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27/04/2006 | FRANCE | N°JURITEXT000006948621

France | France, Tribunal de grande instance de Paris, Ct0087, 27 avril 2006, JURITEXT000006948621


T R I B U N A L D E GRANDE I N S T A N C E D E P A R I S 3ème chambre 2ème section No RG : 04/17318 No MINUTE : Assignation du : 26 Octobre 2004 Expéditions exécutoires délivrées le : JUGEMENT rendu le 27Avril 2006

DEMANDEURS Monsieur Norbert X... 5, rue Sous les Moulins 83660 CARNOULES Madame Cécile Y... épouse X... 5, rue Sous Les Moulins 83660 CARNOULES représenté par Me Olivier ACHACHE, avocat au barreau de PARIS, avocat postulant, vestiaire E 267, Me Marc BACLET, avocat au barreau de BEAUVAIS, avocat plaidant DÉFENDERESSE S.A. SOCIETE NATIONALE DE TELEVISION FRANCE 3 7

Esplanade Henri de France 75015 PARIS représentée par Me Alain D...

T R I B U N A L D E GRANDE I N S T A N C E D E P A R I S 3ème chambre 2ème section No RG : 04/17318 No MINUTE : Assignation du : 26 Octobre 2004 Expéditions exécutoires délivrées le : JUGEMENT rendu le 27Avril 2006

DEMANDEURS Monsieur Norbert X... 5, rue Sous les Moulins 83660 CARNOULES Madame Cécile Y... épouse X... 5, rue Sous Les Moulins 83660 CARNOULES représenté par Me Olivier ACHACHE, avocat au barreau de PARIS, avocat postulant, vestiaire E 267, Me Marc BACLET, avocat au barreau de BEAUVAIS, avocat plaidant DÉFENDERESSE S.A. SOCIETE NATIONALE DE TELEVISION FRANCE 3 7 Esplanade Henri de France 75015 PARIS représentée par Me Alain DE BOUCHONY, avocat au barreau de PARIS, avocat postulant, vestiaire R72 COMPOSITION DU TRIBUNAL Claude VALLET, Vice-Président Véronique RENARD, Vice-Président Michèle PICARD, Vice-Président assistée de Caroline LARCHE, Greffier, lors des débats et Marie-Aline PIGNOLET, Greffier au prononcé. DEBATS A l'audience du 02 Février 2006 tenue publiquement JUGEMENT Prononcé publiquement Contradictoirement en premier ressort I- RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE : Norbert X... et Cécile Y... épouse X... sont photographes sous-marins. Depuis 1994 ils réalisent des reportages sur la mer pour différents magazines. Ils ont consacré plusieurs années à l'étude et à la photographie du plancton. Début décembre 1999 ils étaient contactés par Madame Anne Z..., journaliste à l'émission Thalassa qui souhaitait réaliser un reportage sur le plancton. Ils découvraient par la suite que ce reportage intitulé "Cécile et Norbert photographes de plancton" avait été diffusé en février 2000 sur France 3 puis le 28 mai 2003 sur Planète Thalassa et que 7 photos sur les 20 confiées à Madame Z... avaient été montrées sans crédit photographique et sans mention au générique. Ils apprenaient également que le reportage avait été diffusé sur TV5 réseau mondial. Ils adressaient une facture à la

société Nationale de Télévision FRANCE 3 pour un montant de 74.781, 28 euros le 28 novembre 2003, puis un rappel le 15 décembre 2003. Lors d'une consultation du site internet Planète Thalassa ils découvraient que le reportage avait été diffusé onze fois et que la présentation ne mentionnait pas leur nom mais uniquement leurs prénoms. Enfin, ils apprenaient que l'INA disposait d'une fiche de dépôt légal afférente à cette émission. Par ailleurs, début juillet 1999 ils étaient contactés par la rédaction de l'émission de FRANCE 3 "C'est l'été" qui souhaitait les interviewer au sujet des fonds méditerranéens. Ils se rendaient le 22 août à Saint- Cyr sur Mer afin d'être filmés dans l'eau en train de prendre des photos. Ils participaient ensuite à l'émission diffusée en direct. Ils disent avoir appris début 2004 que seize de leurs photographies avaient été montrées dans le reportage et diffusées sans autorisation et sans crédit photographique. Norbert et Cécile X... faisaient assigner la Société Nationale de Télévision FRANCE 3 par acte d'huissier délivré le 26 octobre 2004. Dans leurs dernières conclusions signifiées le 24 octobre 2005 ils demandent au tribunal d'ordonner à la Société Nationale de Télévision FRANCE 3 de cesser toute diffusion dans l'avenir du reportage "Cécile et Norbert, Photographes de plancton", de la condamner à leur payer la somme de 324.648 euros à titre de dommages et intérêts au titre des diffusions de cette émission, la somme de 32.388 euros à titre de dommages et intérêts au titre de l'émission "C'est l'été" diffusée le 26 août 1999 et la somme de 2.000 euros en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, le tout assorti de l'exécution provisoire. La Société Nationale de Télévision FRANCE 3 a signifié ses dernières conclusions le 18 octobre 2005 . Elle demande au tribunal de dire que Norbert et Cécile X... ont autorisé sans contrepartie financière la diffusion de leurs photographies et de leur image dans l'émission

Thalassa du 11 février 2000, de juger que FRANCE 3 n'est pas responsable des conséquences résultant des diffusions de ce reportage effectuées sur Planète Thalassa, TV5 ou toute autre chaîne que FRANCE 3, de l'autoriser à user normalement des droits qu'elle détient sur le reportage litigieux et qui lui ont été cédés gratuitement, en conséquence de dire que les demandes sont irrecevables et/ou mal fondées et les en débouter, subsidiairement de juger que le barème UPC est dépourvu de toute valeur contractuelle et n'est pas applicable pour calculer le montant des droits des époux X... au titre de la diffusion du reportage, à titre infiniment subsidiaire de juger que Norbert et Cécile X... ont fait une mauvaise application du barème UPC et en conséquence rejeter leurs demandes, de juger qu'ils ont autorisé sans contrepartie la diffusion de leurs photographies et de leur image dans l'émission "C'est l'été" diffusée le 23 août 1999, à titre infiniment subsidiaire de juger qu'ils ont fait une mauvaise application du barème UPC, en conséquence rejeter les demandes relatives à cette émission, et les condamner à lui restituer la somme de 16.208, 84 euros qui leur a été réglée en exécution de l'ordonnance de référé du 19 juillet 2004 avec intérêts de droit et capitalisation des intérêts à compter du jour du paiement de cette somme le 20 juillet 2004 et les condamner à lui payer la somme de 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, le jugement devant être assorti de l'exécution provisoire. II- SUR CE : * Sur le droit à l'image : Les époux X... se plaignent d'une atteinte à leur droit à l'image du fait de la diffusion du reportage de l'émission Thalassa sur FRANCE 3, de la diffusion de ce même reportage à plusieurs reprises sur d'autres chaînes et de la diffusion de l'émission "C'est l'été" sur FRANCE 3. Il n'est pas contestable que les époux X... ont consenti à être filmés gratuitement dans le cadre du reportage

intitulé "Cécile et Norbert, Photographes de plancton" destiné à être diffusé dans le magazine Thalassa de FRANCE 3. Il en est de même pour l'émission "C'est l'été". Dans les deux cas ils se sont prêtés pour les besoins de l'émission à des séquences où ils sont montrés dans l'eau faisant semblant de photographier des planctons. Il n'y a en conséquence aucune atteinte à leur image du fait de la diffusion de ces deux émissions auxquelles ils ont consenti. En revanche les autres diffusions du reportage de THALASSA n'étaient pas envisagées ou prévues lorsqu'ils ont donné leur accord pour être filmés. Un tel accord ne se présume pas. Les époux X... ont relevé seize diffusions de l'émission THALASSA sur Planète Thalassa et TV5. Ils pensent qu'il y aurait eu d'autres diffusions, notamment par l'intermédiaire de CFI. La société de Télévision FRANCE 3 admet ces diffusions mais se garde de préciser leur nombre exact. Il en résulte qu'en l'absence de consentement de leur part ces autres diffusions du reportage de THALASSA ont porté atteinte à leur image, dont la responsabilité incombe à la Société FRANCE 3 pour avoir cédé le reportage en cause à d'autres diffuseurs * Sur la contrefaçon : Le tribunal note que 7 photographies dont Norbert et Cécile X... sont les auteurs ont été montrées dans le reportage de THALASSA et quatorze photographies dans l'émission "C"est la vie". Aux termes des dispositions de l'article L.131-2 du Code de la propriété intellectuelle "Les contrats de représentation, d'édition et de production audiovisuelle définis au présent titre doivent être constatés par écrit. Il en est de même des autorisations gratuites d'exécution. Dans tous les autres cas, les dispositions des articles 1341 à 1348 du code civil sont applicables." Le tribunal relève qu'en l'espèce FRANCE 3 est producteur des émissions litigieuses et en conséquence que les dispositions de l'article L.131-2 du Code de la propriété intellectuelle s'appliquent. Or aucun écrit n'existe qui

permet la reproduction des photographies des époux X... dans les émissions THALASSA et "C'est la vie". La reproduction de ces 21 photographies sans autorisation constitue donc une contrefaçon de la part de FRANCE 3,dans l'impossibilité de rapporter la preuve de la cession dont elle se prévaut. Pour ce qui est du crédit des photographies, les époux X... se plaignent de ce que dans l'émission Thalassa leurs noms n'apparaîtraient pas. De même dans l'émission "C'est l'été" les photographies auraient été diffusées sans crédit photo et leurs noms ne seraient pas cités au générique. Le tribunal a constaté au visionnage de l'enregistrement de l'émission Thalassa que le nom des époux X... n'est cité qu'à une seule reprise très rapidement et qu'il n'apparaît pas au générique de sorte qu'il n'était pas possible pour le spectateur de retenir qu'ils étaient les auteurs des photographies. En revanche s'il est exact que le nom des époux X... n'apparaît pas au générique de l'émission "C'est l'été", leurs noms sont continuellement cités pendant la durée du sujet qui leur est consacré lequel consiste à leur faire commenter leurs photographies au fur et à mesure qu'elles apparaissent à l'écran. De plus leurs noms sont écrits au début du reportage sur un bandeau situé en bas de l'écran lorsqu'ils apparaissent pour la première fois. C'est donc à tort qu'ils reprochent à cette émission de ne pas les avoir crédités des photographies montrées. Il résulte de ces éléments qu'en reproduisant sept photographies de Norbert et Cécile X... dans l'émission Thalassa sans mentionner leurs noms, la société FRANCE 3 a porté atteinte à leur droit moral. * Sur les mesures réparatrices : Outre le préjudice résultant de leur droit à l'image du fait des multiples diffusions non consenties de l'émission de THALASSA, les époux X... fondent leur demande relative à la contrefaçon de leurs droits d'auteur sur les photographies sur la base du barème de

l'Union des Photographes Créateurs (UPC), qu'ils considèrent comme une référence. Selon ce barème le prix d'une photographie sous marine serait de 556 euros par diffusion. Le tribunal estime que ce barème n'a de valeur qu'à titre indicatif. Compte tenu du nombre de photographies diffusées dans les deux émissions, soit 21, du fait que l'émission "C'est l'été" a été diffusé une seule fois et du nombre de diffusions de l'émission THALASSA, soit seize passages, le tribunal estime le préjudice patrimonial subi par les époux X... à la somme de 50.000 euros. Le préjudice moral subi du fait de l'absence de crédit dans l'émission THALASSA sera réparé par l'allocation de la somme de 5.000 euros. Des Des mesures d'interdiction seront en outre prononcées dans les termes du dispositif de la présente décision.. Sur l'article 700 : Les époux X... sollicitent le paiement de la somme de 2.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile. Il serait inéquitable de laisser à leur charge les sommes exposées par eux et non comprises dans les dépens. Il leur sera en conséquence alloué la somme de 2.000 euros de ce chef. PAR CES MOTIFS LE TRIBUNAL, Statuant en audience publique, en premier ressort et par jugement contradictoire, Dit que la Société Nationale de Télévision FRANCE 3 a porté atteinte à l'image de Nobert X... et Cécile Y... épouse X... .

Dit que la société Nationale de Télévision FRANCE 3 a commis des actes de contrefaçon en permettant la diffusion de seize émissions de THALASSA consacrées à Norbert X... et Cécile Y... épouse X... sans leur autorisation et en diffusant dans les émissions THALASSA et C'est l'été 21 de leurs photographies sans autorisation, Dit que la société Nationale de Télévision FRANCE 3 a porté atteinte

au droit moral de Norbert X... et Cécile Y... épouse X... en omettant de les créditer de 14 photos diffusées dans l'émission THALASSA, Condamne la société Nationale de Télévision FRANCE 3 à payer à Norbert X... et Cécile Y... épouse X... la somme de 50.000euros en réparation de leur préjudice patrimonial, Condamne la société Nationale de Télévision FRANCE 3 à payer à Norbert X... et Cécile Y... épouse X... la somme de 5.000euros en réparation de leur préjudice moral, Fait interdiction à la société Nationale de Télévision FRANCE 3 de diffuser le reportage "Cécile et Norbert, photographes de plancton" sous astreinte de 500euros par infraction constatée, Ordonne l'exécution provisoire du présent jugement, Condamne la société Nationale de Télévision FRANCE 3 à payer à Norbert X... et Cécile Y... épouse X... la somme de 2.000euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, Condamne la société Nationale de Télévision FRANCE 3 aux dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile. Fait à PARIS le 27 avril 2006. LE GREFFIER

LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Tribunal de grande instance de Paris
Formation : Ct0087
Numéro d'arrêt : JURITEXT000006948621
Date de la décision : 27/04/2006

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.grande.instance.paris;arret;2006-04-27;juritext000006948621 ?
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