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08/03/2006 | FRANCE | N°JURITEXT000006949129

France | France, Tribunal de grande instance de Paris, Ct0087, 08 mars 2006, JURITEXT000006949129


T R I B U N A L D E GRANDE I N S T A N C E D E P A R I S 3ème chambre 3ème section No RG : 05/17878 No MINUTE : Assignation du : 08 Décembre 2005 Expéditions exécutoires délivrées le : JUGEMENT rendu le 08 Mars 2006

DEMANDERESSE SOCIETE PARFUMS LORIS AZZARO SAS représentée par son Président, M. Gérard X.... 16 rue MONTROSIER 92200 NEUILLY SUR SEINE représentée par Me Séverine GUYOT, avocat au barreau de PARIS, avocat postulant, vestiaire G 284 DÉFENDERESSE S.A. PARFUMS CHRISTIAN DIOR 33 Avenue HOCHE 75008 PARIS représentée par Me Nicolas BOESPFLUG, avocat au barreau de

PARIS, avocat plaidant/postulant, vestiaire E 329 COMPOSITION DU TRIB...

T R I B U N A L D E GRANDE I N S T A N C E D E P A R I S 3ème chambre 3ème section No RG : 05/17878 No MINUTE : Assignation du : 08 Décembre 2005 Expéditions exécutoires délivrées le : JUGEMENT rendu le 08 Mars 2006

DEMANDERESSE SOCIETE PARFUMS LORIS AZZARO SAS représentée par son Président, M. Gérard X.... 16 rue MONTROSIER 92200 NEUILLY SUR SEINE représentée par Me Séverine GUYOT, avocat au barreau de PARIS, avocat postulant, vestiaire G 284 DÉFENDERESSE S.A. PARFUMS CHRISTIAN DIOR 33 Avenue HOCHE 75008 PARIS représentée par Me Nicolas BOESPFLUG, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant/postulant, vestiaire E 329 COMPOSITION DU TRIBUNAL Elisabeth BELFORT, Vice-Président, signataire de la décision Agnès THAUNAT, Vice-Président Pascal MATHIS, Juge assistée de Marie-Aline PIGNOLET, Greffier, signataire de la décision DEBATS A l'audience du 27 Février 2006 tenue publiquement JUGEMENT Prononcé publiquement Contradictoirement en premier ressort FAITS ET PRETENTIONS DES PARTIES:

La société PARFUMS CHRISTIAN DIOR est titulaire d'une marque HAPPENNING no 99 792 685 déposée le 11 mai 1999 pour désigner des "produits de parfumerie, parfums, huiles essentielles, cosmétiques, lotions pour les cheveux, savons et dentifrices" relevant de la classe 3 de la classification internationale.

Par assignation en date du 8 décembre 2005, la société PARFUMS LORIS AZZARO demande au tribunal de prononcer la déchéance des droits de la société PARFUMS CHRISTIAN DIOR sur la marque HAPPENNING no 99 792 685 à compter du 30 octobre 2004 pour absence d'usage sérieux pendant 5 ans et sollicite la somme de 3 500 ç par application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Par conclusions du 31 janvier 2006 la société PARFUMS CHRISTIAN DIOR fait valoir que l'action est irrecevable à défaut d'intérêt à agir du

fait de l'absence de projet d'exploitation du signe par le demandeur et subsidiairement du fait du caractère partiel de la déchéance encourue, la marque devant être maintenue pour les produits pour lesquels elle est exploitée, à savoir les rouges à lèvres et les parfums, ce maintien partiel rendant de toute façon le signe indisponible pour désigner des produits similaires.

En effet la société PARFUMS CHRISTIAN DIOR expose qu'elle s'apprête à commercialiser un rouge à lèvres et un parfum sous sa marque HAPPENNING. Reconventionnellement elle sollicite la somme de 5 000 ç par application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. MOTIFS SUR LA RECEVABILITE DE LA DEMANDE

Sur la nécessité d'un projet d'exploitation au regard de l'intérêt à agir en déchéance

Attendu que l'article L. 714-5 du code de la propriété intellectuelle dispose que :

"Encourt la déchéance de ses droits le propriétaire de la marque qui, sans justes motifs, n'en a pas fait un usage sérieux, pour les produits et services visés dans l'enregistrement, pendant une période ininterrompue de cinq ans.

Est assimilé à un tel usage : a) L'usage fait avec le consentement du propriétaire de la marque ou, pour les marques collectives, dans les conditions du règlement ; b) L'usage de la marque sous une forme modifiée n'en altérant pas le caractère distinctif ; c) L'apposition de la marque sur des produits ou leur conditionnement exclusivement en vue de l'exportation.

La déchéance peut être demandée en justice par toute personne intéressée. Si la demande ne porte que sur une partie des produits ou des services visés dans l'enregistrement, la déchéance ne s'étend qu'aux produits ou aux services concernés.

L'usage sérieux de la marque commencé ou repris postérieurement à la

période de cinq ans visée au premier alinéa du présent article n'y fait pas obstacle s'il a été entrepris dans les trois mois précédant la demande de déchéance et après que le propriétaire a eu connaissance de l'éventualité de cette demande.

La preuve de l'exploitation incombe au propriétaire de la marque dont la déchéance est demandée. Elle peut être apportée par tous moyens.

La déchéance prend effet à la date d'expiration du délai de cinq ans prévu au premier alinéa du présent article. Elle a un effet absolu." Attendu qu'au terme de ce texte la déchéance peut être demandée en justice par toute personne intéressée.

Attendu que l'intérêt à agir d'un demandeur en déchéance est suffisamment établi par la fabrication et la commercialisation régulière sur le territoire national des produits visés à l'enregistrement de la marque attaquée ou de produits similaires.

Attendu qu'il n'est pas contesté en l'espèce que la société demanderesse commercialise habituellement sur le territoire national les produits visés à l'enregistrement et des produits similaires.

Attendu qu'elle a de ce chef intérêt à agir en déchéance. Sur la nécessité d'une disponibilité du signe au regard de l'intérêt à agir en déchéance

Attendu que la société défenderesse conteste l'intérêt à agir de son adversaire en supposant que la déchéance que prononcerait le tribunal ne serait que partielle et de ce fait ne permettrait pas au demandeur d'enregistrer le signe à titre de marque pour désigner les autres produits qui sont similaires.

Attendu que l'enregistrement d'un signe pour désigner des produits ou services visés n'interdit au visa de l'article L. 713-2 du code de la propriété intellectuelle que l'exploitation de la reproduction à l'identique du signe pour désigner des produits ou services

identiques.

Attendu que s'agissant de l'exploitation de ce même signe pour des produits similaires, celle-ci n'est interdite que lorsqu'un risque de confusion est avéré.

Attendu en conséquence que la société demanderesse justifie d'un intérêt légitime à déposer le signe pour de tels produits (similaires) dès lors qu'une exploitation de celui-ci est possible.

Attendu qu'il y a lieu de relever au surplus qu'en application de l'article L. 714-5 du code de la propriété intellectuelle, l'exploitation doit être justifiée pour chaque produit visé à l'enregistrement ; que dénier à tout intéressé le droit de poursuivre la déchéance pour les produits non exploités similaires à ceux qui le sont reviendrait à contourner cette règle et à élargir le champ de protection de la marque en cause.

Attendu ainsi que la demanderesse a bien intérêt à agir en déchéance. SUR LA COMMERCIALISATION IMMINENTE INVOQUÉE EN DÉFENSE

Attendu que l'article 12 1o de la directive relative aux marques du 21 décembre 1988, à la lumière duquel l'article L. 714-5 du code de la propriété intellectuel doit être lu, dispose que :

"Le titulaire d'une marque peut être déchu de ses droits si, pendant une période ininterrompue de cinq ans, la marque n'a pas fait l'objet d'un usage sérieux dans l'État membre concerné pour les produits ou les services pour lesquels elle est enregistrée et qu'il n'existe pas de justes motifs pour le non-usage; toutefois, nul ne peut faire valoir que le titulaire d'une marque est déchu de ses droits si, entre l'expiration de cette période et la présentation de la demande en déchéance, la marque a fait l'objet d'un commencement ou d'une reprise d'usage sérieux; cependant, le commencement ou la reprise d'usage qui a lieu dans un délai de trois mois avant la présentation de la demande de déchéance, ce délai commençant à courir au plus tôt

à l'expiration de la période ininterrompue de cinq ans de non-usage, n'est pas pris en considération lorsque les préparatifs pour le commencement ou la reprise de l'usage interviennent seulement après que le titulaire a appris que la demande de déchéance pourrait être présentée."

Attendu ainsi que les préparatifs d'usage d'une marque, intervenus avant que son titulaire ait été averti d'une éventuelle action en déchéance, doivent être pris en considération dans la mesure où il conduisent à une mise sur le marché imminente.

Attendu que la société demanderesse soutient que cet avertissement résulte d'un courrier en date du 19 octobre 2005.

Mais attendu que ce courrier ne renseignait pas le titulaire de la marque sur l'intention de la société demanderesse de présenter une demande en déchéance.

Attendu que le tribunal examinera dès lors l'ensemble des préparatifs antérieurs au 8 décembre 2005 pour rechercher s'ils devaient conduire à une mise sur le marché imminente de produits revêtus de la marque en cause. Concernant le rouge à lèvres

Attendu que la société PARFUMS CHRISTIAN DIOR expose qu'au jour de l'assignation elle était sur le point de commercialiser un rouge à lèvres sous la marque HAPPENNING.

Attendu que pour établir ce point elle produit un compte rendu de réunion du 19 septembre 2005, une brochure du 25 septembre 2005 présentant ce rouge à lèvre, un texte de dossier de presse, un bon de commande en date du 7 novembre 2005 ainsi qu'un étui carton du rouge à lèvres.

Attendu qu'il ressort du compte rendu de réunion qu'il avait été décidé le 25 septembre 2005 de renommer la teinte Europe/Asie/Japon Dior Addict Ultra-Gloss F028 500 723 du look été 2006 en HAPPENNING,

que cette décision est reprise dans un catalogue prévisionnel du même jour prévoyant une mise sur comptoir le 15 avril 2006 et dans un dossier de presse.

Mais attendu que ces documents ont été édités par la société PARFUMS CHRISTIAN DIOR et ne suffisent pas à prouver l'exploitation imminente prétendue.

Attendu qu'un bon de commande destiné à un client allemand, daté du 7 novembre 2005, rédigé en langue anglaise, est produit concernant notamment un article désigné par l'appellation CHEM 723 DIOR ADDICT ULTRA GL HAPPENNING.

Attendu enfin qu'un emballage est produit, rédigé en langues française et anglaise mais dépourvu de date.

Attendu que ces divers éléments ne permettent pas au tribunal de tenir l'exploitation de la marque HAPPENNING comme imminente au jour de l'assignation ; qu'en effet dans l'hypothèse soutenue par la société PARFUMS CHRISTIAN DIOR d'une mise sur comptoir le 15 avril 2006 cette société aurait pu fournir un tribunal des bons de commande étayant les éléments internes précités ainsi que des documents promotionnels et des exemplaires du produit marqué et pas simplement une commande allemande qui ne renseigne pas sur la dénomination exacte dupromotionnels et des exemplaires du produit marqué et pas simplement une commande allemande qui ne renseigne pas sur la dénomination exacte du produit et un emballage non assemblé dont rien n'établit qu'il n'est pas une maquette.

Attendu ainsi que la société PARFUMS CHRISTIAN DIOR n'établit pas une commercialisation imminente d'un rouge à lèvre de marque HAPPENNING au jour de l'assignation. Concernant le parfum

Attendu que la société PARFUMS CHRISTIAN DIOR soutient encore qu'elle se prépare à lancer un nouveau parfum à la mi-octobre 2006 revêtu de la marque HAPPENNING.

Attendu qu'à titre de preuve cette société produit des devis de la société LOVE en date des 19 avril et 17 juin 2005 ainsi qu'un emballage carton et des compte rendu de réunion interne.

Mais attendu que ces documents internes, même à les considérer comme probants, ne renseignent pas le tribunal sur la volonté de l'entreprise de mener à bien ce projet sous le nom choisi.

Attendu que le tribunal relève en effet que ni le flacon ni le jus ne sont produits, pas plus qu'il n'est justifié des diligences de protection internationale de la marque HAPPENNING pourtant nécessaires au lancement d'un nouveau parfum par une société de la taille des PARFUMS CHRISTIAN DIOR qui ne développe pas de tels produits pour le seul marché national.

Attendu ainsi qu'il convient de déchoir la société PARFUMS CHRISTIAN DIOR de ses droits sur la marque HAPPENNING à compter du 30 octobre 2004. SUR LES FRAIS IRREPETIBLES

Attendu que l'équité commande d'allouer à la société PARFUMS LORIS AZZARO la somme de 3 500 ç en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. SUR LES DÉPENS

Attendu qu'il convient de condamner la société PARFUMS CHRISTIAN DIOR qui succombe aux dépens.

PAR CES MOTIFS Le Tribunal, Statuant publiquement, contradictoirement et en premier ressort

Déclare la société PARFUMS CHRISTIAN DIOR déchue de ses droits sur la marque HAPPENNING no 99 792 685 déposée le 11 mai 1999 pour défaut d'exploitation sérieuse pendant une période de 5 ans pour désigner l'ensemble des produits visés à l'enregistrement et ce à compter du 30 octobre 2004.

Ordonne la communication de ce jugement, une fois devenu définitif à l'INPI pour transcription au registre national des marques à la diligence de Madame le Greffier saisie par la partie la plus

diligente.

Condamne la société PARFUMS CHRISTIAN DIOR à payer à la société PARFUMS LORIS AZZARO la somme de 3 500 ç en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Condamne la société PARFUMS CHRISTIAN DIOR aux dépens dont distraction au profit de Maître Séverine GUYOT, Avocat, pour la part dont elle a du faire l'avance sans en avoir reçu provision en application des dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile. Ainsi fait et jugé à Paris le 8 mars 2006 Le Greffier

Le Président


Synthèse
Tribunal : Tribunal de grande instance de Paris
Formation : Ct0087
Numéro d'arrêt : JURITEXT000006949129
Date de la décision : 08/03/2006

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.grande.instance.paris;arret;2006-03-08;juritext000006949129 ?
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