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10/05/2006 | FRANCE | N°JURITEXT000006952385

France | France, Tribunal de grande instance de Paris, 10 mai 2006, JURITEXT000006952385


TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE PARIS 1ère chambre 1ère section No RG : 05/14407No MINUTE : Assignation du 3 octobre 2005ACTION DISCIPLINAIREINCOMPÉTENCETERRITORIALE M.-D. TExpéditionsexécutoiresdélivrées le :JUGEMENT rendu le 10 mai 2006DEMANDEURLe Procureur de la Républiqueprès le Tribunal de Grande Instance de Paris4, boulevard du Palais75001 PARIS.Madame Mireille VENET, Vice-Procureur DÉFENDEUR Monsieur André X...
... 75019 PARIS assisté de Maître Corinne BITOUN avocat au barreau de PARIS, vestiaire E789En présence de Maître Christian PAUCHET Président de la chambre des n

otaires de l'Aisnereprésentantle Président de la Chambre régionale...

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE PARIS 1ère chambre 1ère section No RG : 05/14407No MINUTE : Assignation du 3 octobre 2005ACTION DISCIPLINAIREINCOMPÉTENCETERRITORIALE M.-D. TExpéditionsexécutoiresdélivrées le :JUGEMENT rendu le 10 mai 2006DEMANDEURLe Procureur de la Républiqueprès le Tribunal de Grande Instance de Paris4, boulevard du Palais75001 PARIS.Madame Mireille VENET, Vice-Procureur DÉFENDEUR Monsieur André X...
... 75019 PARIS assisté de Maître Corinne BITOUN avocat au barreau de PARIS, vestiaire E789En présence de Maître Christian PAUCHET Président de la chambre des notaires de l'Aisnereprésentantle Président de la Chambre régionale de discipline des notaires de la cour d'appel d'Amiensassisté de Maître KUHN avocat au barreau de PARIS, vestiaire P90COMPOSITION DU TRIBUNAL Jean-Claude MAGENDIE, Président du TribunalPrésident de la formationJacques BICHARD, Premier Vice-PrésidentMarie-Dominique TRAPET, Vice-PrésidentAssesseursassistés de Caroline GAUTIER, GreffierDÉBATSEn chambre du conseil, le 5 avril 2006.JUGEMENTDispositif lu en audience publiqueSusceptible de contredit

FAITS ET PROCÉDUREPar requête en date du 5 septembre 2005, le Ministère Public a sollicité l'autorisation d'assigner à jour fixe Monsieur André X..., ancien notaire à la résidence de Soissons, pour que soit prononcée à son encontre, en Chambre du conseil et au plan disciplinaire, la sanction de destitution à raison des atteintes à l'honneur et à la probité dont se serait rendu coupable cet officier ministériel alors qu'il était encore titulaire de son office notarial à Soissons. Une ordonnance rendue le 20 septembre 2005 par le premier vice-président en charge de la Conférence présidentielle, délégué à cet effet par le Président du tribunal, l'y ayant autorisé, l'assignation a été délivrée à Maître X... le 3 octobre 2005.Après

avoir fait l'objet par deux fois d'un renvoi à la demande de Monsieur André X..., l'affaire a été évoquée à l'audience du 5 avril 2006 en chambre du Conseil, Maître X..., spécialement informé par le Président qu'il pouvait demander la publicité des débats, en application des dispositions de l'article 6.1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, n'ayant pas fait le choix d'une audience publique.Maître Christian PAUCHET, Président de la chambre des Notaires de l'Aisne, mandaté à cet effet pour représenter le président de la chambre régionale de disciplines des notaires de la cour d'appel d'Amiens, est intervenu à l'audience et a soulevé l'incompétence territoriale du tribunal de grande instance de Paris pour connaître de ce dossier.Monsieur André X... a, lui aussi, soulevé l'incompétence territoriale de ce tribunal au profit du tribunal de grande instance de Soissons.Le Président a alors indiqué que seule la question de la compétence territoriale serait débattue à cette audience, et que l'affaire serait jugée au fond le 10 mai 2006 dans le cas où le tribunal s'estimerait compétent pour en connaître.Le Ministère public a alors rappelé les termes de la dépêche de Monsieur le Garde des sceaux en date du 10 mars 2005 (pièce no 9)estimant qu'en l'absence "de dispositions claires et précises, il est nécessaire de se référer, outre aux dispositions de l'article 3 du décret no 73-1202 du 28 décembre 1973 relatif à la discipline et au statut des officiers publics ou ministériels, aux principes du droit commun de la procédure civile" ... qui prévoient que "la juridiction territorialement compétente est, sauf disposition contraire, celle du lieu où demeure le défendeur". Le procureur de la République a encore fait valoir que, par arrêt du 8 novembre 2004, la cour d'appel de Paris a condamné Monsieur André X... à une peine d'emprisonnement de cinq ans avec sursis et à une amende de 38 000

euros pour des faits de complicité de mise d'un local privé à la disposition d'une personne s'y livrant à la prostitution.À l'audience, l'officier ministériel poursuivi disciplinairement a été entendu le dernier, conformément aux dispositions de l'article 16 du décret du 28 décembre 1973 modifié. Il a alors indiqué qu'il ne résidait chez son fils à Paris que pour respecter le contrôle judiciaire auquel il est astreint, mais que son domicile se trouvait toujours à Soissons.À l'issue des débats, le Président a invité Maître X... à se présenter à l'audience du 10 mai 2006 à 15 heures 30 à laquelle le présent jugement serait rendu et prononcé publiquement.MOTIFS DE LA DÉCISIONSur l'exception d'incompétence territoriale soulevée in limine litis par le défendeur et par la chambre des notairesAttendu qu'aux termes de l'article 3 du décret no 73-1202 du 28 décembre 1973 modifié, "l'officier public ou ministériel poursuivi disciplinairement en application de l'article 2 de l'ordonnance du 28 juin 1945 est déféré, dans les conditions précisées par cette ordonnance ..., à la chambre de discipline ou au tribunal de grande instance dans le ressort duquel est établi l'office dont il est titulaire" ;Que ce texte ne précise pas la juridiction territorialement compétente dans le cas où l'officier ministériel concerné est sorti de charge, ce qui est le cas de Maître André X..., dont la démission a été acceptée par le Garde des sceaux, ministre de la justice, ainsi qu'il résulte notamment de la publication au Journal officiel de la République française de l'arrêté du 14 mars 2000 portant nomination de Maître Patrick LANNOIS en qualité de notaire à la résidence de Soissons, en remplacement de Maître André X..., démissionnaire ;Attendu que si, comme le soutient le ministère public, l'article 38 du décret du 28 décembre 1973 dispose qu'il est "procédé comme en matière civile pour tout ce qui n'est pas réglé par les dispositions de procédure contenues dans

l'ordonnance du 28 juin 1945 et le présent décret", il ne peut toutefois être valablement déduit de la lecture de cette disposition réglementaire que la compétence du tribunal de grande instance dans le ressort duquel se trouvait l'office où exerçait le notaire poursuivi disciplinairement devrait être exclue au profit de son lieu de résidence, par application des dispositions générales de l'article 42 du nouveau code de procédure civile qui prévoient la compétence de la juridiction du lieu où demeure le défendeur ;Attendu qu'en effet, en son article 39, le décret du 28 décembre 1973 retient expressément l'hypothèse dans laquelle des poursuites disciplinaires sont exercées contre un notaire honoraire pour des faits commis postérieurement à la cessation de ses fonctions ; que cette exception n'aurait pas manqué d'être élargie au notaire démissionnaire si l'auteur des textes réglementaires l'avait jugé opportun ;Attendu, au contraire, que le décret no 2004-1304 du 26 novembre 2004, modifiant l'article 14-4 du décret no 45-117 du 19 décembre 1945 portant règlement d'administration publique pour l'application du statut du notariat, entré en vigueur à l'occasion du renouvellement des conseils régionaux et des chambres des notaires, prévoit la compétence territoriale du ressort dans lequel le notaire poursuivi "exerce ou exerçait" son office au moment des faits ;Attendu qu'il apparaît ainsi qu'il n'existe aucun motif sérieux d'écarter la compétence du tribunal dont dépendait l'ancien notaire poursuivi au profit de la juridiction dans le ressort de laquelle il réside ;Attendu que la juridiction qui a logiquement vocation à statuer disciplinairement sur le cas d'un officier ministériel qui a, entre temps, donné sa démission ou qui a été admis à prendre sa retraite, ne peut être que celle où il a effectivement exercé son office ;Qu'elle apparaît en effet d'autant plus avoir vocation naturelle à recevoir compétence exclusive pour connaître des procédures disciplinaires engagées à

l'encontre d'un détenteur du Sceau de l'État, que cette juridiction, amenée en outre à connaître des actions en responsabilité professionnelle engagées par des usagers à l'encontre d'un officier ministériel, elle bénéficie de la meilleure information sur le comportement et les agissements de celui-ci ; que, de surcroît, le ministère public placé auprès de cette juridiction, est le mieux à même d'exercer le contrôle qu'il tient de la loi ;Attendu, au surplus, qu'il résulte des articles 16 et 37 du décret du 28 décembre 1973 modifié que, dans le cadre des procédures disciplinaires, le président de la chambre de discipline présente ses observations, le cas échéant par l'intermédiaire d'un des membres de la chambre ; que le président de la chambre des notaires ne pouvant être représenté par un avocat mais simplement assisté par lui, il apparaîtrait illogique et incongru d'attraire un ancien notaire devant une juridiction autre que celle dont il dépendait au moment où il exerçait son office et où il commettait les agissements qui se trouvent à l'origine des poursuites engagées contre lui ; Attendu, en effet, que l'on ne saurait sans préjudice contraindre les organes de poursuites, qu'il s'agisse du parquet ou de la chambre de discipline, à saisir une juridiction différente de celle qui avait eu vocation à connaître d'éventuelles fautes commises par un officier ministériel alors en activité, pour le juger disciplinairement, au motif que l'intéressé ne demeure plus, au moment où les poursuites sont exercées contre lui, dans le ressort de la juridiction chargée d'assurer la discipline de la profession ;Que cette observation vaut également pour les tiers que le tribunal peut être amené à entendre, "s'il y a lieu", aux termes de l'article 16 du décret du 28 décembre 1973 ;Attendu qu'en l'espèce, le fait que la procédure diligentée par le parquet à l'encontre de Monsieur André X... a été engagée à Paris a contraint le président de la chambre des notaires de l'Aisne

à se déplacer à plusieurs reprises hors de son ressort pour soulever l'incompétence de cette juridiction ;Attendu que le tribunal de grande instance de Paris n'a, dans ces conditions, aucun titre à connaître des fautes commises par Monsieur André X... alors qu'il était notaire à Soissons ;Attendu qu'il importe peu à cet égard que ce soit le tribunal de grande instance, puis la cour d'appel de Paris, qui aient condamné pénalement Monsieur André X... pour les faits qui se trouvent à l'origine des présentes poursuites, la chambre des notaires de l'Aisne ayant une parfaite connaissance des décisions prononcées contre lui ;Qu'il n'est pas sans intérêt d'observer ici que Monsieur X... avait, dès 1998, fait l'objet d'une mesure de suspension provisoire à la demande du procureur de la République de Soissons, ainsi qu'il résulte d'une ordonnance de référé rendue le 3 mars 1998 par le président du tribunal de grande instance de Soissons produite aux débats par le ministère public (pièce no 1) ;

Que pour se présenter devant le tribunal de grande instance de Soissons dans le cadre de poursuites disciplinaires, Monsieur André X... pourra obtenir sans difficultés un aménagement d'un éventuel contrôle judiciaire ;Attendu qu'il y a lieu, en conséquence, de se déclarer incompétent au profit du tribunal de grande instance de Soissons ;PAR CES MOTIFSLE TRIBUNAL, STATUANT EN AUDIENCE PUBLIQUE, PAR JUGEMENT CONTRADICTOIRE , SUSCEPTIBLE DE CONTREDITVu les articles 3, 16, 37, 38 et 39 du décret no 73-1202 du 28 décembre 1973 relatif à la discipline des officiers publics ou ministériels ;Vu l'article 14-4 du décret no 45-117 du 19 décembre 1945 dans sa rédaction résultant du décret no 2004-1304 du 26 novembre 2004 ;Se déclare territorialement incompétent pour connaître de la demande formée en matière disciplinaire par le procureur de la République de Paris à l'encontre de Monsieur André X..., ancien notaire à la résidence de

Soissons, au profit du tribunal de grande instance de Soissons ;Dit qu'à défaut de contredit dans le délai légal, le dossier sera transmis au greffe civil du tribunal de grande instance de Soissons ;Laisse l'intégralité des dépens à la charge du Trésor public ;

FAIT ET JUGÉ À PARIS, LE 10 MAI 2006.LE GREFFIER :

LE PRÉSIDENT :Caroline GAUTIER

Jean-Claude MAGENDIE


Synthèse
Tribunal : Tribunal de grande instance de Paris
Numéro d'arrêt : JURITEXT000006952385
Date de la décision : 10/05/2006

Analyses

OFFICIERS PUBLICS OU MINISTERIELS - Notaire - Discipline - Procédure

Lorsque des poursuites disciplinaires sont exercées contre un notaire, le décret n 2004-1304 du 26 novembre 2004 prévoit la compétence territoriale du ressort dans lequel le notaire "exerce ou exerçait" son office au moment des faits ; la juridiction compétente pour statuer disciplinairement sur les poursuites engagées contre un notaire démissionnaire ou admis à prendre sa retraite ne peut donc être que celle du lieu où il a effectivement exercé son office et non celle du lieu où il demeure


Références :

Décret no 2004-1304 du 26 novembre 2004, modifiant l'article 14-4 du décret no 45-117 du 19 décembre 1945 portant règlement d'administration publique pour l'application du statut du notariat

Décision attaquée : DECISION (type)


Composition du Tribunal
Président : Président : M. MAGENDIE

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.grande.instance.paris;arret;2006-05-10;juritext000006952385 ?
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