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22/03/2006 | FRANCE | N°JURITEXT000006949910

France | France, Tribunal de grande instance de Paris, Ct0087, 22 mars 2006, JURITEXT000006949910


T R I B U N X... L D E GRANDE I N S T X... N C E D E P X... R I S 3ème chambre 1ère section No RG : 04/06190 No MINUTE :

Assignation du : 05 Avril 2004 Expéditions exécutoires délivrées le :

JUGEMENT rendu le 22 Mars 2006 DEMANDEURS Monsieur Jacques Y... dit GOGOL 1er 51 rue Polonceau 75018 PARIS représenté par la SCP SCHMIDT GOLDGRAB, avocat au barreau de PARIS, vestiaire P 391 Madame Justine Z... 51 rue Polonceau 75018 PARIS représentée par la SCP SCHMIDT GOLDGRAB, avocat au barreau de PARIS, vestiaire P 391 DÉFENDERESSE S.A. UNIVERSAL MUSIC 20-22 rue des Fossés Sai

nt Jacques 75005 PARIS représentée par Me Nicolas BOESPFLUG, avocat au ...

T R I B U N X... L D E GRANDE I N S T X... N C E D E P X... R I S 3ème chambre 1ère section No RG : 04/06190 No MINUTE :

Assignation du : 05 Avril 2004 Expéditions exécutoires délivrées le :

JUGEMENT rendu le 22 Mars 2006 DEMANDEURS Monsieur Jacques Y... dit GOGOL 1er 51 rue Polonceau 75018 PARIS représenté par la SCP SCHMIDT GOLDGRAB, avocat au barreau de PARIS, vestiaire P 391 Madame Justine Z... 51 rue Polonceau 75018 PARIS représentée par la SCP SCHMIDT GOLDGRAB, avocat au barreau de PARIS, vestiaire P 391 DÉFENDERESSE S.A. UNIVERSAL MUSIC 20-22 rue des Fossés Saint Jacques 75005 PARIS représentée par Me Nicolas BOESPFLUG, avocat au barreau de PARIS, vestiaire E 329 COMPOSITION DU TRIBUNAL Marie-Claude APELLE, Vice-Présidente Marie COURBOULAY, Vice-Présidente Carole CHEGARAY, Juge GREFFIER LORS DES DEBATS : Caroline LARCHE GREFFIER LORS DU PRONONCE : Léoncia BELLON DÉBATS X... l'audience du 24 Janvier 2006 tenue en audience publique devant Carole CHEGARAY, juge rapporteur, qui, sans opposition des avocats, a tenu seule l'audience, et, après avoir entendu les conseils des parties, en a rendu compte au Tribunal, conformément aux dispositions de l'article 786 du Nouveau Code de Procédure Civile. JUGEMENT Prononcé en audience publique Contradictoire en premier ressort Par acte du 5 avril 2004, Monsieur Jacques Y... dit "GOGOL 1er" et Madame Justine Z... ont fait assigner la Société UNIVERSAL MUSIC devant ce Tribunal en paiement de dommages et intérêts suite à l'inexécution du protocole d'accord en date du 28 mars 2002. Dans leurs dernières écritures signifiées le 5 décembre 2005, Monsieur Jacques Y... dit "GOGOL 1er" et Madame Justine Z... ont demandé à la juridiction saisie de : Z... l'article 1135 du Code civil et le protocole transactionnel du 28 mars 2002, - dire et juger que la Société UNIVERSAL MUSIC, qui vient aux droits de la Société MUSIDISC, engage sa responsabilité pour n'avoir pas remis les matrices d'origine et le matériel accessoire (pochettes,

photographies, dessins, affiches, etc...) à Monsieur Jacques Y... dit "GOGOL 1er" pour les deux albums "Vite avant la saisie" et "Hencor'pir" et à Madame Justine Z... pour l'album "Poète, prophète et barbare"et ce en exécution du protocole d'accord en date du 28 mars 2002, - condamner, à défaut de remettre les matrices, la Société UNIVERSAL MUSIC à payer :

[* à Monsieur Jacques Y... dit "GOGOL 1er" pour les deux albums "Vite avant la saisie" et "Hencor'pir" un montant total de 100.000 euros de dommages et intérêts,

*] à Madame Justine Z... pour l'album "Poète, prophète et barbare" un montant total de 50.000 euros de dommages et intérêts, X... titre subsidiaire, avant dire droit sur ces indemnités, - désigner un expert avec mission d'évaluer les coûts (studios, arrangements, chanteur, etc.) de ré-enregistrement des trois albums litigieux "Vite avant la saisie", "Hencor'pir" et "Poète, prophète et barbare", - condamner la Société UNIVERSAL MUSIC à titre provisionnel à verser pour les deux premiers albums "Vite avant la saisie" et "Hencor'pir" une somme de 100.000 euros à Monsieur Jacques Y... dit "GOGOL 1er" et une somme de 50.000 euros à Madame Justine Z... pour l'album "Poète, prophète et barbare", - pour le matériel accessoire (pochettes, photographies, dessins, affiches, etc.) :

[* à Monsieur Jacques Y... dit "GOGOL 1er" la somme de 10.000 euros à titre de dommages et intérêts,

*] à Madame Justine Z... celle de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts, - condamner la Société UNIVERSAL MUSIC à payer, au titre du manque à gagner consécutif à la non délivrance des matrices multipistes des trois albums et de leurs accessoires :

[* à Monsieur Jacques Y... dit "GOGOL 1er" la somme de 48.000 euros,

*] à Madame Justine Z... celle de 24.000 euros, - condamner en outre la

Société UNIVERSAL MUSIC à payer à Monsieur Jacques Y... dit "GOGOL 1er" au titre de son préjudice moral et professionnel la somme de 20.000 euros, - ordonner l'exécution provisoire du jugement à intervenir, - condamner en outre la Société UNIVERSAL MUSIC à payer à Monsieur Jacques Y... dit "GOGOL 1er" et à Madame Justine Z... chacun la somme de 3.000 euros en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, - condamner la Société UNIVERSAL MUSIC en tous les dépens dont distraction au profit de la SCP SCHMIDT-GOLDGRAB, avocats aux offres de droit, conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile. Dans ses dernières conclusions signifiées le 22 décembre 2005, la Société UNIVERSAL MUSIC a demandé au Tribunal de : - dire et juger satisfactoire l'offre de remise des bandes mixées des albums intitulés "Vite avant la saisie" et "Hencor'pir" faite par la Société UNIVERSAL MUSIC à Monsieur Jacques Y... dit "GOGOL 1er", - dire et juger Monsieur Jacques Y... dit "GOGOL 1er" et Madame Justine Z... irrecevables et mal fondés en leurs demandes et les en débouter, - condamner in solidum Monsieur Jacques Y... dit "GOGOL 1er" et Madame Justine Z... à payer à la Société UNIVERSAL MUSIC une somme de 10.000 euros à titre de dommages et intérêts, - condamner in solidum Monsieur Jacques Y... dit "GOGOL 1er" et Madame Justine Z... à payer à la Société UNIVERSAL MUSIC une indemnité de 10.000 euros en vertu de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, - condamner in solidum Monsieur Jacques Y... dit "GOGOL 1er" et Madame Justine Z... aux entiers dépens.

MOTIFS Monsieur Jacques Y... dit "GOGOL 1er" se présente comme un auteur-interprète reconnu comme l'un des pionniers du mouvement

musical alternatif. En 1983, il a enregistré avec la Société MUSIDISC, aux droits de laquelle vient aujourd'hui la Société UNIVERSAL MUSIC suite à une fusion absorption du 28 juin 2002 avec effet rétroactif au 1er juillet 2001, deux albums phonographiques intitulés "Vite avant la saisie" et "Hencor'pir". En 1987, sa compagne Madame Justine Z... a assuré la coproduction avec la Société MUSIDISC de l'enregistrement d'un troisième album de Monsieur Jacques Y... dit "GOGOL 1er" intitulé "Poète, prophète et barbare". X... la suite d'un différend survenu entre Monsieur Jacques Y... dit "GOGOL 1er", Madame Justine Z... d'une part et la Société MUSIDISC d'autre part relatif au versement des redevances dues à l'artiste et de la part de co-production due à Madame Justine Z..., les parties ont conclu le 28 mars 2002, en présence de la Société UNIVERSAL MUSIC, un protocole transactionnel dont les demandeurs soutiennent qu'il est resté partiellement inexécuté, et ce sur trois points : - la remise à Monsieur Jacques Y... dit "GOGOL 1er" des bandes masters des albums "Vite avant la saisie" et "Hencor'pir", - la remise à Madame Justine Z... des bandes masters de l'album "Poète, prophète et barbare", - la remise du matériel accessoire à ces trois albums. Sur la remise des bandes masters à Monsieur Jacques Y... dit "GOGOL 1er" : Le protocole transactionnel du 28 mars 2002 stipule à ce titre en son article 1er -3 b) : "La Société MUSIDISC cède à l'artiste la propriété des bandes masters des phonogrammes constituant les albums intitulés "Vite avant la saisie" et "Hencor'pir" interprétés par l'artiste ainsi que tous les droits de propriété intellectuelle y attachés". Les parties divergent sur ce qu'il convient d'entendre par "bandes masters". La Société UNIVERSAL MUSIC fait valoir que ce terme vise les seules bandes mixées à partir desquelles le phonogramme est fixé, alors que les demandeurs soutiennent qu'il s'agit non seulement des bandes mixées qui constituent la version intangible et définitive

de l'enregistrement mais également et surtout des bandes multipistes qui constituent l'enregistrement d'origine avant mixage et qui seules permettent de faire des remixes pour adapter les enregistrements aux modes musicales du moment ou tout simplement les améliorer d'un point de vue technique. Monsieur Jacques Y... dit "GOGOL 1er" expose que les bandes mixées, seules offertes par la Société UNIVERSAL MUSIC, sont d'un intérêt moindre dans la mesure où le CD (et les enregistrements de GOGOL 1er existent déjà en version CD) reproduit exactement les bandes mixées des chansons qu'il contient, de sorte qu'il est possible de pallier l'absence de bandes mixées par un enregistrement CD, alors que les bandes multipistes offrent un tout autre intérêt, tel le remixage ou la constitution d'une version playback utilisée pour les plateaux télévisés, et ne peuvent pas être remplacées, sauf à ré-enregistrer les différents titres figurant sur les albums litigieux. La Société UNIVERSAL MUSIC réplique que les bandes mixées qui représentent le résultat final du travail d'enregistrement correspondent aux albums en cause tels qu'ils ont été publiés et permettent d'en poursuivre l'exploitation ; que les bandes multipistes qui ne constituent qu'une étape intermédiaire de ce travail ne peuvent servir qu'à procéder à un remixage qui ne s'impose nullement et n'a pas été envisagé par le protocole, lequel a pour objet des phonogrammes du commerce, c'est-à-dire mixés, si bien que Monsieur Jacques Y... dit "GOGOL 1er" ne peut se plaindre de ne pas disposer de version playback. Il est constant que selon les usages de la profession concernée l'expression "bandes masters" est employée pour désigner tantôt les seules bandes mixées tantôt les bandes multipistes, et ce en fonction du contexte et de l'utilisation qui est faite de ces bandes. En l'espèce, le protocole n'a pas précisé l'intention des parties lorsqu'elles ont convenu de la cession de la propriété des bandes masters par le producteur à

l'artiste. Or, en vertu de l'article 1162 du Code civil, "dans le doute, la convention s'interprète contre celui qui a stipulé et en faveur de celui qui a contracté l'obligation". Si monsieur Jacques Y... dit "GOGOL 1er" réclame la remise des bandes multipistes aux fins de remixer ses enregistrements datant des années 1980, alors qu'il est manifeste que les seules bandes mixées permettent de poursuivre l'exploitation de ceux-ci, il convient de constater que le protocole ne précise aucunement l'intention de l'artiste de remixer ses enregistrements. Aussi, au vu de cette carence et au vu du fait qu'il est fréquent que les producteurs ne conservent pas les bandes multipistes, il convient, en application de l'article 1162 du Code civil, de considérer que la remise des bandes mixées satisfait aux stipulations du protocole. Sur la remise des bandes masters à Madame Justine Z... : Madame Justine Z... sollicite pour sa part la remise des bandes masters de l'album "Poète, prophète et barbare" dont elle est co-productrice avec la Société MUSIDISC en se fondant sur les stipulations de l'article 3- 2 du protocole : "la Société MUSIDISC cède à Madame Justine Z... sa part de coproduction et tous les droits y afférents sur les enregistrements reproduits sur l'album intitulé "Poète, prophète et barbare"", en faisant valoir que la rétrocession d'une part de coproduction ne peut intervenir sans cession des bandes masters afin de permettre l'exploitation commerciale. Cependant, le protocole du 28 mars 2002 ne fait pas mention d'une telle cession, se contentant d'envisager la cession de part de coproduction, alors que la remise des bandes masters a été expressément prévue pour les deux autres albums, et ce d'autant qu'en présence de coproducteurs, il n'est pas certain que la Société MUSIDISC en ait été la détentrice plutôt que Madame Justine Z... X... cet égard, la mention du contrat de coproduction de 1987 conclu entre la Société MUSIDISC et Madame Justine Z... selon laquelle "toutes les opérations de la société, les

comptes et documents seront centralisés au siège de "MUSIDISC"" ne vise que la gestion de la société en participation constituée entre les parties pour l'exploitation de l'album "Poète, prophète et barbare" et n'implique nullement que les bandes masters de l'album en cause aient été détenues par la Société MUSIDISC. Madame Justine Z... sera donc déboutée de ce chef.Madame Justine Z... sera donc déboutée de ce chef. Sur la remise du matériel accessoire des phonogrammes relatifs aux trois albums : Les demandeurs entendent par là les pochettes, photographies, dessins, affiches, etc. conçus et réalisés pour les enregistrements des albums en cause et dont ils prétendent que ce matériel fait partie intégrante comme un accessoire indispensable. Ils invoquent à ce titre les stipulations du protocole aux termes desquelles la Société MUSIDISC cède à Monsieur Jacques Y... dit "GOGOL 1er" "les bandes masters et les droits d'exploitation y afférents", en application des articles 1et 2 pour les albums "Vite avant la saisie" et "Hencor'pir", et à Madame Justine Z... "sa part de coproduction et tous les droits y afférents sur les enregistrements reproduits sur l'album intitulé "Poète, prophète et barbare"", selon l'article 3 susvisé. Or, le protocole ne prévoit pas expressément la remise des éléments graphiques et visuels, lesquels ne constituent pas un accessoire indispensable à l'exploitation des albums, et ce d'autant qu'il n'est pas rare de modifier les pochettes des phonogrammes au cours de leur exploitation. En conséquence, Monsieur Jacques Y... dit "GOGOL 1er" et Madame Justine Z... seront déboutés de ce chef. Sur la demande reconventionnelle de la Société UNIVERSAL MUSIC : La Société UNIVERSAL MUSIC sollicite la somme de 10.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait de l'absence de poursuite d'exploitation des albums litigieux par les requérants, dès lors qu'aux termes de l'article 2 du protocole il a

été convenu qu' "en contrepartie de la cession des bandes masters et droits d'exploitation y afférents des phonogrammes composant les albums "Vite avant la saisie" et "Hencor'pir" telle que prévue à l'article 1- 3 b) ci avant, l'artiste s'engage à verser à la Société MUSIDISC sur les ventes de ces deux albums une rémunération proportionnelle (dite override) dont le taux est ci-dessous défini ..." et que par son refus de prendre possession des bandes masters, Monsieur Jacques Y... dit "GOGOL 1er" a entravé l'exploitation desdits albums, préférant intenter la présente action sans doute jugée plus rémunératrice. Il apparaît que l'absence de poursuite d'exploitation est liée au différend opposant les parties quant au sens de "bandes masters" visées au protocole et à l'introduction du présent litige, lequel ne revêt au vu de ce qui précède aucun caractère abusif. Dans ces conditions et en l'absence de comportement fautif des demandeurs, la Société UNIVERSAL MUSIC sera déboutée de sa demande de dommages et intérêts. Sur l'article 700 du nouveau Code de procédure civile : Compte tenu des circonstances de l'espèce et des conditions respectives des parties, il n'apparaît pas inéquitable de laisser à la charge de chacune des parties les frais irrépétibles qu'elles ont exposés à l'occasion de l'instance.

PAR CES MOTIFS Le Tribunal statuant publiquement, par jugement contradictoire et en premier ressort, Déclare satisfactoire l'offre de la Société UNIVERSAL MUSIC de remettre à Monsieur Jacques Y... dit "GOGOL 1er" les bandes masters mixées des albums "Vite avant la saisie" et "Hencor'pir", en exécution du protocole d'accord du 28 mars 2002, Déboute Monsieur Jacques Y... dit "GOGOL 1er" et Madame Justine Z... de l'ensemble de leurs demandes, Déboute la Société

UNIVERSAL MUSIC de sa demande reconventionnelle en paiement de dommages et intérêts, Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, Condamne in solidum Monsieur Jacques Y... dit "GOGOL 1er" et Madame Justine Z... aux entiers dépens. Fait et jugé à Paris le 22 Mars 2006 Le Greffier Le Président


Synthèse
Tribunal : Tribunal de grande instance de Paris
Formation : Ct0087
Numéro d'arrêt : JURITEXT000006949910
Date de la décision : 22/03/2006

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.grande.instance.paris;arret;2006-03-22;juritext000006949910 ?
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