La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

20/06/2008 | BURKINA FASO | N°045

Burkina Faso | Burkina Faso, Cour d'appel de ouagadougou, 20 juin 2008, 045


Texte (pseudonymisé)
En présence d'un contrat commercial à caractère international avec une clause attributive de juridiction c'est la convention de Bruxelles du 27 septembre 1968 concernant la compétence judiciaire et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale qui s'applique. Son article 17 prévoit que « si les parties dont l'une au moins a son domicile sur le territoire d'un Etat contractant, sont convenues d'un tribunal ou de tribunaux d'un Etat contractant pour connaître des différends nés ou à naître à l'occasion d'un rapport de droit déterminé, ce tribunal ou les tribunaux de

cet Etat sont seuls compétents (...) ». Mais l'alinéa 5 dudit a...

En présence d'un contrat commercial à caractère international avec une clause attributive de juridiction c'est la convention de Bruxelles du 27 septembre 1968 concernant la compétence judiciaire et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale qui s'applique. Son article 17 prévoit que « si les parties dont l'une au moins a son domicile sur le territoire d'un Etat contractant, sont convenues d'un tribunal ou de tribunaux d'un Etat contractant pour connaître des différends nés ou à naître à l'occasion d'un rapport de droit déterminé, ce tribunal ou les tribunaux de cet Etat sont seuls compétents (...) ». Mais l'alinéa 5 dudit article précise que « si une convention attributive de juridiction n'a été stipulée qu'en faveur de l'une des parties, celle-ci conserve le droit de saisir tout autre tribunal compétent en vertu de la présente convention ». L'article 4 alinéa 1er de ladite convention stipule que «si le défendeur n'est pas domicilié sur le territoire d'un Etat contractant, la compétence est dans chaque Etat contractant, réglée par la loi de cet Etat sous réserve de l'application des dispositions de l'article 16 (compétences exclusives) ». En l'espèce, la partie défenderesse est domiciliée à B, tandis que la demanderesse a son siège social à Paris en France, Etat signataire de la convention de Bruxelles. S'agissant d'un litige à caractère international, la règle fondamentale de compétence territoriale interne des juridictions burkinabè est le tribunal du domicile du défendeur tel que fixé par l'article 43 et suivants du code de procédure civile. En outre, l'Acte uniforme OHADA relatif au recouvrement simplifié parlant de requête aux fins d'injonction de payer indique en son article 3 alinéa 1er que la demande est formée par requête auprès de la juridiction compétente du domicile ou du lieu où demeure effectivement le débiteur ». c'est donc à bon droit que le Tribunal de grande instance a retenu sa compétence juridictionnelle. Concernant le sursis sollicité, il ne peut être accordé, celui-ci n'étant pas nécessaire en l'espèce pour une bonne administration de la justice. Le recouvrement d'une créance peut être demandée suivant la procédure d'injonction de payer lorsque la créance a une cause contractuelle. Dans le cas d'espèce, il est indubitable
que les parties sont liées par un contrat de fourniture de tôles et de tubes d'acier. Le contrat de vente est un contrat essentiellement consensuel, et il ressort des pièces versées au dossier que la créance de la demanderesse répond aux conditions posées par les articles 1 et 2 AUPSRVE à savoir qu'elle une origine contractuelle, qu'elle est certaine, liquide et exigible. C'est donc à bon droit que la premier juge a condamné la défenderesse au paiement de la somme réclamée.
ARTICLE 1 AUPSRVE ARTICLE 2 AUPSRVE ARTICLE 3 AUPSRVE ARTICLE 15 AUPSRVE ARTICLE 263 AUDCG ARTICLE 173 AUSCGIE ARTICLE 174 AUSCGIE ARTICLE 1134 CODE CIVIL BURKINABÈ ARTICLE 1153 CODE CIVIL BURKINABÈ ARTICLE 1406 CODE DE PROCEDURE CIVILE FRANÇAIS ARTICLE 15 CODE DE PROCEDURE CIVILE BURKINABÈ ET SUIVANTS ARTICLE 43 CODE DE PROCEDURE CIVILE BURKINABÈ ET SUIVANTS ARTICLE 315 CODE DE PROCEDURE CIVILE BURKINABÈ ET SUIVANTS ARTICLE 394 CODE DE PROCEDURE CIVILE BURKINABÈ ARTICLE 550 CODE DE PROCEDURE CIVILE BURKINABÈ ARTICLE 17 CONVENTION DE BRUXELLES DU 27 SEPTEMBRE 1968 CONCERNANT LA COMPETENCE JUDICIAIRE ET L'EXECUTION DES DECISIONS EN MATIERE CIVILE ET COMMERCIALE ARTICLE 988 CODE DES PERSONNES ET DE LA FAMILLE BURKINABÈ ET SUIVANTS ARTICLE 1002 CODE DES PERSONNES ET DE LA FAMILLE BURKINABÈ ET SUIVANTS
(COUR D'APPEL DE B, Chambre commerciale (Y A), Arrêt n° 045 du 20 juin 2008, Société Industrielle des Tubes d'Acier (SITACI) c/ TRADESCA)
LA COUR,
FAITS - PROCEDURE - PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Par acte d'huissier en date du 24 septembre 2007 signifié à la Société TRADESCA, la Société Industrielle des Tubes d'Acier (SITACI) a relevé appel du jugement n° 101/2007 du 19 septembre 2007 rendu par le Tribunal de grande instance de B en ces termes : « Statuant publiquement, contradictoirement en matière commerciale et en premier ressort ; En la forme Déclare recevable l'opposition de la SITACI ; Au fond, la déclare mal fondée et la rejette ; La condamne en conséquence à payer à TRADESCA la somme de 168.141.740F CFA outre les intérêts de droit à compter du présent jugement et 500.000F CFA au titre des honoraires d'avocat ; Déboute AG du surplus de sa demande ;
Dit n'y avoir lieu à exécution provisoire ; Condamne Z aux dépens. »
La SITACI expose que depuis quelques années, elle entretient des relations commerciales avec le groupe X et CABAUD à travers la société française d'importation de produits métalliques, la MISETAL, société anonyme ayant son siège social à Paris en France ; qu'outre la société MISETAL le groupe comprend également la SACAF et la société TRADESCA ; que ces trois sociétés logées à la même adresse sont représentées par une seule et même personne ayant pouvoir de signature, tout comme elles possèdent le même directeur administratif et financier ; qu'ayant passé une commande de 700 tonnes de bobines galvanisées le 08 juin 2005 avec MISETAL, celle-ci, pour des raisons qui lui sont personnelles, demanda à ce que les déclarations préalables d'importation (DPI) soient établies au nom des trois sociétés du groupe DESCOURS et CABAUD, ce qui fut fait à raison de 250 tonnes pour la société TRADESCA, 350 tonnes au nom de la société MISETAL et 100 tonnes pour la SACAF, suivant déclarations préalables d'importation n° 08443, 08444 et 08445 toutes établies le 14 juin 2005 ; qu'après livraison de la commande, elle procéda au règlement intégral entre les mains de la société MISETAL, du montant cumulé de cent cinquante quatre mille cinq cent soixante douze, vingt six (154.572, 26) euros correspondant aux factures n° PTR-5040 et 5041 établies le 13 août 2005 au nom de la société TRADESCA ; que les relations d'affaires se poursuivirent normalement jusqu'au 26 avril 2007 où, contre toute attente, les sociétés MISETAL et AG lui ont notifié deux ordonnances d'injonction de payer ; qu'étonnée par de telles réclamations, elle forma opposition contre l'ordonnance d'injonction de payer n° 143/07 du 25 avril 2007 et sollicita son annulation pour cause d'incompétence territoriale des juridictions burkinabè au regard des clauses attributives de juridiction figurant dans les conditions générales de vente des sociétés du groupe DESCOURS et C, d'une part et subsidiairement parce qu'elle contestait le paiement réclamé d'autre part ; que le Tribunal passa outre ces motifs et la condamna à payer à la société TRADESCA la somme de cent soixante huit millions cent quarante un mille set cent quarante (168.141.740) francs en principal, outre les intérêts de droit ainsi que la somme de cinq cents mille (500.000) francs au titre des honoraires d'avocat ;
La SITACI fait valoir que l'article 15 des conditions générales de vente des sociétés du groupe DESCOURS et CABAUD stipule que « tout litige, quel qu'en soit la cause ou l'objet, qui ne pourrait pas être réglé par un arbitrage amiable, sera tranché par les tribunaux de Paris » ; que cette disposition consacre une clause attributive de juridiction encore appelée clause de prorogation de compétence ; qu'en y souscrivant, les parties s'obligent à la respecter en tant que loi des parties et ne peuvent y déroger que si leurs relations se situent dans le cadre d'un contrat n'ayant pas un caractère international ; que dès lors ni la SITACI, ni aucune des sociétés du groupe ne peuvent y déroger au regard de l'article 17 de la convention de Bruxelles du 27 septembre 1968 qui précise que : « si les parties dont l'une au moins a son domicile sur les territoires d'un Etat contractant sont convenues d'un tribunal ou de tribunaux d'un Etat contractant pour connaître des différends nés ou à naître à l'occasion d'un rapport de droit déterminé, ce tribunal ou les tribunaux de cet Etat sont seuls compétents » ; qu'en se déclarant compétent, le Tribunal de B a méconnu les dispositions des articles 1002 et suivants du code des personnes et de la famille burkinabè relatifs aux règles de conflits de loi, l'article 1134 du code civil ainsi que l'article 17 de la convention de Bruxelles ci-dessus visé ; que dès lors le jugement attaqué mérite d'être infirmé et la Cour statuant à nouveau déclarera les juridictions du Y A territorialement incompétentes pour connaître de l'action de la société TRADESCA ;
L'appelante sollicite au cas ou la Cour passerait outre le moyen tiré de l'incompétence, un sursis à statuer et subsidiairement l'infirmation du jugement querellé pour violation des articles 1 et 2 de l'Acte uniforme OHADA portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d'exécution (AU/RSVE)
La SITACI soutient qu'elle doit faire face à deux procédures d'injonction de payer initiées à son encontre par ses fournisseurs habituels, les sociétés MISETAL et TRADESCA ; que le premier juge a rejeté la demande de jonction de ces deux procédures, quand bien même elles présentent un lien de connexité évident, et a rendu deux décisions distinctes, l'une objet du présent appel et l'autre, avant dire droit, commettant une expertise des marchandises mises en cause ; que la procédure l'opposant à la société MISETAL toujours pendante devant le Tribunal dans l'attente du rapport de l'expert, est incontestablement connexe à celle qui l'oppose à la société TRADESCA dont la réclamation fait partie des commandes non entièrement exécutées ; que dès lors pour une bonne administration de la justice et en application de l'article 315 et suivants du code de procédure civile il parait tout indiqué d'ordonner le sursis à statuer jusqu'à l'intervention d'une décision définitive dans le cadre de l'affaire l'opposant à la société MISETAL ;
La SITACI fait valoir, s'agissant du bien fondé de la réclamation de la société TRADESCA, que la créance dont le recouvrement est poursuivi doit, selon l'article 1er de l'AU/RSVE, être certaine, liquide et exigible et avoir, conformément aux prescriptions de l'article 2 du même Acte uniforme un cause contractuelle ; que cependant outre le fait qu'aucun contrat de vente, même verbal, ne l'a jamais lié à la société TRADESCA mais plutôt à la société MISETAL, elle a intégralement acquitté le montant des deux factures datées du 13 août 2005 et libellés à la demande de la société MISETAL au nom de la société TRADESCA ; qu'elle en veut pour preuve l'état récapitulatif de la situation de SITACI établie par la société TRADESCA elle-même, et le fait qu'en dehors de ses factures, l'intimée n'est pas en mesure de produire aucune autre pièce justificative susceptible de corroborer le bien fondé et la cause contractuelle des autres factures d'un montant de cumulé de deux cent cinquante six mille trois cent cinq, quarante trois (256.305,43) euros (n° PTR5047, n° PTR-5047 CMP 01, n° PTR-5066. et n° PTR-5066 COMP 01) ; que la société TRADESCA n'ayant,jamais eu de relations directes avec elle, ne peut évidemment pas produire des factures, en bonne et due forme dont la sincérité serait vérifiable ; qu'il découle de ce qui précède que c'est en violation flagrante des dispositions de l'article 1er de l'AU/RSVE que l'ordonnance d'injonction de payer n° 143/07 a été rendue et confirmée par le tribunal saisi sur opposition ; La SITACI sollicite, en application de l'article 394 du code de procédure civile et 6 nouveau de la loi 10-93/ADP portant organisation judiciaire au Y A, que la société TRADESCA soit condamnée à lui rembourser la somme de un million quarante quatre mille (1.044.000) francs CFA au titre des frais exposés et non compris dans les dépens et constituée de frais d'ouverture de dossier cent mille (100.000) francs CFA, d'honoraires de base (800.000) francs CFA et de la TVA sur lesdits honoraires cent quarante quatre mille (144.000) francs CFA ;
En réplique la société TRADESCA conclut à la confirmation du jugement querellé en ce qu'il a retenu la compétence du tribunal et a condamné la SITACI à lui payer la créance en principal, outre les intérêts et frais ; que cependant il entend relever incidemment appel du même jugement pour l'avoir déboutée de sa demande en paiement de dommages-intérêts sur la base de l'article 1153 du code civil qui traite de la réparation du préjudice lié à la défaillance
dans l'exécution d'une obligation consistant au paiement d'une somme d'argent et qui se résout en intérêts de droit, sauf dérogation en matière commerciale en cas de préjudice spécifique ; L'intimé soutient que s'agissant d'une matière commerciale, en l'espèce une vente de marchandises, c'est à l'article 263 de l'Acte uniforme relatif au droit commercial général qu'il eut fallu faire référence pour apprécier sa demande ; qu'en effet il y est précisé que si une partie ne paie pas le prix de la vente, l'autre partie a droit à des intérêts sur cette somme calculés au taux d'intérêt légal applicable en matière commerciale, et ce sans préjudice des dommages-intérêts qu'elle peut être fondée à demander en compensation de son préjudice ; qu'il est aisé de constater que c'est à tort que le premier juge a rejeté sa demande ;
La société TRADESCA fait valoir par ailleurs que la SITACI qui bien reçu la marchandise commandée et qui n'a formulé aucun grief contre elle, a tout de même formé opposition à l'ordonnance d'injonction de payer ; que cette action qui est malicieuse, vexatoire et dilatoire constitue une faute qui ouvre droit à réparation en application de l'article 15 du code de procédure civile qui prévoit que les actions caractérisées ainsi que dessus ou qui ne sont pas fondées sur des moyens sérieux, constituent une faute ouvrant droit à réparation ; qu'en conséquence de ce qui précède, elle prie la Cour de bien vouloir infirmer le jugement sur ce point et, statuant à nouveau, condamner la SITACI à lui payer la somme de cent cinquante millions (150.000.000) au titre du préjudice subi ;
S'agissant de la compétence internationale des juridictions burkinabè la société TRADESCA fait observer que cette question est régie par les articles 988 et suivants du code des personnes et de la famille ; que l'article 988 dudit code solutionne la question de la compétence des juridictions burkinabè dans un litige international en prescrivant d'étendre à la compétence, les règles internes de compétence territoriale, lesquelles sont contenues dans l'article 43 du code de procédure civile qui prévoit comme tribunal territorialement compétent celui du domicile du défendeur ; qu'en l'espèce la SITACI ayant son siège social à B, il est incontestable que les juridictions burkinabè, par application de l'article 988 précité, sont compétentes ; que c'est seulement après s'être déclaré compétent que le juge burkinabè va rechercher la loi applicable au litige international en utilisant les règles de conflit de lois prévues aux articles 1002 et suivants du codes des personnes et de la famille ; que par ailleurs le juge burkinabè est compétent en application du droit français notamment l'article 17 de la convention de Bruxelles du 27 septembre 1968 que la SITACI cite partiellement dans ces écritures, en omettant de préciser qu'il mentionne plus loin que : « si une convention attributive de juridiction n'a été stipulée qu'en faveur de l'une des parties, celle-ci conserve le droit de saisir tout autre tribunal compétent » ; qu'en l'espèce il est précisé dans les documents de vente liant les parties que les conventions générales de vente sont stipulées dans l'intérêt exclusif de la société TRADESCA ; qu'il s'ensuit qu'elle était, conformément à l'article 17 de la convention de Bruxelles, en droit de renoncer au bénéfice de la clause attributive de juridiction en assignant directement la SITACI devant le Tribunal dans le ressort duquel se situe son siège social, en application des articles 988 du code des personnes et de la famille et 43 du code de procédure civile ;
Pour l'intimé, la demande de sursis de la partie appelante est spécieuse dans la mesure où la société TRADESCA et la société MISETAL sont distinctes, chacune ayant sont patrimoine propre ainsi que l'attestent les extraits de son registre de commerce et de ses statuts ; que la SITACI ne l'ignore pas car dans la déclaration préalable d'importation il est fait référence à la société TRADESCA comme exportateur et Z comme importateur ; qu'en outre la SITACI a reçu.,. et accepté bien avant l'établissement des factures définitives, les factures
proforma ; qu'au regard de ce qui précède la demande de la SITACI tendant à obtenir le sursis à statuer, dans l'attente du jugement l'opposant à MISETAL, mérite d'être rejetée ; L'intimé soutient qu'elles ont entretenu des relations contractuelles contrairement aux allégations de la SITACI depuis 2005 ; qu'elle lui expédiait des marchandises en prenant soin au préalable d'envoyer des factures proforma à la SITACI que cette dernière acceptait par apposition de sa signature et de son cachet ; que c'est ainsi que cette opération a donné lieu aux factures n'PTR-5047, PTR5047 CMP 01, PTR-5066 et PTR-5066 COMP 0 let en enfin PTR 5040 et 5041 avec des impayés de cent soixante huit millions cent quarante un mille sept cent quarante (168.141.740) francs CFA ; que cette créance est certaine, liquide et exigible, la SITACI ne contestant pas avoir reçu les marchandises qui lui ont été livrées par le société TRADESCA ; qu'il sera justice confirmer le jugement en ce qu'il a condamné la SITACI à l'exécution de ses engagements contractuels conformément à l'article 2 de l'AU/RSVE ;
La SITACI, tout en réitérant ses conclusions du 20 février 2008, entend faire les observations suivantes relativement aux écritures en réplique de l'intimé qui tente désespérément de s'accrocher à l'argumentaire selon lequel la clause attributive de juridiction aurait été stipulée dans son intérêt exclusif et qu'elle aurait renoncé à s'en prévaloir ; que cependant il est clair que les dispositions de l'article 17 de la convention de Bruxelles ne peut être valablement invoquée pour fonder la compétence des juridictions du Y A au regard de son libellé qui prévoit que « si une convention attributive de juridiction n'a été stipulé qu'en faveur de l'une des parties, celle-ci conserve le droit de saisi tout autre tribunal compétent en vertu de la présente convention » ; que le Y A n'étant pas signataire de ladite convention, ses juridictions ne peuvent jamais être compétente en vertu de cette convention.
DISCUSSION
EN LA FORME
Attendu que l'appel interjeté par la SITACI est recevable pour avoir été fait dans les forme et délai prescrits par les articles 550 du code de procédure et 15 de l'AU/RSVE ;
AU FOND
SUR LA COMPETENCE
Attendu qu'il n'est pas contesté que les parties ont convenu d'une clause attributive de juridiction ainsi libellée dans l'extrait des conditions générales de vente figurant sur les factures proforma et définitives de la société TRADESCA : « les conditions générales de vente au verso, stipulées dans l'intérêt exclusif de la société TRADESCA prévalent sur toutes autres conditions générales de vente ou d'achat de nos partenaires. Seul le droit français est applicable. Tout litige quel qu'en soit la cause, qui ne pourrait pas être réglé par un arbitrage amiable, sera tranché par les Tribunaux de Paris » ; Attendu que pour dénier la compétence du Tribunal de grande instance de B, la SITACI argue du fait qu'étant en présence d'un contrat commercial à caractère international avec une clause attributive de juridiction c'est la convention de Bruxelles du 27 septembre 1968 concernant la compétence judiciaire et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale qui s'applique, notamment en son article 17 prévoyant que « si les parties dont l'une au moins a son domicile sur le territoire d'un Etat contractant, sont convenues d'un tribunal ou de tribunaux d'un Etat contractant pour connaître des différends nés ou à naître à
l'occasion d'un rapport de droit déterminé, ce tribunal ou les tribunaux de cet Etat sont seuls compétents (...) » ;
Mais attendu que l'alinéa 5 dudit article précise que « si une convention attributive de juridiction n'a été stipulée qu'en faveur de l'une des parties, celle-ci conserve le droit de saisir tout autre tribunal compétent en vertu de la présente convention » ; que ladite convention en son article 4 alinéa 1er édicte que « si le défendeur n'est pas domicilié sur le territoire d'un Etat contractant, la compétence est dans chaque Etat contractant, réglée par la loi de cet Etat sous réserve de l'application des dispositions de l'article 16 (compétences exclusives) » ; Attendu qu'en l'espèce, la SITACI partie défenderesse est domiciliée à B, au Y A, tandis que la société TRADESCA a son siège social à Paris en France, Etat signataire de la convention de Bruxelles ; Attendu que s'agissant d'une procédure d'injonction de payer l'article 1406 du nouveau code de procédure civile français dispose que le juge territorialement compétent est celui du lieu où demeure le ou l'un des débiteurs poursuivis », tout en précisant plus loin que cette règle est d'ordre public ; que partant la société TRADESCA après avoir renoncée au bénéfice de la clause était fondé à saisir le tribunal de B, dans le ressort duquel se trouve le domicile du défendeur la SITACI ;
Attendu par ailleurs que s'agissant d'un litige à caractère international, il y a lieu pour savoir si la juridiction burkinabè saisie peut retenir sa compétence, de se référer à la règle posée par l'article 988 du code des personnes et de la famille qui dit que « les règles internes de compétence territorialement déterminent, sauf disposition contraire, la compétence internationale des juridictions et des autorités administratives burkinabè » ; que cela signifie qu'il faut étendre les règles de compétence territoriale interne pour fixer la compétence internationale des juridictions burkinabè ; que la règle fondamentale de compétence territoriale interne est le tribunal du domicile du défendeur tel que fixé par l'article 43 et suivants du code de procédure civile ; qu'en outre, l'Acte uniforme OHADA relatif au recouvrement simplifié parlant de requête aux fins d'injonction de payer indique en son article 3 alinéa 1er que la demande est formée par requête auprès de la juridiction compétente du domicile ou du lieu où demeure effectivement le débiteur » ; Attendu qu'il ressort de ce qui précède que c'est à bon droit que le Tribunal de grande instance a retenu sa compétence juridictionnelle et il convient dès lors de confirmer le jugement sur ce point ;
SUR LE SURSIS A STATUER
Attendu que la SITACI sollicite de la Cour un sursis à statuer en attendant que le tribunal vide sa saisine dans l'affaire qui l'oppose à la société MISETAL aux motifs que la société TRADESCA et la société MISETAL sont des filiales du groupe DISCOURS et CABAUD d'une part et que ces procédures présentent un lien de connexité en ce sens que les réclamations de la société TRADESCA font parties des commandes non entièrement exécutées par la société MISETAL objet du second litige, d'autre part ; Mais attendu qu'il ressort des pièces du dossier que la société TRADESCA est une société à part entière inscrite au registre du commerce et de sociétés au greffe du tribunal de commerce de Paris ; qu'en outre il y a lieu de relever que la société TRADESCA qui ne saurait être assimilée à une succursale, fait partie d'un ensemble de sociétés (groupe de sociétés) juridiquement indépendante les unes des autres même si elles sont soumises à une unité de décision économique et à un contrôle unique (cf. article 173 et 174 de l'Acte uniforme sur les
sociétés commerciales et GIE) ; Attendu par ailleurs qu'à travers la déclaration préalable d'importation et les factures produites au dossier la SITACI a bel et bien traité avec la société TRADESCA l'un des fournisseurs ; Attendu qu'il s'ensuit que le sursis sollicité ne peut être accordé, celui-ci n'étant pas nécessaire, en l'espèce, pour une bonne administration de la justice ;
SUR LA CREANCE DE LA SOCIETE TRADESCA
Attendu que le recouvrement d'une créance peut être demandée suivant la procédure d'injonction de payer lorsque la créance a une cause contractuelle ; Attendu que la SITACI conteste l'existence d'un contrat de vente commerciale entre elle et la société TRADESCA ; Attendu cependant qu'il est versé au dossier des pièces qui établissent le contraire notamment : - la lettre de la SITACI en date du 13 avril 2006 adressée à la société TRADESCA relative à une créance de cent soixante six mille huit cent quatre vingt neuf mille, soixante trois (166.889,63) euros où elle indiquait à la société TRADESCA que sa créance « sera réglée le 05 mai 2006 au lieu du 20 avril 2006 » ; - des factures proforma de la société TRADESCA dûment acceptées par Z à l'exemple de celle portant sur un montant de cent soixante cinq mille (165.000) euros et référencée n° PTR 2005-2908FF du 29 août 2005 ; - une déclaration préalable d'importation où l'importateur a été identifié comme étant la SITACI et le vendeur (exportateur) la société TRADESCA ;
Attendu qu'au regard de ces éléments il est indubitable que Z et AG sont liées par un contrat de fourniture de tôles et de tubes d'acier ; que le contrat de vente est un contrat essentiellement consensuel ; Attendu que la société TRADESCA réclame le paiement de la somme reliquataire de cent quatre vingt six millions cent quarante un mille sept cent quarante (186.141.740) francs (256.330,43 euros) représentant le solde impayé objet des factures : - PTR-5047 de 166.989, 63 euros - PTR-5057 COMPO 1 de 54.651, 15 euros - PTR-5066 de 26.587,45 euros ; - PTR-5086 COMP 01 de 8.077,20 euros ;
Attendu que ces factures ont été précédées de factures proforma visées et acceptées par la SITACI qui a pris soin de communiquer à son à son co-contractant les numéros de licence d'importation exigés ; qu'en retour les marchandises ont été expédiées par la société TRADESCA ainsi que l'attestent les connaissements produits au dossier (B/L n° RJ/ARD-01 du 04 mai 2005, B/L n° RJ-ABJ12 du 22 octobre 2005, B/L n° PM-ABJ07 du 13 janvier 2006) et où la société TRADESCA et SITACI ont été identifiées respectivement comme chargeur et destinataire des marchandises ; Attendu qu'il ressort de tout ce qui précède que la créance de la société TRADESCA sur la SITACI répond aux conditions posées par les articles 1 et 2 de l'AU/RSVE à savoir qu'elle une origine contractuelle ; qu'elle est certaine, liquide et exigible, le délai de paiement étant expiré ; Attendu que c'est donc à bon droit que la premier juge a condamné la SITACI au paiement de la somme de cent soixante huit millions cent quarante un mille sept cent quarante (168.141.740) francs CFA ;
SUR L'APPEL INCIDENT DE LA SOCIETE TRADESCA
Attendu que l'intimé fait grief au premier juge de l'avoir débouté de la demande en paiement de dommages-intérêts ;
Attendu que la société TRADESCA réclame des dommages-intérêts distincts sur le fondement de l'article 263 de l'Acte uniforme OHADA relatif au droit commercial général (AU/DCG) d'une part et sur celui de l'article 15 du code de procédure civile d'autre part ; Attendu que contrairement aux affirmations de l'intimé les dommages-intérêts dont fait cas l'article 263 de l'AU/DCG ne se confondent pas avec les dommages-intérêts moratoires représentés par l'intérêt légal et qui sont automatiquement dus en cas de retard de paiement par le débiteur d'une somme d'argent ; Attendu qu'il appartient à la société TRADESCA pour pouvoir prétendre à une réparation autre que celle constituée par le forfait légal, d'apporter la preuve que le défaut de paiement à l'échéance par la SITACI lui a causé un préjudice indépendant de celui qui résulte du retard ; que faute pour l'intimé d'avoir apporté la preuve d'un préjudice distinct du retard, c'est à bon droit que les premiers juges l'ont débouté de sa demande ;
Attendu que la société TRADESCA formule une demande additionnelle en paiement de dommages-intérêts pour procédure abusive ; Attendu qu'il est constant que la SITACI a reçu de son fournisseur étranger, la société TRADESCA des marchandises sans en retour remplir en totalité les obligations qui lui incombent à savoir le paiement du prix ; qu'en l'espèce le caractère abusif et dilatoire de la procédure engagée par l'appelant se déduit de ce que ses moyens reposent sur de simples allégations dépourvues de preuves ; Attendu qu'aux termes de l'article 15 de code de procédure civile : « l'action malicieuse, vexatoire ou qui n'est pas fondée sur des moyens sérieux constitue une faute ouvrant droit à réparation... » ; Attendu que l'intimé réclame la somme de cent cinquante millions (150.000.000) de francs CFA à titre de réparation ; Mais attendu que la somme demandée est exagérée quant à son quantum ; que la somme de cinq millions (5.000.000) de francs CFA constitue une juste réparation du préjudice subi au titre de l'article 15 sus visé ;
SUR LES FRAIS EXPOSES
Attendu qu'en application de l'article 6, nouveau de la loi 10/93/ADP 197 mai 1993 portant organisation judiciaire au Y A, la partie peut être condamnée par le juge à payer à la demande de l'autre partie, la somme qu'il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; Attendu que la société sollicite le paiement de la somme totale de vingt millions six cent soixante onze mille deux cent soixante un (25.671.261) francs CFA comprenant les honoraires d'appel de quatre cents mille (400.000) francs CFA ainsi que les honoraires additionnels représentant 15% du montant de la créance réclamée soit vingt cinq millions deux cent vingt un mille deux cent soixante un (25.221.261) francs ; Attendu qu'il est incontestable que la requérante a engagé des frais d'avocats pour assurer sa défense ; qu'au regard des dispositions de l'article 33 du barème indicatif des frais et honoraires des avocats du 20 décembre 2003, il ne peut lui être alloué que la somme de quatre
cents mille (400.000) francs CFA ; Attendu que les honoraires additionnels tels qu'évalués par la société TRADESCA ne peuvent être compris dans les frais exposés par elle en cours d'instance ; qu'il y a lieu par conséquent de la débouter du surplus de sa demande ; Attendu que de ce qui précède il convient de condamner la SITACI, partie perdante, à payer à la société TRADESCA la somme de quatre cents mille (400.000) francs au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement en dernier ressort ;
Déclare l'appel recevable ; Confirme le jugement attaqué Condamne la SITACI à payer à la société TRADESCA la somme de cinq millions (5.000.000) de francs CFA à titre de dommages et intérêts en application de l'article 15 du code de procédure civile ; Condamne Z aux dépens ; La condamne à payer à TRADESCA la somme de quatre cents mille (400.000) francs CFA au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de ouagadougou
Numéro d'arrêt : 045
Date de la décision : 20/06/2008

Analyses

PROCÉDURE SIMPLIFIÉE DE RECOUVREMENT DES CRÉANCES - INJONCTION DE PAYER - DÉCISION D'INJONCTION DE PAYER RENDUE SUR OPPOSITION - APPEL - RECEVABILITÉ (OUI) EXCEPTION D'INCOMPÉTENCE TERRITORIALE - CONDITIONS GÉNÉRALES DE VENTE - CLAUSE ATTRIBUTIVE DE JURIDICTION - CLAUSE STIPULÉE DANS L'INTÉRÊT DU VENDEUR - CONVENTION DE BRUXELLES - RENONCIATION AU BÉNÉFICE DE LA CLAUSE - DROIT FRANÇAIS APPLICABLE - ARTICLE 1406 CPC FRANÇAIS - RÈGLES BURKINABÈS DE COMPÉTENCE TERRITORIALE - ARTICLE 988 DU CODE DES PERSONNES - TRIBUNAL DU DOMICILE DU DÉFENDEUR - COMPÉTENCE DU TGI DE OUAGADOUGOU (OUI) - DEMANDE DE SURSIS À STATUER - REJET - CONFIRMATION DU JUGEMENT CONTESTATION DE LA CRÉANCE - CONTRAT DE VENTE COMMERCIALE - EXISTENCE DE PREUVES (OUI) - LIVRAISON DE LA COMMANDE - PAIEMENT PARTIEL - CRÉANCE - ORIGINE CONTRACTUELLE - CRÉANCE CERTAINE, LIQUIDE ET EXIGIBLE - VIOLATION DES ARTICLES 1 ET 2 AUPSRVE (NON) - CONFIRMATION DU JUGEMENT - APPEL INCIDENT - DEMANDE EN PAIEMENT DE DOMMAGES-INTÉRÊTS - DÉFAUT DE PAIEMENT À L'ÉCHÉANCE - ARTICLE 263 AUDCG - DÉFAUT DE PREUVE D'UN PRÉJUDICE DISTINCT DU RETARD - DEMANDE ADDITIONNELLE - PROCÉDURE ABUSIVE - DOMMAGES-INTÉRÊTS (OUI)


Références :

Ohada.com/Unida


Origine de la décision
Date de l'import : 22/11/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;bf;cour.appel.ouagadougou;arret;2008-06-20;045 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award