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18/11/2016 | CADHP | N°RANDOM1502690496

CADHP | CADHP, Cour africaine des droits de l'homme et des peuples, 18 novembre 2016, RANDOM1502690496


Texte (pseudonymisé)
744 RECUEIL DE JURISPRUDENCE DE LA COUR AFRICAINE VOL
Aa Ah c. Tanzanie (mesures provisoires)
RJCA 744

1 (2006-2016)
(2016) 1

Aa Ah c. République-Unie de Tanzanie
Ordonnance portant mesures provisoires, 18 novembre 2016. Fait en
anglais et en français, le texte anglais faisant foi.
Juges : ORÉ, KIOKO, NIYUNGEKO, GUISSE, BEN ACHOUR, BOSSA,
MATUSSE, MENGUE et MUKAMULISA
Le requérant alléguait la violation du droit à un procès équitable dans une
procédure ayant abouti à sa condamnation à la peine capitale. La Cour a
estimé des mesures provis

oires étaient nécessaires pour éviter un
préjudice irréparable en dépit du moratoire de fait adopté p...

744 RECUEIL DE JURISPRUDENCE DE LA COUR AFRICAINE VOL
Aa Ah c. Tanzanie (mesures provisoires)
RJCA 744

1 (2006-2016)
(2016) 1

Aa Ah c. République-Unie de Tanzanie
Ordonnance portant mesures provisoires, 18 novembre 2016. Fait en
anglais et en français, le texte anglais faisant foi.
Juges : ORÉ, KIOKO, NIYUNGEKO, GUISSE, BEN ACHOUR, BOSSA,
MATUSSE, MENGUE et MUKAMULISA
Le requérant alléguait la violation du droit à un procès équitable dans une
procédure ayant abouti à sa condamnation à la peine capitale. La Cour a
estimé des mesures provisoires étaient nécessaires pour éviter un
préjudice irréparable en dépit du moratoire de fait adopté par l’État
défendeur et du fait qu'aucune exécution n'avait eu lieu depuis
longtemps.
Mesures provisoires (peine capitale, 16-18).
I Objet de la requête
1. Le 15 septembre 2016, la Cour a reçu une requête introductive d'instance présentée par Aa Ah Aci-après dénommé « le requérant »), contre la République-Unie de Tanzanie (ci-après dénommée « le défendeur »), pour violation alléguée de ses droits de
2. Le requérant, actuellement détenu à la prison centrale de Butimba, a été condamné à la peine capitale par la Haute Cour de Tanzanie siégeant à Ag, le 22 avril 2015. La peine a été confirmée le 26 février 2016 par la Cour d'appel, qui est la plus haute juridiction de Tanzanie.
3. Le requérant allègue notamment ce qui suit :
a) La Haute Cour et la Cour d’appel ont commis une erreur de droit et de fait pour l’avoir déclaré coupable de meurtre et condamné à la peine capitale par pendaison bien que le ministère public n’ait pu prouver les charges au-delà de tout doute raisonnable.
b) Les deux juridictions ont commis une erreur de droit et de fait en fondant leur décision de le déclarer coupable sur les témoignages d'identification par la voix et d’identification visuelle des témoins à charge PW1, PW2, PW3, PW4 et PW5 dont les éléments de preuves ne sont pas fiables.
c) Les deux juridictions ont commis une erreur de droit et de fait pour n'avoir pas corroboré les témoignages des témoins à charge PW4 et
d) La preuve à charge produite par P.4 qui a été expurgée était le seul élément qui aurait fondé sa déclaration de culpabilité.

Ah c. Tanzanie (mesures provisoires) (2016) 1 RICA 744 745
e) Les deux juridictions ont commis une erreur de droit et de fait, pour l’avoir déclaré coupable alors qu’elles n’ont pas pris en considération les incohérences et les contradictions contenues dans les dépositions de Ad Ac (PW1) et A/INSP Af Ab APW7) qui sont des témoins à charge dont la crédibilité est douteuse.
f) La Haute Cour et la Cour d'appel ont violé son droit à un procès équitable.
g) Les deux juridictions ont commis une erreur de droit pour l’avoir condamné à la peine capitale, peine qui viole le droit à la vie consacré dans la Déclaration universelle des droits de l'homme et aux articles 13(6)(d) et 14 de la Constitution tanzanienne.
h) La Haute Cour et la Cour d'appel ont violé les articles 1, 3, 5, 6, 7(1) et 9(1) de la Charte africaine.
Il. Procédure devant la Cour
4. La requête a été reçue au Greffe de la Cour le 15 septembre 2016.
5. Conformément à l’article 35 du Règlement de la Cour, le Greffe a signifié la requête au défendeur 15 novembre 2016.
I. Compétence de la Cour
6. Lorsqu'elle est saisie d’une requête, la Cour doit procéder à un examen préliminaire de sa compétence, en application des articles 3 et 5 du Protocole.
7. Toutefois, avant d’ordonner des mesures provisoires, la Cour n’a pas à se convaincre qu’elle a compétence sur le fond de l’affaire, mais simplement s'assurer qu’elle a compétence prima facie.‘
8. L'article 3(1) du Protocole dispose que « la Cour a compétence pour connaître de toutes les affaires et de tous les différends dont elle est saisie concernant l'interprétation et l'application de la Charte, du présent Protocole et de tout autre instrument pertinent relatif aux droits de l’homme et ratifié par les Etats concernés ».
9. L'État défendeur a ratifié la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples (ci-après dénommée « la Charte ») le 9 mars 1984, le Protocole le 10 février 2006 et est partie aux deux instruments ; le 29 mars 2010, il a également fait la déclaration acceptant la compétence de la Cour pour recevoir des requêtes émanant d'individus et d'organisations non gouvernementales conformément aux articles 34(6) et 5(3) du Protocole, lus conjointement.
10. Les violations alléguées qui font l’objet de la requête portent sur des droits protégés par les articles 3(2), 4 et 7(1) de la Charte. La Cour a donc la compétence rationae materiae pour connaître de l’espèce.
Voir requête n° 002/2013 Commission africaine des droits de l'homme et des peuples c. Libye (ordonnance portant mesures provisoires datée du 15 mars 2013) et requête n° 006/2012 Commission africaine des droits de l'homme et des peuples c. Ae (ordonnance portant mesure provisoires datée du 15 mars 2013) ; requête n° 004/2011 Commission africaine des droits de l'homme et des peuples c. Libye (ordonnance portant mesures provisoires datée du 25 mars 2011).

746 RECUEIL DE JURISPRUDENCE DE LA COUR AFRICAINE VOL 1 (2006-2016)
11. À la lumière de ce qui précède, la Cour s’est assurée qu’elle a compétence prima facie, pour examiner la requête.
IV. Sur les mesures provisoires
12. Le requérant n’a pas demandé à la Cour d’ordonner des mesures provisoires.
13. En vertu de l’article 27(2) du Protocole et de l’article 51(1) de son Règlement intérieur, la Cour peut d’office ordonner des mesures provisoires « dans les cas d'extrême gravité et lorsqu'il s'avère nécessaire d’éviter des dommages irréparables à des personnes » et « qu’elle estime devoir être adoptées dans l'intérêt des parties ou de la justice ».
14. |! appartient à la Cour de décider dans chaque situation si, à la lumière des circonstances particulières de l'affaire, elle doit exercer la compétence qui lui est conférée par les dispositions ci-dessus.
15. Le requérant est condamné à la peine capitale et la requête semble révéler une situation d'extrême gravité, ainsi qu’un risque de dommages irréparables pour lui.
16. Compte tenu des circonstances de l'espèce qui révèlent un risque d'application de la peine capitale susceptible de porter atteinte à la jouissance des droits prévus aux articles 3(2), 4 et 7(1) de la Charte, la Cour décide d’exercer ses pouvoirs en vertu de l’article 27(2) du Protocole.
1. La Cour constate que la présente requête révèle une situation d'extrême gravité et présente un risque de violations irréparables des droits du requérant, protégés par les articles 3(2), 4 et 7(1) de la Charte, si la peine capitale venait à être appliquée.
2. En conséquence, la Cour conclut que les circonstances exigent une ordonnance portant mesures provisoires, en application de l’article 27(2) du Protocole et de l’article 51 de son Règlement intérieur, pour préserver le statu quo, en attendant la décision sur la requête principale.
3. Pour lever toute ambiguïté, la présente ordonnance est de nature provisoire et ne préjuge en rien des conclusions que la Cour formulera sur sa compétence, la recevabilité et le fond de la requête.
17. La Cour, à l’unanimité, ordonne au défendeur :
a) de surseoir à l’application de la peine capitale à l'encontre du requérant, sous réserve de la décision relative à la requête principale ; b) de faire rapport à la Cour dans les soixante (60) jours de la date de réception de la présente ordonnance, sur les mesures prises pour la mettre en œuvre.


Synthèse
Numéro d'arrêt : RANDOM1502690496
Date de la décision : 18/11/2016

Origine de la décision
Date de l'import : 13/04/2022
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