Le bailleur qui entend réviser à la hausse le prix du loyer doit garantir la jouissance paisible et décente des lieux par le locataire. La juridiction saisie de l’action en révision est donc fondée à subordonner cette révision à l’exécution par le bailleur des grosses réparations devenues nécessaires et urgentes.
ARTICLE 74 AUDCG ARTICLE 84 AUDCG ARTICLE 85 AUDCG
(TRIBUNAL DE PREMIERE INSTANCE DE YAOUNDE-EKOUNOU, JUGEMENT N°03/COM DU 10 FEVRIER 2011, FOKA GABRIEL C/ A Aa)
LE TRIBUNAL
- Attendu que suivant exploit daté du 19 juillet 2010 de Maître EBODE Raphaël, Huissier de justice de Yaoundé, enregistré à Yaoundé le 27 juillet 2010 sous le numéro 84278525, volume 18, folio 238, case et bordereau 3549 aux droits de quatre mille francs, FOKA Gabriel a fait donner assignation à A Aa d’avoir à se trouver et comparaître devant le Tribunal de première instance de Yaoundé-Ekounou, statuant en matière civile et commerciale pour est-il dit dans l’exploit ;
- Le recevoir en sa demande d’augmentation du prix des loyers et l’y dire fondé ;
- Voir réviser à la hausse les loyers dont s’agit en les faisant passer de 100 000 FCFA à 300 000 FCFA par mois ;
- Voir condamner A Aa aux dépens distraits au profit de Maître TOGUE Michel, Avocat aux offres de droit ;
- Attendu qu’au soutien de son action, le demandeur a exposé que A Aa occupe sur la base d’un contrat verbal depuis près de seize ans deux chambres d’un local à usage commercial sur l’immeuble lui appartenant moyennant un loyer mensuel de 75 000 FCFA par chambre ;
- Qu’il a fondé sa demande d’autorisation à l’augmentation sur les dispositions des articles 84 (b) et 85 (a) de l’Acte uniforme OHADA portant droit commercial général ;
- Attendu qu’en réaction à cette action à l’audience du 30 décembre 2010 notamment, le défendeur a marqué son opposition à toute augmentation de loyers soutenant que rien ne l’a justifié ;
- Que le quartier où se trouve le local litigieux a certes évolué, mais il n’en demeure pas moins vrai que lui se trouve sous une dalle qui laisse suinter de l’eau de partout, ne lui assurant pas une jouissance décente et paisible des lieux ;
- Que le bail commercial étant un contrat synallagmatique qui crée des droits et obligations entre les parties, il incombe au bailleur comme au locataire de respecter leurs obligations respectives afin d’en assurer la bonne et parfaite exécution ;
- Qu’à ce propos, il sollicite que le tribunal invite le demandeur à rapporter la preuve de l’exécution parfaite des obligations lui incombant nées du bail tel qu’il ressort de l’article 74 de l’Acte uniforme OHADA qui selon lui font défaut en l’espèce ;
- Que le bailleur se devait de procéder aux réparations que lui impose la loi avant de prétendre à quelques révisions de loyers que ce soit ;
- Que reconventionnellement il sollicite qu’il soit ordonné au bailleur de procéder à toutes les grosses réparations devenues nécessaires et urgentes pour lui assurer une exploitation paisible, décente et rentable sous astreinte de 50 000 FCFA par jour de retard à compter de la signification de la décision à intervenir et de dire qu’à l’issue de ces réparations, il acceptera une révision à la hausse des loyers dans la proportion de dix pour cent de l’actuel loyer soit 165 000 FCFA à compter de la période triennale à échoir dans deux ans ;
- Attendu que toutes les parties ont conclu, qu’il convient de statuer contradictoirement à l’égard de toutes ;
- Attendu que FOKA Gabriel a saisi le Tribunal dans les forme et délai requis par la loi ;
- Qu’il y a lieu de recevoir son action ;
- Que A Aa a introduit une demande reconventionnelle dans les formes requises ;
- Qu’il convient de le recevoir également ;
- Attendu que le demandeur a sollicité du tribunal de céans la révision à la hausse des loyers d’un immeuble dont il est le propriétaire et occupé par le défendeur sis au quartier B Ab ;
- Que la croissance démographique et infrastructurelle avérée du quartier abritant ledit immeuble militent pour légitimer une telle demande du reste fondée sur les articles 84 (b) et 85 (a) de l’Acte uniforme OHADA portant droit commercial général ;
- Qu’il échet d’y faire droit ;
- Mais attendu que cette demande, aussi légitime et légale qu’elle soit se heurte à celle du défendeur toute aussi légitime et légale, qui n’y voit aucun inconvénient pour autant que la révision souhaitée soit subordonnée à la réfection dudit immeuble en état de ruine avancée ;
- Qu’il y a lieu, en faisant droit à la demande principale d’admettre le même bénéfice à celle faite reconventionnellement, les arguments soutenant cette dernière étant vérifiés ;
- Attendu que le défendeur a sollicité que le tribunal de céans soumette le demandeur à astreinte par rapport aux réparations qu’il souhaite voir effectuer avant toute hausse de loyer et ordonner qu’à l’issue desdites, la révision à la hausse des loyers se fera dans la
proportion de dix pour cent de l’actuel loyer soit 165 000 FCFA à compter de la période triennale à échoir dans et tous les deux ans ;
- Mais attendu sur ces chefs qu’il s’agit du contenu même du contrat de bail qui constitue la loi des parties que le tribunal ne saurait dicter, d’une part, et d’autre part, conséquence logique d’une demande sans objet ;
- Attendu que les dépens sont supportés par la partie qui succombe au procès ;
PAR CES MOTIFS
- Statuant publiquement, contradictoirement à l’égard de toutes les parties, en matière commerciale et en premier ressort et après avoir délibéré conformément à la loi ;
- Reçoit FOKA Gabriel en son action ;
- L’y dit fondé ; reçoit A Aa en sa demande reconventionnelle ;
- L’y dit également fondé
- Autorise la révision du prix du loyer, la subordonne cependant aux réparations y afférentes à la diligence du demandeur ;
- Laisse les dépens à la charge du défendeur ;