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29/10/2021 | ANDORRE | N°156-2021

Andorre | Andorre, Tribunal supérieur de justice, 29 octobre 2021, 156-2021


TRIBUNAL SUPÉRIEUR DE JUSTICE
Chambre civile

TSJC.- 0000039/2019
ORIGINE : 5100212/2013 - 00
NIG : 5300542120150000822


PARTIES

Appelant : B, SA
Représentant : Mme CCE
Avocat : M. JJR

Intimé : Mme MTB
Représentant : Mme HDB
Avocat : M. AFP


COMPOSITION DU TRIBUNAL
Président : M. VINCENT ANIERE
Magistrats : M. CARLES CRUZ MORATONES
Mme ALEXANDRA CORNELLA SOLÀ



OBJET : Résolution de contrat. Héritage dérivé d’un contrat de mariage. Clause pénale


JUGEMENT 156-2021

>Andorre-la-Vieille, le 29 octobre 2021.

Au nom du peuple andorran.

La Chambre civile du Tribunal supérieur de justice d'Andorre a entendu l'appel contre ...

TRIBUNAL SUPÉRIEUR DE JUSTICE
Chambre civile

TSJC.- 0000039/2019
ORIGINE : 5100212/2013 - 00
NIG : 5300542120150000822

PARTIES

Appelant : B, SA
Représentant : Mme CCE
Avocat : M. JJR

Intimé : Mme MTB
Représentant : Mme HDB
Avocat : M. AFP

COMPOSITION DU TRIBUNAL
Président : M. VINCENT ANIERE
Magistrats : M. CARLES CRUZ MORATONES
Mme ALEXANDRA CORNELLA SOLÀ

OBJET : Résolution de contrat. Héritage dérivé d’un contrat de mariage. Clause pénale

JUGEMENT 156-2021

Andorre-la-Vieille, le 29 octobre 2021.

Au nom du peuple andorran.

La Chambre civile du Tribunal supérieur de justice d'Andorre a entendu l'appel contre la procédure susmentionnée.

Dans le traitement de cette procédure, les prescriptions légales ont été respectées, et Mme ALEXANDRA CORNELLA SOLÀ, en tant que juge rapporteur, exprime l'avis du Tribunal.

EXPOSÉ DES FAITS

1) Le 1ᵉʳ avril 2019, la représentation procédurale de la société B, SA a déposé une demande de réclamation de somme, par la procédure civile ordinaire, contre Mme MTB, dont le contenu était le suivant :

1.- La déclaration de résolution du contrat de gestion hôtelière en date du 17 septembre 2004, avec effet au 1ᵉʳ février 2009, du fait du manquement de Madame MTB à ses obligations.

2.- La condamnation de Madame MTB à verser la société B, SA :
a) le montant de 111 916,43 €, au titre des rémunérations échues et impayées pour la gestion jusqu'au 31 janvier 2009 ;
b) le montant de 3 132 011,35 € de dommages et intérêts pour rupture de contrat.
c) les intérêts de retard en vigueur en Espagne en application de l'article 5 de la Loi 3/2004 du 29 décembre et, à titre subsidiaire, les intérêts légaux en vigueur en Andorre, des montants détaillés dans les sections a) et b), selon ce qui suit :
i) concernant le montant de 35 932 €, à titre de rémunération de base pour les mois de juin, juillet, août et septembre 2008, les intérêts à compter du 11 décembre 2008 ;
ii) concernant le montant de 2 052,03 €, à titre de rémunération participative du trimestre correspondant aux mois de juillet, août et septembre 2008, les intérêts à compter du 11 décembre 2008 ;
iii) concernant le montant de 73 932,40 € au titre de rémunération de base et participative jusqu'au 31 janvier 2009, les intérêts à compter de la réponse jusqu’à la demande ;
iv) concernant le montant de 3 132 011,35 €, au titre des dommages et intérêts pour rupture de contrat, des intérêts à compter de la réponse à la mise en demeure jusqu'au paiement effectif ;

3.- La condamnation du défendeur à verser les frais de procédure du présent procès, y compris les frais de justice, les honoraires d'avocat, d’avoué et des experts qui ont dû intervenir dans le procès.

2) Le 1ᵉʳ juillet 2009, la représentation procédurale de Mme MTB a répondu à la demande contradictoire et a déposé une demande reconventionnelle dont le contenu est le suivant :

Premièrement.- que la nullité et l'inefficacité soient déclarées et, à titre subsidiaire, que les contrats de gestion de l'Hôtel PANORAMA du 17 septembre 2004, des hôtels CENTRE TERMAL ROC BLANC et de l'Hôtel Balneari TERMES DE MONTBRIÓ, et des AUTRES contrats de gestion de biens passés par Madame Assumpta BABOT FONT au profit de la société B, SA soient annulés ex tunc. À titre encore plus subsidiaire, si la nullité n'était pas prononcée et s’ils n’étaient pas annulés, que le manquement grave par la société B, SA aux contrats de gestion soient déclarés et dans les deux cas :

Deuxièmement.- condamner la société PRAT DE LA MOLA, SA à verser à Mme MTB :

1.- Tout ce qui a été perçu par la société B, SA en raison et à l'occasion desdits contrats de gestion, depuis le jour de leur conclusion, et avant s'ils ont eu des effets antérieurement, jusqu'au moment de l'exécution du Jugement, avec des intérêts légaux du jour de l'encaissement de chaque montant résultant de l’administration de la preuve et notamment et non limitativement :

a) La rémunération de base ;
b) La rémunération participative ;
c) Toute autre rémunération quelle que soit sa dénomination ;
d) Les sommes que B, SA a perçu à titre de services, salaires, frais, encaissées à Madame Assumpta BABOT FONT et MTB alors qu’elles étaient à sa charge et résultent de l’administration de la preuve et notamment des concepts de « commercialisation » et d’« administration », les salaires, les charges sociales et salariales, les annexes et les compléments de M. MANZANERO et Mme JUAREGUIZAR et M. MARCO « directeur des directeurs d'Hôtel », du responsable des achats et du personnel restant sous les ordres de la société de gestion.
e) Les sommes versées suite aux relances, commissions, etc. et autres titres par les fournisseurs de biens, services et clients des hôtels, que la société B, SA se serait appropriées.
f) Les services, consommations, avantages en espèces et l'équivalent monétaire des avantages en nature qui auraient résulté des administrateurs (famille TORM/ARMENGOL), et du personnel de PRAT DE LA MOLA, SA, payés par les Hôtels, parmi lesquels notamment et de façon non limitative Mme Maria José PUIGSUBIRÀ et son mari, M. PLA et autres.
g) Les sommes que la société B, SA aurait reçues et/ou dont elle se serait appropriée provenant de la gestion des hôtels et des comptes bancaires de Madame Assumpta BABOT FONT pour payer les sommes provenant des contrats de location des appartements de l'immeuble situé au numéro 65, « Avinguda Carlemany », à Escaldes.
h) Toutes les sommes reçues, affectées, aliénées de quelque manière que ce soit par la société B, SA et des tiers et dont le bénéfice aurait été facilité par B, SA, à quelques titres que ce soit, de la gestion des hôtels, des biens mobiliers et immobiliers et des comptes bancaires de Madame Assumpta BABOT FONT.
i) Toutes les sommes d'argent qui auraient été imputées sur les comptes bancaires spécifiques de l'Hôtel PANORAMA et à son exploitation, qui auraient été destinées au paiement d'autres obligations existantes ou contractées par la société B, SA elle-même.

2.- Les dommages et préjudices causés à l'usufruitière, Madame Assumpta BABOT FONT, aux trois hôtels et autres biens mobiliers et immobiliers, au fonds de commerce et droits incorporels, et à Madame MTB, qui résulteraient de l’administration de la preuve et notamment et non limitativement :

a) les frais de remise en état, de remplacement, de mise aux normes de tous les immeubles et biens ayant subi des dégradations, des privations de jouissance, des obsolescences et des pertes de valeur du fait de l'absence et/ou de l'insuffisance de leur entretien par la société B SA ;
b) les dommages et intérêts résultant de la perte d'image, de catégorie et de clientèle des hôtels,
c) les dommages et intérêts résultant de l'appropriation ou du détournement de clientèle parmi ceux figurant dans les pièces n° 9 jointes au présent dossier,
d) les dommages et intérêts résultant des manquements légaux, sociaux et fiscaux de B, SA consistant en des régularisations, pénalités, autres indemnités versées et devant être payées à l'avenir.

Troisièmement.- Déclarer la nullité et l'inefficacité et subsidiairement annuler ex tunc les contrats de location des cinq appartements situés au numéro 65, « Avinguda Carlemany », à Escaldes-Engordany. À titre subsidiaire, si la nullité n'a pas été prononcée, déclarer le contrat résolu avec effet dès le début de l'exécution du contrat du fait que B, SA a gravement manqué au contrat depuis le début, et, en tout cas, le déclarer fini au moment du décès de la locataire.

Condamner la société B, SA à verser à Mme MTB les sommes suivantes :

1) Toutes les sommes perçues par B, SA depuis le début de chacun des contrats pour :

a) loyers perçus, majorations, augmentations et intérêts,
b) frais de la communauté,
c) taxes à la charge de Mme Assumpta BABOT FONT,
d) assurances à la charge de la propriété et de la locataire,
e) pénalités, dont l’auto-perception de 53 174,44 €,

2) À titre subsidiaire du jugement 1) a), dans le cas où la nullité ou la résolution des contrats ne serait pas prononcée, la peine sous 1) a) devait consister d’une part en la restitution des revenus perçus pendant la durée des travaux sur les appartements, et pour le délai après lequel la société B, SA s'est engagée devant la Batllia à « retirer les travailleurs » des appartements et, d'autre part, en la restitution de 66% des loyers abusifs perçus pour le temps pendant lequel la locataire a effectivement bénéficié des appartements.

3) Toutes les sommes que Mme Assumpta BABOT FONT aurait versées à la société B, SA ou directement aux constructeurs, architectes, industriels, pour les travaux effectués dans les appartements, les travaux de rénovation en 2003, la démolition des rénovations à partir des Jugements dans le cadre de l’affaire B-1615-5/2003, et les travaux de remplacement ou de remise en état après la démolition, ainsi que le coût du mobilier, les contrats d’approvisionnement en fluides et assimilés, qui seraient vérifiés en période d’administration de la preuve lorsque cette partie aurait pu avoir accès aux comptes.

4) L'ensemble des sommes versées par Madame Assumpta BABOT FONT à la société B ou directement à un professionnel du droit pour les frais de procédure de l'affaire B-1615-5/2003, et pour les frais imposés à la société B, SA dans la même affaire.

5) Tous les préjudices que Madame Assumpta BABOT FONT a subis de son vivant et Madame MTB ultérieurement et qui résulteront de la période d’administration de la preuve alors que cette partie aurait pu avoir accès aux comptes.

Quatrièmement.- Condamner la société B, SA à verser à Madame MTB toutes les sommes qu'elle aurait perçues et/ou qu'elle se serait appropriées, provenant de Madame Assumpta BABOT FONT, de ses comptes bancaires, du patrimoine successoral du père et de la mère décédés, qu'ils trouvent ou non leur origine, cause ou prétexte dans les contrats qui font l'objet de la présente affaire et dans leur déroulement, et notamment toutes les gratifications, les primes et les dons que la société aurait reçus directement ou par l'intermédiaire de ses administrateurs.

Cinquièmement.- Condamner la société B, SA à payer les intérêts de toutes les sommes auxquelles elle serait condamnée, à compter du jour de la perception de l'argent à rembourser, et du jour où s'est produite la cause qui oblige B, SA à indemniser, au taux du découvert bancaire, et subsidiairement, au taux légal.

Sixièmement.- Condamner la société B, SA à payer l'intégralité des frais, y compris les honoraires d'avocat, avoué et experts. »

3) Une fois les procédures en réplique et duplique terminées, les preuves déclarées pertinentes pratiquées et les procédures de conclusion respectives formulées, le tribunal de juges, le 11 décembre 2018, a rendu un Jugement dont le dispositif établit :
« A DÉCIDÉ :

PREMIÈREMENT.- D’admettre très partiellement la demande présentée par la représentation procédurale de la société B contre Mme MTB et de condamner la défenderesse à lui verser immédiatement la somme de 96 208 €, à majorer de l'intérêt légal en vigueur en Principauté à compter de la présente décision de justice.

DEUXIÈMEMENT.- D’estimer très partiellement la demande reconventionnelle présentée par la représentation procédurale de Mme MTB contre la société B et de condamner le défendeur reconventionnel à lui verser immédiatement la somme de 65 259,54 €, montant à majorer de l'intérêt légal en vigueur en Principauté à compter de 23 septembre 2009. Après exécution de la compensation de dettes correspondante, il en résulte un solde créditeur en faveur de la société B de 30 948,46 €, montant que, après régularisation par application des intérêts fixés, Mme MTB devra satisfaire à la société demanderesse.

4) Les deux parties au litige ont interjeté appel contre le jugement d'instance. Concrètement, la représentation procédurale de la société B, SA a formulé ses conclusions d'appel le 16 avril 2019, du fait de ne pas être d'accord avec le montant de la rémunération générée à partir du 23 septembre 2009 et les intérêts à appliquer sur ce montant de rémunération due, ni avec le rejet de l'indemnité pour rupture de contrat, et en demandant la rétractation du jugement d'instance, l'estimation de sa demande principale et la condamnation de Mme MTB à satisfaire les sommes suivantes à la société B, SA :

a) la somme de 111 916,43 €, au titre des arriérés de rémunération impayés de la direction jusqu'au 31 janvier 2009 ;
b) la somme de 3 132 011,35 €, et à titre subsidiaire, la somme de 3 118 289 € fixée par l'expert, à titre de dommages et intérêts pour rupture de contrat ;
c) les intérêts moratoires en vigueur en Espagne en application de l'article 5 de la loi 3/2004 du 29 décembre et, en plus, les intérêts légaux en vigueur en Andorre, des sommes détaillées aux sections a) et b), selon le détail suivant :
i) sur le montant de 35 932 €, à titre de rémunération de base pour les mois de juin, juillet, août et septembre 2008, les intérêts à compter du 11 décembre 2008 ;
ii) concernant la somme de 2 052,03 €, à titre de rémunération participative du trimestre correspondant aux mois de juillet, août et septembre 2008, les intérêts à compter du 11 décembre 2008 ;
iii) concernant la somme de 73 932,40 € à titre de rémunération de base et participative jusqu'au 31 janvier 2009, les intérêts à partir de la réponse à la demande ;
iv) concernant la somme fixée à titre de dommages et intérêts pour rupture de contrat, les intérêts depuis la réponse à la demande jusqu'au paiement effectif ;

Subsidiairement, en cas de condamnation au paiement des sommes fixées par l'expert du CTA, qu’elle soit condamnée au paiement des intérêts de retard en vigueur en Espagne et, à titre subsidiaire, de l'intérêt légal en vigueur en Andorre à compter de la réponse à la demande et, plus subsidiairement, du caractère définitif de la peine.

Imposer les frais de procédure du présent recours à la partie appelante, y compris les honoraires d'avocat et d’avoué à créditer pendant la période d'exécution du jugement, et, à titre subsidiaire, ne prononcer aucune imposition spéciale des dépens.

De son côté, la représentation procédurale de Mme MTB, qui a formulé ses conclusions d'appel le même jour, le 16 avril, considère sa condamnation à payer la somme de 96 208 € à la demanderesse comme erronée, du fait de comprendre que le contrat de gestion hôtelière était nul depuis le début et que, subsidiairement, la partie adverse n'a à aucun moment agi de bonne foi, elle estime que la déclaration de nullité ou l'annulation des contrats de gestion de l'Hôtel Panorama, du Roc Blanc et des Termes de Montbrió est appropriée, les deux premiers étant affectés par le prétendu vice de volonté, le recours en annulation exercé n'ayant pas non plus expiré, les arguments relatifs au contrat de gestion hôtelière s'appliquant également à l'établissement hôtelier Termes de Montbrió, qu'elle estime affecté d'un manquement grave au contrat par la société défenderesse. Elle considère en outre que les contrats affectant les 5 appartements de l'Av. Carlemany sont nuls et entend subsidiairement que les contrats affectant 3 des appartements ont été exécutés dans des conditions illégales et abusives par la société défenderesse, sa cliente ayant subi un préjudice financier du fait de la mauvaise gestion de la société concernant l'occupation des appartements inachevés imposés en location à Mme BABOT, et réclame également le remboursement des travaux payés par feu Madame BABOT sur les appartements loués, ainsi que d'autres paiements et indemnités en découlant, tout en demandant la révocation du Jugement dans les prononcés contenus dans sa demande, dont elle demande qu’elle soit admise dans son intégralité.

En outre, elle demande la mise en place des preuves estimées par Arrêt de cette Chambre le 3 septembre 2019, et sur laquelle les deux parties ont formulé les prétentions pertinentes, la représentation procédurale de la société B, SA demandant dans le cinquième fait de son exposé la mise en place d'une preuve pour une meilleure diligence, rejetée par Arrêt de cette Chambre le 18 mai 2021.

5) La représentation procédurale de Mme MTB s'est opposée à l'appel de la société B, SA et demande à son égard la ratification du jugement d'instance, avec tous les prononcés qui y sont exprimés, et sa condamnation au paiement des frais qui découlent de la présente procédure, en incluant expressément les honoraires d'avocat et d’avoué.

De son côté, la représentation procédurale de la société B, SA demande également le rejet de l'appel formé par la partie adverse, et qu'un jugement soit prononcé, la condamnant à satisfaire les sommes indiquées dans son mémoire d'appel, lui imposant les frais engendrés à ce stade, y compris les honoraires d'avocat et d’avoué.

Elle exprime également son opposition à la pratique de la preuve demandée par la partie adverse à ce stade.

FONDEMENTS DE DROIT

Premièrement.- Afin de parvenir à une systématisation efficace des questions soumises au recours par les parties au litige et de pouvoir y donner une réponse large, nous les diviserons en cinq grands blocs : I) interprétation du contrat de mariage de 1975 et conséquences par rapport au contrat contesté ; II) nature juridique du contrat de gestion hôtelière, III) nullité ou annulation dudit contrat ; IV) résiliation du contrat pour le manquement invoqué à l'obligation de paiement V) les baux de location des cinq appartements loués par la société demanderesse à feu Mme BABOT pour le personnel de l'Hôtel Panorama.

Deuxièmement.- I.- INTERPRÉTATION DU CONTRAT DE MARIAGE PASSÉ LE 20 JANVIER 1975 et conséquences par rapport au contrat contesté :

Le 20 janvier 1975, les époux M. Domenec TORM BABOT et Assumpta BABOT FONT, ainsi que les époux M. Josep Maria CASES RIBALTA et MTB ont passé devant le Notaire de la Principauté de l'époque, M. Matias ALEIX SANTURÉ, sous le numéro 76 de son protocole, un contrat de mariage relatif au mariage CASES-TORM qui avait déjà été célébré le 22 octobre 1964 à Poblet (Lleida-Espagne), tout en faisant dans sa première section « donation et succession universelle pure, simple, parfaite et irrévocable, dit entre vifs, en faveur de leur fille Assumpta TORM BABOT, de tous leurs biens et droits mobiliers et immobiliers, présents et futurs avec les accords suivants :

« a) Les donateurs ou le survivant des deux, conservant le veuvage, se réservent, leur vie durant, l'entier et intégral usufruit et administration desdits biens et droits donnés, sans avoir à faire d'inventaire, avec l’obligation qu’ils s’imposent à eux-mêmes, de subvenir aux besoins, qu’ils soient malades ou en bonne santé et tant que les uns et les autres travaillent pour le bénéfice de la maison, desdits époux et de la famille susmentionnés, ainsi que de payer les taxes affectant ces biens.

b) Les donateurs, associés de fait à la constitution du patrimoine qu’ils possèdent actuellement, souhaitent que tous leurs biens et droits respectifs, mobiliers et immobiliers présents et futurs soient communs à tous les deux et, à la mort de l'un d'entre eux, restent au profit du survivant qui conservera le veuvage, excepté toutefois tout droit légitime au profit de leurs enfants, avec la possibilité de les vendre, en disposer ou les taxer librement.

c) Les donateurs, conjointement ou séparément lorsqu'ils seront veufs, se réservent le droit de pouvoir vendre, grever ou donner en gage tout ou partie de tous et chacun des biens immobiliers qu'ils possèdent et pourraient acquérir, ainsi que de disposer librement de l'argent, des comptes bancaires et d'épargne à leur nom.

d) Les donateurs se réservent également le droit de passer un testament et de disposer librement de la somme de cent mille pesetas (100 000 pts), qui restera en faveur du survivant, si le prédécédé n’en dispose pas.

e) Les donateurs disposent, en faveur de leur fille Emilia TORM BABOT, la dot ou legs de la moitié de tous leurs biens propres, mobiliers et immobiliers, créances et parts, existant lorsque les deux donateurs disparaitront, biens dont disposera alors la légataire de son libre arbitre. Au cas où elle décèderait avant sans en avoir disposé, ils appellent leurs enfants, à parts égales, avec une substitution vulgaire en faveur des petits-enfants.

f) Les donateurs conjointement ou à défaut, le survivant qui a conservé le veuvage, se réservent le droit de désigner par testament les biens qui feront partie du legs équivalant à la moitié de leur patrimoine pour effectuer la remise correspondante. S'ils décédaient sans le faire, ils désignent d’ores et déjà exécuteur-comptable-distributeur, le Notaire désigné par leur fille héritière Assumpta TORM BABOT, avec les pouvoirs les plus étendus, recourant s'il l'estime nécessaire à des experts, qui établira deux lots équilibrés avec les biens de l'héritage, et s'il y a lieu, chaque lot sera tiré au sort.

Cette donation et cet héritage universel sont acceptés avec reconnaissance par la donataire qui pourra en disposer librement après le décès de l'un ou l'autre donateur, dans le respect de la dot de sa sœur Emília TORM BABOT. »

Le reste des accords contenus dans le contrat de mariage se réfère à la dot apportée par M. CASES en faveur de sa belle-famille et de son épouse (Deuxième) ; à la constitution d'un usufruit et d'un droit d'administration des biens du prédécédé par le conjoint veuf survivant des époux CASES-TORM, en conservant toujours le veuvage et qu'ils aient ou non eu une succession (Troisième); à la donation réciproque entre eux de la somme de 100.000 pts (Quatrième) ; à la promesse de nommer héritier un fils ou une fille de son mariage et à la répartition subsidiaire du patrimoine parmi tous les enfants (Cinquième); et la soumission expresse à la décision de deux proches parents pour la résolution de tout litige qui pourrait exister (Sixième).

Enfin, le dernier pacte dit littéralement : « Les parties louent, approuvent et ratifient le présent contrat de mariage ainsi que tous les pactes qui y sont stipulés, en s’engageant à les respecter et à les observer, chacun d'eux pour la partie qui lui appartient et à ne les révoquer pour quelques causes que ce soit avec un amendement de dommages-intérêts et paiement des frais ».

Troisièmement.- En ce qui concerne le contrat de mariage susmentionné, les parties au litige discutent de la question de savoir si les époux TORM BABOT ont fait un héritage simple ou cumulatif par rapport à leur fille Maria Assumpta, dans la mesure où ce point affecte le contrat de gestion hôtelière qui fait l'objet du présent dossier et passé par feu Mme BABOT et la société B, SA, comme on le verra plus loin.

À cet égard, le Tribunal considère – en effectuant une interprétation littérale et fragmentée de son contenu – qu'avec le contrat de mariage, MM. TORM et BABOT ont constitué un usufruit universel viager sur l'ensemble de leurs biens et droits présents et futurs, en leur faveur, avec la présente donation de la nue-propriété à leur fille Maria Assumpta, les époux susmentionnés TORM BABOT se réservant également les pleins pouvoirs de disposition et d'administration sur ceux-ci.

La représentation procédurale de Mme MTB partage ce critère, étant entendu qu'à partir du moment de son attribution, elle était la titulaire de la nue-propriété des biens faisant l'objet de la donation et de l'héritage, alors qu'à partir de ce même moment, ses parents étaient usufruitiers.

Au contraire, la société B, SA considère que la preuve d'instance étaye la qualité simple de l'héritage constitué dans cet acte par les héritiers et, par conséquent, que Madame TORM BABOT n'a reçu les biens objet de la donation et de l'héritage qu’après la mort de ses parents, en se subrogeant dans la position du dernier d'entre eux par rapport à ces derniers. Elle considère, d'une part, que Mme BABOT FONT elle-même met en évidence dans l’exposé de réponse à la demande formulée dans le cadre de l’affaire 0266-3/2004, jointe à la présente affaire, et qui découle également du fait que les deux époux ont toujours agi en tant que propriétaires dans tous les contrats et actes publics passés après 1975, sans que personne s'en plaigne, pas même Mme Maria Assumpta TORM.

Concernant l'existence d’accords relatifs à la réserve en faveur des héritiers de l'usufruit et de l'administration des biens faisant l’objet de la succession (première convention a) et du pouvoir de vendre, de grever ou de créer un gage sur les biens immobiliers qu’ils possédaient et pourraient acquérir dans le futur (premier pacte c), nous pourrions certainement conclure que nous sommes face à un héritage cumulatif en faveur de Mme MTB puisqu’il n’échappe à personne que la réserve d'usufruit et le pouvoir d'en disposer accompagnaient habituellement ce type de succession, dans la mesure où elle comportait l'acquisition immédiate de la propriété des biens qui en font l'objet au profit de l'héritier ou du donataire, ce qui est à l'origine des réserves de la part de l'héritier ou du donateur.

Cependant, si le contrat de mariage analysé contient d'autres accords dont semble découler la volonté des héritiers de conserver la propriété de leurs biens jusqu'au décès du dernier des deux, donnant lieu à une succession simple, dans le sens où elle attribue uniquement la qualité d'héritier sans rien transmettre de présent, le décès de l'héritier étant nécessaire à l'acquisition du bien, il convient que la Chambre détermine le type d'héritage souhaité par les héritiers. Et, à ces fins, il faudra déterminer leur véritable volonté, qui sera toujours celle qui prévaut, sans qu’elle doive nécessairement coïncider avec la littéralité de tout ou partie du contenu du document analysé.

À cet égard, les accords que les héritiers donateurs ont imposés en relation avec la transmission de leurs biens à l'héritière (paragraphes a), b) et c) du premier point, tendent à maintenir la propriété des biens en faveur des époux ou héritiers jusqu'au décès du dernier d'entre eux : à noter que dans les paragraphes a) et c) non seulement ils se réservent l'usufruit, l'administration et les pouvoirs particuliers de disposition sur eux-mêmes, mais dans le paragraphe b), ils mettent également en évidence leur volonté qu'en cas de décès de l'un d'eux, le survivant conservera la propriété et pourra librement en disposer, tout en conservant le veuvage et en sauvegardant tous droits légitimes en faveur des enfants.

Autrement dit, malgré l'octroi de l'héritage et la nomination de leur fille Maria Assumpta comme héritière, les héritiers ont voulu se réserver la propriété de leur patrimoine jusqu'au décès de l'un et de l'autre.

Ce qui implique que l'acquisition de la propriété des biens objet de la succession par madame Maria Assumpta TORM ne pouvait intervenir qu'au décès, en l'occurrence, de sa mère, puisqu'elle a été la dernière à décéder, le 20 septembre 2008. Conclusion qui est ratifiée par :

Tout d'abord, l'acceptation par madame MTB de la donation et la succession universelle qui est indiquée dans le contrat et où il est stipulé textuellement « Cette donation et succession universelle est acceptée avec reconnaissance par la donataire, qui pourra librement en disposer après le décès de l'un et de l'autre donateur, en respectant la dot de sa sœur Emilia TORM BABOT ». À noter qu'il est à nouveau fait référence au fait que l'héritière ne peut disposer des biens faisant l'objet de la succession qu'au décès des donateurs.

En second lieu, les déclarations faites par Madame Assumpta BABOT FONT par l'intermédiaire de sa représentation légale dans le cadre de l'affaire 0266-3/2004, où elle a consigné expressément que son intention et celle de son mari en octroyant l'héritage était qu'à la mort des deux, la moitié de leur patrimoine reviendrait à chaque fille, confirme également que telle était la volonté des donateurs et héritiers. Il ne fait aucun doute que madame BABOT savait pertinemment qu'au décès de son époux, le patrimoine devenait sa propriété intégrale, dans la mesure où la volonté des époux était que les biens objet de la donation et de l'héritage ne reviennent pas à la donataire et héritière tant qu’ils ne seraient pas tous les deux décédés.

À cet égard, et pour éviter des soupçons qui pourraient jeter un doute sur la véracité des déclarations que Madame BABOT a faites par l'intermédiaire de son avocat, il convient de souligner que Madame BABOT avait son propre avocat et que celui-ci agissait en toute indépendance vis-à-vis de ses filles, les sœurs TORM, comme Mme MTB l'a expressément reconnu.

Troisièmement, il n'est pas inutile de rappeler qu'il a également été prouvé que les deux époux, dans les nombreux actes publics passés après 1975 et se référant à leur patrimoine, agissaient en qualité de propriétaires, sans que personne ne remette jamais cette qualité en cause.

Enfin, il faut également démontrer que les accords contenus dans le contrat ont été expressément acceptés par toutes les parties qui les ont établis. On se souvient que la dernière section intitulée « Enfin » se lit littéralement : « Les parties louent, approuvent et ratifient ce contrat de mariage ainsi que tous les accords qui y sont stipulés, en s’engageant à les respecter et à les observer, chacune d'elles pour ce qui lui appartient et de ne les révoquer sous aucun prétexte avec un amendement concernant les dommages-intérêts et le paiement des frais ». Et, également comme argument d’appui, il convient de se référer à ce que dans des cas similaires dans lesquels les héritiers et les donateurs se réservent non seulement l'usufruit sur tous leurs biens, mais également les pouvoirs de disposition et d'administration sur eux, en dénuant presque entièrement de contenu le droit du nu-propriétaire, qui ne pourra en disposer librement jusqu'à sa mort, la doctrine des pays de notre environnement immédiat considère que l'interprétation qu'il faut en faire est qu'il s'agit d'une donation à cause de mort, vu qu’elle ne peut prendre effet qu'au décès des donateurs. Thèse qui ratifie que le contrat de mariage en l’espèce établit un héritage simple, c'est-à-dire que l'héritière acquiert les biens au décès des héritiers et, par conséquent, sur la base des règles qui régissent la succession.

De tout ce qui précède, la Chambre conclut qu'en l'espèce, feux les époux MM. TORM-BABOT par le contrat de mariage passé le 20 janvier 1975, ont effectué une succession simple en faveur de Mme Maria Assumpta TORM, qui, au décès des deux parents, obtiendrait la propriété des biens qui lui correspondaient en vertu de celle-ci.

En conséquence, il y a lieu de modifier ce point du Jugement d'instance, en ce sens que les époux aujourd'hui décédés, M. et Mme TORM-BABOT, par le contrat de mariage passé le 20 janvier 1975, ont effectué une succession simple au profit de leur fille MTB, sans cependant que cette modification ait une efficacité révocable, du fait qu’elle n'affecte pas – comme nous le verrons – le contenu du dispositif de la résolution d'instance.

Au contraire, et comme nous l’avons avancé précédemment, ce changement de critère par rapport à celui soutenu par le Jugement d'instance, a un impact direct sur le contrat de gestion hôtelière, puisque dans ce cas, madame BABOT, en le signant, aurait agi en tant que propriétaire de l'Hôtel Panorama – comme dans bien d'autres actes liés à d'autres biens, qualité que personne n’a à aucun moment contesté – et non comme usufruitière.

Compte tenu de la qualité de propriétaire de Madame BABOT, il ne conviendra pas d’effectuer de prononcé par rapport aux questions soulevées par la société de gestion concernant sa qualité d'usufruitière.

Quatrièmement.- II.- NATURE JURIDIQUE DU CONTRAT DE GESTION HÔTELIÈRE relative à l'Hôtel Panorama et conséquences qui en découlent :

Le contrat de gestion hôtelière objet de cette procédure date du 17 septembre 2004 et a été passé entre feu Mme Assumpta BABOT FONT, d'une part, et la société B, SA, d'autre part.

Elle avait pour objet la gestion exclusive de l'Hôtel Panorama, comprenant : sa direction, son contrôle et son exploitation, l'organisation et le contrôle de la gestion sociale et comptable, la gestion technique et ses activités publicitaires et de promotion, la contractualisation des services et des fournitures pour son développement, la direction technique et la formation de tout le personnel, ainsi que la direction technique de tous les travaux de rénovation, réparations et autre nouveauté pouvant être réalisée.

Dans la clause 1.2 du contrat, celui-ci est qualifié de commercial. Concrètement, il est littéralement indiqué : « La présente relation contractuelle entre le Gérant et la Propriété possède un caractère commercial et se configure comme une relation de gestion entre deux sociétés indépendantes sans que, en aucun cas, il crée des relations de bail commercial ou industriel, ni de lien sociétaire. »

Pour autant, le jugement d'instance qualifie le contrat de mandat, considérant que le gérant exploite dans ce cas une entreprise étrangère et au profit du mandant en octroyant des pouvoirs pour que le mandataire puisse agir dans tous les domaines de gestion ordinaire de l'hôtel, et que, dans ce cas, le contrat est aussi intuitu personae, fondé sur la confiance mutuelle entre les parties contractantes.

À cet égard, la Chambre considère que le contrat de gestion hôtelière est un contrat à caractère commercial, et ce, malgré la représentation légale de la société B, SA, qui semble changer ses critères par rapport à celui-ci. En effet, bien que dans ses conclusions d'appel, elle insiste d'abord sur le fait que le contrat doit être considéré comme étant de nature commerciale, elle conclut finalement qu'il est de nature civile et plus proche d'un bail de services que d’un bail de mandat auquel, comme nous l'avons dit, le jugement d'instance renvoie et est partagé par la représentation procédurale de Mme MTB.

Caractère commercial qui découle du contenu du contrat lui-même – qui est consensuel, synallagmatique et atypique – tant par son objet que par le caractère d'entrepreneure de Mme BABOT – qui était encore impliquée dans la gestion de l'établissement hôtelier et de fait, dans le contrat, il est stipulé que « la propriété a décidé de renforcer la direction et l'administration de l'exploitation de l'Hôtel » .... (point 3. Section "ils déclarent") ; et, entre autres, à l'article 4.25, « que la propriété et la société de gestion agiront et collaboreront fidèlement pour obtenir les meilleurs résultats possibles dans le fonctionnement de l'Hôtel », et à l’article 4.18 « que la société de gestion doit se conformer aux instructions écrites qui lui seront expressément transmises par la propriété… ». Et, également, en raison même du caractère commercial de la société anonyme B, SA, qui, malgré le fait qu'elle n'ait changé son objet social au Registre des Sociétés que le 6 octobre pour pouvoir exploiter des établissements hôteliers (12 jours après la signature du contrat), la même société était immatriculée au Registre des Sociétés depuis le 6 septembre 1990 (f. 1336).

Contrat de gestion hôtelière dans lequel le gestionnaire agit généralement au nom et en représentation de la propriété, comme cela se produit dans le contrat analysé et qui est généralement intuitu personae, comme cela se produit également dans le contrat susmentionné, basé sur la confiance mutuelle entre les parties, malgré l'obligation de la société de gestion de rendre des comptes à la Propriété, contenue dans la clause 4.17 du contrat, et qui constitue également une preuve de sa nature commerciale.

En conséquence, il conviendra de modifier également ce point contenu dans la résolution d'instance, sans que cette modification ait d'effet révocatoire, sans préjudice cependant des effets qu'elle produira par rapport au contrat objet de la procédure, avec la nature simple de l'héritage, du fait que le contrat n'ait pas été résilié suite au décès de Madame BABOT.

Cinquièmement.- III.- NULLITÉ OU ANNULABILITÉ DU CONTRAT DE GESTION des Hôtels Panorama, Centre Thermal Roc Blanc et Balneari Termes de Montbrió et des autres contrats de gestion de biens qui apparaissent comme ayant été passés par Mme BABOT en faveur de la société B, SA :

Avant d'apprécier les causes de nullité ou d’annulabilité invoquées, il conviendra de déterminer si madame Maria Assumpta TORM dispose d'une action ou d'une légitimation juridique active pour contester également les contrats de gestion hôtelière passés par sa défunte mère au profit de la société défenderesse et concernant les Hôtels Roc Blanc et Termes de Montbrió. En ce qui concerne le dernier des établissements hôteliers mentionnés, il convient de préciser que la représentation procédurale de Mme TORM elle-même reconnaît dans un premier temps dans les conclusions de l'instance son manque de légitimation, bien qu'elle prétende dans un second temps qu’elle en a, et qu’elle émane de sa qualité de propriétaire dudit établissement hôtelier depuis 1975. Condition de propriétaire que – nous l’avons déjà vu – n’avait pas été atteinte lors de l'octroi du contrat de mariage passé en 1975, étant donné que son héritage était simple et non cumulatif. Par conséquent, la contestation du contrat de gestion de l'Hôtel Termes de Montbrió ne peut prospérer. En outre, en ce qui concerne le contrat de gestion hôtelière de l'Hôtel Roc Blanc, il ressort du contenu de ces documents qu'il y a eu une discussion concernant la titularité de celui-ci depuis le décès de Mme BABOT, la légitimation active de Mme Assumpta TORM ne pouvant donc être acceptée pour contester ce contrat, ni même résoudre la question de sa titularité puisqu'elle ne fait pas l'objet de cette procédure.

Dès lors, l'action en contestation du contrat de gestion hôtelière exercée par la représentation procédurale de madame TORM dans le cadre de cette cause sera limitée à l'Hôtel Panorama.

Sixièmement.- La représentation procédurale de Madame MTB fonde la nullité du contrat de gestion hôtelière avec des effets ex tunc en l'absence totale de consentement de madame Assumpta BABOT FONT lors de sa passation le 17 septembre 2004, du fait qu’elle était atteinte de la maladie d'Alzheimer, ce qui l'empêchait de savoir et de comprendre ce qu'on lui demandait de signer. Elle précise que bien que dans certains exposés de cette instance, il ait été fait référence à un défaut de consentement, le mal qui l'affectait va plus loin puisqu'il s'agit d'un défaut de volonté, du fait de ne pouvoir comprendre ce qu'elle faisait.

À cet égard, la résolution d'instance analyse les causes sur lesquelles la partie fonde sa demande (défaut de consentement, intentionnalité et existence de clauses léonines ou abusives) et considère que ce sont toutes des causes de nullité relative ou d’annulabilité, mais pas de nullité absolue. Elle considère en outre que l'action d’annulabilité serait prescrite étant donné que la date a quo doit être replacée au moment de la passation des contrats, si elle avait à ce moment-là la capacité suffisante pour le signer, contrairement à ce qu'affirme la représentation procédurale de Mme MTB.

Que ce soit pour apprécier l'existence de la nullité invoquée par la représentation procédurale de Mme TORM, ou pour la localisation temporelle de la date a quo pour le calcul de la prescription de la nullité relative appliquée par le jugement attaqué, il conviendra de procéder à l'analyse des documents médicaux contenus dans le dossier pour déterminer si Mme BABOT disposait ou non d'une capacité suffisante de passer des contrats en 2004.

Aux fins de déterminer son état mental, qui est en cause, la Chambre analysera les rapports médicaux contenus dans le dossier, mais surtout ceux effectués par les Dr Rafael BLESA et Eduardo TOLOSA SARRÓ, tous deux spécialistes en neurologie. Les deux médecins sont d'accord, tout comme son médecin traitant, le Dr Ricard TOLOSA, sur le fait qu’en août 2004 Mme BABOT souffrait d'un syndrome amnésique. Mais tandis que le Dr Eduard TOLOSA considère qu’en 2004, sa maladie l'empêchait déjà d'avoir une capacité suffisante de contracter puisque le médicament qu'elle prenait était déjà pour traiter la maladie d'Alzheimer à un stade modéré (cf. le rapport contenu aux pages 1109 à 1112 et les réponses à la preuve mise en place qui sont transcrites aux pages 2609 et 2610), le Dr Rafael BLESA, lui, dans son rapport sur le folio 187, considère qu'en août 2004 sa patiente présentait un syndrome amnésique d'évolution longue, avec une aggravation très lente et subtile, sans aucune autre affectation des fonctions cognitives, avec peu de répercussion dans les activités de la vie quotidienne et avec une capacité de jugement préservée. Il considère également que le syndrome est compatible avec le diagnostic de détérioration cognitive légère. En outre, à la page 186, en date du 3 mars 2008, il confirme le diagnostic précédent et ajoute qu'au moins jusqu'en 2005, sa capacité de jugement était suffisamment préservée pour tester et décider de la répartition de ses biens.

Malgré le fait que les deux médecins spécialistes aient une grande expérience professionnelle, en l'espèce, les règles de la saine critique conduisent la Chambre à accorder une plus grande crédibilité aux conclusions médicales du Dr BLESA car il était le médecin traitant de Mme BABOT depuis 2000 contrairement au Dr Eduard TOLOSA, qui, en réponse aux questions posées à la demande de la partie demanderesse a déclaré qu'il n'avait jamais examiné ni même rencontré Mme BABOT, ayant lui-même souligné que ce point pouvait être à l'origine des divergences de diagnostic existant entre eux.

En ce qui concerne la documentation médicale jointe par la représentation procédurale de Mme Assumpta TORM à ce stade, ainsi que l'expertise réalisée à la demande de la Batllia par le Dr Joan ESCOTER BLAVI (dans le cadre de l'affaire 1100077/2009), elle conclut (pages 96 et suiv.) que le 17 septembre 2004, Mme BABOT présentait un degré modéré de démence et qu'elle n'était pas capable de comprendre le contenu des documents signés ni à long ni à court terme. Elle considère que depuis août 2004, elle n’était pas en mesure de prendre des décisions concernant ses activités et son patrimoine. Le Dr ESCOTER lui-même, dans un rapport daté du 13 novembre 2018, complète le premier et rajoute qu’en toute évidence, Mme BABOT, à partir du moment où il existe des preuves de troubles cognitifs légers, n'était pas capable de comprendre le contenu des actes notariés ni de prendre des décisions patrimoniales complexes, et prétend qu'il y a eu une détérioration cognitive légère dès 1999, date à laquelle elle a été orientée vers le Dr BLESA.

En ce qui concerne l'appréciation des preuves qui doit être attribuée au rapport susmentionné, dont les conclusions définitives du 16 octobre 2020 existent déjà, la Chambre gardera à l'esprit que, au moins dans les prémices du rapport final, il part d'une conclusion qu’il attribue à tort au Dr BLESA, puisque celui-ci considère que les troubles cognitifs de Mme BABOT jusqu'en 2005 étaient légers – le Dr ESCOTER ayant compris que cette détérioration était modérée – qu'il n'a pas non plus ausculté ou rencontré Mme BABOT et que sa spécialité n'est pas la neurologie.

En conséquence, et comme nous l'avons dit précédemment, conformément aux critères de saine critique selon lesquels l'autorité judiciaire doit apprécier les rapports fournis dans le dossier, qu’ils proviennent d’experts ou non, en les prenant en compte conjointement et en tenant compte de leur critère, la Chambre considère toujours que le critère du Dr BLESA, en tant que médecin traitant de Mme BABOT et spécialiste en neurologie, doit prévaloir et estime que cette dernière jouissait de la capacité de contracter. Une conclusion qui s'appuie, d'une part, sur le fait que tout le monde a présupposé cette capacité – même les parties au litige actuellement – conformément au fait que la capacité est présupposée et, surtout, parce que plusieurs notaires publics qui sont intervenus dans les actes passés par Mme BABOT elle-même, ont également évalué sa capacité, la jugeant suffisante. Une évaluation qui constitue une présomption iuris tantum importante dans la mesure où celui qui l'émet, bien qu'il ne soit pas médecin, est capable de porter un jugement de valeur sur le discernement de la personne qui passe l'acte notarié. En outre, aucune autre preuve n'a démontré le contraire.

La conséquence de ce qui précède est que Madame BABOT possédait, en 2004, la capacité suffisante pour contracter, et donc pour donner son accord.

La nullité ne pouvant être acceptée, il ne conviendra donc pas de verser les sommes réclamées par la représentation procédurale de Mme Maria Assumpta TORM à cette dernière.

Aussi, vu qu’il a été prouvé que madame BABOT avait la capacité de contracter, l’annulabilité du contrat exercée sous une forme subsidiaire par la représentation procédurale de madame TORM est effectivement prescrite et il ne convient donc pas d’évaluer les arguments sur lesquels elle fonde cet aspect.

Septièmement.- La représentation procédurale de Mme Assumpta TORM prétend toujours que si le contrat de gestion de l'hôtel Panorama n'est pas déclaré nul, il convient de considérer qu’il a été gravement enfreint par la société de gestion. Elle prétend aussi que la partie adverse lui rembourse tout avantage obtenu par le biais de celui-ci, en demandant dans certains cas soit qu'une somme soit versée, soit que le droit à être indemnisée soit reconnu.

À cet égard, le jugement d'instance considère que la représentation procédurale de Mme TORM ne peut demander la résolution de contrats qu'elle-même avait déjà considérés comme résolus – et que, comme la représentation procédurale elle-même l’indique à ce stade, c’est la société B et non Mme TORM qui a demandé la résolution contractuelle – elle ne peut par conséquent demander la restitution des prestations reçues.

Quoi qu’il en soit, comme la résolution de l'instance analyse les manquements allégués et ne les considère pas d'une gravité suffisante pour se prémunir contre une éventuelle résolution contractuelle et que la représentation procédurale de Mme Maria Assumpta TORM conteste ce point, nous procéderons à son analyse :

1.- Par rapport à la perception par la société B de la somme de 153 914 € de plus dans ses honoraires au cours du quatrième trimestre 2004 et 2007, à titre de rémunération de base et participative dans la gestion des hôtels Panorama et Roc Blanc :

Il ressort du résultat des preuves d’expertise mises en place qu'il est discutable que les honoraires doivent être calculés sur les ventes nettes ou sur les ventes brutes, bien qu'il soit plus courant que le montant de base de la rémunération de base soit appliqué sur les ventes nettes et non sur les ventes brutes.

Aux pages 4072 et 4094, l'expert judiciaire précise quelle est son interprétation de la clause contractuelle qui le prévoit, qui est la clause 5.2, et aussi que son contenu peut être interprété d'une autre manière. Par conséquent, il ne s'agit pas d'un manquement en soi et il ne convient pas de verser quelques sommes que ce soit à ce titre.

2.- En ce qui concerne l'absence alléguée de comptabilisation des émoluments de M. Joan ARMENGOL RIBAS – en tant que représentant de la propriété dans le contrôle de la gestion des Hôtels Panorama et Roc Blanc – dans les comptes de l'hôtel comme frais d'exploitation :

Il a déjà été indiqué précédemment que les déclarations de cette résolution ne concernent que l'Hôtel Panorama.

En tout état de cause, la prétention de la partie n'a pas été étayée, car il n'y a aucune preuve au dossier qui détermine comment cette dépense doit être comptabilisée.

3.- Concernant le prétendu manquement à l'obligation d'entretien de l'Hôtel Panorama, entre les années 2004 et 2008 :

L'expertise pratiquée à cet égard dans l'instance (pages 4189 à 4217) montre que la société B, SA a effectué des travaux d'entretien dans l'établissement hôtelier durant toute la période de 2004 à 2008.

En outre, à la page 4203, est dressée une liste des différentes sections qui nécessitent un entretien (structure, autres éléments de construction, installation électrique, installation de sécurité incendie, installation de chauffage, installation de plomberie, appareils élévateurs, installation de gaz et conditions sanitaires hygiéniques), tout en évaluant l’entretien effectué dans chacun d'eux et concluant qu'il n'y a eu en aucun cas un manque d'entretien, et en évoquant tout au plus un entretien insuffisant dans les sections de structure (en se référant en l'occurrence à un entretien de nature préventive, p. 4196), d'autres éléments de construction ( à la p. 4196 elle-même, il est fait référence à des défauts non urgents qui existaient probablement déjà avant 2004), l’installation de sécurité incendie (l'expert reconnaît que durant la période de 2004 à 2008 différents contrôles ont été réalisés par Vall Segur pour la maintenir en bon état et qu'un certificat daté du 05/08/2008 de l'entreprise qui a effectué l'entretien de l'installation de sécurité incendie atteste qu'elle était en bon état, p. 4197), l’installation de plomberie (dans ce cas, dans les commentaires contenus aux p. 4197 et 4198, des divergences peuvent être constatées entre les différents professionnels du secteur par rapport au point analysé dans le cadre de celui-ci, l’entretien devant être également considéré comme un entretien préventif, s'il devait être effectué) et les conditions d'hygiène et de salubrité (il ressort des commentaires qu'il fallait effectivement les améliorer). À ce sujet, il convient de noter que juste en dessous de ce tableau, l'expert lui-même précise que lorsqu'il parle de « manque d'entretien » il fait référence à « un entretien insuffisant », sous-entendant que c'est le jargon qui est habituellement utilisé dans son domaine professionnel.

Quoi qu’il en soit, quand bien même un entretien insuffisant a été constaté, il a également été prouvé que même si l’investissement n’était pas adapté à un hôtel 4 étoiles, qui doit être de l'ordre de 4 % alors que l’investissement effectué était de l’ordre de 3 %, cela signifie qu'au lieu de la somme investie de 111 000 € en entretien, l’investissement aurait dû être à hauteur de 125 000 €.

De ce qui précède, il s'ensuit qu'il n'y a pas eu de manque d'entretien.

4.- Par rapport à la prétendue mauvaise gestion économique :
Rien n'indique que la cause de l'évolution négative de l'établissement hôtelier découle de la mauvaise gestion économique de la propriété par le biais des services de la société B. En tout état de cause, l'expert judiciaire souligne que l'amélioration économique qui se serait produite en 2009 n'est qu'apparente et découle d'un changement de politique d'amortissement.

Bien que cette explication ne plaise pas à la représentation procédurale de Mme MTB, elle n'apporte que la preuve des résultats économiques objectifs, mais pas de la cause qui les a produits, sans que la perception des revenus convenus par l'entreprise prouve une quelconque déficience dans sa gestion. Le compte de profits et pertes d'une entreprise n'est pas seulement lié à une meilleure ou moins bonne gestion, car de nombreux autres éléments peuvent affecter le résultat économique.

5.- Sur la prétendue gestion discriminatoire de l'Hôtel Roc Blanc au détriment de l’Hôtel Panorama :
Là encore, la représentation procédurale de Mme Maria Assumpta TORM n'apporte aucun élément prouvant que les résultats bruts des deux établissements hôteliers découlent d'une mauvaise gestion volontaire d'un établissement hôtelier par rapport à l'autre. Plusieurs causes peuvent être à l'origine de leurs résultats économiques différents, sans qu'il appartienne à la Chambre d'émettre une quelconque présomption à cet égard.

6.- En ce qui concerne l'imputation irrégulière invoquée des frais administratifs et commerciaux :
La propre représentation procédurale de Mme Maria Assumpta TORM reconnaît que le contrat de gestion n'est pas clair en ce qui concerne la partie qui doit supporter les dépenses découlant de ces concepts. Dans tous les cas, aucun changement n'est intervenu dans son exécution depuis l'attribution du marché.

7.- Sur les irrégularités dans la gestion du personnel :
Le manque de cotisations de l'entité gestionnaire à la Caisse andorrane de Sécurité sociale pour la rémunération des travailleurs ne peut avoir aucune justification, mais rien n’indique dans le dossier qu'elle ait causé des dommages à la propriété, qui avait confié spécifiquement la gestion du personnel à la société de gestion. Cet argument aurait certainement pu produire un changement d'opinion de la part de la propriété envers la société de gestion à qui elle avait confié l'exploitation de son commerce. En tout état de cause, il convient de noter qu'après vérification du contenu des pages indiquées par la représentation procédurale de Mme Maria Assumpta TORM : 14785, 8841 et 3181, il s'ensuit que la société d'audit conclut favorablement son rapport, en faisant une simple recommandation sur l'exécution des déclarations non faites à la CASS. La partie aurait pu proposer et mettre en place une preuve pour clarifier ce point et les conséquences qui en découlent pour les parties concernées.

8.- En ce qui concerne les abus présumés dans le cadre du recrutement et le paiement des directeurs des établissements hôteliers,

Hormis le fait que le contrat de gestion hôtelière établit clairement que le salaire du directeur devait être payé par la propriété, en l’absence de preuve de la position de l'établissement par rapport à ce point, il ne ressort pas de la page 3683 invoquée par la représentation procédurale de Mme TORM (faisant partie de l'Audit KPMG) que l'entreprise avait embauché deux directeurs avec les mêmes fonctions ou positions, mais que dans chaque hôtel, dans la section « Direction », il y a deux membres, sans que la fonction de chacun d'eux soit expliquée.

Par conséquent, la Chambre ne peut pas confirmer l'existence de l'abus présumé au sens visé.

9.- Enfin, en ce qui concerne la plainte des commissaires aux comptes concernant le contrôle des immobilisations résultant de la rénovation de l'hôtel en 2005, par rapport à l'impossibilité d'obtenir les factures de rénovation de la propriété :

Ce point ne constitue pas un manquement pouvant entraîner des conséquences juridiques par rapport au contrat analysé.

Hormis l'irrecevabilité de toute forme d'indemnisation pour la rupture contractuelle préalable, aucun des manquements allégués n'aurait donné lieu à celle-ci.

Huitièmement.- IV.- RÉSOLUTION DU CONTRAT demandée par la société B,SA en raison du manquement à l'obligation de paiement :

Après avoir déterminé le caractère commercial du contrat de gestion hôtelière, et alors même que dans le contrat de mariage passé en 1975, une succession simple était stipulée au profit de Madame MTB, au décès de sa de cujus, madame BABOT, madame TORM s’est subrogée dans sa position, tout en supportant les relations juridiques existantes à cette époque, l'une d’elles étant le contrat litigieux en l'espèce que madame BABOT avait passé en tant que propriétaire de l'Hôtel PANORAMA.

Le contrat n'ayant pas été résilié au décès de Madame BABOT, il procédera à l'analyse du concours de la cause de résiliation invoqué par la représentation procédurale de la société B, SA et des conséquences indemnitaires découlant, dans son cas, de celle-ci.

À cet égard, il est pacifique entre les parties au litige qu’après le décès Mme le 20 septembre 2008, l'héritière, Mme Maria Assumpta TORM, a cessé de verser à la société B la rémunération convenue dans le contrat conclu le 17 septembre 2004, sans pour autant utiliser le pouvoir de retrait volontaire qui y est prévue. Bien au contraire, c'est la société de gestion qui, par courrier du 23 janvier 2009, après trois mois sans percevoir la rémunération convenue, a averti de son intention de résilier le contrat qui liait les parties, à compter du 1ᵉʳ février 2009. Ainsi, la société de gestion a exercé avec la demande le pouvoir résolutoire prévu au contrat, faisant usage des dispositions contractuelles contenues dans sa clause 6.3 ; et fondant sa réclamation sur les dispositions de la clause 6.5, dont le contenu littéral est le suivant : « Dans les cas (i) et (ii) de la sous-clause 6.3 ci-dessus et dans ceux de la sous-clause 6.4 ci-dessus, la Partie qui a enfreint le contrat devra indemniser la Partie lésée de tous les dommages et préjudices causés, même en l'absence d'intentionnalité ou de mauvaise foi, l'indemnisation étant non seulement à la hauteur de la valeur du préjudice subi, mais encore de celle du gain qu'elle a cessé d'obtenir. L'indemnisation déterminée en faveur de la société de gestion ne pourra en aucun cas être inférieure à celle qui résulterait de l'application des règles convenues au paragraphe 6.2 ci-dessus. »

En outre, la sous-clause 6.2 incluse dans la section « Retrait volontaire » contrairement à la 6.5 qui est incluse dans la section « Résolution pour cause justifiée » ; après avoir fixé un délai de notification préalable de déclaration de la volonté de rétractation de 6 mois au paragraphe (i), établit littéralement : « (ii) Si la partie qui entend se rétracter est la Propriété, elle devra verser à la société de gestion une somme équivalente à la rémunération moyenne obtenue pour l'ensemble des concepts au cours des trois (3) années précédentes multipliées par le nombre d'années restantes jusqu'à la fin du contrat. L'indemnisation convenue doit être payée en espèces et en un seul versement dans les vingt (20) jours suivant la date de notification prévue au paragraphe (i) ci-dessus. Si le désistement intervient avant que trois (3) ans ne se soient écoulés... »

C'est-à-dire que, en exerçant le pouvoir résolutoire, la société est soumise au paragraphe 6.5 qui renvoie à l'article 6.2 aux seules fins d'assurer le minimum à percevoir une fois la rémunération fixe calculée et créditée, qui, contrairement à ce qui est prévu au 6.2, n'est pas préétablie.

Et comme la société elle-même le reconnaît dans la requête et découle également du résultat de l'expertise effectuée, l'entreprise B, SA demande directement l'application de la disposition de la clause 6.2 susvisée sans, par conséquent, prouver le lucrum cessans qui s’est effectivement produit (et mentionné en 6.5). La clause 6.2, qui, du fait de contenir déjà l'indemnisation des dommages et intérêts en prévision d'une rupture de contrat, est une clause pénale, comme il a été reconnu également à la société demanderesse aujourd’hui appelante.

Concernant les clauses pénales, cette Chambre a eu l'occasion de se prononcer, entre autres, dans l'arrêt du 26 mars 2009 (rôle TSJC-274/08) qui stipule : « La clause pénale est la clause comminatoire qui prévoit l’indemnisation ou une autre prestation à laquelle la partie qui ne respecte pas ou retarde l'obligation principale sera soumise. Force est de constater que la cinquième clause mentionnée du contrat, qui prévoit le paiement d'un loyer exponentiel lié à la durée de l’excédent du terme prévu pour la restitution des films, correspond parfaitement à une clause pénale. Cela dit, la clause pénale n'est pas interdite en droit andorran et les tribunaux l'ont toujours acceptée. Néanmoins, la clause pénale peut être modulée par les tribunaux pour adapter le montant de la sanction aux circonstances du manquement produit et au préjudice effectivement subi par le créancier, et notamment lorsque ladite clause peut être considérée comme léonine et/ou lorsqu'elle peut entraîner un enrichissement manifestement injuste du créancier. »

En outre, dans le Jugement du 21 mai 2009 (rôle TSJC-038/09) qui précise : « Toutefois, le pouvoir de modérer une clause pénale si le Tribunal l'estime disproportionnée au préjudice subi par la partie qui en réclame le respect a été reconnu à plusieurs reprises par les tribunaux andorrans. Ainsi le jugement de cette Chambre prononcé le 22 septembre 2000 souligne que cette clause est « un instrument destiné à garantir l'exécution des obligations ou, si l’on veut, à satisfaire l'intérêt du créancier, mais sans que cela implique une application automatique de la clause pénale dans tous les cas, puisque la satisfaction de l'intérêt du créancier doit être liée au sacrifice que l'application intégrale de la clause pénale peut entraîner pour le débiteur et que, pour cette raison, la thèse favorable est introduite à la modération judiciaire des clauses pénales » afin d'« ajuster son montant aux dommages réels subis par le créancier ».

Neuvièmement.- Selon le contenu de ce qui a été convenu dans le contrat et conformément au rapport d'expertise du dossier (pages 3963 et 4075) pour ces concepts, il conviendrait de verser les sommes de 96 208 € à titre de montant dû jusqu'au 01/ 31/2009 et de 3 118 829 à titre d’indemnisation pour le manque à gagner depuis plus de 15 ans, du fait de la résiliation contractuelle exercée.

Ceci dit, en ce qui concerne l'indemnisation et compte tenu des circonstances particulières en l’espèce, la Chambre devra procéder à déterminer et à modérer l'indemnisation des dommages et des préjudices que la société a effectivement subis du fait de la rupture de contrat par Mme TORM, afin d'éviter un enrichissement injuste pour le créancier.

Et afin de procéder à cette appréciation, la Chambre tiendra compte à la fois du lien entre le défaut de paiement et la complexité juridique de l'interprétation du type de succession contenue dans le contrat de mariage passé le 20 janvier 1975 par les parties, ainsi que les circonstances mêmes de la résolution contractuelle – qui s’est produite après le décès de Madame BABOT et dans un climat de méfiance entre les parties – et la volonté que le préjudice réclamé soit motivé et légitime. Il convient d’ajouter en outre que le service n'a pas été fourni à partir du mois de février 2009, le montant réclamé comprenant diverses dépenses que la propriété n'a aucune raison d'assumer, que de surcroit, à cette époque, elle ignorait – comme tout le monde – l'évolution future des marchés et , donc, l'existence de crises, voire de pandémies comme celle qui nous a touchés et qui a contraint les établissements hôteliers à fermer.

Par conséquent, la Chambre considère qu'en l'espèce, en raison de la résolution contractuelle, il ne convient pas de verser une indemnisation sur la base des 15,63836 années restantes pour mettre fin au contrat, car cela entraînerait une indemnisation exorbitante, abusive et disproportionnée par rapport au préjudice que la société de gestion a pu subir – qui en aucun cas n'a été attestée – mais il convient de fixer la durée de l'indemnisation à une période de 3 ans.

Ainsi, au titre de l'indemnité, Madame TORM devra verser à la partie demanderesse et appelante la somme de 598 200 € (199 400 € x 3 ans), selon le rapport d'expertise susvisé.

Dixièmement.- En outre, par rapport à la somme de 96 208 € fixée par le rapport d'expertise réalisé à la demande de la Batllia par la société CTA en matière de rémunération due, par rapport aux 111 916 € réclamés par la société défenderesse pour le même concept, la représentation légale de la société conteste tant sa quantification que la date de génération des intérêts au taux légal fixé par la résolution de l'instance.

D'une part, concernant l'expertise réalisée, elle considère qu'elle doit être évaluée selon les critères d'une saine critique et que ses conclusions ne correspondent pas à la dette réelle de ce concept, puisque l'expert lui-même affirme que le chiffre susmentionné et auquel on le condamne à payer est approximatif.

En ce qui concerne le contenu de l'expertise rédigée par la société Consultors i Tècnics Associats, SL (CTA) et, plus précisément, par M. Antoni CERQUEDA GISPERT, la Chambre doit confirmer son contenu vu qu’il n'existe aucun élément objectif permettant de douter de la bonté de celle-ci. L'expert lui-argumente de façon cohérente la procédure utilisée pour analyser les informations dont il disposait, l'origine desdites informations, les critères retenus pour leur interprétation, les concepts sur lesquels il a calculé le montant obtenu (ventes nettes versus ventes brutes) et la raison pour laquelle il utilise l'expression selon laquelle il considère que le résultat obtenu « reflète raisonnablement la réalité ». En tout état de cause, les notions à apprécier par rapport au calcul de la rémunération de base (ventes nettes) sont au moins partagées par le reste des experts intervenus à la demande de la partie, qui estiment qu'elle doit être calculée sur la base des ventes brutes est contraire aux usages du secteur. Et s'agissant des corrections qu'elle apporte à ses avis, la Chambre n'estime pas qu'elles impliquent un défaut de fiabilité de ses conclusions, mais qu'elles découlent de la complexité des tâches assignées qui ont conduit les parties à faire de nombreuses allégations et précisions.

La pratique d'une autre preuve d’expertise ne se justifie en aucune façon.

En ce qui concerne l'évaluation qui doit être attribuée à la preuve d’expertise mise en place à la demande de la Batllia, dans le Jugement rendu le 27 avril 2015, rôle TSJC.-358/2013, nous avons déclaré :
« En ce qui concerne l'évaluation des rapports d’expertise, c'est-à-dire aussi bien celle effectuée par M. ... dans le cadre du présent dossier que celui rédigé par l'experte judiciaire Mme ... et apporté au dossier selon l’Arrêt du 26-01-2015, il convient de préciser que lorsqu'il est indiqué que le juge est « perum peritorum », cela signifie que l'autorité judiciaire doit évaluer avec les critères de la saine critique les rapports qui sont apportés à la procédure en les prenant en compte conjointement et en fonction de leurs critères, car si le juge n'a pas les connaissances techniques, raison pour laquelle il a nommé un technicien qui lui les possède, il a en revanche la capacité de déterminer la justesse des opérations d’expertise et leurs conclusions.

En l'espèce, il est vrai que les conclusions des deux rapports ne sont guère compatibles, mais leur étude précise permet de donner une meilleure force probatoire à celui de M.... quant à la question de l'origine des fuites. »

Ainsi, dans d'autres résolutions comme, par exemple, celle rendue le 27 octobre 2015, numéro de rôle 337/2014, nous avons ajouté :
« II.- En ce qui concerne l'appréciation de l'expertise et la nécessité d'en pratiquer une nouvelle, nous rappellerons que l'autorité judiciaire doit apprécier avec les critères de la saine critique les rapports qui sont apportés au dossier en les prenant en compte conjointement et selon leurs critères, car si le juge n'a pas les connaissances techniques, raison pour laquelle il a nommé un technicien qui lui les possède, il a en revanche la capacité de déterminer, d'une part, la justesse des opérations d'expertise et de leurs conclusions et, d'autre part, les conséquences juridiques des constatations techniques de l'expert.

[...]

« En ce qui concerne le reproche relatif au manque de fiabilité, voire de rigueur de l'expert judiciaire, celui-ci n’est pas justifié, étant donné que l'étude précise des rapports provisoires et définitifs et des précisions apportées par l'expert pour répondre aux allégations des parties, il ressort clairement que ledit expert a examiné tous les documents fournis par les parties, et a établi les conclusions sur la base de ses propres constatations en tenant compte des éléments et considérations fournis par les parties.

Par rapport aux variations de valorisation des écarts rapportés, nous ne considérons pas qu'il s'agirait d'une manifestation du manque de fiabilité de P. Au contraire, celles-ci s'expliquent d'une part par la complexité et une certaine confusion qui ont entouré l’exécution des travaux (notamment du fait qu'il n'existe pas de cahier des charges et du fait que de nombreuses modifications ont été apportées sans toujours les formaliser), et qui ont rendu plus difficile la mission de l'expert et conduit les parties à lui fournir de nombreuses allégations et précisions. Précisément, et d'autre part, ces variations correspondent au fonctionnement normal du principe contradictoire, si bien que, comme c'était son obligation, l'expert a tenu compte des considérations techniques des parties tout au long de la procédure pour proposer l’évaluation qui lui était demandée.

Cela étant, le Tribunal ne pouvait pas et cette Chambre ne peut pas prendre en compte uniquement le rapport de B comme le prétend le défendeur aujourd’hui appelant, mais les rapports de l'expert judiciaire doivent être considérés de manière préférentielle, le fait d’ordonner une nouvelle preuve d’expertise étant totalement injustifié. »

Et toujours dans notre Jugement du 20 septembre 2016, rôle 38/2016, nous avons mis en évidence :
« L'autre motif d'appel consiste en la divergence dans l’évaluation judiciaire de la preuve d'expertise faite par le tribunal d’instance. Comme nous l'avons dit récemment dans notre STJC 271-2015, nous devons rappeler les principes suivants que notre jurisprudence n'a cessé de rappeler selon lesquels a) la preuve d'expertise n'est pas contraignante pour le juge, qui peut l'apprécier librement ; b) quant à l'expertise, elle ne prouve pas de manière irréfutable un fait, mais plutôt le jugement personnel de celui qui l'émet, c) on peut affirmer que les experts ne fournissent pas au Juge leur décision, mais l'illustrent sur les circonstances de l'affaire et lui donnent un avis, ce dernier pouvant arriver à des considérations différentes, d) bien que le juge doive indiquer les raisons pour lesquelles il n'accepte pas les arguments spécialisés fournis par l'expert et parce qu'il considère ses explications incohérentes et illogiques, e) étant entendu que le juge ne peut pas tomber dans l'arbitraire, il devra motiver sa décision lorsqu'elle est contraire à l'avis de l'expert, surtout lorsqu'il se prononce sur l'une des nombreuses alternatives qui existent, et plus encore, si elle est minoritaire et quand elle est décidée par l'une des opinions contradictoires, optant pour ce qui est plus pratique et objectif, f) il est, en revanche, dispensé de motiver son rejet lorsque l'avis ne motive pas non plus le résultat auquel il parvient.

Quant à l'efficacité probante de l'expertise, la doctrine de la Chambre a déjà indiqué, à maintes reprises, que la force probatoire des opinions d'experts réside essentiellement, non dans leurs affirmations, ni dans la condition, la catégorie ou le nombre de leurs auteurs, mais dans leur fondement et raison plus ou moins grands de la science. Pour cette raison, il est nécessaire de considérer comme prévalentes, en principe, les affirmations ou conclusions dotées d'une explication rationnelle supérieure, sans oublier d'autres critères auxiliaires, tels que celui de la majorité coïncidant ou celui de l'éloignement de l'intérêt des parties.

Bref, l’expertise doit être appréciée par le juge selon les règles de la saine critique, sans être obligé de se soumettre à l'avis, et puisque les règles indiquées ne sont prévues dans aucune règle d'évaluation de la preuve, cela équivaut, dans la majorité des cas, à déclarer la libre appréciation de ce moyen de preuve, sans qu'une contestation ouverte et libre de l'activité appréciative soit admise, sauf si le processus déductif mené se heurte de manière évidente et manifeste avec le bon sens humain ou l’on peut arriver à un résultat contraire à l'expertise avec l'évaluation conjointe d'autres éléments de preuve. »

D’autre part, s'agissant des intérêts réclamés sur la somme de 96 208 €, il convient également de confirmer le Jugement d'instance en ce sens que les intérêts en vigueur en Principauté doivent être appliqués à compter de la date du Jugement d'instance et jusqu'à son règlement intégral, d'autant que le montant à payer a été fixé dans cette résolution par une expertise.

En conséquence, le recours de la société B est partiellement admis, en ce sens que le contrat de gestion hôtelière en vigueur à compter du 1er février 2009 est considéré résolu et que l'indemnité à lui verser pour ce concept est fixée par Madame TORM à hauteur de 598 200 €, les arguments relatifs au montant fixé pour la rémunération impayée ne pouvant prospérer, montant qui reste fixé à la somme de 96 208 €.

Ainsi, la somme qui devra être versée à la société B, SA est de 694 408 €, majorée d'intérêts au taux légal à compter de la date de la présente résolution pour la somme de 598 200 € et de la décision d'instance pour la somme de 96 208 €.

ONZIÈMEMENT.- VI.- LES BAUX DE LOCATION DES CINQ APPARTEMENTS situés « av. Carlemany, 65 ans », à Escaldes-Engordany

Le Jugement d’instance considère, et cette Chambre partage son avis, que les cinq baux de location se référant aux unités immobilières porte A étage 3, porte E étage 3, porte A étage 4, porte E étage 4 et porte E étage 6 de l’immeuble « Edifici Prínceps », situé « Av. Carlemany 65 » à Escaldes-Engordany, passés par feu Mme BABOT, en tant que locataire, entre février 2003 et juillet 2004 avec la société B, SA en tant que bailleur, pour subvenir aux besoins d'hébergement du personnel de l'Hôtel Panorama, que la prétention de nullité existant dans l'instance pour vice de consentement et intentionnalité imputable à la société de gestion, du fait que les contrats contreviennent à un précepte légal à la date de passation et contiennent des inexactitudes et un contenu léonin, ne peut prospérer, car il a déjà été prouvé qu'à cette époque, madame BABOT jouissait de la capacité de contracter et, bien que certaines clauses étaient en faveur du bailleur, madame BABOT ne les a pas remises en cause.

Par conséquent, ce qu'affirme la représentation procédurale de Mme MTB par rapport au fait que le Tribunal de première instance ignore ses allégations concernant la nullité ou l'annulation desdits contrats n’est pas vrai. En tout état de cause, et même s'il n'est pas applicable en l'espèce, étant donné qu'une réponse a été donnée par l'organe judiciaire, il est évident que le Tribunal n'est pas tenu de donner une réponse expresse à toutes les allégations de la partie.

En ce sens, le Tribunal Constitutionnel s'est prononcé à de multiples reprises, comme par exemple dans l’Arrêt du 14 juillet 2021, rendu dans le cadre de l'affaire 2021-45-RE, où il est stipulé « [...] le Tribunal Constitutionnel, conformément à la jurisprudence du Tribunal Supérieur de justice, a précisé à plusieurs reprises que les juridictions ne sont pas liées au caractère littéral de la demande, mais à son contenu en substance, et qu'il lui appartenait de l'examiner en vertu de la législation applicable [...]".

Et l’Arrêt du 7-5-2018, Affaire 2018-5-RE, établit à cet égard :
« 3.3. En ce qui concerne l'éventuelle atteinte au droit d'obtenir une résolution fondée en Droit sur la base d'une prétendue incongruité d'omission, pour ne pas avoir pris en compte, évalué ou mentionné les prétentions formulées, il convient de rappeler que ce Tribunal constitutionnel a affirmé que « la congruence des décisions judiciaires fait partie du droit à la juridiction en ce sens [...] que les juges et les tribunaux doivent répondre aux demandes ou aux prétentions des parties et aux motifs invoqués pour fonder lesdites prétentions, bien qu'il ne soit pas nécessaire de donner une réponse expresse et détaillée à chacun des arguments qu'ils ont utilisés. En effet, puisque le bien constitutionnel protégé par le droit de ne pas subir d'omissions incohérences est celui de garantir que les juges et les tribunaux apprécient les réclamations faites et les raisons sur lesquelles celles-ci sont fondées et que les parties connaissent les motifs de leur décision, il peut y avoir des cas dans lesquels la réponse tacite à certaines réclamations et allégations est constitutionnellement légitime, Cela se produirait, par exemple, lorsque de l'ensemble des raisonnements contenus dans la résolution judiciaire, on peut raisonnablement en déduire que l'organe judiciaire a évalué les prétentions et, en outre, les motifs sur lesquels se fonde sa réponse tacite peuvent être déduits » (deuxième fondement juridique du Jugement du 12 octobre 2009, relevant de l'affaire 2009-9-RE).

Et en outre, dans le Jugement du 12 octobre 2020, Affaire 2020-14-RE, il est stipulé :
"3.4. En ce qui concerne l'omission incohérente commise soit par la juridiction de première instance, soit par la juridiction de deuxième instance, la jurisprudence constitutionnelle en la matière est bien connue et établit de façon constante qu'elle doit découler de l'incongruité qui pourrait exister entre le contenu du petitum des parties et la décision de l'organe judiciaire. L'incongruité ne saurait être alléguée pour n'avoir pas obtenu de réponse circonstanciée à chacun des arguments des parties et lorsque le petitum a été tranché conformément aux preuves et aux indications dont disposait l’organe judiciaire, éléments qui fondent sa décision (voir, par exemple, le jugement du 7 septembre 2018, affaire 2018-29-RE, et plus généralement, les jugements du Tribunal Constitutionnel du 12 octobre 2009, affaire 2009-9-RE, du 2 avril 2012, affaire 2011-37-RE , du 3 décembre 2012, affaire 2012-13-RE et les jugements du 14 mai 2019, relatifs aux affaires 2018-67-RE et 2019-16-RE, ainsi que le jugement du 13 juillet 2020, rendu dans l’affaire 2020-44-RE, lequel en fournit un résumé détaillé).

Dès lors, l’allégation de l’appelant relative au fait que le manque de réponse de la première instance à l'un de ses arguments le priverait du double degré de juridiction doit être rejetée. »

Douzièmement.- La conséquence de ce qui précède est le rejet de l'appel formé par la représentation procédurale de Mme MTB et l'estimation partielle de l'appel formé par la représentation procédurale de la société B SA , dans le sens de ratifier la résolution du contrat de gestion hôtelière à effet du 1ᵉʳ février 2009 et condamner Mme Assumpta TORM à lui verser les sommes de 96 208 € avec les intérêts de droit à compter de la date de la résolution de l'instance à titre d'arriérés et impayés de rémunération et de 598 200 € à titre d'indemnisation du manque à gagner avec les intérêts légaux à compter de la présente résolution, le contenu de la résolution d'instance ayant également modifié en ce sens que la succession issue du contrat de mariage passé le 20 janvier 1975 en faveur de Madame MTB est simple et non cumulative, comme nous l'avons avancé dans le quatrième fondement de droit et que le contrat de gestion hôtelière est de nature commerciale.

Treizièmement.- Malgré le rejet de l’appel formé par Mme TORM et l'appréciation partielle de celui formé par la société B, SA, en application de la Nouvelle 82, Chapitre 10, aucune condamnation aux dépens engendrés à ce stade, compte tenu de la complexité de l’affaire, ne sera prononcée.

A DÉCIDÉ

Premièrement.- DE REJETER l'appel interjeté par la représentation procédurale de Mme MTB contre le Jugement rendu le 11 décembre 2018 par le Tribunal des Juges.

Deuxièmement.- D’ADMETTRE partiellement l'appel interjeté par la représentation procédurale de la société B, SA contre le Jugement rendu le 11 décembre 2018 par le Tribunal des Juges, en ce sens de ratifier la résolution du contrat de gestion hôtelière à effet du 1ᵉʳ février 2009 et de condamner Madame MTB à lui verser les sommes de 96 208 € avec les intérêts légaux à compter de la date de résolution de l'instance à titre de rémunérations échues et impayées et 598 200 € à titre d’indemnisation de manque à gagner avec les intérêts légaux à compter de la date de la présente résolution, tout en maintenant le reste des prononcés de la résolution d'instance à l'exception de celui relatif au paiement des frais de justice, auquel nous nous référons dans le paragraphe suivant.

Troisièmement.- DE NE PRONONCER AUCUNE CONDAMNATION AUX DÉPENS engendrés dans l’instance ou à ce stade par l’une ou l’autre des parties appelantes.

Ce jugement est définitif et exécutoire.

Ainsi, à travers ce jugement définitif, nous l'ordonnons et le signons.


Synthèse
Numéro d'arrêt : 156-2021
Date de la décision : 29/10/2021

Analyses

Contrat – résolution – héritage dérivant d’un contrat de mariage – clause pénale


Origine de la décision
Date de l'import : 13/09/2023
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ad;tribunal.superieur.justice;arret;2021-10-29;156.2021 ?
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