188 RECUEIL DE JURISPRUDENCE DE LA COUR AFRICAINE VOL 1 (2006-2016)
Ab Ad Ac c. Union africaine (compétence)
(2013) 1 RICA 188
Ab Ad Ac c. Union africaine
Arrêt du 15 mars 2013. Fait en anglais et en français, le texte anglais
faisant foi.
Juges A, OUGUERGOUZ, C, NIYUNGEKO,
RAMADHANI, TAMBALA, THOMPSON, ORE et GUISSE
N’a pas siégé conformément à l’article 22 Z B
Le requérant avait intenté une action en contestation de la validité de
l’article 34(6) du Protocole pour incompatibilité alléguée avec l’Acte
constitutif de l'Union africaine et demandait à la Cour de dire que l’article
34(6) était nul et sans effet. En rejetant la requête, la Cour a estimé
qu’elle n’était pas compétente pour examiner des affaires visant des
entités qui ne sont pas parties au Protocole.
Compétence (organisation internationale en qualité de défendeur, 38-40)
Opinion individuelle Z A, C et THOMPSON
Interprétation (l’article 34(6) est incompatible avec les articles 7 à 8 de la
Charte ; l’article 34(6) viole l'accès à la justice, 11)
Opinion séparée : OUGUERGOUZ
Compétence (la Cour n’a pas compétence à l’égard des entités qui ne
sont pas parties au Protocole, 1)
I Objet de la requête
1. Par requête en date du 18 octobre 2011, parvenue au Greffe le ''" décembre 2011, le sieur Ab Ad Ac , ressortissant du Cameroun, (ci-après dénommé «le requérant») et membre du personnel de la Commission de l’Union africaine, a attrait l’Union africaine (ci-après dénommée « le défendeur») devant la Cour africaine des droits de l'homme et des peuples (ci-après dénommée «Ja Cour ») en vue d'obtenir un jugement déclarant que l’article 34(6) du Protocole portant création d’une Cour africaine des droits de l’homme et des peuples (ci- après dénommé « le Protocole »), est contraire à l’Acte constitutif de l’Union africaine (ci-après dénommé « l’Acte constitutif ») et à la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples (ci- après dénommée « /a Charte ») et qu’il est de ce fait nul et de nul effet.
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2. La requête a été reçue au Greffe de la Cour le 1° décembre 2011 et enregistrée sous la référence 014/2011.
3. Par lettre en date du 5 janvier 2012, le Greffier a accusé réception de la requête en application de l’article 34(3) du Règlement.
4. En application de l’article 35(1) du Règlement, le Greffier a communiqué copie de la requête à la Présidente et aux autres membres de la Cour.
5. Conformément à l’article 22 du Protocole et à l’article 8(2) du Règlement intérieur de la Cour (ci- après dénommé « /e Règlement »), Juge Ben B, membre de cette Cour, qui était intervenu dans cette affaire en qualité de Conseiller juridique du défendeur s’est récusé.
6. Par lettre en date du 15 février 2012 et en application de l’article 35(2) du Règlement, le Greffe a communiqué la requête au défendeur en lui demandant d’indiquer le nom de ses représentants dans un délai de 30 jours et de répondre à la requête dans un délai de 60 jours.
7. En application de l’article 35(3) du Règlement et par lettre en date du 15 février 2012, le Greffe a informé le Président de la Commission de l’Union africaine et les États parties au Protocole du dépôt de la requête.
8. Par courriel en date du 1er avril 2012, le requérant a déposé un supplément au dossier initial de la requête.
9. Par lettre en date du 27 avril 2012 parvenue au Greffe le 20 mai 2012, le défendeur a communiqué le nom de son représentant ainsi que son mémoire en réponse à la requête.
10. Par lettre en date du 21 mai 2012, le Greffe a communiqué au requérant la réponse du défendeur à sa requête initiale.
11. Par lettre en date du 22 mai 2012, le Greffe a communiqué au défendeur le supplément déposé par le requérant à sa requête initiale. 12. Le 11 juin 2012, le Greffe a reçu la réplique du requérant datée du 6 juin 2012, en a accusé réception le même jour et l’a aussitôt communiquée au défendeur.
13. Par lettre en date du 25 Juin 2012, le Greffe a informé les parties que la procédure écrite était close et qu’elles pouvaient demander l'autorisation de soumettre de nouvelles pièces, le cas échéant.
14. Par courriel daté du 27 Juin 2012, le requérant a introduit une demande aux fins d’être autorisée à déposer des conclusions supplémentaires.
15. Sans attendre l’autorisation de la Cour, le requérant a déposé lesdites conclusions dont le Greffier a accusé réception le 2 juillet 2012. 16. Par ordonnance en date du 7 décembre 2012, la Cour a rejeté la demande d’autorisation du requérant comme non fondée, et introduite en violation de l’article 50 du Règlement qui dispose qu’ « aucune des parties ne peut déposer une nouvelle preuve après la clôture des débats, sauf autorisation de la Cour ».
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II. Les positions des parties
A. La position du requérant
17. Dans sa requête initiale, le requérant soutient que l’article 34(6) du Protocole est contraire au traité instituant l’Union africaine, à savoir l’Acte constitutif, qui met en avant des principes fondamentaux comme l’État de droit, la condamnation, le rejet de l'impunité et la promotion des droits de l’ homme, tels que consacrés par la Charte africaine. Le requérant considère en outre que l’article 34(6) du Protocole constitue une obstruction à la justice dans la mesure où il empêche l'accès à la Cour par les citoyens africains, en particulier les victimes des violations des droits de l'homme et des peuples qui ne peuvent obtenir réparation devant les juridictions nationales ou devant la Commission africaine des droits de l'homme et des peuples.
18. Il ajoute que le même article confère aux auteurs de violations des droits de l'homme et des peuples, en particulier les Etats, le pouvoir d'empêcher leurs victimes d’être entendues et partant, d'obtenir justice. 19. Le requérant estime que l’Union africaine ne peut être perçue par les africains comme une organisation qui se dote de dispositions qui empêchent les citoyens africains d’obtenir justice ou qui place ceux qui violent les droits de l'homme au-dessus de la loi.
20. Dans le supplément à la requête initiale, le requérant évoque trois éléments : l’obligation de l’Union africaine de veiller à ce que les textes de l’Union soient conformes à l’Acte constitutif et à la Charte, la compétence de la Cour en tant qu’élément central pour s'assurer du respect par les Etats membres des obligations qui sont les leurs dans le cadre de l’Acte constitutif et de la Charte et la qualité du requérant pour agir.
21. Sur le premier point, le requérant rappelle le rôle de coordination de l'Union africaine dans la mise en conformité des décisions de l’Union aux dispositions de l’Acte constitutif et instruments juridiques de l’Union et dans la rédaction des projets de traités et de conventions, ainsi que des accords de coopération entre l'Union africaine et les Etats membres ou avec d’autres organisations.
22. Sur le second point, le requérant allègue que l’article 34(6) exclut la compétence du seul organe continental chargé d'examiner les allégations de violations des obligations découlant des traités conclus par les Etats membres de l'Union africaine. Pour lui, il est inconcevable que les Etats fassent une déclaration ou exprime une réserve qui remet en cause les obligations qu’ils se sont auparavant engagés volontairement à respecter, privant ainsi la Cour continentale de toute compétence à connaître des allégations de violations alléguées par les individus et les ONG contre ces Etats.
23. Sur le dernier point, le requérant estime que tout africain digne de ce nom a l'obligation de défendre l’Acte constitutif, de la même manière que tout citoyen a le devoir de défendre la Constitution de son pays. Rappelant à l’occasion les dispositions de l’article 34(6), le requérant considère que la requête n'étant pas dirigée contre un Etat Membre, l’article 34(6) ne saurait être invoqué pour la rejeter.
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24. Par ailleurs, le requérant allègue que l’article 34(6) est incompatible avec l’Acte constitutif parce qu’il viole les objectifs et les principes tels qu’énoncés dans l’Acte constitutif. Dans son analyse, il cite une partie du Préambule du Protocole selon lequel les Etats membres de l'Organisation de l’unité africaine, Etats parties à la Charte, se disent « Fermement convaincus que la réalisation des objectifs de la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples nécessite la création d’une Cour africaine des droits de l'homme et des peuples pour compléter et renforcer la mission de la Commission africaine des droits de l'homme et des peuples ». Le requérant conclut de là que tous les principes inscrits dans l'Acte constitutif et les droits énumérés dans la Charte n’ont absolument aucun sens s'ils ne peuvent pas être reconnus et défendus devant une juridiction compétente.
25. En conclusion :
Le requérant prie la Cour de :
Déclarer que l’article 34(6) du Protocole est contraire à l’esprit et à la lettre de l’Acte constitutif et de la Charte et qu’il est de ce fait nul et de nul effet.
Dire et juger que l’article 34(6) est nul et de nul effet car il en est déjà ainsi en raison des règles de jus cogens contenues dans la Charte.
B. La position du défendeur
26. À titre d’exception préliminaire, le défendeur soulève l’irrecevabilité de la requête au motif que : la requête est sans fondement, fantaisiste, vexatoire et constitue un abus de procédure ; le requérant n'a pas qualité pour agir du fait qu’il est ressortissant d’un Etat qui n’a pas déposé la déclaration requise à l’article 34(6) du Protocole ; et il n’est ni partie à l’Acte constitutif, ni à la Charte, ni au Protocole. Il évoque à l’appui de ses prétentions l’article 34 de la Convention de Vienne de 1969 sur le droit des traités.
27. En ce qui concerne le fond de l'affaire, notamment la question de l'incompatibilité de l’article 34(6) du Protocole avec l’Acte constitutif et la Charte, le défendeur soutient que les Etats membres ont le droit souverain de négocier, d'adopter, de signer et de ratifier un traité quelconque ou d’y adhérer. I! précise que toutes les dispositions du Protocole, y compris l’article 34(6), sont conformes à la Convention de Vienne sur le droit des traités et au droit international coutumier.
28. Le défendeur indique qu’en droit international, un traité ne peut être nul et prendre fin que s’il est en conflit avec une norme impérative du droit international et rejette l’idée selon laquelle l’article 34(6) du Protocole est incompatible avec tous les instruments adoptés sous l'égide de l'Organisation de l’unité africaine ou de l’Union africaine.
29. Le défendeur fait valoir que les États membres ont le droit souverain, au moment de la ratification du Protocole ou à tout moment à partir de la ratification de celui-ci, de faire la déclaration acceptant la
1 «Un traité ne crée ni obligations ni droits pour un État tiers sans son consentement ».
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compétence de la Cour pour permettre aux individus ainsi qu'aux organisations non gouvernementales dotées du statut d'’observateur devant la Commission d'introduire des requêtes directement devant elle.
30. En conclusion,
Le défendeur prie la Cour de :
. Rejeter la requête sur la base de l’article 38 du Règlement ou, le cas échéant, pour défaut de compétence.
. Condamner le requérant aux dépens.
IV. Compétence de la Cour
31. En application des articles 39(1) et 52(7) du Règlement, la Cour doit examiner les exceptions préliminaires soulevées par le défendeur et en particulier l'exception relative à la compétence de la Cour pour connaître de la présente requête.
32. Les articles 3(2) du Protocole et 26(2) du Règlement disposent qu’ «en cas de de contestation sur le point de savoir si la Cour est compétente, la Cour décide ».
33. Pour régler la question de l'exception préliminaire, l’on doit comprendre que pour que la Cour puisse examiner une requête introduite directement par un individu, cette requête doit satisfaire notamment aux exigences énoncées aux articles 5(3) et 34(6) du Protocole.
34. L'article 5(3) du Protocole est libellé comme suit : « la Cour peut permettre aux individus ainsi qu'aux organisations non gouvernementales (ONG) dotées du statut d’observateur auprès de la Commission d'introduire des requêtes directement devant elle, conformément à l’article 34(6) de ce Protocole. »
35. Par ailleurs, l’article 34(6) du Protocole dispose que « à tout moment, à partir de la ratification du présent Protocole, l’État doit faire une déclaration acceptant la compétence de la Cour pour recevoir des requêtes énoncées à l’article 5(3) du présent Protocole. La Cour ne reçoit aucune requête en application de l’article 5(3) intéressant un État partie qui n’a pas fait une telle déclaration ».
36. De la lecture combinée des deux dispositions susmentionnées, la Cour fait observer que la saisine directe de la Cour par un individu ne peut viser qu’un Etat partie qui a fait une déclaration autorisant une telle saisine.
37. Comme indiqué plus haut, le requérant soutient que la requête n’est pas dirigée contre un Etat en particulier, mais contre l’Union africaine et que par conséquent l’article 34(6) ne peut s'appliquer en l'espèce.
38. La Cour considère que le fait qu’une entité non étatique comme l’Union africaine ne soit pas tenue par l’article 34(6) du Protocole de faire la déclaration ne donne pas nécessairement compétence à la Cour pour accepter les requêtes introduites par des individus contre cette entité. La Cour aurait en tout état de cause à examiner sa compétence à l'égard du défendeur.
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39. La Cour note que la requête n’est pas introduite contre un État partie au Protocole mais contre l’Union africaine qui n’est ni partie à la Charte ni au Protocole sur lequel le requérant se fonde.
40. || convient de souligner que la Cour a été créée par le Protocole et que sa compétence est clairement prescrite par ce Protocole. Lorsqu'une requête est introduite devant la Cour, la compétence rationae personae de la Cour est définie par les articles 5(3) et 34(6) lus conjointement. La présente affaire, dans laquelle la requête a été introduite contre une entité autre qu’un Etat ayant ratifié le Protocole et fait la déclaration en question, tombe en dehors du champ de compétence de la Cour. En conséquence, la Cour n’a pas compétence pour connaître de la requête.
41. La Cour, ayant conclu qu’elle n’a pas compétence pour connaître de la requête en l'espèce, considère qu’il n'est pas nécessaire d'examiner la question de la recevabilité de la requête et du fond de
42. Le défendeur ayant formulé des conclusions quant aux frais, la Cour doit à présent se prononcer sur cette question.
43. Dans sa réplique, le défendeur a demandé à la Cour de condamner le requérant aux dépens.
44. La Cour note que l’article 30 du Règlement dispose : « À moins que la Cour n’en décide autrement, chaque partie supporte ses frais de procédure ».
45. Tenant compte de l'ensemble des circonstances de l'espèce, la Cour estime qu'il n’y a pas lieu de se départir des dispositions de l’article 30 de son Règlement.
46. Par ces motifs,
LA COUR, à la majorité de six (6) voix contre trois (3)
a) Déclare qu’aux termes des articles 5(3) et 34(6) du Protocole lus conjointement, elle n’a pas compétence pour connaître de la requête introduite par Ab Ad Ac contre l’Union africaine.
b) Dit que chacune des parties supportera ses frais de procédure.
Opinion dissidente : A, C et THOMPSON
[1.] Les faits de la cause ont été succinctement décrits dans le jugement de la majorité et nous y souscrivons.
[2.] Nous avons lu le raisonnement dans l’arrêt rendu par la majorité des Juges et, malheureusement, nous ne partageons pas leur opinion. Dans la requête n° 001/11 - Ae Ag c. Union africaine, nous - Juges A, C et Thompson JJ - avons émis une opinion dissidente. Nous adoptons la même opinion dissidente en l'espèce comme si le raisonnement était reproduit dans cette affaire, et nous sommes d’autant plus confortés par les observations présentées par le requérant dans la requête en l'espèce.
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[3.] Le requérant a soutenu qu’«En ce qui concerne la promotion des droits de l'homme et des peuples conformément à la Charte africaine, l’article 34(6), en particulier, viole les articles 2, 3 et 7 de la CADHP... Dans toutes ces dispositions, la Charte insiste sur le droit de chaque individu d'avoir accès à la justice ; elle souligne l’égalité des parties devant la loi. Cependant, en application de l’article 34(6) du Protocole, toutes les victimes de violations des droits de l'homme et des peuples dans les pays qui n’ont pas déclaré leur acceptation de la compétence de la Cour pour connaître des affaires introduites contre eux n’ont accès à aucune forme de justice ».
[4.] Il a fait encore valoir que : « Cette restriction imposée à la jouissance des droits de l'homme et des peuples par l’article 34(6) devrait également être perçue sous l'aspect que les droits de l'homme ne sont pas des droits accordés par les Etats, mais plutôt les droits dont chaque individu jouit en vertu du seul fait qu’il est un être humain. Les Etats peuvent les formuler, mais ils ne les ont pas créés. Ainsi, même les Etats n’ont pas le droit d’entraver la jouissance de ces droits, et pire encore, d’avoir le droit de le faire en vertu des instruments d’une organisation continentale qui se doit de défendre la justice, Etant donné que les droits de l'homme n’émanent pas de pays mais de notre condition d’êtres humains, chaque Etat qui viole ces droits devrait être tenu pour responsable ».
[5.] En outre, il a soutenu que « Toute personne qui lit le Protocole se demanderait comment les véritables bénéficiaires des lois relatives aux droits de l’homme et des peuples pourraient être ainsi systématiquement exclus de l’accès à une Cour créée en principe pour mettre en œuvre et faire respecter les droits de l'homme et des peuples ».
[6.] Le requérant soutient qu’« || s’agit d’une violation flagrante des principes fondamentaux du droit pour les contrevenants de décider si leurs victimes doivent avoir accès aux cours de justice ou non. L'article 34(6) accorde effectivement aux Etats parties le droit de décider si leurs victimes doivent avoir accès à la Cour africaine ou non, contrairement aux principes fondamentaux du droit ».
[7.] Nous partageons le point de vue du requérant dans son argumentation que l’article 34(6) du Protocole relatif à la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples portant création d’une cour africaine des droits de l'homme et des peuples (le Protocole) est incompatible avec le Protocole lui-même et est incompatible avec la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples (la Charte). Il viole également le droit fondamental des peuples d'Afrique d’exprimer leurs griefs devant une Cour créée à cet effet.
[8.] Les États membres doivent non seulement créer des institutions pour la protection des droits de l'homme, ils doivent aussi s'assurer que les instruments utilisés par ces institutions répondent aux normes internationales et ne dérogent pas à la mission de protection, consacrée pour les peuples d'Afrique dans la Charte. Ils ne peuvent et ne devraient pas être autorisés à renoncer à leur responsabilité et à approuver et réprouver. Et là où ils ont cherché à le faire, l'Union africaine, organe qu’ils ont mis en place pour concrétiser leur volonté et
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leur action collective peut et doit pouvoir être tenue responsable de cet échec ou de ce renoncement.
[9.] Le droit d’accès à la justice est une norme impérative du droit international jus cogens. Ce droit est consacré dans la Charte africaine et par d'autres instruments internationaux relatifs aux droits dont les Etats parties sont signataires. Les instruments ont été présentés de manière appropriée par le requérant, à la page 11 de sa réplique, le 6 juin 2012. Voir
|. L'article 7 de la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples ;
ii. L'article 8 de la Déclaration universelle des droits de l’homme ; iii. L'article 2(3) du Pacte international relatif aux droits civils et politiques et ;
iv. L'article 10(3) de la Charte africaine de la démocratie, des élections et de la gouvernance
[10.] Nous partageons l’opinion du requérant sur cette question. C’est la raison pour laquelle nous nous distinguons de la position de la majorité dans l'affaire Ae Ag c. Union africaine comme énoncé dans notre opinion dissidente.
[11.] Les États parties ont le devoir de veiller à ce que les peuples d'Afrique aient accès à la protection judiciaire de leurs droits et cela ne peut être réalisé avec l’obstacle que constitue l’article 34(6) du Protocole. Le droit d’accès à la Cour est un élément essentiel en matière de protection des droits de l'homme. En assurant l'accès à la Cour, la Cour est compétente pour écarter tout obstacle,
[13.] Au vu de ce qui précède et des raisons que nous avons déjà invoquées dans l'affaire précitée Ae Ag c. Union africaine, nous n’hésitons pas à déclarer l’article 34(6) du Protocole nul et sans effet.
Opinion individuelle : OUGUERGOUZ
1. Je souscris pleinement à la décision d’incompétence de la Cour pour connaître de la requête introduite contre l'Union africaine par Monsieur Ab Ad Ac. Aux termes du Protocole portant création de la Cour, seuls en effet les Etats parties à cet instrument peuvent être attraits devant la Cour (voir les articles 3(1), 5(1)(c)), 7, 26, 30, 31 et 34(6)). L'Union africaine n’étant pas une entité étatique partie au Protocole, la Cour était donc manifestement incompétente pour connaître de cette requête. En conséquence, je considère que cette requête n'aurait pas dû donner lieu à un arrêt en bonne et due forme sur la base de l’article 52(7) du Règlement, relatif aux exceptions préliminaires ; elle aurait simplement dû faire l’objet d’un traitement administratif, c’est-à-dire être rejetée de p/ano par une simple lettre du Greffier (voir mutatis mutandis mon opinion individuelle jointe à l’arrêt de la Cour rendu le 26 juin 2012 dans une affaire similaire, Ae Ag c. Union africaine ; voir également mon opinion individuelle jointe à la
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décision rendue le 30 septembre 2011 dans l'affaire Ah AfXo Aa c. Parlement panafricain).
2. Le caractère manifeste de l’incompétence de la Cour pour connaître de cette requête transparaît d’ailleurs clairement de la relative brièveté des motifs de l’arrêt (voir les paragraphes 36 à 40, et plus particulièrement les paragraphes 36 et 39).