1. VOIES D’EXECUTION - SAISIE - SAISIE CONSERVATOIRE DE CREANCE – CONDITIONS - CREANCE MENACEE DANS SON RECOUVREMENT - PROCEDURE D’INJONCTION DE PAYER INFRUCTUEUSE - SAISIE JUSTIFIEE (OUI)
2. VOIES D’EXECUTION - SAISIE - SAISIE CONSERVATOIRE DE CREANCE - PROCES-VERBAL DE SAISIE ET DE DENONCIATION - MENTIONS OBLIGATOIRES - FORME ET SIEGE DU DEBITEUR (OUI) - FORME ET SIEGE DU TIERS SAISI (NON) - NULLITE DU PROCES-VERBAL DE SAISIE (NON).
3. VOIES D’EXECUTION - SAISIE - SAISIE CONSERVATOIRE DE CREANCE - EXERCICE CONCOMITTANT DE LA PROCEDURE D’INJONCTION DE PAYER - PROCEDURE TENDANT A L’OBTENTION D’UN TITRE EXECUTOIRE- PROCEDURE VALABLE (OUI).
4. VOIES D’EXECUTION - SAISIE - SAISIE CONSERVATOIRE DE CREANCE - INCERTITUDE DE LA CREANCE - INJONCTION DE PAYER EN COURS - CONTESTATION PENDANTE DEVANT UNE AUTRE JURIDICTION - ACTION EN VALIDATION DEVANT LE JUGE DU CONTENTIEUX DE L’EXECUTION- ACTION RECEVABLE (NON)
1. Un créancier est fondé à exercer une procédure de saisie – conservatoire de créance contre son débiteur dès lors que sa créance est menacée dans son recouvrement ; la menace en l’espèce étant caractérisée par une procédure d’injonction de payer restée infructueuse.
2. Le débiteur ne saurait fonder valablement son action en nullité de l’acte de saisie et en mainlevée sur la non indication dans le procès-verbal de saisie et de dénonciation de la forme et du siège social du tiers saisi alors même que cette formalité n’est pas prévue par les textes.
3. Toute personne dont la créance est menacée dans son recouvrement peut pratiquer une saisie conservatoire de créance sur le compte bancaire de son débiteur. La saisie ainsi opérée n’est pas exclusive d’une procédure d’injonction de payer initiée par le créancier saisissant visant à obtenir un titre exécutoire.
4. Dès lors qu’une ordonnance d’injonction de payer a été obtenue contre le débiteur et qu’elle fait l’objet d’une procédure d’opposition, le débiteur ne saurait discuter du bien fondé de la créance devant le juge du contentieux de l’exécution qui n’est saisie d’une instance en validation. Ce chef de demande doit par conséquent être déclarer irrecevable.
ARTICLE 54 AUPSRVE ARTICLE 55AUPSRVE ARTICLE 61 AUPSRVE ARTICLE 77 AUPSRVE
TRIBUNAL DE PREMIERE INSTANCE D’EDEA, ORDONNANCE N°04/CE/TPI/010 DU 18 NOVEMBRE 2010, CAISSE NATIONALE POUR LA PROMOTION DE L’INVESTISSEMENT SA (CNPI) REPRESENTEE PAR DAME CLARISSE SAPPI A EDEA CONTRE SIEUR MASSE RICHARD, MAITRE JEAN JACQUES MAYI
NOUS, PRESIDENT, JUGE DU CONTENTIEUX DE L’EXECUTION
- Vu les textes en vigueur ;
- Vu les pièces du dossier de la procédure ;
- Attendu que suivant exploit du 17 août 2010 de Maître Victorine NTAMACK EPANDA, Huissier de justice à Edéa, non encore enregistré, la Caisse Nationale pour la Promotion de l’Investissement SA, en abrégé CNPI dont le siège social est à Yaoundé, BP :1401, agissant poursuites et diligences de dame Clarisse SAPPI, sa représentante légale en service à l’agence d’Edéa a assigné le sieur MASSE Richard sportif ayant domicile élu en l’Etude de Maître MAYI Jean Jacques, Huissier de justice à Edéa, et ce dernier devant le Président du Tribunal de Première Instance d’Edéa, statuant en matière de contentieux de l’exécution en nullité de l’ordonnance n°88 du 26 juillet 2010 et en mainlevée de la saisie conservatoire de créance pratiquée sur la base de cette ordonnance ;
- Qu’elle expose que suivant ordonnance n°88 du 26 juillet 2010 du Président du Tribunal de Première Instance d’Edéa, le sieur MASSE Richard a fait pratiquer par exploit de Maître Jean Jacques MAYI, Huissier de justice à Edéa le 28 juillet 2010 une saisie conservatoire de créance sur son compte à la BICEC agence d’Edéa ;
- Que cette saisie manque de fondement en ce qu’elle ne rentre pas dans le cadre institué par l’acte uniforme OHADA n°6 en son article 54 qui dispose que « toute personne dont la créance paraît fondée en son principe peut, par requête, solliciter de la juridiction compétente du domicile ou du lieu où demeure le débiteur, l’autorisation de pratiquer une mesure conservatoire sur tous les biens mobiliers corporels ou incorporels de son débiteur, sans commandement préalable, si elle justifie de circonstances de nature à en menacer le recouvrement » ;
- Que le recouvrement des créances du sieur MASSE Richard n’est nullement menacé, elle (CNPI SA) étant un établissement de microfinance très crédible ;
- Que cette action tend plutôt à paralyser abusivement son fonctionnement ;
- Qu’elle ajoute que les créances du sieur MASSE Richard contenues dans ses livres se chiffrent au 11août 2010 à la somme de 10.052.108 francs ;
- Que par contre l’ordonnance querellée a ordonné la saisie en principal de la somme de 11.050.000 francs, celle-ci étant supérieure à la créance due ;
- Que par ailleurs le saisissant n’a fait mention ni dans la requête aux fins de la saisie conservatoire ni dans l’ordonnance, du siège social de la CNPI SA, ce qui est une violation de l’article 77 de l’Acte uniforme susvisé en son alinéa 1er ;
- Qu’elle poursuit que le sieur MASSE Richard a d’abord saisi le Président du Tribunal de Grande Instance du Mfoundi qui a rendu une ordonnance d’injonction de payer et contre laquelle elle a formé opposition ;
- Qu’alors que cette procédure est encore pendante, le sieur MASSE Richard obtient l’ordonnance de saisie conservatoire querellée;
- Qu’en agissant de la sorte, il viole le principe selon lequel « qui peut le plus peut le moins » ;
- Qu’en conséquence elle sollicite la nullité de ladite ordonnance et mainlevée de la saisie conservatoire de créance pratiquée sur ses comptes ;
- Qu’elle produit à l’appui de ses allégations une ordonnance n°088 du 26/7/2010 aux fins de saisie conservatoire de créance querellée, un procès-verbal de saisie conservatoire de créance du 28/7/2010, une lettre du département des affaires juridiques et du contentieux de BICEC à la CNPI informant de la saisie de son compte avec avis débit, une ordonnance sur requête n°12 du 6/5/2010 aux fins d’injonction de payer de la même prétendue créance, la signification de ladite ordonnance par exploit de Maître BILONG MINKA, Huissier de justice à Yaoundé en date du 7/5/2010, une opposition à injonction de payer avec assignation pour l’audience du 16/6/2010 par devant le Tribunal de Grande Instance du Mfoundi entre les mêmes parties pour la même créance ;
- Attendu que venant aux débats, le sieur MASSE Richard ayant pour conseil Maître NGUEFACK Joseph, Avocat, fait observer que la CNPI SA ne conteste pas la cause de la saisie querellée, à savoir le dépôt à terme n°36130-31-38013 ;
- Que contrairement aux prétentions de cette dernière, il fait mention tant sur le procès- verbal de saisie conservatoire que sur le procès-verbal de dénonciation de ladite saisie que le siège social de la CNPI SA est à Yaoundé, Avenue FOCH ;
- Que s’agissant de la contestation du montant cause de saisie, il soutient que le dépôt à terme (DAT) de (dix) 10 millions de francs était assorti d’un taux annuel de 7% qu’à ce jour le montant en principal est déjà supérieur au montant préalablement ordonné ;
- Que le décompte des sommes est donc conforme, certain et nullement exagéré en droit ;
- Que s’agissant des diverse procédures engagées, il développe que la procédure d’injonction de payer et celle de saisie conservatoire de créance sont distinctes l’une de l’autre mais non exclusives ;
- Qu’elles peuvent alternativement être utilisées dans le but de parvenir au recouvrement de la créance du créancier ;
- Qu’il y a lieu par conséquent de débouter la CNPI SA de sa demande et la condamner aux dépens distraits au profit de Maître NGUEFACK Joseph, Avocat aux offres de droit ;
- Qu’il verse à l’appui de ses allégations le DAT n°36130-31-38013 du 13 février 2009, une sommation du 25 février 2010, un procès-verbal de saisie conservatoire de créance du 28 juillet 2010, un procès-verbal de dénonciation de saisie conservatoire de créance du 03 août 2010 ;
- Attendu qu’en réaction aux conclusions du sieur MASSE Richard, la CNPI SA sous la plume de Maître BIMONG DIBOULE Yvan, Avocat, son conseil, et par des écritures du 30 septembre 2010 articule sur l’incertitude de la créance ;
- Qu’elle fait valoir en effet que l’ordonnance d’injonction de payer obtenue du Président du Tribunal de Grande Instance du Mfoundi avait fait mention de la créance
d’un montant à solde définitif de 11 377 067 FCFA tandis que l’ordonnance de saisie conservatoire n°88 attaquée mentionne un montant de 11 800 000 FCFA ;
- Que par ailleurs elle évoque de nouveau la violation de l’article 77 alinéa 1 de l’Acte uniforme n°6 par l’huissier instrumentaire qui selon lui n’a pas cru devoir mentionner le siège social des tiers saisis sur le procès-verbal de saisie conservatoire ;
SUR LE MOYEN TIRE DE LA VIOLATION DE L’ARTICLE 54 DE L’ACTE UNIFORME N°6
- Attendu que cet article subordonne l’ordonnance de saisie conservatoire à l’existence de circonstances de nature à menacer le recouvrement de la créance ;
- Attendu que cette condition en l’espèce paraît remplie au regard des productions ;
- Qu’à la lecture en effet de l’acte du 13 février 2009 constatant le dépôt à terme n°36130-31-38013 il ressort que la date de l’échéance était fixée au 14 février 2010 ;
- Que le défendeur était ainsi supposé recevoir paiement de sa créance à cette date ;
- Qu’or une sommation de payer du 25 février 2010 a été faite à la demanderesse suivant exploit de Maître BILONG MINKA Jeannette, Huissier de justice à Yaoundé et copie est versée au dossier, ce qui laisse parfaitement entendre que le paiement était devenu problématique ;
- Qu’une ordonnance d’injonction de payer n°13 du 06 mai 2010 lui sera même servie mais sans suite favorable ;
- Que cet ensemble d’éléments traduisent à suffisance le risque d’insolvabilité du débiteur et justifient la pertinence de l’ordonnance n°88 attaquée ;
- Qu’il échet d’écarter ce moyen ;
SUR LE MOYEN TIRE DE LA VIOLATION DE L’ARTICLE 77 (1) DE L’ACTE UNIFORME N°6
- Attendu que ce texte énonce que le créancier procède à la saisie au moyen d’un acte d’huissier ou agent d’exécution signifié au tiers en respectant les dispositions des articles 54 et 55 ;
- Que cet acte contient à peine de nullité : «
1) l’énonciation des noms, prénoms et domicile du débiteur et du créancier saisissant ou, s’il s’agit de personnes morales, leurs dénominations, forme et siège social »;
- Attendu qu’à la lecture tant du procès-verbal de saisie conservatoire que du procès- verbal de dénonciation de ladite saisie, il ressort que l’identité de la demanderesse y a été lisiblement mentionnée en ces termes « Caisse Nationale pour la Promotion de l’Investissement (CNPI) SA, établissement de microfinance de 2e catégorie dont le siège est à Yaoundé avenue FOCH BP : 1401 » ;
- Que la mention de la forme et du siège social du tiers saisi n’a pas été prescrite par cet article contrairement à ce qu’a semblé prétendre la demanderesse dans ses écritures du 30 septembre 2010 ;
- Qu’il échet par conséquent de constater la non violation de cet article et de rejeter le moyen ainsi soulevé ;
SUR LE MOYEN TIRE DE L’EXERCICE CONCOMITANT PAR LE DEFENDEUR DE LA PROCEDURE D’INJONCTION DE PAYER ET DE LA SAISIE CONSERVATOIRE
- Attendu qu’aux termes de l’article 61 de l’Acte uniforme OHADA n°6 « si ce n’est pas le cas où la saisie conservatoire a été pratiquée avec un titre exécutoire, le créancier doit, dans le mois qui suit ladite saisie, à peine de caducité, introduire une procédure ou accomplir les formalités nécessaires à l’obtention d’un titre exécutoire (…) » ;
- Attendu qu’au regard de cet article, l’usage de la saisie conservatoire n’est pas exclusif de la procédure d’injonction de payer ;
- Qu’au contraire, il y a lieu de comprendre par ces dispositions textuelles que lorsqu’une saisie conservatoire est pratiquée en l’absence d’un titre exécutoire, le créancier saisissant dispose pour garder valable cette saisie d’un mois pour engager une procédure, qu’elle soit par voie d’injonction, d’assignation ou de tout autre moyen légal à sa convenance en vue d’obtenir ce titre exécutoire ;
- Que la saisie conservatoire ayant pour but de prémunir le créancier contre le péril qu’encourt sa créance pendant le temps que dure la procédure d’obtention d’un titre exécutoire, il ne saurait être reproché au créancier habile l’exercice de cette mesure préventive ;
- Qu’ainsi la procédure d’injonction de payer même commencée, en ce qu’elle tend à obtenir un titre exécutoire sur une créance n’exclut pas l’exercice de la saisie conservatoire qui quant à elle tend à sécuriser le recouvrement ;
- Qu’il échet de rejeter ce moyen comme non fondé ;
SUR LE MOYEN TIRE DE L’INCERTITUDE DE LA CREANCE
- Attendu que la demanderesse a soutenu qu’une ordonnance d’injonction de payer a été obtenue par le défendeur et qu’elle fait l’objet d’opposition devant le juge du Tribunal de Grande Instance du Mfoundi ;
- Qu’elle ne saurait à bon droit aller en marge de cette procédure pour discuter du bien fondé de la créance devant le juge de céans, celui-ci n’étant pas saisi de l’instance en validation ;
- Qu’il y aurait d’ailleurs risque de litispendance ;
- Qu’il échet par conséquent de déclarer irrecevable ce chef de demande ;
- Attendu que les dépens doivent être laissés à la charge de la demanderesse qui succombe au procès ;
PAR CES MOTIFS
- Statuant publiquement, contradictoirement, en matière de contentieux de l’exécution et en premier ressort ;
- Rejetons comme non fondée la demande en nullité du procès-verbal de saisie conservatoire du 20 juillet 2010 des comptes de la CNPI SA ;
- Rejetons également comme non fondée la demande en mainlevée de la saisie conservatoire pratiquée sur la créance de la CNPI SA ;
- Déclarons irrecevable en l’état la demande tendant à l’examen du bien fondé de la créance ;
- Condamnons la demanderesse aux dépens distraits au profit de Maître NGUEFACK Joseph, Avocat aux offres et affirmations de droit ;