Les contestations nées de la désignation d’un séquestre judiciaire au cours d’une procédure de saisie conservatoire sont des difficultés d’exécution ressortissant à la compétence exclusive du juge du contentieux de l’exécution. Saisi de telles actions, le juge des référés doit impérativement se déclarer incompétent ratione materiae.
ARTICLE 49 AUPSRVE ARTICLE 113 AUPSRVE
TRIBUNAL DE PREMIERE INSTANCE D’EDEA, ORDONNANCE N°09/ORDONNANCE/011 DU 09 JUIN 2011, LA SOCIETE ESTNO SARL CONTRE MAITRE MAYI JEAN JACQUES, HUISSIER DE JUSTICE A EDEA ; LA SOCIETE NESSWOOD
NOUS, NKENGNI FELIX, PRESIDENT DU TRIBUNAL DE PREMIERE INSTANCE D’EDEA, JUGE DES REFERES
- Vu les textes en vigueur ;
- Vu les pièces du dossier de la procédure ;
- Attendu qu’agissant en vertu de l’ordonnance n°022 du 09 mars 2011 du Président du Tribunal de Première Instance d’Edéa et suivant exploit du 10 mars 2011 de Maître David Victor BAYIGA, Huissier de justice à Edéa, non encore enregistré, la société ESTNO SARL, dont le siège social est sis à la zone industrielle de Bonabéri-Douala B.P : 9244, agissant poursuites et diligences de son représentant légal et ayant domicile élu en l’étude de son conseil Maître Laurent BONDJE, avocat au Barreau du Cameroun, B.P : 5131 Aa, a fait donner assignation à Maître MAYI Jean Jacques, Huissier de justice à Edéa et la société NESSWOOD SARL dont le siège social est à Aa à comparaître devant le Président du Tribunal de Première Instance d’Edéa, juge des référés pour s’entendre il est dit dans le dispositif dudit exploit :
- Au principal renvoyer les parties à mieux se pourvoir ainsi qu’elles aviseront ;
- Mais dès à présent, vu l’urgence et le péril en la demeure ;
- Constater que l’engin caterpillar D7E châssis n°37670769 a été mis sous la main de justice entre les mains d’un tiers suivant une ordonnance n°1449/PTPI/DLA- BONANJO rendue en date du 10/12/10 par madame le Président du Tribunal de Première Instance de Douala-Bonanjo seule compétente ;
- Constater que la requérante n’a pas été entendue en ses moyens de défense ;
- Constater qu’aucune audience de contestation n’a été élevée à l’encontre de la saisie conservatoire autorisée par madame le Président du Tribunal de Première Instance de Douala-BONANJO ;
- Constater que madame B A Ac Ab fait l’objet d’un avis de recherche pour faux en écriture privée de commerce et autres ;
- Constater que l’ordonnance n°16 rendue en date du 1er mars 2011 par monsieur le Président du Tribunal de Première Instance d’Edéa l’est en fraude ;
- En conséquence, ordonner sa rétractation en disant nulle et non avenue la désignation de TALLA Blaise comme séquestre de l’engin caterpillar D7E châssis n°37670769 ;
- Dire que l’ordonnance à intervenir sera exécutoire sur minute et avant enregistrement ;
- Qu’elle expose au soutien de son action que suivant un exploit du 1er février 2011 et en vertu de l’ordonnance n°1446/PTPI/DLA-BONANJO du 10 décembre 2010 de madame le Président du Tribunal de Première Instance de Douala-Bonanjo, elle a fait pratiquer une saisie conservatoire sur l’engin caterpillar D7E châssis n°37670769 ;
- Que suivant ordonnance n° 16 du 1er mars 2011, du Président du Tribunal de Première Instance d’Edéa, à la requête de la société NESSWOOD SARL, TALLA Blaise a été désigné séquestre dudit engin ;
- Que cette ordonnance dont elle n’a pas encore du reste eu notification mentionne à tort que les parties ont été entendues alors qu’elle n’a jamais présenté ses moyens de défense devant le juge des requêtes pour battre en brèche les arguments évoqués par son adversaire ;
- Qu’elle articule que la désignation d’un séquestre suppose une discussion entre les parties prenantes dont chacune se réclame propriétaire alors que dans les présentes le bien est sous la main de justice par une saisie conservatoire ordonnée par le Président du Tribunal ;
- Que par conséquent l’objet saisi et placé sous la garde d’un tiers ne peut être déplacé que dans le cadre d’une procédure de contestation de la saisie ;
- Qu’en outre la désignation d’un séquestre ne peut se faire par ordonnance sur requête ;
- Qu’il ajoute sur l’effectivité de la créance qu’aucune instance en contestation n’a été élevée à l’encontre de la saisie, ce qui confirme la légalité de celle-ci et partant le bien fondé de ladite créance ;
- Que par ailleurs, dame B A Ac Ab, représentante légale de la société NESSWOOD SARL fait l’objet d’un avis de recherche pour faux en écriture privée de commerce, escroquerie en coaction et abus de confiance au préjudice de ESTNO SARL et ERTECO Cameroun SARL ;
- Que le comportement de NESSWOOD SARL s’analyse en un gangstérisme qu’elle veut auréoler par une ordonnance gracieuse aux conséquences imprévisibles ;
- Attendu que pour faire échec à l’action, la société NESSWOOD SARL soulève au principal l’incompétence du juge des référés et subsidiairement le rejet de la demande en rétractation, le cas échéant la désignation d’un séquestre ;
- Attendu qu’elle développe sur l’exception d’incompétence matérielle que suivant les dispositions de l’article 49 de l’Acte Uniforme portant procédures simplifiées de recouvrement et voies d'exécution la juridiction compétente pour statuer sur tout litige ou toute demande relative à une mesure d’exécution forcée ou à une saisie conservatoire est le Président de la juridiction statuant en matière d’urgence ;
- Que suivant l’organisation judiciaire du Cameroun ce juge est le juge du contentieux de l’exécution et non le juge des référés ;
- Qu’il est évident en l’espèce que la demande de la société ESTNO est relative à une saisie conservatoire et à ses incidents ;
- Que le litige entre les parties naît en effet de la saisie conservatoire de l’engin D7E, laquelle a donné elle-même lieu à la désignation d’un séquestre ;
- Que ces deux mesures ont été prises dans le cadre du droit OHADA ;
- Qu’il s’ensuit l’incompétence du juge des référés ;
- Qu’en ce qui est de la demande en rétractation, elle estime que celle-ci n’est pas fondée ;
- Que les arguments avancés par ESTNO pour soutenir cette demande sont inopérants et inadéquats ;
- Que la désignation d’un séquestre ne s’entend que dans les cas où le bien a été saisi et mis sous main de justice et c’est bien le cas en l’espèce ;
- Que cet argument est donc inexistant ;
- Qu’au sujet de la non audition de ESTNO, l’article 113 exige que les parties soient entendues ou dûment appelées ;
- Que ESTNO ne conteste pas avoir été dûment appelée, au regard de la convocation servie et reçue à son domicile élu chez Maître BAYIGA, Huissier de justice à Edéa, et versée au dossier de la procédure ;
- Que le fait pour elle de ne pas contester l’ordonnance de saisie conservatoire ne prouve pas à ses yeux que la créance est avérée contrairement à ce qu’a voulu croire ESTNO ;
- Que cette créance est inexistante ;
- Que quand bien même elle serait avérée, elle ne constituerait pas un obstacle à la désignation d’un séquestre dont le but est la conservation de l’objet saisi ;
- Q’il s’ensuit que l’action en rétractation de ESTNO manque de fondement et encourt par conséquent débouté ;
- Attendu qu’elle demande par ailleurs reconventionnellement la désignation d’un séquestre tirant argument de ce que le gardien choisi au moment de la saisie n’est pas aisément identifiable et surtout il a été constaté qu’il se livre à l’exploitation abusive de ce bien ;
- Qu’elle produit à l’appui de ses allégations entre autres pièces thermocopies de l’ordonnance de saisie conservatoire n°1449 du 10 décembre 2010 du Président du Tribunal de Première Instance de Douala-Bonanjo, l’exploit de dénonciation du procès-verbal de saisie conservatoire entre les mains d’un tiers ;
- Attendu sur l’exception d’incompétence que l’article 49 de l’Acte Uniforme portant procédures simplifiées de recouvrement et voies d'exécution décide que la juridiction compétente pour statuer sur tout litige ou toute demande relative à une mesure d’exécution forcée ou à une saisie conservatoire est le président de la juridiction statuant en matière d’urgence ;
- Attendu que la requête aux fins de désignation de séquestre et l’ordonnance n°022 du 09 mars 2011 ont pour fondement juridique l’article 113 de l’Acte uniforme sur les voies d’exécution ;
- Que cette procédure d’ailleurs découle de l’ordonnance de saisie conservatoire n°1449 susvisée rendue en faveur de la demanderesse sur le fondement des dispositions OHADA ;
- Qu’il s’ensuit que tout litige découlant de cette saisie est de la compétence de la juridiction définie par l’article 49 sus énoncé ;
- Que la loi camerounaise ayant distingué entre le juge des référés et le juge statuant en matière d’urgence dudit article 49, c’est à ce dernier que la demanderesse se devait d’adresser son recours et non au premier ;
- Qu’il échet par conséquent de se déclarer incompétent ;
- Attendu que la demanderesse qui succombe doit supporter les dépens ;
PAR CES MOTIFS
- Qtatuant publiquement, contradictoirement en matière de référé et en premier ressort ;
- Nous déclarons incompétent à statuer ;
- Renvoyons la demanderesse à mieux se pourvoir ainsi qu’elle avisera ;
- Laisse les dépens à sa charge ;
- (…)