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16/07/2015 | CôTE D'IVOIRE | N°481

Côte d'Ivoire | Côte d'Ivoire, Cour suprême, 16 juillet 2015, 481


COUR SUPRÊME CHAMBRE JUDICIARE,

ARRÊT N° 481/15 du 16 JUILLET 2015

LA COUR

Sur le rapport de Monsieur le Conseiller YAO Kouakou Patrice et les observations des parties ;

Vu l’exploit en date du 04 Décembre 2014 portant pourvoi en cassation ;

Vu le mémoire en défense daté du 12 janvier 2015 ;

Vu les conclusions écrites du Ministère Public du 04 juin 2015 ;

Sur le moyen unique de cassation, en ses deux branches réunies, pris du défaut de base légale, résultant de l’absence, de l’insuffisance, de l’obscurité ou de la con

trariété des motifs ;

Vu l’article 206-6ème du Code de Procédure Civile, Commerciale et Administrative ;

At...

COUR SUPRÊME CHAMBRE JUDICIARE,

ARRÊT N° 481/15 du 16 JUILLET 2015

LA COUR

Sur le rapport de Monsieur le Conseiller YAO Kouakou Patrice et les observations des parties ;

Vu l’exploit en date du 04 Décembre 2014 portant pourvoi en cassation ;

Vu le mémoire en défense daté du 12 janvier 2015 ;

Vu les conclusions écrites du Ministère Public du 04 juin 2015 ;

Sur le moyen unique de cassation, en ses deux branches réunies, pris du défaut de base légale, résultant de l’absence, de l’insuffisance, de l’obscurité ou de la contrariété des motifs ;

Vu l’article 206-6ème du Code de Procédure Civile, Commerciale et Administrative ;

Attendu qu’il résulte des énonciations de l’arrêt confirmatif attaqué (Ae, 27 décembre 2013), que recruté à la société SHELL Côte d’Ivoire, le 1er Février 2004, B A avait occupé successivement les fonctions de Directeur Régional en charge du Secteur de l’Energie en Afrique de l’Ouest, Directeur Général de Ab Ad puis Directeur Régional en charge du Secteur Minier en Afrique de l’Ouest, avant de se voir proposer la nomination au poste de Directeur en charge du Secteur Minier en Afrique ; qu’il explique que face à ses appréhensions et sur insistance de son supérieur hiérarchique d’alors, il fut convenu que cette affectation sera pour une période d’une année avec évaluation formelle de son niveau ; que cependant, non seulement à l’expiration du délai il fut maintenu à ce poste et ne fut point évalué, mais suite à ses différentes plaintes, son supérieur hiérarchique se contenta de lui présenter des excuses en invoquant ses priorités ; que bien plus, alors qu’après de multiples rencontres et discussions avec d’autres responsables du Groupe il avait accepté de continuer ses fonctions pour un délai qui ne devait pas excéder cinq mois, il recevait, de son supérieur hiérarchique, un courriel en date du 02 juin 2011 qui indiquait explicitement qu’il devait demeurer à ce poste ; qu’estimant qu’il s’agissait-là d’une modification unilatérale et substantielle de son contrat de travail qu’il était en droit de refuser, il adressait, le 04 juin 2011, un courriel à la Direction des Ressources Aa Ac, pour signifier qu’il arrêtait d’exercer les attributions à lui confiées dans le cadre de cette affectation et se mettait à la disposition de cette Direction ; que quoique son supérieur hiérarchique l’eût invité à reprendre le service, il maintenait sa position ; que par lettre en date du 15 juin 2011 la société SHELL Côte d’Ivoire le congédiait pour insubordination ; que saisi, le Tribunal du Travail d’Ae déclarait légitime le licenciement ainsi intervenu et déboutait B A de sa demande tendant à obtenir des dommages et intérêts pour rupture abusive de son contrat de travail ;

Attendu que pour confirmer le jugement, la Cour d’Appel a énoncé que B A « ne conteste pas que le courriel en question ne lui était pas destiné et que son supérieur hiérarchique s’adressait à quelqu’un d’autre et que c’est accidentellement que le message est parvenu à sa boite de messagerie électronique … qu’aucune décision de maintien à son poste ne lui a été notifiée par sa hiérarchie » ;

Attendu cependant qu’en se déterminant ainsi, alors qu’il ressort des énonciations de l’arrêt que le travailleur qui occupait un haut poste de direction, s’était mis à la disposition de la Direction des Ressources Aa Ac, en dénonçant l’exécution ,de mauvaise foi , de l’accord passé sur les conditions de son affectation au poste de Directeur en charge du secteur minier en Afrique, la Cour d’Appel, faute d’indiquer en quoi une telle attitude était de nature à constituer une faute susceptible de justifier la rupture du contrat de travail prononcée pour insubordination, a, par des motifs insuffisants et obscurs, manqué de donner une base légale à sa décision ; qu’il s’ensuit que le moyen unique de cassation, en ses deux branches, est fondé ; qu’il y a lieu de casser et annuler l’arrêt attaqué et d’évoquer conformément à l’article 28 de la loi n° 97-243 du 25 Avril 1997 sur la Cour Suprême

SUR L’ÉVOCATION

Attendu que nonobstant l’existence du lien de subordination juridique, les relations entre l’employé et l’employeur prennent leur fondement dans l’accord des parties, convention dont les obligations réciproques doivent être exécutées de bonne foi ; qu’il est constant, en ce que cela résulte des courriels échangés par les parties, que l’affectation de B A au poste de Directeur en charge du secteur minier en Afrique était soumise à conditions ; qu’en prorogeant de facto, de plus d’une année, le temps convenu d’accord parties, avec l’intention manifeste de maintenir le travailleur à ce poste : « B A tiendra le rôle de haut niveau KAM pour gérer nos comptes miniers majeurs comme il le fait à présent ….», et cela, contre son gré , plusieurs fois exprimé, la société ne peut légitimement reprocher à celui-ci une quelconque insubordination ; qu’il s’ensuit que la rupture du contrat de travail intervenue dans ces circonstances est l’expression d’un abus qui ouvre droit à des dommages et intérêts

Attendu que B A totalisait plus de sept ans d’exercice, occupait un poste de Directeur Afrique et percevait un salaire mensuel moyen de six millions neuf cent huit mille sept cent cinquante francs (6.908.750 frs) ; qu’il s’agit d’un statut social et professionnel pour lequel l’obtention d’un nouvel emploi ne peut être aisée et immédiate ; qu’il convient de lui allouer douze mois de salaire, soit 6.908.750 x 12 = 82.905.000 frs à titre de dommages et intérêts ;

PAR CES MOTIFS

Casse et annule partiellement l’arrêt N° 24 CS1 rendu le 27 décembre 2013 par la Cour d’Appel d’Ae ;

Évoquant,

Condamne la société SHELL COTE D’IVOIRE devenue Société VIVO ENERGY COTE D’IVOIRE à payer à B A la somme de quatre-vingt-deux millions neuf cent cinq mille francs ( 82.905.000 frs CFA) à titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif.

Laisse les dépens à la charge du Trésor Public ;

Ont siégé : M. CHAUDRON Maurice, Conseiller à la Chambre Judiciaire, Président ; YAO Kouakou Patrice, Conseiller-Rapporteur.



Références :

Origine de la décision
Date de la décision : 16/07/2015
Date de l'import : 10/03/2020

Numérotation
Numéro d'arrêt : 481
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ci;cour.supreme;arret;2015-07-16;481 ?
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