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06/04/2006 | FRANCE | N°JURITEXT000006950041

France | France, Tribunal de grande instance de Paris, Ct0087, 06 avril 2006, JURITEXT000006950041


T R I B U N A L D E GRANDE I N S T A N C E D E P A R I S 3ème chambre 2ème section No RG : 03/14471 No MINUTE : Assignation du : 10 Juin 2003 Expéditions exécutoires délivrées le : JUGEMENT rendu le 06 Avril 2006

DEMANDERESSE Société X... SPA Via Oberdan 702030 LENTATE SUL SEVESO (ITALIE) représentée par Me Bruno MARTIN, avocat au barreau de PARIS, avocat postulant, vestiaire R.051, Me OHL DANIEL, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant, vestiaire R051 DÉFENDEURS Maitre Marie-Hélène MONTRAVERS es-qualité de Mandataire-liquidateur de la Société SA DUE 62 Boulevard SÃ

©bastopol 75003 PARIS Monsieur Emmanuel Y... 26 Rue des Lombards 75001...

T R I B U N A L D E GRANDE I N S T A N C E D E P A R I S 3ème chambre 2ème section No RG : 03/14471 No MINUTE : Assignation du : 10 Juin 2003 Expéditions exécutoires délivrées le : JUGEMENT rendu le 06 Avril 2006

DEMANDERESSE Société X... SPA Via Oberdan 702030 LENTATE SUL SEVESO (ITALIE) représentée par Me Bruno MARTIN, avocat au barreau de PARIS, avocat postulant, vestiaire R.051, Me OHL DANIEL, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant, vestiaire R051 DÉFENDEURS Maitre Marie-Hélène MONTRAVERS es-qualité de Mandataire-liquidateur de la Société SA DUE 62 Boulevard Sébastopol 75003 PARIS Monsieur Emmanuel Y... 26 Rue des Lombards 75001 PARIS représentés par Me Thierry LACROIX, avocat au barreau de PARIS, avocat postulant, vestiaire R 276 COMPOSITION DU TRIBUNAL Claude VALLET, Vice-Président Véronique RENARD, Vice-Président Michèle PICARD, Vice-Président assistée de Caroline LARCHE, Greffier, lors des débats et Marie-aline PIGNOLET, Greffier au prononcé. DEBATS A l'audience du 03 Février 2006 tenue publiquement JUGEMENT Prononcé publiquement Contradictoirement en premier ressort

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

La société de droit italien X... Spa fabrique et commercialise des cuisines et des éléments de cuisine.

Elle est titulaire de la marque internationale désignant la France "X..." déposée le 14 février 1990 sous priorité d'une marque italienne et enregistrée sous le no 548 027 pour désigner les meubles de la classe 20 ainsi que de la marque

internationale désignant également la France b déposée le 1er avril 1961 sous priorité d'une marque italienne, renouvelée en dernier lieu le 1er avril 2001 et enregistrée sous le no 2R241960 pour désigner aussi les produits de la classe 20.

ni le quantum des préjudices qu'ils invoquent ; Maître MONTRAVERS, ès-qualités conclut par ailleurs à la recevabilité de ses demandes en application de l'article 1844-8 du Code Civil et sur le fond, à titre principal fait valoir que la société X... aurait engagé sa responsabilité contractuelle en résiliant par anticipation un contrat de distribution exclusive à durée déterminée qui se serait prolongé par tacite reconduction par périodes de deux ans, jusqu'au 1er janvier 2004 et à titre subsidiaire, si le Tribunal jugeait que ce contrat de distribution était à durée indéterminée, que la société X... aurait engagé sa responsabilité sur le fondement de L 442.6.1.5o du Code de Commerce ; dans l'un ou l'autre cas Maître MONTRAVERS, ès-qualités, sollicite paiement des sommes de :

- 1,4 million d'euros de dommages et intérêts en réparation du préjudice économique et financier de la société DUE - 630.000 euros de dommages et intérêts en réparation de son préjudice résultant du détournement de la clientèle de la société DUE par X... STUDIO SARL située à Paris 7éme, société française du groupe X... Italie - 150.000 euros de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral de la société DUE Monsieur Emmanuel Y... demande quant à lui de dire et juger que la résiliation par la Société X... du

contrat de distribution exclusive qui le liait à la SA DUE lui a occasionné des préjudices par ricochet par application de l'article 1382 du Code Civil et en conséquenceusive qui le liait à la SA DUE lui a occasionné des préjudices par ricochet par application de l'article 1382 du Code Civil et en conséquence de condamner la Société X... à lui payer les sommes de : - 61.000 euros de dommages et intérêts en réparation de son préjudice économique correspondant à la perte de son investissement de départ pour faire reprendre la société DUE par sa société " Y... DISTRIBUTION SARL" - 102.000 euros dommages et intérêts en réparation de son préjudice économique correspondant à sa La société X... indique avoir notifié à compter du 1er août 2002 à la société DUE qui était l'un de ses distributeurs agrées en France autorisé à faire usage de ces marques notamment pour son fond de commerce situé à Paris 157 rue du Faubourg Saint-Honoré, la résiliation du contrat de distribution à la suite du non paiement des échéances et des commandes ; qu'elle a cependant

découvert courant 2003 que la société DUE continuait à faire usage de ses marques sans autorisation, à titre d'enseigne et de nom commercial, pour commercialiser des éléments et meubles de cuisine, laissant ainsi croire qu'elle était toujours distributeur et revendeur agréé.

Par acte d'huissier en date du 10 juin 2003 la société de droit italien X... Spa

-ci après désignée X...- a fait assigner la société DUE en contrefaçon, au sens de l'article

L 713-2 du Code de la Propriété Intellectuelle, de la marque nominale X... no 548 027 et de la marque semi-figurative b no 2R241960 ainsi qu'en concurrence déloyale, et sollicite outre toutes mesures d'interdiction d'usage, d'arrêt immédiat de toute distribution ou diffusion des documents publicitaires et commerciaux et de suppression des marques contrefaites de la devanture et des murs du fonds de commerce, la condamnation de la société défenderesse à lui payer la somme de 100.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du

préjudice causé par la contrefaçon, la somme de 100.000euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait de la concurrence déloyale et parasitaire ainsi que celle de 6.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, le tout au bénéfice de l'exécution provisoire,

Par acte d'huissier en date du 17 novembre 2003 la société X... a assigné en intervention forcée Maître Marie-Hélène MONTRAVERS prise perte de rémunération - 34.000 euros de dommages et intérêts en réparation de son préjudice économique correspondant à son manque à gagner - 12.195,92 euros de dommages et intérêts en réparation de son préjudice économique correspondant à une accumulation de dettes - 10.000 euros de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral résultant de l'expulsion de son domicile - 100.000 euros de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral résultant de la mise en liquidation judiciaire de la société DUE. - 100.000 euros de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral lié à sa mise en cause personnelle dans la présente instance sur la

base de moyens diffamatoires Les défendeurs sollicitent en tout état de cause la condamnation de la société X... à verser à Maître MONTRAVERS, es qualité de mandataire liquidateur la SA DUE, et à Monsieur Emmanuel Y... la somme de 10.000 euros de dommages et intérêts en réparation de leur préjudice moral pour procédure abusive ainsi que sa condamnation à rembourser la somme de 15.000 euros à Maître MONTRAVERS, es qualité de mandataire liquidateur la SA DUE, et celle de 5.000 euros à Monsieur Emmanuel Y... par application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, le tout au bénéfice de l'exécution provisoire. L'ordonnance de clôture a été rendue le 14 octobre 2005. MOTIFS DE LA DÉCISION : Sur le rejet des pièces no 26 et 33 produites par la société X... Z... que les défendeurs sollicitent le rejet de ces pièces aux motifs que la première ne respecte pas les dispositions de l'article 202 du Nouveau Code de Procédure Civile et que la seconde est une preuve faite à elle-même par la société

X... ; Que cependant, si la pièce no 26 produite par la société X... est effectivement une attestation dactylographiée de Monsieur Paolo X... et si la pièce no 33 est une attestation certes manuscrite mais émanant de Monsieur Philippe A... gérant et associé de la société X... Studio Paris, ces deux en sa qualité de mandataire-liquidateur de la société DUE, objet d'une procédure de liquidation judiciaire par jugement du Tribunal de Commerce de Paris du 12 juin 2003, ainsi que Monsieur Emmanuel Y... aux mêmes fins et en responsabilité personnelle à l'encontre de ce dernier du fait d'une faute intentionnelle et d'une particulière gravité détachable de ses fonctions de président de la société DUE, et sollicite en conséquence, l'inscription au passif de la société DUE des sommes qui lui seront allouées au titre des préjudices subis ainsi que la condamnation de Monsieur Y... à lui verser la somme de 100.000 euros à titre de dommages et intérêts en

réparation du préjudice subi du fait de ses agissements illicites et du préjudice qu'elle a subi auprès de sa clientèle, outre la somme de 3.000 euros en application de l'article 700 Nouveau Code de Procédure Civile;

Les procédure ont été jointes.

Par ordonnance du 27 mai 2005, le Juge de la mise en état a ordonné la communication par la société X..., dans le délai de 15 jours à compter de l'ordonnance, de l'accord cadre du 17 avril 2002 formalisé entre elle-même et Monsieur Y... pris en sa qualité de président de la société DUE et de gérant de la société Y... DISTRIBUTION.

Par dernières conclusions en date du 16 décembre 2004, donc antérieures à l'ordonnance du Juge de la mise en état, la société X..., agissant tant sur le fondement de l'article L 713-2 du Code de la Propriété Intellectuelle que sur celui de l'article L 713-3 du même Code, a repris l'ensemble de ses prétentions relatives à la contrefaçon, à la concurrence déloyale et

à la responsabilité personnelle de Monsieur Y... sauf à renoncer, compte tenu de la liquidation judiciaire dont fait l'objet la société DUE, à ses demandes d'interdiction et de suppression des marques contrefaites et à solliciter la fixation de sa créance au passif de la société DUE ; elle demande ainsi au Tribunal de :

documents restent des pièces soumises à l'appréciation du Tribunal comme tout autre élément de preuve sans qu'il y ait lieu de les écarter des débats; Sur la contrefaçon Z... qu'aux termes de l'article L 713-2 a) du Code de la Propriété Intellectuelle, sont interdits, sauf autorisation du propriétaire, la reproduction, l'usage ou l'apposition d'une marque, (...) ainsi que l'usage d'une marque reproduite, pour des produits ou services identiques à ceux désignés dans l'enregistrement ; Z... que la marque internationale "X..." a été déposée le 14 février 1990 et enregistrée sous le no 548 027 pour désigner les meubles de la classe 20 ; Que de la marque internationale

semi-figurative b a quant à elle été déposée le 1er avril 1961, renouvelée en dernier lieu le 1er avril 2001 et enregistrée sous le no 2R241960 pour désigner également les produits de la classe 20 ;

Z... que la société X... fait grief à la société DUE et à Monsieur Y... d'avoir reproduit à l'identique, sans autorisation, sur la devanture et les murs de son magasin situé 157 rue du Faubourg Saint Honoré à Paris 8ème la marque b no 2R241960 pour la période d'août 2002 à mai 2003, et d'avoir continué à faire usage en janvier 2003 de la marque "X..." no 548 027 sur ses documents commerciaux ; Que les défendeurs répliquent que seule la trace de l'enseigne "X..." subsiste sur le mur de la devanture du fond de commerce de la société DUE après dépose de l'enseigne et que la suppression du logo gravé dans la pierre de l'immeuble est impossible et entraînerait des frais inconsidérés ; Mais attendu qu'il résulte du procès verbal de constat dressé par Maître Eric CHAPUIS, Huissier de Justice à Paris, en date du 12 mai

2003 et auquel est annexé trois photographies, qu'à l'adresse sus-indiquée, sur la droite en regardant depuis la rue la porte d'accès à l'immeuble, existe, à l'extrémité droite de la façade, une boutique de vente de meubles de cuisine et apparemment de - dire et juger que la société DUE, représentée par Maître MONTRAVERS es qualité de mandataire liquidateur, a commis des actes de contrefaçon en faisant usage et reproduisant sans autorisation les marques dont elle est titulaire à titre de nom commercial et d'enseigne sur la devanture de son fonds de commerce d'ameublement situé 157 rue du Faubourg Saint-Honoré à Paris, entre le 1er août 2002 et le 12 juin 2003, date du jugement de liquidation judiciaire, - dire et juger que Monsieur Emmanuel Y... a commis une faute intentionnelle, détachable de ses fonctions de Président de la société DUE SA, en contrefaisant les marques précitées de sorte que sa responsabilité personnelle est engagée à son égard, -dire et juger que la société DUE, représentée par Maître MONTRAVERS es qualité de mandataire liquidateur, a commis des actes de concurrence déloyale et

parasitaire à son égard en faisant usage de documents commerciaux à en-tête "X... " notamment sur des devis destinés à tromper la clientèle sur sa qualité de distributeur de produits X... passés le 1er août 2002, - dire et juger que les agissements de la société DUE, représentée par Maître MONTRAVERS es qualité de mandataire liquidateur, et de Monsieur Y... ont nécessairement porté atteinte à la réputation et à la notoriété des marques et du nom commercial "X..." en plaçant la société X... en grande difficulté vis-à-vis de sa clientèle et sont constitutifs de concurrence déloyale et parasitaire, - lui donner acte, compte tenu de l'évolution du litige et de la liquidation judiciaire de la société DUE, de ce qu'elle renonce à ses demandes d'interdiction et de suppression des marques contrefaites, - dire et juger que le préjudice subi par la société X... du fait de la contrefaçon de ses marques et de la concurrence déloyale s'élève à la somme de 100.000 euros, - fixer la créance de

cuisines ; que sur le bandeau da la façade de la première partie de boutique, en partie gauche en regardant depuis la rue, existe, en spectre, nettement visible un "b" minuscule suivi de "X...", puis en lettres apparemment métalliques, l'inscription "cucine" ; que sur la porte gauche en regardant la porte d'accès à cette première partie de boutique existe, dans la pierre, y étant sculpté, un "b" (en réalité b); Z... que les deux marques dont la demanderesse est titulaire sont reproduites à l'identique à titre d'enseigne pour identifier un magasin proposant des produits identiques à ceux désignés dans l'enregistrement, en l'occurrence des cuisines et meubles de cuisine, de sorte que la contrefaçon par reproduction au sens de l'article précité est caractérisée à l'encontre de la société DUE prise en la personne de Maître MONTRAVERS ès-qualités de mandataire liquidateur, pour la période postérieure à la date d'effet de la résiliation du contrat de distribution consenti par la société X..., soit au 1er août 2002 ; Qu'en effet les arguments en défense tenant

au fait que l'enseigne et le logo avaient été déposés avant le constat et que seul le spectre subsistait à sa date ne peuvent être retenus dès lors que l'huissier a relevé que ce spectre était nettement visible et qu'en conséquence il permet d'identifier les marques opposées ; qu'il en est de même de l'argument consistant à soutenir que le retrait du logo incrusté dans la pierre de l'immeuble aurait nécessité la dépose complète du pilier porteur de celui-ci dès lors qu'un ponçage ou un simple cache aurait permis matériellement de faire disparaître la marque en cause ; Z... que la contrefaçon est également caractérisée par la reproduction de la marque X... no 548 027 sur un devis en date du 29 janvier 2003, peu important que celui-ci soit la reprise d'un précédent devis antérieur à la rupture des relations contractuelles entre les parties ; Sur la concurrence déloyale Z... que la société X... reproche à ce titre à la société DUE

la société X... au passif de la liquidation judiciaire de la société DUE à une somme de 100.000 euros au titre du préjudice subi du fait de la contrefaçon de ses marques et de la concurrence déloyale,

- condamner Monsieur Emmanuel Y... au paiement de la somme de 100.000 euros à titre de dommages intérêts en réparation du préjudice subi du fait de ses agissements illicites en contrefaçon de marques et concurrence déloyale, - ordonner la publication du jugement à intervenir dans 5 journaux de son choix et aux frais in solidum de Maître MONTRAVERS es qualité de liquidateur de la société DUE, et de Monsieur Emmanuel Y..., sans que le montant de chaque insertion excède la somme de 3.000 euros HT, - ordonner l'exécution provisoire du jugement à intervenir, -condamner solidairement Maître MONTRAVERS es-qualités de liquidateur de la Société DUE, et Monsieur Emmanuel Y... à verser à la Société X... la somme de 10.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du nouveau code de Procédure Civile. Sur les demandes reconventionnelles en rupture

abusive des relations contractuelles, la société X... demande au Tribunal de déclarer la société DUE irrecevable en ses demandes telles que soumises au Tribunal notamment en raison de la disparition de la personnalité morale de la société DUE en liquidation judiciaire et de l'absence de lien suffisant avec les demandes principales, de dire et juger qu'en tout état de cause l'inexécution par la société DUE de ses engagements contractuels justifiait la résiliation des accords de distribution à ses torts exclusifs et qu'elle a donc elle- même résilié à bon droit ces accords, en conséquence de débouter Maître MONTRAVERS, es qualité de liquidateur de la société DUE, de toutes ses demandes reconventionnelles tendant à voir juger fautive la résiliation desdits accords et obtenir une indemnisation à ce titre ; plus subsidiairement encore, de dire et juger que l'inexécution par la société DUE de ses engagements contractuels

d'avoir commis un détournement de clientèle en faisant croire qu'elle était toujours revendeur agréé de la marque "X..." et en mesure de fournir les produits commandés après le 1er août 2002, et d'avoir détourné des acomptes afin de poursuivre une activité au préjudice des clients de la marque "X..." en profitant de la notoriété de celle-ci ; Z... que sont versés aux débats une télécopie de la société BE2i portant réclamation sur une commande de cuisine X... passée à la société DUE le 24 avril 2003 pour laquelle un acompte de 40 % a été versé à cette date ; qu'un autre client indiquait par courrier du 27 juin 2003 que bien qu'ayant commandé en janvier 2003 des meubles de marque "Moretti", c'est l'enseigne X... qui l'a conduit dans le magasin de la rue du Fg Saint -Honoré ; Z... que ces éléments démontrent d'une part, qu'à une date postérieure à la résiliation des relations contractuelles, soit au 1er août 2002, la société DUE a pris commandes de cuisines de X... moyennant le versement d'acomptes en sachant qu'elle ne pourrait les satisfaire et d'autre part, qu'elle a profité de la notoriété, laquelle n'est pas

contestée, de la marque X..., en faisant croire en sa qualité de revendeur agréé pour vendre des produits d'une autre origine ; Que ce faisant la société DUE a commis des actes de concurrence déloyale distincts des actes de contrefaçon poursuivis ; Sur la faute personnelle de Monsieur Y... Z... qu'il est fait grief à Monsieur Emmanuel Y..., en ne faisant pas déposer la marque b de la devanture et des murs de magasin de la société DUE après le 1er août 2002, en diffusant à compter de cette date des documents commerciaux sous le nom commercial "X..." et des devis sous l'en-tête "SA DUE - Cuisine X..." et en continuant à prendre des commandes de produits "X..." en sachant pertinemment qu'elles ne pourraient être suivies d'effet soit parce que lui-même ne les avait pas transmises au fabricant, soit parce qu'elles étaient postérieures au 1er août 2002,

justifiait la résiliation sans préavis des relations commerciales avec la société X... conformément à l'article L.442-6 I-5 du code de commerce et qu'aucune faute ne saurait lui être reprochée au regard de ces dispositions. Par dernières conclusions en date du 8 juillet 2005, Maître Marie-Hélène MONTRAVERS prise en sa qualité de mandataire-liquidateur de la société DUE, et Monsieur Emmanuel Y... demandent le rejet de la pièce no 26 produite par X... , qui ne respecte pas les dispositions de l'article 202 Nouveau Code de Procédure Civile ainsi que de la pièce no 33 produite par X... qui est une preuve constituée à elle-même ; sur le fond ils contestent les faits de contrefaçon qui sont allégués faisant valoir qu'à compter de la date de la rupture effective du contrat, la société DUE ne commercialisait plus les produits de la marque "X..." et n'a effectué aucune vente ou démarche trompeuse pour placer un produit d'une marque différente sous l'enseigne "X..." et que le constat d'huissier du 12 mai 2002 établit que l'enseigne

"X..." de la devanture du magasin et le logo "b" de la marque ont bien été déposés, que d'autre part le seul usage du signe "X..." fait à titre de nom commercial concerne un devis antérieur à la rupture des relations contractuelles et s'inscrit en tout état de cause dans ce contexte particulier ; ils contestent par ailleurs les actes de concurrence déloyale qui sont reprochés à la société DUE motif pris que c'est la société X... elle même qui a détourné la clientèle de la société DUE au profit de sa filiale française et ajoutent que ces griefs ne peuvent pas plus être retenus à l'encontre de Monsieur Y... ; ils concluent par ailleurs à l'irrecevabilité de l'action en responsabilité engagée à l'encontre de Monsieur Y... qui contreviendrait aux dispositions des articles L 624-3 et L 624-6 du Code du Commerce et qui en tout état de cause ne serait pas fondée; ils ajoutent enfin que les demandeurs ne démontrent pas le principe

d'avoir commis une faute d'une particulière gravité ; Z... qu'il s'agit là d'une action en responsabilité civile contre Monsieur Y... différente d'une action en comblement de passif qui en tout état de cause ne serait pas de la compétence de ce Tribunal ; Que la règle du non cumul de responsabilités exercées contre un dirigeant de société dans le cadre d'une procédure collective ne s'applique qu'aux actions intentées contre les dirigeants agissant dans le cadre de leurs fonctions ; que tel n'est précisément pas le cas en l'espèce puisqu'est invoquée contre Monsieur Y..., ancien dirigeant de la société DUE, une faute intentionnelle d'une particulière gravité, incompatible avec l'exercice normal des fonctions de dirigeant social ; Que les exceptions d'irrecevabilité soulevées de ce chef par les défendeurs seront dès lors rejetées ; Z... que les deux premiers griefs invoqués ne sont pas distincts des faits de contrefaçon retenus à l'encontre de la société DUE et ne peuvent être imputés personnellement à Monsieur Y... qui n'a pas reproduit ou fait usage des marques opposés pour son propre

compte dans le cadre d'une activité qui lui aurait été personnelle ; Que s'agissant des commandes postérieures au 1er août 2002, la responsabilité de Monsieur Y... suppose qu'il ait commis une faute détachable de ses fonctions de dirigeant et ayant un lien direct avec le préjudice invoqué, et donc qu'il ait agi pour des mobiles personnels, dans son propre intérêt et dans le but d'en tirer un avantage propre ; Qu'une telle démonstration n'étant pas faite en l'espèce, l'action dirigée à l'encontre de Monsieur Y... personnellement sera rejetée ; Sur les mesures réparatrices Z... que les atteintes portées aux marques dont la société X... est titulaire, qui ont perduré du mois d'août 2002 au mois de mai 2003 seront réparées par l'octroi de la somme de 15.000 euros à titre de dommages-intérêts ; Que les actes de concurrence déloyale qui sont caractérisés par l'existence de deux

faits isolés tels que précédemment décrits seront également réparés par l'allocation de la somme de 10.000 euros à titre de dommages-intérêts ; Z... que le préjudice de la société X... étant intégralement réparé par les dommages-intérêts alloués, il n'y a pas lieu de faire droit à la mesure de publication qui est en outre sollicitée ; Sur les demandes reconventionnelles Z... qu'à titre reconventionnel Maître MONTRAVERS, ès-qualités de mandataire liquidateur de la société DUE fait valoir à titre principal que la société X... aurait engagé sa responsabilité contractuelle en résiliant par anticipation un contrat de distribution exclusive à durée déterminée qui se serait prolongé par tacite reconduction par périodes de deux ans, jusqu'au 1er janvier 2004, et à titre subsidiaire que la société X... aurait engagé sa responsabilité en rompant brutalement des relations commerciales établies ; Que Monsieur Y... invoque quant à lui et pour les mêmes motifs des préjudices par ricochet dont il demande réparation en appplication de l'article 1382 du Code Civil ; Que les

arguments d'irrecevabilité de la société X... qui soutient que la société DUE n'a plus d'existence légale et ne peut plus ester en justice et que seul son mandataire liquidateur est habilité à former des demandes au nom de la société liquidée ne peuvent prospérer dès lors d'une part, que la personnalité morale de la société subsiste pour les besoins de la liquidation en application de l'article 1844-8 du Code Civil et d'autre part, que c'est précisément Maître MONTRAVERS ès-qualités qui formule des demandes reconventionnelles ; Z... par ailleurs que les demandes reconventionnelles tendant à voir déclarer abusive la rupture du contrat de distribution consenti au profit de la société DUE présentent incontestablement un lien de connexité direct avec le litige en contrefaçon et en concurrence déloyale objet de l'action principale ; qu'elles doivent dès lors être déclarées recevables ;

Z... qu'il convient de rappeler les relations contractuelles entre les parties antérieurement au litige ; Que par "lettre d'engagement réciproque tenant lieu de contrat" en date du 13 décembre 1989, la société X... a confié l'exclusivité de la distribution de ses produits d'une part à la société X... Studio Paris et d'autre part à la société MP devenue DUE, dont le représentant était Monsieur Claude B... et qui exploitait un magasin situé au 157 rue du Faubourg Saint Honoré à Paris ; que par acte intitulé "promesse synallagmatique de cession d'actions" en date du 19 avril 2001 Monsieur B... a cédé le contrôle majoritaire de la société DUE à la société Y... DISTRIBUTION représentée par Monsieur Emmanuel Y..., moyennant le versement comptant au jour de la signature de la somme de 1.200.000 francs (soit 182.938, 82 euros) et d'un solde de 800.000 francs (soit 121.959, 21 euros) payable en 5 annuités à compter du 31 mars 2002 et jusqu'au 31 mars 2007, et sous condition suspensive du versement par la société X... Spa, dont il convient de relever qu'elle n'était pas partie à l'acte, à la société Y... DISTRIBUTION d'une indemnité de

1.200.000 francs soit 182.938, 82 euros minimum permettant au cessionnaire de faire face aux différents engagements financiers relatifs à la réalisation de la cession de parts ; que par avenant du 5 juillet 2001, les deux parties, à savoir Monsieur B... et la société Y... DISTRIBUTION ont renoncé à cette condition suspensive ; qu'à la suite de créances impayées par la société DUE d'un montant de 67.769,33 euros au 30/04/2002, un accord a été signé entre la société X... et Monsieur Y... le 17 avril 2002 aux termes duquel il a été convenu d'un plan d'apurement des dettes sur 9 mois, de la libération des livraisons en cours, de la signature d'un nouveau contrat de distribution, de la rénovation immédiate du magasin sous certaines conditions et "d'une garantie de tous paiements des années 2002 et 2003 par 50 % des actions DUE" ;

Z... que la société DUE ayant refusé les termes de ce dernier accord et notamment la cession de 50 % de ses parts en cas de non respect des paiements, la société X... a, par courrier du 17 juin 2002 accordé de nouveaux délais de paiement des arriérés à la société DUE jusqu'au 31.12.2002 tout en lui notifiant la résiliation du contrat de distribution à compter du 1er août 2002 ; Z... que l'une des obligations principales du distributeur est de payer son fournisseur selon les termes et délais convenus ; que le non paiement constitue une faute grave de nature à justifier la résiliation sans préavis du contrat quelque soit sa nature ; Qu'en l'espèce il est constant que la société DUE n'a pas payé ses achats de produits auprès de la société X... ; que sa dette s'élevait à la somme de 67.769,33 euros au 30 avril 2002 et à celle de 144.732,76 euros au 30 juin 2002 malgré l'échelonnement des dettes résultant du dernier accord conclu entre les parties le17 avril 2002 ; que cet accord a été remis en cause ultérieurement par Monsieur Y... qui n'en acceptait plus les termes ; qu'enfin Monsieur Y... a reconnu dans son courrier du 9 avril 2002 adressé à la société

X... Spa que le magasin de la rue du Faubourg Saint Honoré ne remplissait pas le niveau de qualité exigé par le fournisseur ; Z... dès lors qu'il est indéniable que les relations entre les parties ne pouvaient se poursuivre sans augmentation des dettes en cours, étant précisé que le Tribunal de Commerce a fixé la date de cessation des paiements de la société DUE au 19 février 2002 et placé directement celle-ci en liquidation judiciaire ; Qu'il suit que la rupture du contrat à l'initiative de la société X... le 17 avril 2002 à effet du 1er août suivant ne présente pas de caractère abusif et que tant les demandes reconventionnelles de Maître MONTRAVERS ès-qualités de mandataire liquidateur de la société DUE que celles de Monsieur Y... doivent être rejetées ; Sur les autres demandes Z... que les défendeurs

qui succombent ne peuvent voir leurs demandes de dommages-intérêts pour procédure abusive prospérer.

Z... que la nature de l'affaire et l'ancienneté du litige justifient l'exécution provisoire de la présente décision. Z... qu'il serait inéquitable de laisser à la charge de la société X... la totalité des frais irrépétibles et qu'il convient de lui allouer la somme de 4.000 euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile. Qu'en revanche aucune considération d'équité ne justifie l'application de ces dispositions aux autres parties. PAR CES MOTIFS : Le Tribunal, statuant en audience publique, par jugement contradictoire et en premier ressort, - Dit n'y avoir lieu à écarter des débats les pièces no 26 et 33 produites par la société X... Spa. - Dit qu'en reproduisant sans autorisation, sur la devanture et les murs de son magasin situé 157 rue du Faubourg Saint Honoré à Paris 8ème les signes "X..." et b et en faisant usage de la marque "X..." sur ses documents commerciaux , la société DUE a commis des actes de contrefaçon par reproduction des marques no 2R241960 et no 548 027 dont est titulaire la société X... Spa. -

Dit qu'elle a en outre commis des actes de concurrence déloyale au préjudice de la société X... Spa. En conséquence, - Fixe la créance de la société X... Spa au passif de la liquidation judiciaire de la société DUE à la somme de 15.000 euros au titre du préjudice résultant des actes de contrefaçon et à celle de 10.000 euros au titre du préjudice résultant des actes de concurrence déloyale ainsi qu'à celle de 4.000 euros sur le fondemente du préjudice résultant des actes de contrefaçon et à celle de 10.000 euros au titre du préjudice résultant des actes de concurrence déloyale ainsi qu'à celle de 4.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

- Donne acte à la société X... Spa de ce qu'elle renonce à ses demandes d'interdiction et de suppression des marques contrefaites compte tenu de la liquidation judiciaire dont a fait l'objet la société DUE. - Rejette les demandes formulées à l'encontre de Monsieur Emmanuel Y... à titre personnel. - Déclare recevables mais mal fondées les demandes reconventionnelles de Maître MONTRAVERS ès-qualités de mandataire liquidateur de la société DUE et de Monsieur Emmanuel Y.... - Rejette toutes autres demandes. - Ordonne l'exécution provisoire. - Condamne Maître MONTRAVERS ès-qualités de mandataire liquidateur de la société DUE à payer à la société X... Spa la somme de 4.000 euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ainsi qu'aux dépens dont distraction au profit de Maître Bruno MARTIN , Avocat, conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Fait et jugé à Paris, le 6 avril 2006. Le Greffier Le Président


Synthèse
Tribunal : Tribunal de grande instance de Paris
Formation : Ct0087
Numéro d'arrêt : JURITEXT000006950041
Date de la décision : 06/04/2006

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.grande.instance.paris;arret;2006-04-06;juritext000006950041 ?
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