La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

02/02/2010 | CENTRAFRIQUE | N°006

Centrafrique | Centrafrique, Cour de cassation, Chambre criminelle, 02 février 2010, 006


Texte (pseudonymisé)
ARRET N° 006 DU 02 FEVRIER 2010

AU NOM DU PEUPLE CENTRAFRICAIN

La Cour de Cassation, Chambre Criminelle, en son audience publique tenue au Palais de Justice de Bangui le 02 Février 2010, a rendu l’arrêt suivant :

Sur le rapport de Monsieur José-Christian LONDOUMON, Président de la Chambre et les conclusions de Monsieur Aa A, 1er Avocat Général près la Cour de Cassation ;

Attendu que le 25 janvier 2007, le Tribunal Correctionnel de Bangui, rejetant l’exception d’incompétence soulevée par le prévenu B C, l’a déclaré coupable du délit d’abus

de confiance et l’a condamné à deux (2) ans d’emprisonnement avec sursis, 500.000 FCFA d’amende...

ARRET N° 006 DU 02 FEVRIER 2010

AU NOM DU PEUPLE CENTRAFRICAIN

La Cour de Cassation, Chambre Criminelle, en son audience publique tenue au Palais de Justice de Bangui le 02 Février 2010, a rendu l’arrêt suivant :

Sur le rapport de Monsieur José-Christian LONDOUMON, Président de la Chambre et les conclusions de Monsieur Aa A, 1er Avocat Général près la Cour de Cassation ;

Attendu que le 25 janvier 2007, le Tribunal Correctionnel de Bangui, rejetant l’exception d’incompétence soulevée par le prévenu B C, l’a déclaré coupable du délit d’abus de confiance et l’a condamné à deux (2) ans d’emprisonnement avec sursis, 500.000 FCFA d’amende et à payer à la SODIAM, la somme de 22.101.813 FCFA à titre principal et 500.000 FCFA de dommages et intérêts ;

Que sur appel de B C, la Chambre Correctionnelle de la Cour d’Appel de Bangui s’est, par arrêt avant dire droit du 19 septembre 2007, déclarée incompétente et a renvoyé les parties à mieux se pourvoir ;

Attendu que le 04 octobre 2007, le Parquet Général de la Cour d’Appel de Bangui et la société SODIAM se sont pourvus en cassation contre ledit arrêt ;

SUR LA RECEVABILITE DES POURVOIS

Vu l’article 59 de la loi n° 95.011 du 23 décembre 1995 portant organisation et fonctionnement de la Cour de Cassation ;

Attendu que les pourvois intervenus dans les 48 heures qui suivent le prononcé de l’arrêt ont été élevés dans le délai légal ; ils sont en la forme recevables ;

AU FOND

SUR LE PREMIER MOYEN PRIS DE LA MAUVAISE APPLICATION DE LA LOI, DE LA CONTRARIETE

En ce que la cour d’appel, tout en prenant une décision avant dire droit, a en même temps statué au fond en se déclarant incompétente et en réservant les intérêts des parties.

Vu les mémoires produits ;

Attendu qu’une décision avant dire droit est la décision prise par le Juge au cours d’une instance qui lui est soumise pour ordonner des mesures provisoires, pour régler ou aménager une situation temporaire qui sera définitivement tranchée par la décision au fond ;

Qu’en raison de son caractère provisoire, cette décision ne dessaisit pas le Juge qui l’a prononcée ;

Attendu que dans le cas d’espèce le Juge d’Appel ne pouvait pas qualifier sa décision d’arrêt avant dire droit et en même temps trancher au fond le litige en se déclarant incompétent et en renvoyant les parties à mieux se pourvoir, toutes mesures qui ne peuvent être prise qu’au fond ;

Qu’en procédant ainsi, le Juge d’Appel s’est contredit et a fait une mauvaise application de la loi, d’où il suit que son arrêt doit être cassé ;

SUR LE DEUXIEME MOYEN DE CASSATION PRIS DE LA MAUVAISE APPLICATION DE LA LOI

En ce que la chambre correctionnelle de la cour d’appel s’est déclarée incompétente pour examiner le litige qui lui est soumis et renvoyé les parties à mieux se pourvoir.

Vu l’article 52 de la loi n° 95.011 du 23 décembre 1995 portant organisation et fonctionnement de la Cour de Cassation ;
Vu les mémoires produits ;

Attendu que pour se déclarer incompétente, la Chambre Correctionnelle de la Cour d’Appel dit en substance que la reconnaissance de dette signée par B C au profit de la SODIAM et acceptée par celle-ci, constitue une transaction au sens des articles 2044 et 2052 du Code Civil, conférant d’une part au litige un caractère civil et d’autre part assujettit la procédure au principe de l’irrévocabilité de l’option ;

Qu’il s’ensuit que seul le Juge civil est compétent pour connaitre dudit litige ;
Qu’elle s’est en conséquence déclarée incompétente et renvoyé les parties à mieux se pourvoir ;

Attendu cependant que l’article 4 du Code de Procédure Pénale Centrafricain qui traite de l’irrévocabilité de l’option dispose que « la partie qui a exercé son action devant la juridiction civile compétente ne peut plus la porter devant la juridiction répressive » ;
Qu’il s’ensuit que l’option devient irrévocable si une juridiction civile compétente a été saisie préalablement à la procédure en cours ;
Attendu qu’en l’espèce, la SODIAM n’a saisi aucune autre juridiction dans cette affaire ;
Que le principe de l’irrévocabilité ne peut donc lui être opposé ;

Attendu que la reconnaissance de dette signée par B C et acceptée par la société SODIAM, est un mode de règlement qui n’a d’autre but que d’apaiser les réclamations de la SODIAM ;

Que cela ne transforme pas pour autant le litige pénal qui oppose B C à la SODIAM en une affaire civile ;
Qu’à supposer que l’obligation de B C dérivant du mandat ait été transformée par l’effet dudit règlement, cette transformation n’a eu lieu qu’à un moment où le délit d’abus de confiance était déjà consommé et ne saurait mettre un obstacle à l’exercice de l’action publique ;

Que la juridiction pénale est toujours compétente pour connaitre ce litige et que les dispositions de l’article 2052 du Code Civil relative à l’autorité de la chose jugée sont en l’espèce inopérantes ;

Attendu qu’en refusant de retenir sa compétence pour l’examen de la cause qui lui était soumise, la Chambre Correctionnelle de la Cour d’Appel de Bangui a fait une mauvaise application de la loi exposant sa décision à la censure ;

SUR LA CASSATION SANS RENVOI
Vu l’article 54 alinéa 4 et 5 de la loi n° 95.011 du 23 décembre 1995 portant organisation et fonctionnement de la Cour de Cassation ;
Vu l’article 6 du Code de Procédure Pénale ;

Attendu qu’aux termes de l’article 54 alinéa 4 et 5 de la loi susvisée, la Cour de Cassation peut casser, sans renvoi, lorsque la Cassation n’implique pas qu’il soit à nouveau statué au fond ou lorsque les faits, tels qu’ils ont été souverainement constatés et appréciés par les juges du fond, permettent à la Cour d’appliquer la règle de droit appropriée ;

Attendu qu’en retenant sa compétence, contrairement au juge d’appel et en condamnant B C pour abus de confiance, le premier Juge a fait une bonne appréciation des faits et une saine application de la loi ;

Qu’il n’ y a cependant pas lieu à renvoyer la cause et les parties à nouveau devant la Cour d’Appel autrement composée pour la constater, en raison du décès le 20 mars 2009 à BODA de B C, l’action publique contre l’intéressé étant ainsi éteinte par application des dispositions de l’article 6 du Code de Procédure Pénal Centrafricain ;

PAR CES MOTIFS
En la forme : Reçoit le Parquet Général et la SODIAM en leurs recours ;
Au fond : Casse et annule l’arrêt avant dire droit n° 98 de la Cour d’Appel du 3 Octobre 2007, dans toutes ses dispositions ;
Dit qu’il n’y a pas lieu à renvoi ;
Constate l’extinction de l’action publique ;

Ainsi fait, jugé et prononcé par la Cour de Cassation, Chambre Criminelle, en son audience publique les jours, mois et an que dessus où siégeaient, Messieurs :
-José-Christian LONDOUMON, Président
-Pamphile OUABOUI, Conseiller ;
-Eloi LIMBIO, Conseiller ;
En présence de Monsieur Aa A 1er Avocat Général près de la Cour Cassation ;
Avec l’assistance de Maitre Gilbert Jean MABA, Greffier ;

En foi de quoi, le présent arrêt a été signé après lecture faite par le Président, les Conseillers et Le Greffier


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 006
Date de la décision : 02/02/2010

Analyses

ABUS DE CONFIANCE ; CONDAMNATION EN 1ERE INSTANCE ; RECONNAISSANCE DE DETTE SIGNEE PAR LE PREVENU ; DECISION INCOMPETENCE COUR D’APPEL PAR ARRET AVANT DIRE DROIT ; IRREVOCABILITE OPTION ; ARRET STATUANT AU FOND ET N’ORDONNANT PAS UNE MESURE D’INSTRUCTION ; CONTRARIETES DE MOTIFS ; MAUVAISE APPLICATION DE LA LOI ; COMPETENCE JURIDICTION REPRESSIVE MEME SI TRANSACTION AU PLAN CIVIL ; DECES PREVENU EN COURS DE POURVOI ; CASSATION SANS RENVOI ; MAINTIEN DECISION 1ER JUGE ; EXTINCTION DE L’ACTION PUBLIQUE

La cour d’appel ne peut qualifier sa décision d’arrêt avant dire droit et en même temps trancher le litige au fond en se déclarant incompétent. En affirmant dans sa décision que la reconnaissance de dette signée par le prévenu et acceptée par la victime constitue une transaction au sens des articles 2044 et 2052 du code civil et confère d’une part au litige un caractère civil, d’autre part assujettit la procédure au principe de l’irrévocabilité de l’option et que seul le juge civil était compétent alors qu’aucune juridiction civile n’avait été saisie au préalable, la cour d’appel a fait une mauvaise application de la loi, exposant ainsi sa décision à la censure de la cour de cassation. Le prévenu étant décédé après la décision d’appel, c’est à juste titre que la cour de cassation a cassé sans renvoi l’arrêt querellé et constaté l’extinction de l’action publique suite au décès du prévenu.


Parties
Demandeurs : PARQUET GENERAL ET SOCIETE SODIAM (Me KOMENGUE)
Défendeurs : MAMADOU BELLO (Me PANDA)

Origine de la décision
Date de l'import : 22/11/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;cf;cour.cassation;arret;2010-02-02;006 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award