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22/03/2006 | FRANCE | N°JURITEXT000006949456

France | France, Tribunal de grande instance de Paris, Ct0087, 22 mars 2006, JURITEXT000006949456


T R I B U N A L D E GRANDE I N S T A N C E D E P A R I S 3ème chambre 3ème section No RG : 04/17513 No MINUTE : Assignation du : 27 Octobre 2004 Expéditions exécutoires délivrées le : JUGEMENT rendu le 22 Mars 2006

DEMANDEUR Monsieur Guy X... 2 rue du Marquis de Morès 92380 GARCHES représenté par SCP SCHMIDT-GOLDGRAB, avocats au barreau de PARIS, vestiaire P.391 DÉFENDERESSE S.A. EMI MUSIC FRANCE 118/126 rue du Mont CENIS 75018 PARIS représentée par Me Eric LAUVAUX, avocat au barreau de PARIS, vestiaire L.0237 COMPOSITION DU TRIBUNAL Elisabeth BELFORT, Vice-Président , sig

nataire de la décision Agnès THAUNAT, Vice-Président Pascal MATHIS...

T R I B U N A L D E GRANDE I N S T A N C E D E P A R I S 3ème chambre 3ème section No RG : 04/17513 No MINUTE : Assignation du : 27 Octobre 2004 Expéditions exécutoires délivrées le : JUGEMENT rendu le 22 Mars 2006

DEMANDEUR Monsieur Guy X... 2 rue du Marquis de Morès 92380 GARCHES représenté par SCP SCHMIDT-GOLDGRAB, avocats au barreau de PARIS, vestiaire P.391 DÉFENDERESSE S.A. EMI MUSIC FRANCE 118/126 rue du Mont CENIS 75018 PARIS représentée par Me Eric LAUVAUX, avocat au barreau de PARIS, vestiaire L.0237 COMPOSITION DU TRIBUNAL Elisabeth BELFORT, Vice-Président , signataire de la décision Agnès THAUNAT, Vice-Président Pascal MATHIS, Juge assistée de Marie-Aline PIGNOLET, Greffier , signataire de la décision DEBATS A l'audience du 06 Mars 2006 tenue publiquement JUGEMENT Prononcé publiquement Contradictoire en premier ressort FAITS ET PRETENTIONS DES PARTIES Monsieur Guy X... est l'auteur-compositeur et l'interprète initial de la chanson intitulée "VOUS" éditée par les Editions ESPACE. Cette chanson a fait l'objet d'une reprise en 2003 par Monsieur Henri Y..., cette reprise ayant été enregistrée et éditée par la société VIRGIN MUSIC aux droits de laquelle se trouve aujourd'hui la société EMI MUSIC FRANCE. Par assignation en date du 27 octobre 2004, Monsieur Guy X... reproche à la société EMI MUSIC FRANCE d'avoir porté atteinte à son droit moral en dénaturant l'oeuvre par quatre modifications : -dans le premier couplet, au lieu de "Pour le reste je me tais c'est vous", Monsieur Henri Y... chante "Tout le reste, je me tais c'est vous", -dans le troisième couplet au lieu de "Ce qu'il en sort le meilleur c'est vous", Monsieur Henri Y... chante " Ce qu'il en sort de meilleur c'est vous", -dans le quatrième couplet, au lieu de "Sans un as mes rois abdiquent", Monsieur Henri Y... chante "Sans un as ni rois abdiquent", -à la fin du cinquième et dernier couplet, au lieu de "C'est faux ce que j'aime en vous c'est vous", Monsieur

Henri Y... chante "C'est fou ce que j'aime en vous c'est vous". Cette dernière erreur est en outre reproduite sur le livret du CD. En réparation, Monsieur Guy X... sollicite la somme de 30 000 ç à titre de dommages et intérêts ainsi que celle de 3 000 ç au titre des frais irrépétibles, le tout sous le bénéfice de l'exécution provisoire. Par dernières conclusions, Monsieur Guy X... reprend ses demandes et porte ses prétentions concernant l'article 700 du nouveau code de procédure civile à la somme de 5 000 ç. Suivant dernières écritures la société EMI MUSIC FRANCE fait valoir que les modifications sont minimes et ne dénaturent pas l'oeuvre et à titre subsidiaire que l'auteur n'a pas subi de préjudice lequel serait indemnisé par un Euro symbolique. Reconventionnellement, la défenderesse sollicite la somme de 3 000 ç au titre des frais irrépétibles. MOTIFS SUR LA DÉNATURATION DE L'OEUVRE Attendu que l'article L. 121-1 du code de la propriété intellectuelle dispose que : "L'auteur jouit du droit au respect de son nom, de sa qualité et de son oeuvre. Ce droit est attaché à sa personne. Il est perpétuel, inaliénable et imprescriptible. Il est transmissible à cause de mort aux héritiers de l'auteur. L'exercice peut être conféré à un tiers en vertu de dispositions testamentaires."

Attendu que Monsieur Guy X... fait grief à la société EMI MUSIC FRANCE d'avoir dénaturé son oeuvre par quatre modifications orales dont la dernière figure aussi au livret du CD en cause. Attendu que la première modification de "Pour le reste je me tais c'est vous" en "Tout le reste, je me tais c'est vous" manifeste un léger changement du sens mais surtout un relâchement de la syntaxe qui n'est pas assimilable à une licence poétique. Attendu que la deuxième modification de "Ce qu'il en sort le meilleur c'est vous" en "Ce qu'il en sort de meilleur c'est vous" est à l'inverse un appauvrissement du style, la légèreté binaire de l'apposition de la

proposition "le meilleur c'est vous", qui contient elle-même en son sein une apposition, au pronom "ce" étant remplacée par le groupe adverbial "de meilleur" complété par la proposition "c'est vous" qui avec le verbe "sort" forment une lourde explication ternaire. Attendu que la troisième modification de "Sans un as mes rois abdiquent" en "Sans un as ni rois abdiquent" rend la métaphore initiale incompréhensible et prive le verbe d'un sujet, et la phrase de sens et de structure. Attendu enfin que la quatrième modification de "C'est faux ce que j'aime en vous c'est vous"en "C'est fou ce que j'aime en vous c'est vous" qui intervient après les vers : "Oh j'aurai pu dire encore Que j'aime tant votre corps" change radicalement le sens du couplet dont l'objet était précisément d'opposer l'attirance charnelle à un amour plus global de la personne désirée. Attendu que ces modifications répétées, perceptibles tant oralement que visuellement et significatives dénaturent l'oeuvre intitulée "VOUS" dont Monsieur Guy X... est l'auteur et constituent des actes de contrefaçon imputables à la société EMI MUSIC FRANCE, ayant droit de la société productrice du phonogramme en cause à qui il appartient de se retourner contre son artiste-interprète, si elle estime celui-ci responsable des altérations incriminées ; le demandeur étant libre d'agir contre l'un quelconque des auteurs des actes qu'il allègue. SUR LES MESURES RÉPARATRICES Attendu que le préjudice de Monsieur Guy X... causé par l'atteinte à son droit au respect de l'intégrité de son oeuvre sera réparé, compte tenu de l'ampleur de la dénaturation qui a été caractérisée précédemment, par l'allocation de la somme de 5 000 ç à titre de dommages et intérêts. SUR LES FRAIS IRREPETIBLES Attendu que l'équité commande d'allouer à Monsieur Guy X... la somme de 5 000 ç par application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. SUR L'EXÉCUTION PROVISOIRE Attendu qu'il convient, au regard des éléments de l'espèce,

d'assortir le présent jugement de l'exécution provisoire.

SUR LES DÉPENS Attendu que la société EMI MUSIC FRANCE supportera les dépens. PAR CES MOTIFS Le Tribunal, Statuant publiquement, contradictoirement et en premier ressort Sous le bénéfice de l'exécution provisoire,

Dit qu'en dénaturant l'oeuvre intitulée "VOUS" dont Monsieur Guy X... est l'auteur la société EMI MUSIC FRANCE a porté atteinte aux droits moraux de l'auteur. En conséquence, Condamne la société EMI MUSIC FRANCE à payer à Monsieur Guy X... la somme de 5 000 ç à titre de dommages et intérêts. Condamne la société EMI MUSIC FRANCE à payer à Monsieur Guy X... la somme de 5 000 ç par application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. Condamne la société EMI MUSIC FRANCE aux dépens. Ainsi fait et jugé à Paris le 22 mars 2006 Le Greffier

Le Président


Synthèse
Tribunal : Tribunal de grande instance de Paris
Formation : Ct0087
Numéro d'arrêt : JURITEXT000006949456
Date de la décision : 22/03/2006

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.grande.instance.paris;arret;2006-03-22;juritext000006949456 ?
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