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15/03/2006 | FRANCE | N°JURITEXT000006949692

France | France, Tribunal de grande instance de Paris, Ct0087, 15 mars 2006, JURITEXT000006949692


T R I B U N A L D E GRANDE I N S T A N C E D E P A R I S 3ème chambre 1ère section No RG : 02/08264 No MINUTE : Assignation du : 23 Mai 2002 Expéditions exécutoires délivrées le : JUGEMENT rendu le 15 Mars 2006

DEMANDEUR Monsieur X... VAN Y... 15 Rue de la Montagne 1367 Mont-Saint-André - BELGIQUE représenté par Me Martine SORDEL, avocat au barreau de PARIS, vestiaire B.1061, avocat postulant et par Me Michel GYORY , avocat au barreau de BRUXELLES - BELGIQUE - 59 Avenue Everard - B 1190 - BRUXELLES - avocat plaidant - DÉFENDERESSE Société GERARD BILLAUDOT EDITEUR 14 Rue de

l'Echiquier 75010 PARIS représentée par Me Jean CASTELAIN de la S...

T R I B U N A L D E GRANDE I N S T A N C E D E P A R I S 3ème chambre 1ère section No RG : 02/08264 No MINUTE : Assignation du : 23 Mai 2002 Expéditions exécutoires délivrées le : JUGEMENT rendu le 15 Mars 2006

DEMANDEUR Monsieur X... VAN Y... 15 Rue de la Montagne 1367 Mont-Saint-André - BELGIQUE représenté par Me Martine SORDEL, avocat au barreau de PARIS, vestiaire B.1061, avocat postulant et par Me Michel GYORY , avocat au barreau de BRUXELLES - BELGIQUE - 59 Avenue Everard - B 1190 - BRUXELLES - avocat plaidant - DÉFENDERESSE Société GERARD BILLAUDOT EDITEUR 14 Rue de l'Echiquier 75010 PARIS représentée par Me Jean CASTELAIN de la SCP GRANRUT, avocats au barreau de PARIS, vestiaire P 14 COMPOSITION DU TRIBUNAL Marie-Claude APELLE, Vice-Présidente Marie COURBOULAY, Vice-Présidente Carole CHEGARAY, Juge GREFFIER LORS DES DEBATS : Caroline LARCHE GREFFIER LORS DU PRONONCE : Léoncia BELLON DEBATS A l'audience du 16 Janvier 2006 tenue en audience publique JUGEMENT Prononcé en audience publique Contradictoire en premier ressort Suivant exploit d'huissier de justice en date du 23 mai 2002; M. X... van Y... a assigné la société Gérard Billot Éditeur devant le Tribunal de grande instance de Paris aux fins de voir prononcer la résiliation des contrats de cession et d'édition passés entre ces parties en date des 23 juin 1994, 31 mai 1994 et 3 octobre 1996, aux torts de la société éditrice ; condamner la société Gérard Billaudot Éditeur à lui payer la somme de 509.556,55 euros à titre de dommages-intérêts en réparation de son préjudice matériel et

celle de 26.000 euros, au titre de son préjudice moral; condamner la société Gérard Billot Éditeur à lui restituer toutes les partitions originales de ses .uvres ; ordonner l'exécution provisoire du jugement à intervenir ; condamner la société défenderesse aux dépens. Dans ses dernières conclusions, monsieur van Y... demande au Tribunal de prononcer la reconnaissance en dehors de son pays, la Belgique. S'agissant du contrat principal du du 23 juin 1994, les parties sont parvenues à un accord après de longues discussions. La société défenderesse conteste formellement les affirmations de M. van Y... suivant lesquelles l'éditeur lui aurait imposé des conditions draconiennes ; elle souligne, au contraire, que c'est l'inverse, M. van Y..., qui avait fait examiner les projets de contrats par la S.a.b.a.m., qui remplit en Belgique une mission analogue à celle de la S.a.c.e.m., a imposé plusieurs exigences lourdes à l'éditeur, qui les a acceptées ù notamment le rachat à un prix élevé des partitions et matériels d'orchestre à la société

Millstone Publishing et la réalisation d'une partie des nouvelles gravures par cette société, qui les a acceptées. L'éditeur souligne ensuite qu'il s'est heurté à de nombreuses difficultés pour mener à bien l'édition graphique des .uvres faisant l'objet duL'éditeur souligne ensuite qu'il s'est heurté à de nombreuses difficultés pour mener à bien l'édition graphique des .uvres faisant l'objet du principal contrat, difficultés qui ne sont pas de son fait, mais celui de M. van Y... et du graveur qu'il lui a imposé pour réaliser l'édition graphique des .uvres faisant l'objet du premier contrat. S'agissant de l'opéra De soldaat Johan, concerné par le contrat de mai 1994, cette .uvre n'a jamais pu être exploitée par la société défenderesse, faute d'avoir pu obtenir de la part de M. van Y... les coordonnées des héritiers du librettiste pour solliciter leur accord. La plupart des .uvres cédées étant copiées à la main, il était indispensable de procéder à de nouvelles gravures dans un format normalisé. Le contrat de cession et d'édition prévoyait, au titre des conditions particulières figurant à l'annexe 3, que M. van

Y... s'engageait à remettre gratuitement à l'éditeur de nouvelles gravures de six pièces, l'éditeur ayant à sa charge la nouvelle gravure de deux .uvres et de trois réductions nullité du rapport d'expertise, la résiliation des contrats de cession et d'édition en date des 31 mai 1994, 23 juin 1994 et 3 octobre 1996, aux torts de la société éditrice, de condamner la société défenderesse à lui payer la somme de 39.390,31 euros représentant la perte de droits d'auteur pour les années 1995 à 2004, majorée des intérêts légaux depuis la date de l'assignation, la somme de 668.607,87 euros représentant le manque à gagner pour les années 1995 à 2004 majorée des intérêts légaux depuis la date de l'assignation, la somme de 70.799,82 euros au titre de la provision pour la perte de droits d'auteur et le manque à gagner pour l'année 2005 et pour la location de partitions la somme de 23.357,25 euros représentant la perte de recettes pour les années 1995 à 2004, la somme de 49.865,91 euros représentant le manque à gagner pour les années 1995 à 2004, majorée des intérêts légaux depuis la date de l'assignation, la somme de 7322,32 euros au titre de la provision sur

la perte et le manque à gagner pour l'année 2005, pour ce qui concerne les ventes de partition, la somme de 42.000 euros représentant la perte de droits et le manque à gagner pour les années 1995 à 2004 et la somme de 4200 euros au titre de la provision sur la perte et le manque à gagner pour l'année 2005. Il sollicite enfin la somme de 42.000 euros au titre du préjudice moral et la somme de 10.000 euros au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile. + + + Au soutien de ses demandes, M. van Y... expose les faits suivants :

Compositeur de musique classique, il a signé avec la société Gérard Billaudot, éditeur de musique trois contrats, les 31 mai 1994, 23 juin 1994 et 3 octobre 1996, qui couvrent la quasi totalité de ses .uvres. Celles-ci comprennent des .uvres pour piano, des .uvres de musique de chambre, des réductions d'orchestre ù destinées à la vente ù, ainsi que des .uvres orchestrales dont le matériel ù c'est-à-dire l'impression de toutes les parties

d'orchestre.L'annexe 2 énumérait les manuscrits de vingt-huit des .uvres cédées. Il était précisé que les manuscrits des vingt autres .uvres devaient être remis à l'éditeur par le compositeur au fur et à mesure de leur disponibilitéEn outre, à la demande du compositeur, l'éditeur a consenti d'une part à avoir recours au graveur de M. van Y..., M. Z..., d'autre part, à recourir aux services de la société Millstone Publishing, afin de venir en aide à cette dernière. Or, M. Z..., qui exerçait parallèlement les fonctions de directeur d'une académie de musique, n'a pu consacrer qu'une partie de son temps à la gravure, ce qui a occasionné des retards considérables. Toutes les .uvres autres que celles figurant dans l'annexe 3 ont été disponibles dès le début de la signature des accords. Celles énumérées à l'annexe 3 sont devenus indisponibles au fur et à mesure de l'écoulement du petit stock cédé par la société Millstone Publishing à la société Gérard Billaudot Éditeur et il a été alors impossible de les réimprimer faute de nouvelles gravures. Le retard pris à la gravure et à la regravure des .uvres n'est en rien imputable à l'éditeur, mais uniquement à M. van Y... ou à M.

Z.... Enfin, en ce qui concerne le Concerto pour flûte et orchestre, op. 57,objet du contrat du 3 octobre 1996,l'éditeur n'a jamais reçu la réduction pour flûte et piano qui est indispensable pour la promotion d'un concerto. Là encore, aucune faute ne saurait lui être reprochée. + + + Le tribunal se rapporte aux écritures des parties pour le détail de leurs moyens et arguments. SUR CE Attendu qu'il convient tout d'abord d'observer que M. van Y... ne tire aucune conclusion, notamment de nullité du fait qu'il aurait été contraint d'accepter des conditions, selon lui léonines, de l'éditeur Gérard Billaudot, qu'il convient toutefois d'observer, pour la moralité de débats, que les pièces produites aux débats n'établissent pas que M. van Y... a été contraint, ne serait-ce que par

instrumentales destinées aux musiciens de l'orchestre ù est uniquement destiné à la location. M. van Y... reproche à son éditeur de s'être abstenu d'exploiter un grand nombre d'.uvres cédées et d'avoir exploité insuffisamment les autres. Il considère que ce défaut d'exploitation comme cette insuffisance d'exploitation constituent des fautes graves, qui justifient la résiliation des contrats au torts de l'éditeur. M. van Y... rappelle que, antérieurement à la conclusion du contrat principal du 23 juin 1994, il exploitait lui-même les quarante-huit .uvres cédées dans le cadre de ce premier contrat au moyen d'une société Millstone Publishing qu'il avait créée à cette fin. Constatant que le caractère nécessairement artisanal de cette gestion limitait l'exploitation de ses .uvres, et préoccupé surtout d'en assurer la pérennité, M. van Y... a ressenti la nécessité de s'adresser à un éditeur professionnel. C'est ainsi qu'il est entré en relation avec la société Gérard Billaudot Éditeur. Celle-ci s'est déclarée intéressée, mais a subordonné la conclusion d'un contrat à la cession de toutes les .uvres du compositeur. Au moment de la signature du contrat, l'entreprise d'édition a exigé, de plus, que le compositeur lui cède, à titre gratuit, les manuscrits des .uvres et prenne à sa charge des travaux de gravure qui, normalement,

incombaient à l'éditeur. M. van Y... indique qu'il a accepté ces conditions inhabituelles parce qu'il était découragé par l'idée de devoir recommencer toutes les négociations déjà accomplies et parce que, dans son esprit, c'était le prix à payer pour assurer la permanence de l'exploitation de ses .uvres, et donc sa pérennité. Ce contrat a été accompagné de deux autres, un du 31 mai 1994, relatif à la cession des droits sur l'opéra télévisuel De soldaat Johan, le second, du 3 octobre 1996, concernant son Concerto pour flûte et orchestre, opus 57. Ces deux contrats comportaient les mêmes clauses que celui du 23 juin 1994. lassitude, d'accepter des conditions draconiennes ; qu'au contraire, il résulte des pièces produites aux débats que le contrat était équilibré ; Attendu que monsieur van Y... soulève la nullité du rapport d'expertise et développe, dans le cadre de ce moyen, divers arguments qu'il est nécessaire d'analyser dans un ordre logique ; Attendu que monsieur van Y... met d'abord en cause l'impartialité de l'expert en soulignant que celui ci est manifestement lié à un

éditeur de musique , comme le démontrent ses différents courriers, son pré rapport et son rapport définitif , envoyés aux parties par des télécopies à en-tête d'une maison d'édition, de sorte qu'"on ne peut s'empêcher d'être troublé" par le fait que, dans un litige opposant un compositeur à un éditeur de musique, l'expert entretienne à l'évidence des relations avec un professionnel de l'édition ; Attendu qu'il est de la nature même de l'expertise civile , telle que l'a conçue le législateur que l'expert soit un professionnel qui, seul, peut éclairer le juge sur des questions relevant de la science, de la technique ou de fonctionnements économiques spécifiques ; Attendu de plus que le domaine de l'édition musicale classique se limite en France, à la différence de l'Allemagne et des pays anglo saxons, à un secteur extrêmement restreint de maisons d'édition et de professionnels , en raison à la fois d'une traduction culturelle qui attache une importance plus restreinte qu'ailleurs à l'édition musicale et de concentrations intervenues dans le secteur au cours des dernières décennies ; Attendu que ,dans le domaine de l'édition musicale, il n'existe pas et ne peut exister pour des raisons

résultant de la structure du secteur, et à la différence d'autres domaines comme la médecine ou l'architecture, d'expert exerçant dans un cadre non commercial, notamment appartenant à la fonction publique ou à des structures assimilées ; Attendu que, par nature ou par nécessité, un expert choisi pour renseigner le Tribunal sur les Parallèlement à ces trois contrats, la société Millstone Publishing, créée par M. van Y... et au moyen de laquelle il exploitait ses .uvres, a cédé au même cessionnaire l'ensemble des matériels d'orchestre et des partitions qu'elle avait édités pour un prix forfaitaire très inférieur à leur valeur réelle. La société Gérard Billaudot Éditeur était donc, dès la conclusion du contrat, en possession de toutes les .uvres pour orchestre du compositeur et d'un grand nombre de partitions destinées à la vente. La société Gérard Billaudot a été gravement défaillante dans l'exploitation des .uvres. Ainsi, sur vingt-et-une .uvres pour orchestre, dont le matériel est exclusivement destiné à la location, seules onze ont fait l'objet d'une exécution entre le 23 juin 1994, date de la conclusion du contrat principal, et le 31 décembre 2004,

date de clôture du dernier relevé disponible. Ces .uvres ont été exclusivement jouées par des orchestres belges et, à l'exclusion d'une exécution à Vienne, à Budapest et en Australie, uniquement sur le territoire belge. Les attestations produites aux débats établissent que toutes ces exécutions sont exclusivement le fruit des propres démarches de M. van Y... S'agissant des partitions destinées à la vente ù .uvres pour piano, musique de chambre, musique chorale et réductions d'orchestre ù, M. van Y... fait valoir que la grande majorité de ces .uvres ne sont pas exploitées de manière suivie et permanente, de nombreuses partitions, notamment celles de musique de chambre, de musique chorale et de réductions d'orchestre, n'étant pas exploitées du tout. S'appuyant sur les résultats enregistrés par la société Gérard Billaudot Éditeur et en les comparant avec les chiffres de diffusion réalisés par la société Millstone Publishing de 1989 à 1994,M. van Y... soutient que, s'agissant des partitions effectivement exploitées, les résultats ne diffèrent pas de ceux qu'obtenait sa société Millstone, alors qu'il

était en droit spécificités de l'édition musicale classique ne peut qu'être en rapport avec des maisons d'édition, faute de quoi il serait évidemment hors d'état d'apporter au juge des renseignements techniques et professionnels pertinents; Attendu que le fait que l'expert soit en relations d'affaires avec une maison d'édition sans rapport avec celle qui est partie au procès ne permet pas à monsieur van Y... de mettre en doute la loyauté et l'impartialité de l'expert , exigées par l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; Attendu en second lieu que M. van Y... fait également grief à l'expert d'avoir pris en compte un document communiqué in extremis par la société d'édition et de n'avoir pas pris en compte un document qu'il lui avait antérieurement transmis ; Mais attendu que le Tribunal constate d'abord que le document contesté, qui constitue un état des démarches effectuées par la société Gérard Billaudot Editeur a été transmis à l'expert le 17 février 2005 , soit avant la date fixée par

l'expert pour communication des observations de cette partie ; que cette communication se situait à un stade antérieur à l'établissement du pré-rapport d'expertise , de sorte que monsieur van Y... a eu tout loisir, pendant plusieurs mois, de le contester au moyen d'un dire ou de production de pièces, le principe du contradictoire et de la loyauté des débats n'ayant été en aucune manière violé ; Attendu que monsieur van Y... reproche à l'expert d'être parvenu à ses conclusions en tenant compte du document précité émanant de l'éditeur sans tenir compte de la pièce communiquée par le compositeur en août 2004 ; Mais attendu qu'il résulte des énonciations du rapport que l'expert a sollicité les pièces et observations des parties et a veillé au respect du principe du contradictoire au cours de l'exécution de la mission qui lui a été confiée ; que les développements très longs et précis de l'expert sur d'attendre d'un éditeur professionnel l'élargissement du marché. Au total, sur cinquante .uvres cédées, vingt-cinq n'avaient fait l'objet d'aucune exploitation au 31 décembre 2004, aucune .uvre destinée à la vente n'a connu d'exploitation permanente et suivie et aucune des exécutions publiques des .uvres concernés par les contrats n'est à mettre au crédit exclusif de l'éditeur. Ces données caractérisent la défaillance de l'éditeur, qui n'a pas respecté l'obligation posée par l'article L. 132-12 du Code de la propriété industrielle d'assurer à l'.uvre une exploitation permanente et suivie et une diffusion commerciale conforme aux usages de la profession. En raison de l'évolution du marché des produits culturels au cours des vingt dernières années, les professionnels doivent s'imposer une vigilance accrue en matière de promotion et de marketing. Cette vigilance était d'autant plus exigée de l'éditeur que, bénéficiaire du monopole que lui conférait le contrat de licence, qui plus est pour une très longue durée et sur une étendue territoriale qui était la plus large possible, il avait en contrepartie des obligations particulières en matière de promotion et d'exploitation des .uvres. En l'espèce, cette obligation de vigilance doit s'apprécier compte tenu du fait que le monopole de l'éditeur porte sur la quasi-totalité des .uvres du compositeur : l'éditeur est seul responsable du maintien en vie de

la quasi-totalité de l'.uvre, et détient ainsi le pouvoir exorbitant de la faire disparaître du marché. La défaillance de l'éditeur bloque l'.uvre de M. van Y..., lui causant un dommage considérable, non seulement sur le plan financier, mais également en termes de notoriété. Ainsi, certaines .uvres orchestrales, qui étaient régulièrement jouées avant la conclusion des contrats de cession, notamment les .uvres symphoniques, ont disparu de la circulation, aucun enregistrement phonographique n'a été réalisé en huit ans, alors que l'objet même des contrats était de leur assurer l'exécution par la société défenderesse de ses obligations d'édition, de promotion et de commercialisation - développements qui comportent des mentions nombreuses des reproches faits par le compositeur à l'éditeur - prouvent que l'expert a nécessairement pris en compte le document sus spécifié mais ne l'a pas tenu pour techniquement probant , d'où il suit que le grief formulé par monsieur van Y..., dénué de toute pertinence, ne saurait déterminer la nullité du rapport d'expertise ; Attendu que M.

van Y... fait par la suite grief à l'expert d'avoir méconnu la mission qui lui était impartie par le juge en ne procédant pas à une analyse oeuvre par oeuvre mais en se bornant à une " impression globale "; Mais attendu que le Tribunal constate que l'expert a très longuement analysé, sur huit pages (pp 7 à 14) les actions d'édition et de promotion de la société défenderesse, en précisant les spécificités de ces actions pour des oeuvres déterminées et en prenant le soin de détailler sur trois pages ( pp.12 à 14 ) les différents coûts afférents à ces actions ; qu'il s'ensuit que l'argument est dépourvu de toute pertinence ; Attendu enfin que monsieur van Y... ne saurait sérieusement faire grief à l'expert d'avoir " reproduit des arguments de l'éditeur sans relever leur incompatibilité avec la jurisprudence " alors que, ce faisant, l'expert n'a fait que se conformer exactement aux obligations posées par les articles 232 et 276 du nouveau Code de procédure civile , d'une part en notant les arguments de chacune des parties, d'autre part en ne portant que des appréciations factuelles et techniques , à l'exclusion de toute

considération de droit : Attendu que M. van Y... doit, par voie de conséquence, être débouté de sa demande tendant à voir déclarer nul le rapport d'expertise ; Attendu que M. van Y... conteste l'importance et la qualité des démarches faites par l'éditeur pour l'exécution publique des .uvres pour orchestre, pour la vente des partitions pour piano et des .uvres une plus large diffusion. Vainement, la société éditrice ferait-elle valoir qu'elle a eu une activité dans le domaine phonographique, du fait que la dénomination Gérard Billaudot Éditeur figure en qualité de sponsor sur trois CD. En effet, deux de ces CD, publiés en 1995, sont des rééditions d'enregistrements anciens, parus entre 1970 et 1994 ; ils ont été publiés à nouveau en 1995 à l'initiative de M. A..., gérant de la société René A... International Productions. La société Gérard Billaudot Éditeur n'a eu aucun rôle ni dans les enregistrements qui figurent sur ces disques, ni dans leur réédition. La mention de sa dénomination résulte uniquement d'un accord passé

entre la société René A... International Productions et la défenderesse, aux termes duquel elle a acquis des exemplaires de ces deux disques. S'agissant du troisième CD, qui contient des .uvres pour piano, il a été produit par l'interprète lui-même, M. Frédéric B..., et diffusé par la société René A... Là encore, la mention de la dénomination de la société défenderesse n'apparaît qu'à la suite d'un accord d'achat. La mention an accomplishment signed Gérard Billaudot Éditeur est trompeuse, ce disque résultant exclusivement de la collaboration entre le pianiste et le compositeur, en dehors de toute intervention de la société Gérard Billaudot Éditeur, qui n'a fait qu'apposer son nom sur le produit achevé en dehors de toute intervention de sa part. Vainement la société Gérard Billaudot Éditeur ferait-elle grief à M. van Y... de ne pas lui avoir remis toutes les nouvelles gravures qu'elle avait exigées à titre gratuit. En effet, l'utilité de ce travail lui est apparue, après la remise des premières gravures, comme aléatoire, ses .uvres ne faisant pas

l'objet d'une exploitation conforme aux stipulations contractuelles par l'éditeur ; la défaillance de l'éditeur justifie la suspension par son cocontractant de ses obligations. Enfin, l'éditeur, à l'exception d'un courrier du 2 de musique de chambre, pour l'exploitation phonographique audiovisuelle des ces .uvres ; Attendu qu'il résulte toutefois du rapport d'expertise que la société Gérard Billaudot Editeur a effectué toutes les diligences normalement requises ; Qu'il résulte des pièces produites aux débats que l'éditeur a engagé des investissements importants afin que les .uvres cédées par M. van Y... soient présentées de manière usuelle à la clientèle et disponibles sur les supports graphiques courants nécessaires à leur bonne exécution et à leur promotion ; Qi'il convient d'examiner la conduite respective des parties pièce de musique par pièce de musique ; Que s'agissant de l'opéra télévisuel De soldaat Johan, il est démontré que M. van Y... n'a jamais communiqué à l'éditeur, qui en avait fait la demande, les coordonnées des héritiers du

librettiste pour solliciter leur accord ; que, M. van Y... ne peut reprocher à son cocontractant de ne pas avoir exploité l'.uvre, alors que, d'une part, cette exploitation eût été illégale sans l'accord de ces ayants droit, d'autre part, que le compositeur est le seul à même de donner les coordonnées de l'auteur qui avait travaillé avec lui pour la création de l'oeuvre ; qu'ainsi, aucune faute ne saurait, à l'évidence, être reprochée à l'éditeur ; Attendu que, s'agissant du Concerto pour flûte et orchestre opus 57, objet du contrat passé le 3 octobre 1996, il était convenu aux termes de cet acte que la gravure devait être réalisée par la société Millstone Publishing aux frais de la société Gérard Billaudot Éditeur ; qu'un concerto ne peut faire l'objet d'une promotion, conformément aux usages de l'édition, sans la réduction pour flûte et piano ; qu'il est démontré que M. van Y... n'a jamais fait parvenir la réduction, de sorte qu'il ne saurait faire grief à son cocontractant de n'avoir pas réalisé une promotion qui ne pouvait être faite alors que c'est son abstention fautive qui l'en a empêchée ; Attendu qu'il

est démontré, par les octobre 1995 relatif à ses démarches de promotion, n'a jamais rendu compte de ses démarches de promotion, de ses démarches visant à procéder à l'exploitation des .uvres par voie phonographique ou audiovisuelle, de l'état des stocks, des justificatifs des fabrications et tirages. Ainsi, l'éditeur néglige totalement la vente des partitions du compositeur et n'entreprend aucune démarche pour promouvoir l'.uvre ; il se contente d'encaisser la part des recettes qui lui revient conformément aux dispositions contractuelles sur des exécutions orchestrales qui sont le fruit des seules démarches du compositeur et sur les diffusions radiophoniques d'anciens enregistrements, dans lesquels il n'a eu aucun rôle. Ces défaillances, graves et constantes, de l'éditeur justifient la résiliation des contrats à ses torts exclusifs. M. van Y... détaille enfin les principes de calcul de ses préjudices, matériel ù pertes de droits d'auteur et manque à gagner ù et moral. + + + Aux termes de ses écritures récapitulatives signifiées le 4 juillet 2005, la société Gérard

Billaudot Éditeur demande au tribunal de débouter M. van Y... de ses demandes ; de le condamner à lui payer la some de 15.000 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ; de condamner M. van Y... aux dépens. + + + La société défenderesse rappelle que les parties sont entrées en contact à l'occasion de la Foire internationale de la Musique à Francfort-sur-le Main, début 1994. M. van Y... souhaitait, en raison de son âge et de l'importance des tâches matérielles inhérentes à l'exploitation d'un catalogue éditorial, confier cette tâche à un éditeur de musique. Pour sa part, l'éditeur lui a exposé que, dans une logique éditoriale, il était préférable de représenter le plus d'.uvres possibles, d'autant que les .uvres de M. van Y... n'avaient fait l'objet d'aucune promotion pendant près de trente ans et que le compositeur souffrait manifestement d'un manque de

pièces produites aux débats que M. van Y... a reçu chaque année de la part de son éditeur un relevé des ventes de partitions et de locations des matériels d'orchestre, ainsi que le formulaire F 5 d'exonération de l'impôt français sur les redevances de droits d'auteurs ; qu'ainsi, il ne peut être reproché à la société Gérard Billaudot Éditeur d'avoir manqué à son obligation de rendre compte à son cocontractant ; Attendu que l'éditeur a, conformément aux usages professionnels, l'obligation de procéder au dépôt des .uvres du compositeur qui a contracté avec lui ; que cette obligation n'existe que dans la mesure où le compositeur lui a remis le manuscrit de l' .uvre et où sont mentionnées les autorisations des personnes titulaires des droits d'auteurs ; Attendu, s'agissant des .uvres dont M. van Y... est le seul auteur, qu'il convient de constater tout d'abord qu'il résulte des énonciations de l'annexe 2 du contrat du 23 juin 1994, que les manuscrits de vingt-huit .uvres sur les quarante-huit cédées étaient remis dans les mains de l'éditeur à cette date ; que ces vingt-huit .uvres ont été déposées par la société Gérard Billaudot Éditeur à la S.a.c.e.m. ; qu'il est

démontré par les pièces produites aux débats que la société Gérard Billaudot Éditeur a fait procéder au dépôt de toutes les autres .uvres dont le manuscrit lui a été ensuite remis ; que les .uvres ayant pour seul auteur M. van Y... qui n'ont pas fait l'objet de dépôt sont celles dont le compositeur n'a pas remis le manuscrit à l'éditeur; qu'aucune faute ne saurait donc être reprochée sur ce plan à l'éditeur ; Attendu que, s'agissant de l'opéra télévisuel De soldaat Johan, dont le librettiste était coauteur, il ne saurait être fait grief à l'éditeur de n'avoir pas publié une .uvre, alors que la défaillance du compositeur, qui n'a pas communiqué les coordonnées des héritiers du librettiste à l'éditeur, constitue la cause exclusive de la non-exécution du contrat ; Attendu que, de très nombreuses .uvres

étant copiées à la main et les impératifs de l'édition musicale moderne imposant de les graver dans un format normalisé, pour améliorer leur diffusion, les parties ont convenu, le 23 juin 1994, à l'annexe 3 du contrat, de se répartir la charge de la gravure de certaines .uvres ; Que M. van Y... s'est engagé à remettre gratuitement à l'éditeur de nouvelles gravures, en suivant les indications données par l'éditeur de six .uvres, à savoir : Adagio, Opus 4, Sonata in un movimento, Opus 5, Impulses, Opus 34, Préludes, Opus 44, Ballade, Opus 49 et Hommage à Kafka, Opus 35 ; Que l'éditeur avait à sa charge la nouvelle gravure de deux .uvres, Pyrogravureqs, Opus 19 bis et Catharsis, Opus 42, et de trois réduction d'orchestre : Concerto pour violon no 1, opus 37, Éloquences Opus 39 et Concerto pour piano Slovienska duca ; Qu'il convient de constater que les parties ont également convenu que, s'agissant des gravures à la charge de l'éditeur, celui-ci devait avoir recours à M. Z... ainsi qu'à la société Millstone Publishing, animée pare M. van Y... ; Attendu qu'il est démontré que le recours à M. Z... n'a pu être décidé qu'à la demande de M. van Y... qui recourait habituellement à ses services ; Attendu que M. Z..., qui ne pouvait consacrer qu'une partie de son temps à la gravure du fait qu'il était exerçait

également les fonctions de directeur d'une Académie de musique, a reconnu, dans un courrier du 13 septembre 1998, que le retard survenu dans les gravures qui lui avaient été confiées lui étaient imputable ; que l'éditeur n'a commis à ce niveau aucune défaillance ; Que les .uvres autres que celles figurant à l'annexe 3 du contrat ont été disponibles dans un temps très proche de la signature de la convention ; Attendu que les oeuvres figurant à l'annexe 3 sont devenues indisponibles au fur et à mesure du petit stock vendu par la société Millstone Publishing à la société Gérard Billaudot Éditeur ; Que s'agissant de Catharsis et du Concerto pour piano Slovienska

duca le défaut de publication est uniquement causé par le défaut de diligence de M.van Y... ; qu'en effet, le compositeur, pour la première .uvre, a demandé, par lettre du 10 novembre 2000, qu'elle soit remise en page à l'italienne , puis est resté taisant (alors que la preuve d'une réponse lui incombait), après qu'une deuxième épreuve de correction lui ait été adressée le 31 août 2001 ; que l'éditeur fait valoir que M. van Y... n'a jamais répondu ;que, dès lors, il ne saurait être fait grief de ce défaut de regravure à l'éditeur, qui a fait preuve de la diligence que lui imposaient les règles de la profession ;que, en ce qui concerne le concerto pour piano, M. van Y... ne justifie pas avoir répondu au courrier de l'éditeur en date du 25 mars 1997, qui lui transmettait la pièce pour relecture ; Que, s'agissant de Pyrogravures et d'Éloquence, Opus 39, il avait été convenu que Monsieur Z..., qui était le graveur de M. van Y... en assurerait la gravure ; que le retard est uniquement imputable au manque de temps du graveur qui, exerçant en même temps les fonctions de directeur d'une académie de musique, n'avait pas la disponibilité pour graver simultanément plusieurs .uvres, ainsi que M. Z... l'a reconnu dans un courrier du 13 septembre 1998 ; qu'aucune faute ne peut être reprochée à l'éditeur ; Que, s'agissant d'Impulses, Opus 34, Préludes, Opus 44 et Hommage à Kafka, Opus 35, la gravure était contractuellement à la charge de M. van Y..., qui ne justifie pas, alors que la

charge lui incombe, avoir réalisé ces gravures et les avoir fait parvenir à son cocontractant ; Attendu que monsieur van Y... reproche enfin une carence dans l'exploitation et la diffusion commerciale de ses oeuvres ; Attendu que la société éditrice a, à la suite de la conclusion du premier contrat de cession et d'édition, élaboré un catalogue des .uvres de M. van Y..., alors qu'aucun catalogue n'avait jamais été réalisé auparavant ; qu'à la suite de la sortie des disques compacts produits par la société René Gaily Productions, elle a fait parvenir de nombreux communiqués de promotion aux producteurs de radio classique, accompagnés de disques ; que, annuellement, elle a informé la presse, les revendeurs et les professeurs des conservatoires de Paris et de Lyon ; que, à l'occasion du centenaire de la maison d'édition, elle a réalisé une vidéo dans laquelle est intervenu M. van Y... aux côtés de neuf autres compositeurs et l'a invité à une réception, pour lui permettre de se faire mieux connaître du milieu musical; qu'elle a envoyé des

communiqués aux journalistes spécialisés à l'occasion de la création du Concerto pour flûte et orchestre, Opus 57 ; qu'elle a suggéré la participation de M. van Y... au troisième concours international de saxophone de Dinan, candidature qui a été retenue ; Qu'elle a également conclu, quatre conventions, avec les producteurs de phonogrammes René A... et Pavane Records pour la production de quatre compact discs, permettant ainsi la diffusion de seize .uvres du compositeur ; que, aux termes des conventions passées avec la société René A..., elle a en outre apporté la somme de 4.573 euros au titre du mécénat et fourni les matériels d'orchestre à titre gracieux ; Que, sur son site Internet mis en place en décembre 20001, www.billaudot.com, M. van Y... dispose de plusieurs pages personnalisées avec photographies ; que les oeuvres de M. van Y... destinées à la vente figurent sur de nombreux sites internet de marchands de musique, en France et à l'étranger ; Que l'éditeur a adressé des .uvres du compositeur à de grands orchestres et à des artistes

célèbres; que rien ne permet de retenir que la défaut de réponse ou la réponse négative de ces orchestres ou solistes puisse être imputable à un défaut de communication de l'éditeur ; Attendu qu'il est ainsi justifié des démarches nombreuses, diligentes et pertinentes, totalement satisfaisantes au regard des pratiques de la profession, accomplies par l'éditeur dans l'intérêt des .uvres de M. van Y... au regard de ses obligations ;que les actions engagées par l'éditeur, et les frais engagés par lui, démontrent que l'éditeur a accompli, totalement et de manière adéquate, les obligations mises à sa charge par la loi, les contrats et les usages professionnels ; Que les défauts de résultats dont se plaint M. van Y... ne sont en aucune manière imputables à une quelconque défaillance de son éditeur, mais ne sont, manifestement que la conséquence de la désaffection que connaît, de manière générale, la musique classique contemporaine, phénomène qui a été accentué, en l'espèce, par l'absence de promotion par un éditeur de l'.uvre de M. van Y... pendant trente ans ; Qu'enfin, il résulte des relevés de la société

belge de gestions collectives des droits des auteurs, compositeurs et interprètes de musique, la S.a.b.a.m., que les droits de de reproduction mécanique de M. van Y... ont augmenté nettement depuis la production des compacts discs subventionnés par la société Gérard Billaudot Éditeur ; Que M van Y... doit, en conséquence, être débouté de l'ensemble de ses demandes tant de résiliation des conventions conclues que de condamnation à paiement ; Attendu que, dans les circonstances de l'espèce, il n'est pas contraire à l'équité de laisser à la charge des parties les frais irrépétibles qu'elles ont exposés ; qu'elles seront déboutées de leurs demandes formées sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ; Attendu que les demandes de M. van Y... étant rejetées, sa demande d'exécution provisoire de la décision se trouve dépourvue d'objet ; qu'il doit en être débouté ; Attendu que M. van Y..., partie succombante, doit supporter les dépens .

PAR CES MOTIFS Statuant publiquement, contradictoirement, en premier

ressort, Déboute M. X... van Y... de ses demandes. Déboute les parties de leurs demandes au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile. Condamne M. X... van Y... aux dépens avec bénéfice pour lc SCP GRANRUT, Avocat à la Cour, de recouvrer directement ceux des dépens dont elle a fait l'avance, dans les conditions prévues à l'article 699 du nouveau Code de procédure civile. Fait à Paris, le 15 mars 2006

Le Greffier

Le Président


Synthèse
Tribunal : Tribunal de grande instance de Paris
Formation : Ct0087
Numéro d'arrêt : JURITEXT000006949692
Date de la décision : 15/03/2006

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.grande.instance.paris;arret;2006-03-15;juritext000006949692 ?
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