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01/02/2006 | FRANCE | N°JURITEXT000006947557

France | France, Tribunal de grande instance de Paris, Ct0087, 01 février 2006, JURITEXT000006947557


T R I B U N A L D E GRANDE I N S T A N C E D E P A R I S 3ème chambre 3ème section No RG : 05/16539 No MINUTE : Assignation du : 14 Novembre 2005 Expéditions exécutoires délivrées le : JUGEMENT rendu le 01 Février 2006 DEMANDERESSE S.A.S Societé SANTE MAGAZINE ... représentée par Maître Michel RASLE de la SCP CARBONNIER - LAMAZE - Y... etamp; ASSOCIES, avocats au barreau de PARIS, vestiaire P298 DÉFENDERESSE Société ALAIN AYACHE DEVELOPPEMENT ... représentée par Maître Grégoire HALPERN, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant/postulant, vestiaire E.0593

COMPOSITIO

N DU TRIBUNAL Elisabeth X..., Vice-Président, signataire de la décision...

T R I B U N A L D E GRANDE I N S T A N C E D E P A R I S 3ème chambre 3ème section No RG : 05/16539 No MINUTE : Assignation du : 14 Novembre 2005 Expéditions exécutoires délivrées le : JUGEMENT rendu le 01 Février 2006 DEMANDERESSE S.A.S Societé SANTE MAGAZINE ... représentée par Maître Michel RASLE de la SCP CARBONNIER - LAMAZE - Y... etamp; ASSOCIES, avocats au barreau de PARIS, vestiaire P298 DÉFENDERESSE Société ALAIN AYACHE DEVELOPPEMENT ... représentée par Maître Grégoire HALPERN, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant/postulant, vestiaire E.0593

COMPOSITION DU TRIBUNAL Elisabeth X..., Vice-Président, signataire de la décision Agnès Z..., Vice-Président Pascal MATHIS, Juge assistée de Marie-Aline PIGNOLET, Greffier, signataire de la décision DEBATS A l'audience du 13 Décembre 2005 tenue publiquement JUGEMENT Prononcé publiquement Contradictoire en premier ressort FAITS ET PRETENTIONS DES PARTIES : La société SANTE MAGAZINE édite le magazine mensuel "SANTE MAGAZINE" crée en 1976. Il s'agit d'une publication grand public spécialisée dans les domaines de la santé, de la médecine, du bien être, de la beauté, de la nutrition et de l'écologie. Elle revendique pour ce mensuel 400.000 acheteurs et 5.000.000 de lecteurs par mois. Elle est titulaire de la marque semi-figurative SANTE MAGAZINE, déposée le 4 septembre 1990 et enregistrée à l'INPI sous le numéro 1 613 429 en classes 16, 35 et 41 notamment pour des "revues" ainsi décrite à l'enregistrement:"SANTE est écrit en lettres minuscules jaunes entourées de rouge, MAGAZINE est écrit en dessous du mot SANTE, en plus petit, en lettres minuscules jaunes entourées de rouge." Cette marque a été régulièrement renouvelée le 2 août 2000. Le groupe ALAIN AYACHE DEVELOPPEMENT publie depuis plusieurs années le magazine "LES REPONSES SANTE" qui porte également sur la forme, le bien être et la

beauté. Ce groupe a publié à compter du mois de septembre 2005 une nouvelle formule de son magazine sous le titre "LES REPONSES SANTE MAGAZINE". Par acte d'huissier de Justice en date du 14 novembre 2005, la S.A.S. SANTE MAGAZINE a assigné à jour fixe, après y avoir été autorisée par ordonnance du 13 décembre 2005, la société ALAIN AYACHE DEVELOPPEMENT, devant le Tribunal de Grande Instance de Paris en contrefaçon par imitation.

La S.A.S. SANTE MAGAZINE, dans ses dernières écritures communiquées le 12 décembre 2005, a principalement demandé de : au visa des articles L713-3, L716-1, L112-4 alinéa 2 du code de la propriété intellectuelle et 1382 du code civil, - Constater la contrefaçon par imitation de la marque "SANTE MAGAZINE" par la dénomination "LES REPONSES SANTE MAGAZINE" pour un produit similaire, - Dire et juger qu'il y a risque de confusion générée auprès du public. En conséquence, - Ordonner l'interdiction à la société défenderesse d'utiliser ou de reproduire la dénomination "LES REPONSES SANTE MAGAZINE" à quelque titre que ce soit sous astreinte de 5.000 euros par jour de retard à compter de la signification de la décision à intervenir, - Condamner la société défenderesse à réparer son préjudice à hauteur de 100.000 euros, - Ordonner la saisie et la destruction au frais du défendeur des exemplaires d'ores et déjà publiés sous cette dénomination. En outre, - constater les actes de concurrence déloyale de la société défenderesse. En conséquence, - La condamner à lui payer la somme de 150.000 euros en réparation du préjudice subi. En toutes hypothèses, - La débouter de sa demande en nullité de la marque "SANTE MAGAZINE", - La débouter de l'intégralité de ses demandes, - Ordonner l'exécution provisoire, - Condamner la société ALAIN AYACHE DEVELOPPEMENT à lui payer la somme de 4.000 euros en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile. Dans ses dernières écritures communiquées le 13 décembre

2005, la société ALAIN AYACHE DEVELOPPEMENT a principalement demandé de : au visa des articles L711-1, L711-2 et L713-3 du code de la propriété intellectuelle, sur l'action en contrefaçon par imitation de produits identiques, - Voir constater que la marque "SANTE MAGAZINE" utilisée pour désigner un magazine traitant de la santé est descriptive, - Voir prononcer la nullité de la marque descriptive "SANTE MAGAZINE", - Voir, en conséquence, rejeter l'action en contrefaçon se fondant sur cette marque de la société SANTE MAGAZINE, à titre subsidiaire : - Voir constater que la dénomination "LES REPONSES SANTE MAGAZINE" se distingue phonétiquement, intellectuellement et visuellement de celle "SANTE MAGAZINE", - Voir constater qu'il n'existe aucun risque de confusion entre les deux titres, - Voir en conséquence, rejeter les demandes de la société SANTE MAGAZINE, sur l'action en concurrence déloyale, - Voir constater que la société SANTE MAGAZINE n'apporte aucune preuve d'une faute incombant à la société ALAIN AYACHE DEVELOPPEMENT, ni d'un préjudice et encore moins d'un lien de causalité, - Voir en conséquence, rejeter les demandes de la demanderesse, En tout état de cause, - Voir condamner la S.A.S. SANTE MAGAZINE à lui payer la somme de 5.000 euros en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, MOTIFS DE LA DECISION Sur la nullité de la marque "SANTE MAGAZINE" La société défenderesse soutient que la marque "SANTE MAGAZINE" n'aurait pas de caractère distinctif car elle recouvrirait par sa banalité l'objet même de la publication, puisqu'elle désigne un périodique illustré consacré au domaine de la santé. La marque ayant été déposée en 1990, son caractère distinctif s'apprécie par rapport à la loi de 1964 et notamment de son article 3 qui dispose :"ne peuvent être considérée comme marque (...) Celles qui sont constituées exclusivement de la désignation nécessaire ou générique du produit et du service ou qui comportent des indications

propres à tromper le public." Le Tribunal relève que le signe semi-figuratif déposé n'est pas constitué exclusivement de la désignation nécessaire ou générique du produit en l'espèce une revue, dès lors qu'il comporte un élément figuratif. Dans ces conditions, la marque est valable. Sur la contrefaçon Aux termes de l'article L713-3 du code de la propriété intellectuelle "sont interdits, sauf autorisation du propriétaire, s'il peut en résulter un risque de confusion dans l'esprit du public :(...) b) l'imitation d'une marque et l'usage d'une marque imitée, pour des produits ou services identiques ou similaires à ceux désignés dans l'enregistrement." En l'espèce, il est constant que les produits désignés sont identiques puisqu'il s'agit en défense d'une revue périodique mensuelle. L'élément dominant de la marque première réside dans l'inversion des termes SANTE et MAGAZINE alors que l'usage de la syntaxe française conduirait à écrire "magazine de la santé". Le signe argué de contrefaçon reproduit à l'identique cet élément dénominatif dominant du signe premier, le terme "REPONSES" qui figure en position d'attaque dans le deuxième signe n'est qu'une adjonction ayant un caractère de déclinaison. En outre, il convient de noter que la marque a été enregistrée sous une forme figurative particulière puisqu'elle est écrite en jaune entouré de rouge, SANTE étant écrit en minuscules, MAGAZINE étant écrit en dessous du mot SANTE en plus petit, également en lettres minuscules. La marque arguée de contrefaçon reproduit cette graphie et cette présentation puisque les mots SANTE et MAGAZINE sont écrits en minuscules, MAGAZINE étant écrit en dessous du terme SANTE, en plus petit. De surcroît, le titre du magazine de la société défenderesse paru en décembre 2005 est de couleur jaune, ce qui imite la couleur jaune entourée de rouge de la marque enregistrée.défenderesse paru en décembre 2005 est de couleur jaune, ce qui imite la couleur jaune entourée de rouge de la marque

enregistrée. Il y a donc de fortes similitudes tant phonétiques, qu'intellectuelles et visuelles entre les deux signes. Il est constant que le risque de confusion doit s'apprécier globalement en tenant compte des différences et des similitudes, tant des signes que des produits, au regard du public concerné. En l'espèce, il y a lieu de relever que la marque "SANTE MAGAZINE" est exploitée depuis 1990 pour désigner une revue mensuelle à grande diffusion relative à la santé ; qu'ainsi la revue arguée de contrefaçon s'adresse au même public soucieux de trouver des informations destinées au grand public dans le domaine de la santé. Compte tenu de la forte similitude des signes, de l'identité des produits et du caractère moyennement attentif de la clientèle intéressée par ce genre de publication qui ne mémorise pas le terme d'attaque de la marque arguée de contrefaçon qui n'a qu'un caractère accessoire et de la grande notoriété de la marque première, le risque de confusion est certain. Dans ces conditions, la contrefaçon par imitation de la marque enregistrée au sens de l'article L713-3 du code de la propriété intellectuelle est caractérisée en l'espèce. Sur la concurrence déloyale La société SANTE MAGAZINE rappelle qu'aux termes de l'article L112-4 alinéa 2 du code de la propriété intellectuelle "nul ne peut même si l'oeuvre n'est plus protégée dans les termes des articles L123-1 à L123-3, utiliser ce titre pour individualiser une oeuvre du même genre, dans des conditions susceptibles de provoquer une confusion." et soutient qu'en l'espèce, les deux journaux appartenant au même genre, il y a un risque de confusion dans l'esprit des consommateurs ce qui constitue un acte de concurrence déloyale. Le Tribunal relève que si l'alinéa 2 de l'article précité met en place une protection "suis generis" proche des règles gouvernant la concurrence déloyale, celles-ci ne sont pas applicables directement à la protection d'un titre ; qu'eu égard à la demande de la société "SANTE MAGAZINE" sur

ce fondement, il convient de requalifier celui-ci et d'apprécier si les conditions d'application de l'article L112-4 précité sont réunies. Il n'est pas contesté en défense que la revue "SANTE MAGAZINE " constitue une oeuvre protégeable ; dès lors la reprise de son titre pour désigner une revue du même genre est illicite, le risque de confusion étant certain pour les mêmes motifs que ceux exposés pour la contrefaçon de marque; La société demanderesse allègue, par ailleurs, que la société défenderesse aurait commis des actes distincts de la contrefaçon conduisant à détourner le public et la clientèle de son concurrent. Elle soutient notamment, que le format du magazine litigieux, contribue à tromper le consommateur, qui peut se méprendre en considérant qu'il s'agit d'un supplément ou d'une déclinaison de la revue SANTE MAGAZINE et que dès lors la société défenderesse bénéficie de la réputation de son magazine et cela sans investissement de sa part. Il est constant que le format du magazine "Les réponses santé magazine" est plus petit que la revue "santé magazine". La société défenderesse indique que le format de sa publication a toujours été identique et donc toujours différent de celui de "santé magazine". Ce point n'est pas contesté par la demanderesse. Dès lors, il n'est nullement établi par la société demanderesse que le choix de ce format serait fautif et qu'il existerait en l'espèce un grief distinct de celui résultant de la contrefaçon. Il y a donc lieu de rejeter les demandes formées au titre de la concurrence déloyale. Sur les mesures réparatrices Le Tribunal possède suffisamment d'éléments pour fixer à la somme de 30.000 euros la réparation de l'atteinte aux droits privatifs de la demanderesse sur sa marque et à la somme de 5.000 euros la réparation du préjudice né de l'usurpation du titre de la revue. Il sera fait droit aux mesures d'interdiction et de confiscation sollicitées, selon des modalités précisées au dispositif, étant précisé,

cependant, que l'interdiction sera limitée au seul usage du terme "magazine" accolé au titre "les réponses santé", seul le rapprochement des termes "santé" et "magazine", écrit dans cet ordre, étant contrefaisant. Sur l'application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile

Il parait inéquitable de laisser à la charge de la société SANTE MAGAZINE les frais irrépétibles qu'elle a pu engager et qui ne sont pas compris dans les dépens. Il lui a lieu de lui accorder une indemnité de 4000 euros de ce chef. Sur l'exécution provisoire L'exécution provisoire apparaît nécessaire en l'espèce pour faire cesser l'atteinte portée à la marque et compatible avec la nature de l'affaire. Sur les dépens La société ALAIN AYACHE DEVELOPPEMENT succombant dans ses prétentions, il y a lieu de la condamner aux entiers dépens avec distraction au profit de la SCP CARBONNIER LAMAZE Y... en application de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile. PAR CES MOTIFS Le Tribunal statuant publiquement, par jugement contradictoire et en premier ressort, Dit que la marque "santé magazine" déposée le 4 septembre 1990 et enregistrée à l'INPI sous le numéro 1 613 429 notamment pour des "revues" ainsi décrite à l'enregistrement "SANTE est écrit en lettres minuscules jaunes entourées de rouge, MAGAZINE est écrit en dessous du mot SANTE, en plus petit, en lettres minuscules jaunes entourées de rouge", régulièrement renouvelée le 2 août 2000, est valable, Dit qu'en publiant une revue sous le titre "les réponses santé magazine" la société ALAIN AYACHE DEVELOPPEMENT a commis des actes de contrefaçon par imitation de la marque "santé magazine"n 1 613 429, sus-visée, au préjudice de la société SANTE MAGAZINE et a ainsi porté atteinte au titre de la revue "SANTE MAGAZINE", En conséquence : - Interdit à la société ALAIN AYACHE DEVELOPPEMENT d'adjoindre à la fin du titre de sa revue "les réponses santé" le terme "magazine" et d'utiliser le

code couleur déposé et ce , sous astreinte de 150 euros par jour de retard passé un délai d'un mois suivant la signification du présent jugement, - Ordonne la saisie et la destruction au frais de la société défenderesse des exemplaires publiés sous la dénomination "les réponses santé magazine" et qui seraient encore offert à la vente, - Condamne la société ALAIN AYACHE DEVELOPPEMENT à payer à la S.A.S. SANTE MAGAZINE la somme de 30.000 euros (TRENTE MILLE EUROS) à titre de dommages-intérêts pour la contrefaçon par imitation et la somme de 5.000 euros (CINQ MILLE EUROS) pour l'usurpation du titre de la revue, - Rejette les autres demandes tant principales que reconventionnelles, - Condamne la société ALAIN AYACHE DEVELOPPEMENT à payer à la société SANTE MAGAZINE la somme de 4.000 euros (QUATRE MILLE EUROS) en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, - Ordonne l'exécution provisoire, - Condamne la société ALAIN AYACHE DEVELOPPEMENT aux entiers dépens, avec distraction au profit de la SCP CARBONNIER LAMAZE Y..., en application de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Ainsi jugé et prononcé le 1er février 2006 Le Greffier Le Président


Synthèse
Tribunal : Tribunal de grande instance de Paris
Formation : Ct0087
Numéro d'arrêt : JURITEXT000006947557
Date de la décision : 01/02/2006

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.grande.instance.paris;arret;2006-02-01;juritext000006947557 ?
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