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01/06/2006 | FRANCE | N°JURITEXT000006950308

France | France, Tribunal de grande instance de Paris, Ct0087, 01 juin 2006, JURITEXT000006950308


T R I B U N A L D E GRANDE I N S T A N C E D E P A R I S 3ème chambre 2ème section No RG : 04/17603 No MINUTE : Assignation du : 12 Novembre 2004 Expéditions exécutoires délivrées le : JUGEMENT rendu le 01 Juin 2006

DEMANDERESSE S.A. LOUIS VUITTON MALLETIER ... représentée par Me Patrice DE CANDE, avocat au barreau de PARIS vestiaire L 280 DÉFENDEURS S.A. ANDRE ... représentée par Me Jean-Marc LEONELLI, avocat au barreau de PARIS, vestiaire T0700 S.A.R.L. BAG'S VILLE ... représenté par Me Ingrid ZAFRANI, avocat au barreau de PARIS, vestiaire M1705 COMPOSITION DU TRIBUNAL C

laude Z..., Vice-Président, signataire de la décision Véronique Y....

T R I B U N A L D E GRANDE I N S T A N C E D E P A R I S 3ème chambre 2ème section No RG : 04/17603 No MINUTE : Assignation du : 12 Novembre 2004 Expéditions exécutoires délivrées le : JUGEMENT rendu le 01 Juin 2006

DEMANDERESSE S.A. LOUIS VUITTON MALLETIER ... représentée par Me Patrice DE CANDE, avocat au barreau de PARIS vestiaire L 280 DÉFENDEURS S.A. ANDRE ... représentée par Me Jean-Marc LEONELLI, avocat au barreau de PARIS, vestiaire T0700 S.A.R.L. BAG'S VILLE ... représenté par Me Ingrid ZAFRANI, avocat au barreau de PARIS, vestiaire M1705 COMPOSITION DU TRIBUNAL Claude Z..., Vice-Président, signataire de la décision Véronique Y..., Vice-Président Michèle X..., Vice-Président assistée de Marie-Aline PIGNOLET, Greffier, signataire de la décision DEBATS A l'audience du 09 Mars 2006 tenue publiquement JUGEMENT Prononcé publiquement Contradictoirement en premier ressort FAITS ET PRETENTIONS DES PARTIES: La société Louis Vuitton Malletier, ci-après LVM, exerce son activité dans le domaine de la création, de la fabrication et de la commercialisation de produits de maroquinerie et de prêt à porter. Elle est notamment titulaire de la marque figurative no 1 506 382 déposée le 30 décembre 1988 et renouvelée le 24 décembre 1998 dans les classes 6 et 18 de la classification internationale et notamment pour désigner les sacs. Cette marque représente la forme d'une serrure composée d'un palastre de forme carrée comportant quatre rivets, deux boutons poussoirs et une serrure et d'autre part d'un moraillon composé dans sa partie supérieure d'un rectangle aux bouts arrondis présentant un rivet de chaque côté et dans sa partie inférieure d'un triangle apposé sur le palastre. Ayant eu connaissance de ce que les magasins à l'enseigne "ANDRE" commercialisaient, notamment à Paris, un modèle de sac reproduisant

constater que la marque invoquée n'en constitue nullement la désignation nécessaire ou générique; qu'en effet tous les produits de maroquinerie en cuir ou imitation ne comportent pas de fermoir, de surcroît de la forme représentée par la marque, rien n'imposant d'avoir recours à un tel signe pour les désigner; Attendu en second lieu qu'en ce qui concerne les produits de serrurerie de la classe 6, il doit être relevé que la marque est constituée par un fermoir qui ne représente qu'une catégorie de serrure et n'est ni un verrou, ni un loquet de sorte qu'il est exclu qu'elle puisse constituer l'unique manière de désigner ces produits; Attendu que la forme constituant la marque contestée ne peut être considérée comme uniquement attribuable au résultat technique recherché; qu'en effet, s'il est évident qu'un système de fermeture se compose nécessairement de deux parties aptes à s'emboîter et de rivets destinés à leur fixation, et dans le cas particulier d'un fermoir, d'un moraillon venant s'enclencher dans un palastre, aucune nécessité fonctionnelle ne détermine en l'espèce la configuration de ces éléments telle qu'elle a été choisie par la société demanderesse; Attendu que le fermoir utilisé, depuis une date non précisée, par la société de maroquinerie GOYARD pour ses malles ne présente pas la même forme que celle de la marque de la société LVM: le moraillon n'est pas composé d'une surface plane, il ne montre pas une forme de V dans la mesure où sa partie supérieure est moins large, la plaque supérieure, moins large que le palastre, comporte trois rivets et non deux, enfin, il n'existe pas de bouton poussoir;

Attendu qu'il doit être relevé qu'il s'agit là de la seule forme de serrure prétendument semblable opposée par les défenderesses, ce qui suffit à contredire l'argument d'une représentation nécessaire; Attendu Attendu que l'impossibilité alléguée pour ce signe d'assurer la fonction d'identité d'origine qui constitue le rôle premier de la marque se trouve contredite par le fait que la forme en V du selon elle les caractéristiques de cette marque, elle a obtenu le 22 octobre 2004 l'autorisation de faire procéder à une saisie-contrefaçon dans les locaux de la société ANDRE 119- ... . Des documents adressés à l'huissier par la société ANDRE, il est apparu qu'elle avait acquis 300 exemplaires du modèle de sac (référence19270140590) auprès de la société BAG'SVILLE pour le prix de 10 euros l'unité. La saisie-contrefaçon diligentée dans les locaux de cette dernière le 29 octobre 2004 a confirmé que la société ANDRE était bien sa cliente et que les sacs en cause avaient été importés de Chine. Par actes en date du 12 novembre 2004, la société LVM a assigné les sociétés ANDRE SA et BAG'S VILLE devant ce tribunal en contrefaçon et en concurrence

déloyale. Dans le dernier état de ses écritures signifiées le 3 février 2006, elle demande sur le fondement du livre VII du code de la Propriété Intellectuelle et de l'article 1382 du code civil de: - dire qu'en important et en commercialisant le modèle de sac litigieux, les société ANDRE SA et BAG'S VILLE se sont rendues coupables d'actes de contrefaçon de la marque no 1 506 382 à son préjudice, - dire qu'au surplus, en commercialisant à vil prix des produits de qualité médiocre, proches de certains modèles commercialisés par la société LVM, les défenderesses ont commis des actes de concurrence déloyale, En conséquence, - interdire aux sociétés défenderesse de poursuivre l'importation et la commercialisation de sacs contrefaisant la marque no 1 506 382 sous astreinte de 1500 euros par infraction constatée, - ordonner la remise sous astreinte de 800 euros par jour, dans les 48 heures de la signification du jugement à intervenir, des sacs actuellement en stock ou dans le circuit de distribution de leur fait, aux fins de destruction sous contrôle d'huissier, - condamner in solidum les défenderesses à lui payer la somme de 100 000 euros à titre de

moraillon renvoie clairement à Louis Vuitton; qu'il est par ailleurs démontré par les pièces produites que cette marque n'est pas seulement utilisée comme fermoir de sacs ou de porte-documents mais également de façon purement décorative sur des mules ou encore sur des bracelets; que dans ce cas, ce signe n'a pas d'autre fonction que de rattacher l'article considéré à la société LVM; Qu'en conséquence, ce moyen de nullité sera écarté. Sur le dépôt frauduleux: Attendu que la société ANDRE SA poursuit en second lieu la nullité de la marque dite "Serrure S" sur le fondement de la fraude; qu'elle expose que le fermoir en cause relève de la création artistique et/ou industrielle de sorte qu'il ne pouvait être protégé que de manière temporaire au titre des livres 1 et 5 du code de la Propriété Intellectuelle, or, en choisissant de le déposer à titre de marque en 1988, peu de temps après que le modèle qu'elle avait déposé le 7 septembre 1983 soit tombé dans le domaine public, la société LVM a commis un détournement de la loi en s'octroyant un monopole perpétuel; Attendu cependant que la loi autorisant le dépôt de marques figuratives qui confèrent un monopole non limité dans le temps pour autant que les renouvellements

soient régulièrement opérés et n'interdisant pas le cumul des protections au titre des livres 1, 5 et 7 du code de la Propriété Intellectuelle, un tel dépôt est insusceptible de réaliser en lui-même une fraude; Que ce moyen de nullité sera également écarté. Sur la demande de déchéance: Attendu que selon les dispositions de l'article L 714-5 du code de la Propriété Intellectuelle " Encourt la déchéance de ses droits le propriétaire de la marque qui, sans justes motifs, n'en a pas fait un usage sérieux, pour les produits et services visés dans l'enregistrement, pendant une période ininterrompue de cinq ans. ... La déchéance peut être demandée en justice par toute personne intéressée. Si la demande ne porte que sur une partie des produits ou services visés dans l'enregistrement, la

dommages et intérêts du chef de contrefaçon et la somme de 100 000 euros du chef de concurrence déloyale, - autoriser une mesure de publication de la décision par extrait aux frais avancés et in solidum des défenderesses dans la limite de 60 000 euros ht, le tout sous le bénéfice de l'exécution provisoire, et de condamner les défenderesses, sous la même solidarité au paiement de la somme de 10 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ainsi qu'aux dépens, dont distraction au profit de son conseil. Dans le dernier état de ses écritures signifiées le 22 février 2006, la société ANDRE SA soulève la nullité de la marque pour défaut de distinctivité et dépôt frauduleux. Subsidiairement, elle demande de prononcer la déchéance de cette marque à compter du 1er mars 2000, faute d'exploitation sérieuse et en conséquence, de déclarer irrecevable l'action en contrefaçon. A titre infiniment subsidiaire, elle conclut au débouté tant de la demande en contrefaçon que de celle en concurrence déloyale, s'oppose à toute condamnation solidaire avec la société BAG'S VILLE. Elle sollicite l'allocation de la somme de 10 000 euros au titre de ses frais irrépétibles. Encore plus subsidiairement, elle demande garantie à la société BAG'S VILLE ainsi que sa condamnation au paiement de la somme de 7 735 euros au titre de la perte consécutive à l'impossibilité de vendre la marchandise et de la somme de 10 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile. Dans ses dernières écritures signifiées le

1er juillet 2005 la société BAG'S VILLE poursuit la nullité de la marque en raison de son caractère fonctionnelet sa déchéance. Subsidiairement, elle demande de prendre acte de sa bonne foi et de constater que la société LVM ne rapporte pas la preuve du préjudice dont elle se prévaut et conclut au débouté de la demande présenter à son encontre par la Société ANDRE. Elle demande de condamner la déchéance ne s'étend qu'aux produits ou aux services concernés. ... La preuve de l'usage sérieux incombe au propriétaire de la marque dont la déchéance est demandée. Elle peut être apportée par tous moyens. La déchéance prend effet à la date d'expiration du délai de cinq ans prévu au premier alinéa du présent article. Elle a un effet absolu."; Attendu que la société ANDRE SA soutient qu'au regard des preuves d'exploitation produites, la société LVM ne justifie pas de l'usage sérieux de la marque 1 506 382 mais de la marque no 1 506 388 déposée à la même date et qui se distingue de la marque invoquée en ce qu'elle porte le monogramme LV entre les deux rivets supérieurs et la mention "Louis Vuitton Made in France" de part et d'autre de la serrure; Attendu cependant, d'une part que la société LVM verse aux

débats des extraits de ses catalogues 2003 et 2004 qui montrent l'utilisation de la marque 1 506 382 sur plusieurs modèles de sacs à main, de serviettes et de boîtes à flacons de toilette; qu'il ne peut utilement être prétendu que ces documents n'établiraient pas un usage sérieux et non équivoque de la marque en cause dès lors que ces catalogues, qui sont diffusés à plusieurs centaines de milliers d'exemplaires par an ainsi qu'il en est justifié, démontrent une réelle offre en vente portant sur un nombre conséquent de modèles; Attendu d'autre part que la demanderesse justifie encore de l'usage de cette marque notamment pour de nombreux modèles de sacs à mains par la production de ses catalogues de vente et par des publicités les uns et les autres diffusés au cours des trois années précédant l'introduction de la demande de déchéance; que s'il est vrai que ces pièces montrent que la marque considérée est revêtue du monogramme LV et de l'indication Louis Vuitton, il n'en demeure pas moins que cet usage sous une forme modifiée n'en altère pas le caractère distinctif et ne vient au contraire que le renforcer, peu important que ce signe soit par ailleurs déposé à titre de marque; Qu'il s'en suit que la

société LVM à lui payer la somme de 5000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive et celle de 10 000 euros au titre de ses frais non taxables. Motifs de la décision Sur la validité de la marque no 1 506 382: Attendu que selon les dispositions de l'article 3 de la loi du 31 décembre 1964 en vigueur au moment du dépôt de la marque considérée, sont exclus de la protection légale les signes "qui sont constitués exclusivement de la désignation nécessaire ou générique du produit et du service ou qui comportent des indications propres à tromper le public" ou ceux " qui sont composées exclusivement de termes indiquant la qualité essentielle du produit ou du service, ou la composition du produit"; Attendu que les défenderesses à l'instance soutiennent que la forme d'une serrure n'est pas de nature à exercer la fonction d'attribution d'origine de la marque en ce qu'elle n'est pas perçue comme un signe distinctif du fait de sa fonctionnalité d'ensemble et de celle de chacun des éléments qui la composent: rivets, mortaise, boutons-poussoir; que l'invocation par la société LVM d'une part, du caractère arbitraire du signe est contredit par la démonstration de ce que la société

GOYARD utilise depuis des dizaines d'années une serrure identique et d'autre part que son aspect décoratif n'assure pas davantage l'identification d'origine du produit; Attendu que la marque en cause désigne les produits et services suivants: " Serrurerie et quincaillerie métallique et notamment boucles de métaux communs, loquets, verrous, serrures et rivets métalliques. Cuir et imitations du cuir, produits en ces matières non compris dans d'autres classes, malles et valises et notamment coffres, sacs et trousses de voyage, sacs à main, porte-documents et mallettes, coffrets destinés à contenir des articles de toilette, porte-feuilles et porte -monnaie."; Attendu en premier lieu qu'en ce qui concerne les produits de la classe 18, " Cuir et imitation du cuir", force est de

demande de déchéance n'est pas fondée en ce qui concerne les sacs et trousses de voyage, sacs à main, porte-documents et mallettes et coffrets destinés à contenir des articles de toilette; Attendu qu'en revanche, il n'est pas justifié de l'usage de la marque d'une part pour les cuirs et imitations du cuir, la société demanderesse n'établissant pas commercialiser ces matières premières, d'autre part pour les porte-feuilles et porte-monnaie, et enfin pour les produits ou services de la classe 6, l'apposition de la marque sur des produits de maroquinerie en cuir n'établissant pas l'exploitation de celle-ci pour des produits de serrurerie dont rien ne vient établir qu'ils seraient offerts à la vente par la société LVM de façon distincte des précédents; Qu'en conséquence, la demande de déchéance, qui porte sur l'intégralité des produits et services et dont la recevabilité n'est pas discutée, sera prononcée en ce qui concerne ces produits et ce à compter du 1er mars 2000; Sur la contrefaçon :

Attendu qu'il résulte du procès-verbal de saisie-contrefaçon et de l'examen du modèle de sac saisi qu'est apposé sur celui-ci un fermoir reproduisant servilement la marque 1 506 382; qu'en effet, il reprend à l'identique la forme arrondie de la partie supérieure du moraillon, la forme en V de sa partie inférieure, la forme carrée du palastre d'une largeur identique au moraillon, ainsi que le nombre et l'emplacement des rivets, de la serrure et des boutons poussoirs; Attendu que les différences qui peuvent être relevées à la suite d'un examen attentif, à savoir, le fait que les rivets sont factices et ne

constituent que des renflements du métal, de même que la perforation destinées à montrer l'apparence d'une serrure, ne sont pas perceptible par un consommateur normalement attentif qui n'aurait pas simultanément les deux signes sous les yeux, de sorte qu'elles doivent être considérées comme insignifiantes; Qu'il y a lieu dès lors de faire application des dispositions de l'article L 713-2 du code de la Propriété Intellectuelle qui dispose que: " Sont interdits, sauf autorisation du propriétaire: a) la reproduction, l'usage ou l'apposition d'une marque, même avec l'adjonction de mots tels que : " formule, façon, système, imitation, genre, méthode", ainsi que l'usage d'une marque reproduite, pour des produits ou services identiques à ceux désignés dans l'enregistrement; b) la suppression ou la modification d'une marque régulièrement apposée." Qu'étant relevé que la reproduction de la marque a été réalisée sur des sacs à main, produit également visé au dépôt de celle-ci, il y a lieu de dire que le grief de contrefaçon est bien fondé, la bonne foi, invoquée par la société BAG'S VILLE étant indifférente en cette matière. Sur la concurrence déloyale: Attendu que la société LVM

reproche en outre aux sociétés défenderesses d'avoir cherché à s'inscrire dans son sillage et à profiter sans bourse délier des investissements considérables qu'elle réalise pour asseoir sa notoriété et faire connaître ses produits et ce en mettant sur le marché, dans l'ensemble de ses 81 magasins en ce qui concerne la société ANDRE, des produits de piètre qualité réalisés en PVC "imitation croco" vendus à bas prix, très semblables à ses propres modèles " SUHALI" et dans la forme au modèle lancé en 2003 sous l'appellation "Sac de Nuit"; Attendu que la société ANDRE SA oppose l'irrecevabilité de la société LVM à agir sur ce fondement en ce qu'elle ne commercialise pas elle-même les produits considérés lesquels sont vendus par la société Magasins Louis Vuitton France qui exploite en location- gérance les magasins de la société LVM; Attendu que sur le fond, elle soutient que les faits invoqués ne sont pas distincts des actes de contrefaçon, que la vente à moindre prix n'est pas une faute et que le sac qu'elle a commercialisé est sans rapport avec le modèle " Sac de Nuit", la présence de deux enchapes triangulaires fixées par des rivets métalliques procédant de

l'utilisation d'un éléments usuel en maroquinerie; Attendu que la société BAG'S VILLE oppose pour sa part qu'elle n'est ni le créateur, ni l'importateur des sacs litigieux qu'elle se borne à distribuer; que les produits ne sont pas en situation de réelle concurrence, ne visant pas la même clientèle et n'étant pas commercialisés dans la même zone géographique; Attendu que la société LVM est, en sa qualité de propriétaire des fonds de commerce de la société Magasins Louis Vuitton France, recevable à agir en concurrence déloyale en indemnisation de son préjudice propre résultant de la dépréciation de ses fonds de commerce dont elle est propriétaire; Attendu que si les faits visés au titre de la concurrence déloyale sont bien distincts de ceux de contrefaçon en ce qu'il est reproché d'avoir importé et commercialisé en France un modèle de sac revêtus de la marque qui constituerait en outre l'imitation de certains modèle de la gamme Vuitton, force est cependant de constater que ce reproche n'est pas fondé, la ressemblance alléguée ne portant que sur l'un des éléments du sac dit " Sac de Nuit" et sur la matière des sacs SUHALI, sans qu'il s'en dégage une impression d'identité d'ensemble, ce qui est

insuffisant à caractériser une quelconque volonté de se placer dans le sillage de la société LVM; Qu'en conséquence, cette demande n'est pas fondée. Sur les mesures réparatrices: Attendu qu'il sera fait droit à la mesure d'interdiction sous astreinte et la demande de mesure de publicité selon les modalités précisées au dispositif; qu'en revanche, la mesure d'interdiction étant suffisante à assurer la préservation des droits de la demanderesse, il n'y a pas lieu de prononcer la confiscation sollicitée; Attendu que le préjudice résultant de la banalisation de la marque sera réparé par l'allocation de la somme de 30 000 euros à titre de dommages et intérêts en l'absence de démonstration d'un préjudice commercial; Sur les responsabilités et la demande de garantie de la société ANDRE:

Attendu que vis à vis de la société LVM, les deux défenderesses qui ont contribué l'une et l'autre à la réalisation du dommage, seront tenues in solidum; Attendu que la société ANDRE SA sollicite la garantie de la société BAG'S VILLE sur le fondement des conditions générales d'achat qui prévoient en leur article 10.3 que le fournisseur s'engage à prendre toutes les précautions nécessaires pour que les articles livrés ne puissent faire l'objet d'une action en contrefaçon et à indemniser l'entreprise de l'intégralité du préjudice subi, condamnation à dommages et intérêts, pertes et manque à gagner et impossibilité de vendre les articles litigieux; qu'elle demande à ce dernier titre la somme de 7735 euros; Attendu que la société BAG'S VILLE, qui n'oppose aucune contestation sur ce point, sera condamnée à garantir la société ANDRE des condamnations prononcées.Qu'au regard des dispositions contractuelles, elle sera également condamnée à rembourser à celle-ci la somme de 2 537 euros correspondant au prix d'achat, selon facture du 22 juillet 2004, de 221 sacs qui ont dû être retirés de la vente; Sur les autres demandes: Attendu que la société BAG'S VILLE, condamnée pour contrefaçon sera déboutée de la demande reconventionnelle fondée sur l'abus du droit d'agir en justice; Attendu qu'il serait inéquitable que la demanderesse supporte la charge de ses frais non compris dans les dépens; qu'au regard des justificatifs produits, il lui sera alloué la somme de 5000 euros en application des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile; Attendu que les

défenderesses seront condamnées in solidum aux dépens de l'instance, incluant les frais de la procédure de saisie-contrefaçon, dépens qui seront recouvrés directement par Maître de CANDE conformément aux dispositions de l'article 699 du même code. PAR CES MOTIFS Le tribunal, statuant en audience publique, par décision contradictoire et en premier ressort, Déboute les sociétés ANDRE SA et BAG'S VILLE de leurs demande de nullité de la marque figurative no 1 506 382 dont est titulaire la société LOUIS VUITTON MALLETIER, Prononce la déchéance de cette marque, en ce qu'elle désigne " Serrurerie et quincaillerie métallique, et notamment boucles en métaux communs, loquets, verrous, serrures et rivets métalliques, cuir et imitation du cuir, porte-feuilles et porte-monnaie" et ce à compter du 1er mars 2000, Dit que la présente décision, une fois devenue définitive, sera transmise, à l'INPI pour inscription au Registre National des Marques, par les soins du greffier saisi à la requête de la partie la plus diligente, Dit qu'en important et commercialisant en France un modèle de sac à main reproduisant sans autorisation la marque no 1 506 382, les sociétés ANDRE SA et BAG'S VILLE ont commis des actes de

contrefaçon au préjudice de la société LOUIS VUITTON MALLETIER, En conséquence, Fait interdiction aux sociétés ANDRE SA et BAG'S VILLE de poursuivre ces agissements sous astreinte de 500 euros par infraction constatée à compter de la signification de la présente décision, Autorise la publication du dispositif du jugement dans deux journaux ou revues au choix de la société LOUIS VUITTON MALLETIER et aux frais in solidum des sociétés ANDRE SA et BAG'S VILLE dans la limite de 3500 euros hors taxes par insertion, Condamne in solidum les sociétés ANDRE SA et BAG'S VILLE à payer à la société LOUIS VUITTON MALLETIER la somme de 30 000 euros à titre de dommages et intérêts, Déboute la société LOUIS VUITTON MALLETIER de sa demande fondée sur la concurrence déloyale et de sa demande de confiscation aux fins de destruction, Dit que la société BAG'S VILLE doit garantir la société ANDRE SA de l'ensemble des condamnations prononcées en principal, frais et dépens et la condamne à rembourser à la société ANDRE SA la somme de 2 537 euros, Déboute la société BAG'S VILLE de sa demande reconventionnelle, Ordonne l'exécution provisoire de la présente décision, Condamne in solidum les sociétés ANDRE SA et BAG'S

VILLE aux entiers dépens de l'instance qui seront recouvrés directement par Maître de CANDE et à payer à la société LOUIS VUITTON MALLETIER la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile. Fait et jugé à Paris Le 1er juin 2006Le 1er juin 2006 Le Greffier Le Président


Synthèse
Tribunal : Tribunal de grande instance de Paris
Formation : Ct0087
Numéro d'arrêt : JURITEXT000006950308
Date de la décision : 01/06/2006

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.grande.instance.paris;arret;2006-06-01;juritext000006950308 ?
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