elle ne pouvait pas exploiter le film du fait de la publication du DVD " La longue route " en mai 2004 ne peut être retenu. En effet, son courrier du 22 juillet 2004 ne peut être interprété comme demandant à Madame C... d'intervenir volontairement à ses côtés dans une procédure en contrefaçon comme le prévoyait l'article 9 du contrat, ni même une demande d'explication.

Enfin, l'argument selon lequel elle ne pouvait prendre le risque de publier le DVD sans savoir si celui ci contenait des images contrefaisantes n'apparaît pas sérieux. En effet le film " La mer " est exploité par Madame C... depuis 1970 sous son nom, ce que la société NEFERTITI, spécialisée dans le domaine maritime ne pouvait ignorer. De même, elle ne pouvait ignorer l'existence du film produit par la société TELEHACHETTE et celui produit par la société INCONTRI NAUTICI..

Il résulte de ces éléments que le courrier recommandé du 28 octobre 2005 faisant suite aux courriers de mise en demeure des 4 novembre 2004 et14 mai 2005, non suivis d'effet, a résolu de plein droit le contrat du 27 avril 2004 aux torts de la société NEFERTITI.

* Sur la garantie d'éviction :

La société NEFERTITI demande à Mamdame C... de la garantir de la validité des droits d'exploitation du film " La mer ".

Le tribunal relève qu'aucune action en contrefaçon n'a été dirigée contre la société NEFERTITI d'une part et d'autre part qu'il n'est pas contestable qu'elle avait bien acquis, notamment par le contrat du 27 avril 2004, les droits d'exploitation du film " La mer ".

Cette demande est donc sans objet.

* Sur les demandes reconventionnelles de Madame C... :

Madame C... fait valoir que du fait de la résolution du contrat elle a subi un préjudice matériel et moral important.

Elle dit avoir été privée des revenus qu'elle aurait tiré de l'exploitation du film depuis 3 ans. En s'appuyant sur les chiffres de vente du film édité par la société FAC TELEVISION elle estime à la somme de 30. 000 euros pour les trois ans les revenus qu'elle aurait du recevoir de la vente de DVD et autres exploitations et à tout le moins à la somme de 27. 500 euros au titre du minimum garanti qu'elle aurait dû recevoir.

Elle fait également valoir au titre de son préjudice moral que son film n'a pas pu sortir pour l'année du dixième anniversaire de la disparition de Bernard C..., qu'elle a perdu cette possibilité de rendre hommage à son mari alors qu'elle est âgée de 78 ans. Elle sollicite la somme de 20. 000 euros à ce titre.

Aux termes des dispositions des articles 1183 et suivants du Code civil la clause résolutoire a pour effet de mettre les parties dans l'état où elles se trouvaient avant la conclusion du contrat. Les termes de l'article 11 du contrat selon lesquels la résolution prend effet immédiatement ne remettent pas en cause ce principe.

En l'espèce, la société NEFERTITI a versé à Madame C... la somme de 19. 734,47 euros, soit les sommes de 15. 244 euros lors de la signature du contrat puis de 6. 128 euros en novembre 2004 à titre de minimum garanti, ces sommes étant diminuées du précompte AGESA et de la TVA. Cette somme devrait être restituée à la société NEFERTITI en conséquence de l'effet rétroactif de la résolution du contrat.

Le tribunal estime le préjudice tant matériel que moral subi par Madame C... à la somme de 19. 734,47 euros, somme qui se compense avec le montant des sommes qu'elle a reçues en exécution du contrat.

Madame C... sollicite également sous astreinte la restitution des éléments nécessaires à l'exploitation de l'oeuvre et à la conservation du film, soit le master original et les copies réalisées.

La société NEFERTITI fait valoir qu'elle a de longue date restitué tous les éléments originaux du film " La mer " qui lui avaient été remis.

Le tribunal constate que le film original sur support numérique a été rendu à Madame C... en juin 2000 et qu'un exemplaire du DVD " Bernard C..., itinéraire d'un marin de légende " de même qu'un exemplaire en VHS du film " La mer " ont été restitués en juillet 2004. Il n'est pas établi qu'il existerait d'autres copies du film en possession de la société NEFERTITI.

Il convient en conséquence de rejeter cette demande de même que la demande de paiement de dommages et intérêts pour résistance abusive.

Madame C... sollicite le paiement de la somme de 10. 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive.

Le droit d'agir en justice ne dégénère en abus qu'en cas de mauvaise foi révélatrice d'une intention de nuire dont la preuve n'est pas rapportée en l'espèce ;

En conséquence la Madame C... de D... sera déboutée de sa demande de dommages-intérêts de ce chef.

* Sur les demandes reconventionnelles de la société FAC TELEVISION :

La société FAC TELEVISION sollicite le paiement de la somme de 10. 000 euros en réparation du préjudice lié à sa désorganisation et la somme de 49. 681,13 euros en réparation du préjudice commercial.

Elle ne produit aucune pièce établissant la réalité de ces préjudices.

Il convient en conséquence de la débouter de ses demandes.

Elle sollicite également la publication du présent jugement.

Le tribunal estime que la société FAC TELEVISION n'a pas subi de préjudice du fait de l'action engagée à son encontre par la société NEFERTITI et la déboute en conséquence de cette demande.

* Sur l'exécution provisoire :

Madame C... sollicite l'exécution provisoire de la présente décision.

Il convient de faire droit à la demande compte tenu de l'ancienneté du litige.

* Sur l'article 700 :

Madame C... de D... sollicite le paiement de la somme de 5. 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Il serait inéquitable de laisser à sa charge les sommes exposées par elle et non comprises dans les dépens. Il lui sera en conséquence alloué la somme de 5. 000 euros de ce chef.

La société FAC TELEVISION sollicite le paiement de la somme de 5. 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Il serait inéquitable de laisser à sa charge les sommes exposées par elle et non comprises dans les dépens. Il lui sera en conséquence alloué la somme de 5. 000 euros de ce chef.

PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL,

Statuant en audience publique, en premier ressort et par jugement contradictoire,

Dit que la société NEFERTITI est recevable à agir à l'encontre de la société FAC TELEVISION et de Madame C... de D...,

Déboute la société NEFERTITI de l'ensemble de ses demandes,

Constate la résolution du contrat du 27 avril 2004 conclu entre la société NEFERTITI et Madame Françoise C... de D... suite au courrier recommandé du 28 octobre 2005,

Condamne Madame C... de D... à restituer à la société NEFERTITI la somme de 19. 734,47 euros,

Condamne la société NEFERTITI à payer à Madame C... de D... la somme de 19. 734,47 euros en réparation des préjudices matériel et moral subis,

Prononce la compensation de ces sommes,

Déboute Madame C... de D... du surplus de ses demandes,

Déboute la société FAC TELEVISION de ses demandes,

Ordonne l'exécution provisoire du présent jugement,

Condamne la société NEFERTITI à payer à Madame Françoise C... de D... la somme de 5. 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,

Condamne la société NEFERTITI à payer à la société FAC TELEVISION la somme de 5. 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,

Condamne la société NEFERTITI aux dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Fait à PARIS le 4 juillet 2007.

Le GreffierLe Président


Synthèse
Tribunal : Tribunal de grande instance de Paris
Formation : Ct0196
Numéro d'arrêt : 05/06005
Date de la décision : 04/07/2007

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.grande.instance.paris;arret;2007-07-04;05.06005 ?
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