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06/12/2006 | FRANCE | N°JURITEXT000006952025

France | France, Tribunal de grande instance de Paris, 06 décembre 2006, JURITEXT000006952025


T R I B U N A L D E GRANDE I N S T A N C E D E P A R I S 3ème chambre 3ème section No RG : 05/02412 No MINUTE : Assignation du : 27 Janvier 2005 Expéditions exécutoires délivrées le : JUGEMENT rendu le 15 Novembre 2006 DEMANDERESSES S.A.R.L. EPB, sous le nom commercial La Chaise Longue 8, rue Princesse 75006 PARIS Madame Naomi X...
... 75006 PARIS représentées par Me Arnaud CASALONGA, de la SELAS CASALONGA avocat au barreau de PARIS, vestiaire K.177 DÉFENDEURS S.A.R.L. ROYAL RIVOLI 78 rue de Rivoli 75004 PARIS défaillante S.A. CONSORTIUM MENAGER PARISIEN 12 rue des Gravilliers 750

03 PARIS représenté par Me Marc BENSIMHON, de la SCP BENSIMH...

T R I B U N A L D E GRANDE I N S T A N C E D E P A R I S 3ème chambre 3ème section No RG : 05/02412 No MINUTE : Assignation du : 27 Janvier 2005 Expéditions exécutoires délivrées le : JUGEMENT rendu le 15 Novembre 2006 DEMANDERESSES S.A.R.L. EPB, sous le nom commercial La Chaise Longue 8, rue Princesse 75006 PARIS Madame Naomi X...
... 75006 PARIS représentées par Me Arnaud CASALONGA, de la SELAS CASALONGA avocat au barreau de PARIS, vestiaire K.177 DÉFENDEURS S.A.R.L. ROYAL RIVOLI 78 rue de Rivoli 75004 PARIS défaillante S.A. CONSORTIUM MENAGER PARISIEN 12 rue des Gravilliers 75003 PARIS représenté par Me Marc BENSIMHON, de la SCP BENSIMHON -MAURYavocat au barreau de PARIS, vestiaire P 410 COMPOSITION DU TRIBUNAL Elisabeth BELFORT, Vice-Président, signataire de la décision Agnès THAUNAT, Vice-Président Pascal MATHIS, Juge assistée de Marie-Aline PIGNOLET, Greffier, signataire de la décision Sommaire

Les dispositions du livre I du code de la propriété intellectuelle ne protègent que les oeuvres originales, c'est-à-dire celles qui portent l'empreinte de la personnalité de leur auteur. Cette exigence ne doit pas conduire à rechercher si l'auteur a puisé son inspiration dans sa subjectivité ou a voulu rendre compte de son moi, la protection légale étant accordée quelque soit le programme littéraire, artistique ou scientifique que réalise l'oeuvre, même si ce dernier récuse toute subjectivité pour s'attacher à une démarche purement formelle. Sauf à apprécier le mérite ou la destination de l'oeuvre, ce que la loi interdit au juge, ce dernier doit examiner l'originalité de l'oeuvre non au regard de sa valeur esthétique ou scientifique mais de ses caractères formels généraux en recherchant s'ils l'inscrivent dans un dispositif industriel ou administratif lui faisant automatiquement rencontrer un public captif, s'il la soumette simplement à l'aléa commercial du marché des biens, ou si, à l'inverse, ils ne permettent à l'oeuvre de rencontrer son public

qu'au travers d'un aléa proprement esthétique ou scientifique, en sorte que dans ce cas seulement, la protection du droit d'auteur est socialement nécessaire à l'existence d'une activité littéraire, artistique ou scientifique. DÉBATS A l'audience du 24 Octobre 2006 tenue en audience publique devant Elisabeth BELFORT et Agnès THAUNAT, juges rapporteurs, qui, sans opposition des avocats, ont tenu seules l'audience, et, après avoir entendu les conseils des parties, en ont rendu compte au Tribunal, conformément aux dispositions de l'article 786 du Nouveau Code de Procédure Civile. JUGEMENT Prononcé publiquement Réputé contradictoire en premier ressort Par assignation du 27 janvier 2005 la société EPB expose qu'elle exerce son activité sous la dénomination "LA CHAISE LONGUE" et qu'elle se trouve investie de droits d'auteur résultant de la création pour son compte en 1996 par Madame Naomi X... d'un modèle de "mini poêle à frire" décliné sous divers motifs. La société EPB, autorisée par ordonnance du 30 novembre 2004 rendue par le Président du tribunal de grande instance de PARIS, a fait procéder le 2 décembre 2004 à deux saisies contrefaçon simultanées dans les locaux des sociétés ROYALE RIVOLI et CONSORTIUM MÉNAGER PARISIEN. La société EPB et Madame Naomi X... font grief à la société ROYAL RIVOLI de commercialiser des mini poêles présentant les caractéristiques de l'oeuvre en cause et à la société CONSORTIUM MÉNAGER PARISIEN d'avoir importé de Chine 4 800 de ces mini poêles arguées de contrefaçon. En réparation des actes de contrefaçon, les demanderesses sollicitent les mesures usuelles d'interdiction, de destruction et de publication. Madame Naomi X... réclame la somme de 20 000 ç en réparation de l'atteinte portée à ses droits moraux et la société EPB la somme de 100 000 ç en réparation de l'atteinte portée à ses droits patrimoniaux. De plus la société

EPB se plaint d'actes de concurrence déloyale consistant dans la vente à vil prix et la similarité des emballages. En réparation elle demande la somme de 100 000 ç à titre de dommages et intérêts. Enfin les demanderesses sollicitent la somme de 10 000 ç sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ainsi que l'exécution provisoire. Par dernières conclusions la société EPB et Madame Naomi X... reprennent leurs prétentions. Suivants dernières écritures la société CONSORTIUM MENAGER PARISIEN conteste la paternité de Madame Naomi X... sur l'oeuvre en cause ainsi que la titularité des droits patrimoniaux revendiqués par la société EPB et l'originalité de l'oeuvre. Enfin la société défenderesse expose n'avoir pas commis d'actes de concurrence déloyale faute de grief distinct. Reconventionnellement, elle sollicite la somme de 5 000 ç au titre des frais irrépétibles. La société ROYAL RIVOLI, bien que régulièrement assignée n'a pas constitué avocat. MOTIFS SUR L'ORIGINALITÉ DE L'OEUVRE

Attendu que les dispositions du livre I du code de la propriété intellectuelle ne protègent que les oeuvres originales, c'est-à-dire celles qui portent l'empreinte de la personnalité de leur auteur. Attendu que cette exigence ne doit pas conduire à rechercher si l'auteur a puisé son inspiration dans sa subjectivité ou a voulu rendre compte de son moi, la protection légale étant accordée quelque soit le programme littéraire, artistique ou scientifique que réalise l'oeuvre, même si ce dernier récuse toute subjectivité pour s'attacher à une démarche purement formelle. Attendu que sauf à apprécier le mérite ou la destination de l'oeuvre, ce que la loi interdit au juge, ce dernier doit examiner l'originalité de l'oeuvre non au regard de sa valeur esthétique ou scientifique mais de ses caractères formels généraux en recherchant s'ils l'inscrivent dans un dispositif industriel ou administratif lui faisant automatiquement

rencontrer un public captif, s'il la soumette simplement à l'aléa commercial du marché des biens, ou si, à l'inverse, ils ne permettent à l'oeuvre de rencontrer son public qu'au travers d'un aléa proprement esthétique ou scientifique, en sorte que dans ce cas seulement, la protection du droit d'auteur est socialement nécessaire à l'existence d'une activité littéraire, artistique ou scientifique. Attendu que les mini poêles à frire dont la protection par le droit d'auteur est revendiquée se caractérisent par la combinaison des éléments suivants : -une partie ronde à bords bas en acier inoxydable, au fond de laquelle est moulé un motif variable tel un coeur, une fleur ou une étoile, -un manche en plastique troué à son extrémité, -une liaison par un coude à angle droit en métal fixé par deux rivets disposée entre la partie ronde et le manche. Attendu que le tribunal estime que cette combinaison de caractéristiques produit un résultat susceptible d'appeler un jugement esthétique de la part du consommateur apte à déterminer partiellement son choix. Attendu en conséquence que l'oeuvre qui, comme il vient d'être dit, est susceptible de rencontrer son public non simplement comme une marchandise mais aussi au travers d'un jugement esthétique doit être tenue pour originale et protégée de cet aléa spécifique par le droit d'auteur. SUR LA PATERNITÉ DE MADAME NAOMI X... Attendu que Madame Naomi X... verse aux débats deux attestations de Mesdames PORCAR-KUHN et HOZUMI KOWA justifiant de sa paternité ; Attendu qu'en l'absence de tout élément en sens opposé le tribunal tient la preuve de la paternité suffisamment établie par les attestations précitées, étant relevé que cette paternité est reconnue par le fabriquant des mini-poêles également en la cause. SUR LES DROITS PATRIMONIAUX DE LA SOCIÉTÉ EPB Attendu que Madame Naomi X... expose avoir cédé ses droits d'exploitation à la société EPB, laquelle confirme cette cession. Attendu que la partie recherchée pour contrefaçon de droit

d'auteur n'est pas recevable à discuter des cessions de droits intervenues entre les demandeurs à l'instance et ce d'autant que l'oeuvre protégée est divulguée sous le nom commercial de la société EPB. Attendu ainsi que le tribunal retient que la société EPB est bien titulaire des droits d'exploitation sur l'oeuvre en cause dont Madame Naomi X... est l'auteur. SUR LA CONTREFAOEON Attendu que les éléments d'originalité de l'oeuvre se retrouvant dans les objets argués de contrefaçon, cette dernière se trouve constituée par la reproduction de l'oeuvre première en application de l'article L. 122-4 du code de la propriété intellectuelle. Attendu en revanche que les droits moraux de l'auteur n'ont pas été atteints ; qu'en effet, s'agissant du droit au nom, les produits commercialisés avec son autorisation ne portent pas d'indication de l'auteur selon la coutume en ces matières de design appliqué aux petits objets de la vie courante et que s'agissant de l'intégrité de l'oeuvre, cette dernière n'a pas été dénaturée, s'agissant comme l'indique Madame Naomi X... elle-même de copies serviles. SUR LA CONCURRENCE DÉLOYALE Attendu qu'il est encore reproché aux sociétés défenderesses d'avoir surmoulé les produits originaux. Mais attendu que ce grief n'est pas distinct du grief de contrefaçon de droit d'auteur, la copie servile n'étant qu'un cas de contrefaçon particulier. Attendu en Attendu en revanche que la reprise des éléments d'emballage associée à un vil prix soit 2 ç TTC au lieu de 14 ç TTC constituent des actes de concurrence déloyale distincts engageant la responsabilité des sociétés défenderesses sur le fondement de l'article 1382 du code civil. SUR LES MESURES RÉPARATRICES Attendu qu'une mesure d'interdiction sera prononcée dans les termes du dispositif. Attendu que la société CONSORTIUM MÉNAGER PARISIEN a importé 4 800 mini-poêles. Attendu que la société ROYAL RIVOLI qui a commercialisé ces objets n'ayant pas comparu, le tribunal ne peut cantonner sa responsabilité. Attendu que

le préjudice patrimonial de la société EPB résultant de la contrefaçon sera réparé par l'allocation d'une somme de 20 000 ç, le préjudice causé par les actes de concurrence déloyale sera indemnisé par l'allocation de la somme de 5 000 ç. Attendu qu'à titre de complément de réparation, il convient d'autoriser la société EPB à faire publier le dispositif du présent jugement dans 3 publications de leur choix aux frais des sociétés défenderesses tenues in solidum, ces derniers ne pouvant excéder la somme globale de 12 000 ç.

SUR LES FRAIS IRREPETIBLES Attendu que l'équité commande d'allouer aux demanderesses qui triomphent la somme de 10 000 ç par application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. SUR L'EXÉCUTION PROVISOIRE Attendu que les données de l'espèce commandent d'assortir la présente décision de l'exécution provisoire. SUR LES DÉPENS Attendu qu'il convient de condamner les sociétés défenderesses qui succombent aux dépens. PAR CES MOTIFS Le Tribunal, Statuant publiquement, en premier ressort et par décision réputée contradictoire Sous le bénéfice de l'exécution provisoire,

Dit que Madame Naomi X... est bien l'auteur d'une oeuvre originale consistant en un modèle de mini-poêle à frire dont elle a cédé les droits d'exploitation à la société EPB. Dit que respectivement en important et en distribuant des mini-poêles à frire reprenant les éléments d'originalité de l'oeuvre de Madame Naomi X..., les sociétés CONSORTIUM MÉNAGER PARISIEN et ROYAL RIVOLI ont commis des actes de contrefaçon de droit d'auteur au préjudice de la société EPB titulaire des droits d'exploitation. Dit qu'en commercialisant ces objets à vil prix et sous un emballage similaire à celui utilisé par la société EPB les sociétés CONSORTIUM MÉNAGER PARISIEN et ROYAL RIVOLI ont commis des actes de concurrence déloyale au détriment de cette dernière. En réparation, Fait interdiction aux sociétés CONSORTIUM MÉNAGER PARISIEN et ROYAL RIVOLI de commercialiser les

objets en cause sous astreinte de 100 ç par infraction passé un délai de 2 mois à compter de la signification de la présente décision. Dit que le tribunal se réserve expressément le pouvoir de liquider l'astreinte prononcée en application de l'article 35 de la loi no 91-650 du 9 juillet 1991 modifié par l'article 3 de la loi no 92-644 du 13 juillet 1992. Condamne in solidum les sociétés CONSORTIUM MÉNAGER PARISIEN et ROYAL RIVOLI à payer à la société EPB la somme de 20 000 ç à titre de dommages et intérêts en réparation des actes de contrefaçon et la somme de 5 000 ç en réparation du préjudice causé par les actes de concurrence déloyale. Autorise la société EPB a faire publier le dispositif du présent jugement dans 3 publications de son choix aux frais in solidum des sociétés CONSORTIUM MÉNAGER PARISIEN et ROYAL RIVOLI, ces dernier ne pouvant excéder la somme globale de 12 000 ç. Condamne in solidum les sociétés CONSORTIUM MÉNAGER PARISIEN et ROYAL RIVOLI à payer à Madame Naomi X... et à la société EPB la somme de 10 000 ç par application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. Condamne in solidum les sociétés CONSORTIUM MÉNAGER PARISIEN et ROYAL RIVOLI aux dépens. Ainsi fait et jugé à Paris le 15 novembre 2006 Le Greffier

Le Président


Synthèse
Tribunal : Tribunal de grande instance de Paris
Numéro d'arrêt : JURITEXT000006952025
Date de la décision : 06/12/2006

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Composition du Tribunal
Président : Présidente : Mme Belfort

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.grande.instance.paris;arret;2006-12-06;juritext000006952025 ?
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