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27/11/2020 | CADHP | N°59/2019

CADHP | Cour africaine des droits de l'homme et des peuples, 27 novembre 2020, 59/2019


Texte (pseudonymisé)
AFRICAN UNION AFRICAN UNION
UNIAO AFRICANA AFRICAN COURT ON HUMAN AND PEOPLES" RIGHTS
COUR AFRICAINE DES DROITS DE L’HOMME ET DES PEUPLES
AFFAIRE
RÉPUBLIQUE DU BENIN
REQUÊTE N°59/2019
ARRÊT VI.
SOMMAIRE
SOMMAIRE
I LES PARTIES
I. OBJET DE LA REQUÊTE
A. Faits de la cause
B Violations alléguées
RÉSUMÉ DE LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR
IV. SUR LES MESURES DEMANDÉES
V. SUR LA COMPÉTENCE
B Sur l'exception d'incompétence personnelle de la Cour
C Sur les autres aspects de la compétence

10
SUR LES EXCEPTIONS PRELIMINAIRES 10
A. Sur l'exception tirée de ...

AFRICAN UNION AFRICAN UNION
UNIAO AFRICANA AFRICAN COURT ON HUMAN AND PEOPLES" RIGHTS
COUR AFRICAINE DES DROITS DE L’HOMME ET DES PEUPLES
AFFAIRE
RÉPUBLIQUE DU BENIN
REQUÊTE N°59/2019
ARRÊT VI.
SOMMAIRE
SOMMAIRE
I LES PARTIES
I. OBJET DE LA REQUÊTE
A. Faits de la cause
B Violations alléguées
RÉSUMÉ DE LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR
IV. SUR LES MESURES DEMANDÉES
V. SUR LA COMPÉTENCE
B Sur l'exception d'incompétence personnelle de la Cour
C Sur les autres aspects de la compétence 10
SUR LES EXCEPTIONS PRELIMINAIRES 10
A. Sur l'exception tirée de l'abus du droit d’ester en justice. 11
B Sur l'exception tirée du défaut de lien entre la Requête principale et la Requête
additionnelle 11
C Sur l'exception tirée du défaut d'intérêt à agir et de la preuve de qualité de victime 12
VI. SUR LA RECEVABILITÉ 14
A. Conditions de recevabilité en discussion entre les parties 15
1 Sur l'exception tirée d'incompatibilité de la Requête avec la Charte et l'acte
constitutif de l'Union Africaine 15
ii. Sur l'exception tirée du non-épuisement des recours internes 16
B Sur les autres conditions de recevabilité 18
VII. SUR LE FOND 20
A. Sur l'ilégalité et l’illégitimité alléguées de l'Assemblée nationale pour modifier les lois relatives aux élections 20
B Sur la violation alléguée de l'obligation de créer des organes électoraux
indépendants et impartiaux 22
1 Sur l'indépendance et l'impartialité de la CENA 26
ii. Sur l'indépendance et l'impartialité du COS-LEPI 27
C Sur la modification unilatérale et substantielle de la loi électorale moins de six (06) mois
avant les élections 28 D. Sur l'allégation de violation de l'obligation de garantir la paix et la sécurité nationale
E. Sur l'allégation de violation du droit à une égale protection de la loi…….………………… 32
IX. SUR LES RÉPARATIONS....………….…………rrrrrrrererrrrrrrercecerererrrrrererrrrenerrrerce carences 34
A. Réparations non pécuniaires.…..…….…..…...….…..….…..….…...….…...……ieeeeenmenentannnnnnmnnnnnnnnnnnnnn 35
ii Modification du Code électoral.
ii. Annulation des élections communales et municipales du 17 mai 2020... 36
B. Demande reconventionnelle.………..…....…...….…...…...….…esennnnnnnnnnnnnnnnnnnnnnn 37
X. SUR LES FRAIS DE PROCÉDURE....….….….….………………rrrrrccsrerenesnsenennennssrerercrererensennse 37 La Cour composée de : Sylvain ORÉ, Président ; Ben KIOKO, Vice-président ; Rafa
BEN ACHOUR, Angelo V. MATUSSE, Suzanne MENGUE, M-Thérèse MUKAMULISA,
Tujilane R. CHIZUMILA, Chafika BENSAOULA, Blaise TCHIKAYA, Stella |. ANUKAM,
Imani D. ABOUD - Juges; et Robert ENO, Greffier
En l'affaire :
Assurant lui-même sa défense
Contre
RÉPUBLIQUE DU BENIN,
Représentée par Monsieur Ab B, Agent Judiciaire du Trésor
Après en avoir délibéré,
rend le présent Arrêt :
LES PARTIES
1. XYZ (ci-après dénommé « le Requérant ») est un ressortissant béninois. Il a requis
l'anonymat qui lui a été accordé par la Cour, en vertu de l’article 56(1) de la Charte
et des Règles 41(8) et 50(2)(a) du Règlement de la Cour (ci-après dénommé « le
Règlement ». Il conteste l'indépendance et l'impartialité des organes électoraux
ainsi que la composition de l’Assemblée nationale.
2. La requête est dirigée contre la République du Bénin (ci-après dénommée « l'État
défendeur ») qui est devenue partie à la Charte africaine des droits de l'homme et
des peuples (ci-après désignée « la Charte ») le 21 Octobre 1986 et au Protocole
relatif à la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples portant création
d’une Cour africaine des droits de l'homme et des peuples (ci-après désigné « le Protocole »), le 22 Aout 2014. L'État défendeur a également déposé, le 8 février
2016, la Déclaration prévue à l'article 34(6) du Protocole par laquelle il accepte la
compétence de la Cour pour recevoir les requêtes émanant des individus et des
organisations non gouvernementales (ci-après désignée « la Déclaration »). Le 25
mars 2020, l'Etat défendeur a déposé auprès du Président de la Commission de
l’Union africaine l'instrument de retrait de sa Déclaration. La Cour a jugé que ce
retrait n'a d’une part, aucun effet sur les affaires pendantes et d'autre part, les
nouvelles affaires déposées avant l'entrée en vigueur du retrait le 26 mars 2021,
soit un an après son dépôt.!
OBJET DE LA REQUÊTE
A. Faits de la cause
3. Le Requérant allègue que l'État défendeur a modifié la loi électorale N° 2019-43
du 15 novembre 2019 (ci-après désigné « le Code électoral de 2019 ») moins de
six (06) mois avant les élections communales et municipales du 17 mai 2020 ; ce
qui, selon lui, est contraire au Protocole de la Communauté Economique de
l’Afrigqgue de l'Ouest (CEDEAO) sur la démocratie et la bonne gouvernance
additionnel au Protocole relatif au mécanisme de prévention, de gestion, de
règlement des conflits, de maintien de la paix et de la sécurité (ci-après désigné
« le Protocole de la CEDEAO sur la démocratie »).
4. Le Requérant soutient que l'Assemblée nationale qui a modifié la loi électorale est
elle-même illégitime parce qu’elle n’est composée que des membres de la
mouvance présidentielle, aucun parti politique « sérieux » de l'opposition n'en
faisant partie.
5. Le Requérant allègue, en outre, qu'en application des lois électorales révisées,
l'Etat défendeur a mis en place le Conseil d'orientation et de supervision de la Liste
électorale permanente informatisée (ci-après désigné « le COS-LEPI et la
Commission électorale nationale autonome (ci-après désignée « la CENA »),
1H. E. Nc. République du Benin, CAfDHP, Requête No. 003/2020 ordonnance du 05 mai 2020
(mesures provisoires), 88 4-5 and Corrigendum du 29 juillet 2020.
organes qui ont, respectivement, la responsabilité d'organiser le recensement
électoral national approfondi et d’établir la liste électorale permanente informatisée
et celle de l’organisation des élections.
6. Le Requérant met en doute l'indépendance et l'impartialité de ces deux organes
dans la mesure où leurs membres ne représentent que les partis politiques de la
mouvance présidentielle. Il en conclut que les élections communales et
municipales du 17 mai de 2020 ne pouvaient pas être considérées comme libres,
justes et transparentes. Selon lui, elles doivent donc être annulées par la Cour de
céans.
B. Violations alléguées
7. Le Requérant allègue :
i. l'illégalité de l'Assemblée nationale et son illégitimité pour modifier les lois
électorales ;
ii. la violation de l'obligation de créer des organes électoraux indépendants et
impartiaux, consacrée par les articles 13(1) de la Charte, 17 de la Charte
africaine de la démocratie, des élections et de la bonne gouvernance (ci-
après désignées « la CADEG ») et 3 du Protocole de la CEDEAO sur la
démocratie
üit. la violation de l'obligation de ne pas modifier unilatéralement et
substantiellement les lois électorales moins de six (06) mois avant les
élections, prévue par ‘l’article 2(1) du Protocole de la CEDEAO sur la
démocratie ;
iv. la violation de l'obligation de garantir la paix et la sécurité nationale et
internationale, prévue à l’article 23 de la Charte ;
V. la violation du droit à une égale protection de la loi, garanti par l'article 3(2)
de la Charte.
RÉSUMÉ DE LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR
La Requête au fond a été reçue au Greffe le 02 septembre 2019. Dans la Requête,
la Requérante demande l'anonymat pour des raisons de sécurité personnelle.
Au cours de sa 53ème session ordinaire du 10 juin 2019 au 05 juillet 2019, la Cour
a fait droit à la demande d'anonymat du Requérant et en a informé les parties.
10. La Requête au fond a été communiquée à l'État défendeur le 12 décembre 2019.
11. Le 26 septembre 2019, le Requérant a soumis une demande de mesures
provisoires qui a été rejetée par Ordonnance de la Cour du 2 décembre 2019.
12 .Après diverses prolongations de délai à la demande des parties, celles-ci ont
déposé leurs conclusions sur le fond et les réparations dans le délai fixé par la
Cour.
13. Le 12 novembre 2020, les débats ont été clôturés et les parties en ont reçu
notification.
IV. SUR LES MESURES DEMANDÉES
14. La Requérante demande à la Cour de dire ou juger que l’État défendeur a violé ce
qui suit :
i. le droit des citoyens de participer librement à la direction des affaires
publiques de leur pays, garanti par l’article 13(1) de la Charte ;
ï. le droit à une égale protection de la loi, garanti par les articles 10(3) de
la CADEG, 3(2) de la Charte et 26 du Pacte international relatif aux
droits civils et politiques ;
iii l'obligation de créer des organes électoraux indépendants et
impartiaux, conformément à l'article 17 de la Charte africaine sur la
démocratie, les élections et la gouvernance (CADEG) et à l'article 3 du
Protocole de la CEDEAO;
iv. l'obligation de garantir la paix, la sécurité nationale et internationale,
prévue à l’article 23 de la Charte ;
v. l'obligation de ne pas modifier unilatéralement les lois électorales
moins de six (06) mois avant le scrutin sans une « majorité politique » ;
Vi. l'obligation d'organiser des élections transparentes, libres et justes ;
vil. le processus électoral du 17 mai 2020 est nul et non avenu ;
viñi. condamner l’État défendeur aux dépens.
15. L'État défendeur demande à la Cour de se déclarer incompétente pour les motifs
ci-après:
ii la Cour n’a pas le pouvoir d'annuler une élection ;
ï. le Requérant n’invoque aucune violation de droits de l'homme.
16. L'État défendeur demande à la Cour de déclarer la Requête irrecevable pour les
motifs suivants:
ile Requérant abuse du droit d’ester en justice ;
ï. le défaut de lien entre la Requête principale et la Requête additionnelle ;
ii. le défaut d'intérêt à agir et de preuve de qualité de victime par le
Requérant.
17. L'État défendeur demande, en outre, à la Cour de déclarer la Requête irrecevable
pour les motifs ci-après :
i. l'incompatibilité avec la Charte et l'acte constitutif de l'Union Africaine ;
ï. le non-épuisement des recours internes.
18. L'État défendeur demande à la Cour de constater que les violations suivantes :
i. les membres de la CENA jouissent d’une immunité suffisante, les
mettant à l'abri de pressions éventuelles ;
ïi le Code électoral de 2019 est le résultat d’une concertation politique
consensuelle ayant conduit à une adoption plus de six (06) mois avant
les élections municipales de mai 2020 ;
ii. il n’y a aucun acte du processus électoral relatif aux communales de
2020 qui soit entaché de vices de nature à exposer lesdites élections à
l’annulation ;
iv. le COS-LEPI est légalement et légitimement installé et son office est
régulier ;
v. il n’y a pas de violation par l'État du Bénin du droit des citoyens de
participer librement à la direction des affaires publiques de leurs pays.
19. L'État défendeur demande à la Cour de condamner le Requérant à lui payer deux
milliards (2 000 000 000) francs CFA, à titre reconventionnel, pour l'ensemble des
préjudices subis et encourus.
SUR LA COMPÉTENCE
20. Lorsqu'elle est saisie d’une requête, la Cour procède à un examen préliminaire de
sa compétence. L'article 3 du Protocole dispose :
1.La Cour a compétence pour connaître de toutes les affaires et de tous les
différends dont elle est saisie concernant l'interprétation et l'application de la
Charte, du présent Protocole et de tout autre instrument pertinent relatif aux
droits de l'homme et ratifié par les États concernés.
2. En cas de contestation sur le point de savoir si la Cour est compétente, la Cour
décide.
21. Par ailleurs, aux termes de la Règle 49(1) du Règlement?, « [Na Cour procède à
un examen de sa compétence (.…..) conformément à la Charte, au Protocole et au
présent Règlement. »
22. Il résulte des dispositions ci-dessus que la Cour doit, pour toute requête, procéder
à un examen préliminaire de sa compétence et statuer sur les exceptions
soulevées, le cas échéant.
23. La Cour note qu'en l'espèce, l’État défendeur a soulevé les exceptions relatives à
sa compétence matérielle. Il a, en outre, soulevé l'incompétence personnelle de la
? Ancien article 39(1) du Règlement du 2 juin 2010.
Cour pour connaitre des allégations de violations de son obligation prescrite par le
Protocole de la CEDEAO sur la démocratie.
A. Sur l'exception d’incompétence matérielle
24. La Cour note que l'État défendeur soulève i) le défaut de sa compétence pour
annuler une élection et ii) l'absence d'invocation par le Requérant d’un cas de
violation des droits de l'homme. La Cour va examiner ensemble ces deux
exceptions dans la section relative à la compétence matérielle parce qu'elles sont
liées.
25. L’Etat défendeur allègue qu'aux termes de l’article 26 du RèglementS, la Cour n’est
pas compétente pour annuler une élection communale et municipale non
contestée au niveau interne et qu’une telle décision serait prise en violation de sa
souveraineté. Il soutient que « l'office de la Cour est de veiller à la protection des
droits de l'homme et non de participer à la remise en cause de l'ordre juridique des
États membres ».
26. L'Etat défendeur allègue également que, conformément à l'article 3(1) du
Protocole, la Cour est compétente pour connaitre des cas de violation des droits
de l'homme et qu'aux termes de l’article 34(4) du Règlement“, la requête doit
indiquer la violation alléguée. Il soutient qu’en l'espèce, le Requérant devait
« indiquer de manière caractérisée les violations supposées des droits de l'homme.
Il ne doit pas se contenter d’invoquer des hypothèses. »
27. Le Requérant, n’a pas répliqué.
28. Sur l'exception relative à son incompétence pour annuler une élection non
contestée au niveau national, la Cour fait observer qu’une telle mesure relève des
formes de réparations de violations des droits de l'homme. À cet égard, l'article
27(1) dispose que « [IIorsqu’elle estime qu'il y a eu violation d'un droit de
l'homme
* Règle 29(1)(a) du Règlement du 25 septembre 2020, en vigueur.
* Règle 41(1)(f) du Règlement du 25 septembre 2020, en vigueur.
ou des peuples, la Cour ordonne toutes les mesures appropriées afin de remédier
à la situation, y compris le paiement d'une juste compensation ou l'octroi d'une
réparation ».
29. La Cour estime qu'aux termes de cette disposition, son pouvoir d’ordonner les
mesures de réparations n’est conditionné que par la constatation préalable de la
violation des droits de l'homme ou des peuples et le caractère approprié de telles
mesures. Dans le cas d'espèce, la Cour considère que, contrairement à l’allégation
de l’État défendeur, sa compétence matérielle ne peut pas être conditionnée par
le fait que les élections n'ont pas été contestées au niveau interne.
30. La Cour en conclut qu’elle peut ordonner l'annulation d'une élection si elle estime
que cette mesure est appropriée pour remédier à la violation constatée. Cette
exception de l’État défendeur est considéré infondée et rejetée, en conséquence.
31. S'agissant de exception relative à l'absence d’invocation par le Requérant d’un cas
de violation des droits de l'homme, la Cour note qu’en vertu de l’article 3(1) du
Protocole ci-dessus cité, elle est investie du pouvoir de connaitre de toute
allégation de violation des droits de l'homme. La Cour a estimé que pour que sa
compétence matérielle soit établie, il suffit que les droits dont les violations sont
alléguées soient protégés par la Charte ou par tout autre instrument des droits de
32. En l'espèce, et contrairement aux exceptions soulevées par l'État défendeur, la
Cour note que le Requérant allègue la violation par l'État défendeur des droits de
l'homme et des obligations prévues à la Charte, au Protocole de la CEDEAO sur
la démocratie et la bonne gouvernance et à la CADEGS (voir paragraphe 7 du
SF. D. O et autres c. République-Unie de Tanzanie (recevabilité) (28 mars 2014) 1 RICA 371 8 74;
P. C. c. République Unie de Tanzanie (recevabilité) (28 mars 2014) 1 RICA 413 8
118.
© L'Etat défendeur est devenue partie à la Charte Africaine de la Démocratie Et de la Gouvernance (ci — après dénommé CADEG), le 11 juillet 2012 ainsi qu'au le Protocole A/SP1/12/01 de la Communauté Economique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO) sur la démocratie et la bonne gouvernance, additionnel au Protocole relatif au mécanisme de prévention, de règlement des conflits, de maintien de la paix et de la sécurité (Protocole de la CEDEAO sur la démocratie), le 20
février 2008.
présent arrêt), instruments qu’elle est habilitée à interpréter et appliquer en vertu
de l’article 3(1) du Protocole.”
33. En conséquence, cette exception est rejetée.
B. Sur l'exception d’incompétence personnelle de la Cour
34. L'État défendeur allègue que la Cour n’est pas compétente pour connaitre de
l'affaire du fait que, conformément à l'article 10 du Protocole additionnelle
A/SP/01/05 sur la Cour de Justice de la CEDEAO, les recours en manquement
des obligations par les États membres sont réservés aux entités spécifiques dont
les individus ne font pas partie.
35. Le Requérant, n’a pas répliqué.
36.La Cour note que cette exception est soulevée par l'État défendeur comme
condition de recevabilité. Toutefois, elle relève de la compétence du fait que l’État
défendeur du fait qu'il s'agit d’une exception relative à la qualité pour saisir la Cour.
37. La Cour note d'emblée que cette allégation est basée sur les conditions régissant
la compétence de la Cour de Justice de la CEDEAO et la recevabilité des requêtes
devant celle-ci, alors que ces conditions ne lui sont pas applicables. Par contre,
les conditions d'accès à la Cour de céans par les individus sont régies par son
Protocole et son Règlement. Cette exception est donc dépourvue de tout
fondement et est rejetée.
7 Voir Actions pour la protection des droits de l'homme c. République de Côte d'Ivoire (fond et
réparations) (18 novembre 2016) 1 RICA 697, 88 47-65.
C. Sur les autres aspects de la compétence
38. La Cour ayant constaté que rien dans le dossier n'indique qu’elle n’est pas
compétente au regard des autres aspects de la compétence, elle conclut qu’elle a :
ii la compétence personnelle, dans la mesure où l'État défendeur est
partie à la Charte, au Protocole et a déposé la Déclaration qui permet
aux individus et aux organisations non gouvernementales de saisir
directement la Cour. A cet égard, la Cour rappelle sa position
antérieure selon laquelle le retrait par l'État défendeur de sa déclaration
le 25 mars 2020 n'a pas d'effet sur la présente requête, car le retrait a
été effectué après le dépôt de la requête devant la Cour®.
ï. La compétence temporelle, dans la mesure où les violations alléguées
ont été perpétrées, en ce qui concerne l’État défendeur, après l'entrée
en vigueur des instruments suscitées ;
ïi. la compétence territoriale, les faits de la cause s'étant produits sur le
territoire d'un État partie au Protocole, à savoir l'État défendeur.
39. Au vu de ce qui précède, la Cour déclare qu'elle a compétence pour connaître de
la présente affaire.
VI. SUR LES EXCEPTIONS PRELIMINAIRES
40. La Cour note que l'État défendeur a soulevé les exceptions préliminaires relatives
à la recevabilité de la Requête, à savoir : A) abus du droit d’ester en justice, B) le
défaut de lien entre la Requête principale et la Requête additionnelle et C) le défaut
d'intérêt à agir et de preuve de qualité de victime du Requérant.
41. La Cour souligne que même si ces exceptions ne sont pas spécifiquement prévues
au regard du Protocole et du Règlement, elle est tenue de les examiner.
8 Voir Paragraphe 2 ci-dessus.
A. Sur l’exception tirée de l’abus du droit d’ester en justice
42. L'État défendeur allègue que le Requérant « inconnu » fait un usage abusif de
« l'actio popularis », en utilisant des facilités d'accès à la Cour pour déposer
plusieurs requêtes, notamment les requêtes numéros « 207/2019, 218/2019,
232/2019, 316/2019, 316/2019, 317/2019, 349/2019, 391/2019 et 447/2019. »
43. Le Requérant n'a pas répliqué.
44.La Cour note qu'une requête est dite abusive, entre autres, si elle est
manifestement frivole ou s'il peut être discerné qu'un requérant l'a déposée de
mauvaise foi contrairement aux principes généraux du droit et aux procédures
établies de la pratique judiciaire. À cet égard, il convient de noter que le simple fait
qu'un requérant dépose plusieurs requêtes contre un État défendeur particulier ne
traduit pas nécessairement un manque de bonne foi de la part du requérant.
45. La Cour note en outre que le fait pour une requête d’avoir été inspirée par des
motifs de propagande politique, même s'il était établi, n'aurait pas nécessairement
pour conséquence de rendre la requête abusive et qu'en tout état de cause ce fait
ne peut être établi qu'après un examen au fond.
46. Elle conclut que la question de l’abus de droit d’ester en justice ne peut être
tranchée au stade actuel de la procédure.
B. Sur l'exception tirée du défaut de lien entre la Requête principale et
la Requête additionnelle
47. L'État défendeur allègue qu’une requête additionnelle n'est recevable que si elle
se rattache à la requête principale par un lien suffisant. En l'espèce, il soutient que
la Requête principale No. 020/2019 et 021/2019 porte sur le Code pénal et
l’annulation de la condamnation de M. Y Z, alors que la Requête additionnelle
porte sur l'annulation des élections municipales et communales. Pour soutenir son allégation, l’État défendeur cite la décision de la Cour de céans dans
l'affaire S. Ap c. République du Bénin rendue le 29 mars 2019, Requête 013/2017°.
48. Le Requérant n'a pas répliqué.
49. La Cour note que la Règle 62 du Règlement"° dispose :
1. À n’importe quelle phase de la procédure, la Cour peut, d'office ou à la
demande de l'une des parties, ordonner la jonction ou la disjonction
d'instances lorsqu'elle estime qu’une telle mesure est appropriée.
2. La Cour, lorsqu'elle le juge nécessaire, peut recueillir l'avis des parties sur la
jonction et la disjonction.
50. La Cour relève que cette disposition du Règlement lui confère le pouvoir de joindre
et disjoindre des instances. En l'espèce, ne s'agissant pas d’un cas de disjonction,
le Cour estime qu'elle est, a fortiori, investie de prérogative de rejeter des
soumissions additionnelles et ordonner qu'elles soient utilisées pour ouvrir une
nouvelle instance, si l'intérêt d’une bonne administration de la justice l'exige.
51. La Cour, contrairement à sa décision dans l'affaire S. Ap c. République du Bénin ci-
dessus citée par l'État défendeur, estime que dans le cas d'espèce, les allégations
des violations dans les soumissions additionnelles justifient qu’elles soient
considérées comme de nouvelle requête et qu’elles soient enregistrées comme
telle. En conséquence, cette question préliminaire est rejetée.
C. Sur l'exception tirée du défaut d'intérêt à agir et de la preuve de qualité
de victime
52. L'État défendeur allègue que, dans son anonymat, le Requérant a présenté à la
Cour une douzaine de requêtes. Il soutient que «[e]n aucune de ces affaires, le
°S. A. c. République du Bénin, CAfDHP, Requête No. 013/2017, Arrêt du 29 mars 2019 (fond), 88
63-64.
1° Article 54 du Règlement du 2 Juin 2010.
demandeur ne motive son intérêt personnel à agir. Il ne se présente pas comme
une victime de violations des droits de l'homme. Or, il est de principe que l’action
en justice est conditionnée entre autres par la capacité, la qualité et l'intérêt à agir.
L'intérêt à agir doit être actuel, légitime et personnel».
53. L'État défendeur fait valoir que le défaut d'intérêt à agir du Requérant fait que la
Requête devienne une actio popularis, ce qu'il contexte. À cet égard, il s'appuie
sur l'opinion individuelle du Juge Fatsah Ouguergouz dans l'affaire Az
Ax Ar, the Legal and Aj Av Centre et R. C. M. X A
de Tanzanie, selon laquelle « une action devant la Cour n’est en effet recevable
que si son auteur justifie de son intérêt propre à l'engager. »
54. La Cour fait observer qu’aux termes de l’article 5(3) du Protocole, « la Cour peut
permettre aux individus ainsi qu'aux ONG dotées du statut d’observateur auprès
de la Commission africaine d'introduire des requêtes directement devant elle ».
55. La Cour note que ces dispositions n'obligent pas les individus ou les ONG à
démontrer un intérêt personnel dans une requête pour accéder à la Cour. La seule
condition préalable est que l'Etat défendeur, en plus d'être partie à la Charte et au
Protocole, ait déposé la Déclaration permettant aux individus et aux ONG
d'introduire des requêtes devant la Cour. Cela tient compte des difficultés pratiques
que les victimes de violations des droits de l'homme peuvent rencontrer pour porter
leurs plaintes devant la Cour, permettant ainsi à toute personne de porter ses
plaintes devant la Cour sans avoir besoin de démontrer un intérêt individuel direct
56. En l'espèce, la Cour observe que le Requérant allègue que les dispositions
contestées des lois électorales béninoises ne sont pas conformes à la Charte, à la
CADEG et au Protocole de la CEDEAO sur la démocratie.
1! Commission Africaine des Droits de l'Homme et des Peuples, Communication 25/89, 47/90, 56/91, 100/9-Comité-des-Avecats-peur les droits de l'homme, Union Interafricaine des Droits de l'Homme, Les Témoins de Jehovah (WTOAT) v. Zaïre, 8. 51.
57. La Cour note que ces allégations relèvent du contentieux objectif en ce que les
dispositions légales contestées sont d'intérêt pour tous les citoyens car il a une
incidence directe ou indirecte sur leurs droits individuels, la sécurité et le bien-être
de leur société et de leur pays. Étant donné que le Requérant lui-même est citoyen
de l'Etat défendeur et que les dispositions des lois électorales ont un impact
potentiel sur son droit de participer aux affaires politiques de son pays, il est
évident qu'il a un intérêt direct dans la matière.
58. La Cour rejette par conséquent cette exception
59. Aux termes de l'article 6(2) du Protocole, « [Ja Cour statue sur la recevabilité des
requêtes en tenant compte des dispositions énoncées à l’article 56 de la Charte ».
60. Aux termes de la Règle 50(1) du Règlement‘, « [Ia Cour procède à un examen
de la recevabilité des requêtes introduites devant elle, conformément aux
articles 56 de la Charte et 6, alinéa 2 du Protocole, et au présent Règlement».
61. La règle 50(2) du Règlement‘*, qui reprend en substance l’article 56 de la Charte,
dispose :
Les requêtes introduites devant la Cour doivent remplir toutes les conditions ci-après :
a) Indiquer l'identité de leur auteur, même si celui-ci demande à la Cour de
garder l'anonymat ;
b) Être compatibles avec l’Acte constitutif de l'Union africaine et la Charte ;
c) Ne pas être rédigées dans des termes outrageants ou insultants à
l'égard de l'État concerné et ses institutions ou de l’Union africaine ;
d) Ne pas se limiter à rassembler exclusivement des nouvelles diffusées par
les moyens de communication de masse ;
e) Être postérieures à l'épuisement des recours internes s'ils existent, à
moins qu'il ne soit manifeste à la Cour que la procédure de ces
recours se prolonge de façon anormale ;
12 Ancien article 40 du Règlement du 2 juin 2010.
f) Être introduites dans un délai raisonnable courant depuis l'épuisement
des recours internes ou depuis la date où la Commission a été saisie
de l'affaire ;
g) Ne pas concerner des affaires qui ont été réglées par les États
concernés, conformément aux principes de la Charte des Nations Unies,
de l'Acte constitutif de l'Union africaine ou des dispositions de la Charte.
62. L'État défendeur a soulevé deux (02) exceptions d’irrecevabilité de la Requête.
A. Conditions de recevabilité en discussion entre les parties
63. L'État défendeur a soulevé deux exceptions d'irrecevabilité de la Requête, à
savoir : i) exception tirée d’incompatibilité de la Requête avec la Charte et l'acte
constitutif de l'Union Africaine et ii) exception tirée du non-épuisement des recours
internes.
i. Sur l'exception tirée d’incompatibilité de la Requête avec la
Charte et l’acte constitutif de l’Union Africaine
64. S'appuyant sur la jurisprudence de la Commission africaine des droits de l'homme
et des peuples (ci-après désignée « la Commission ») dans l'affaire F. K. c.
Libéria!*, H. M. X AlC5 et S. A. c. Togo!S, l'État défendeur soutient que les
allégations du Requérant sont basées sur des craintes que les élections
municipales et communales empêcheront les candidats sérieux de se présenter à
l'élection du Président de la République. Il conclut qu’une telle demande est
contraire à la Charte et à l'Acte constitutif de l'Union africaine.
65. Le Requérant n’a pas répliqué.
14 Communication No. 1/88, F. Ao c. Libéria.
15 Communication No. 13/88, H. M c. Algérie.
16 Communication No. 35/89), S. A c. Togo.
66. La Cour rappelle que s'agissant de cette condition
Le contenu de la requête doit être relatif à des droits garantis par la Charte
ou tout autre instrument des droits de l’homme ratifié par l'État concerné,
sans exiger que les droits particuliers dont la violation est alléguée soient
nécessairement précisés dans la requête.!”
67. La Cour note qu’en l'espèce, la demande d'annulation des élections municipales
et communales afin de faciliter la participation des « candidats d’opposition »
« sérieux » à l'élection du Président de la République » ne saurait être considérée
comme incompatible avec la Charte et l’Acte constitutif de l'Union africaine. Au
contraire, le Requérant demande à la Cour de constater les violations des droits
de l'homme prévus à la Charte, à la CADEG et le Protocole de la CEDEAO sur la
démocratie. Or, l’un des objectifs de l'Union africaine prévu à l'article 3(h) est la
promotion et la protection des droits de l'homme et des peuples, conformément à
la Charte et aux autres instruments pertinents relatifs aux droits de l’homme”.
68. Cette exception est donc rejetée.
ii. Sur l'exception tirée du non-épuisement des recours internes
69. L'État défendeur allègue qu’il existe des recours internes prévus à l’article 110 du
Code électoral de 2019 qui donne la compétence à la Cour Suprême pour
connaître de « tout le contentieux électoral en ce qui concerne les élections
communales. » Il soutient que le même article prévoit « la possibilité de reprendre
des élections s'il y a lieu. » Il soutient, en outre, que les « personnes intéressées
par ce recours les ont exercés et des décisions ont été rendues par la Cour
Suprême ».
70. Le Requérant n’a pas répliqué.
1P. C c. République-Unie de Tanzanie (recevabilité) (28 mars 2014) 1 RICA 413, 8 118.
18 A. T c. République-Unie de Tanzanie (fond) (20 novembre 2015 (2015) 1 RICA 482, 8 52.
71. 11 est de jurisprudence constante que l'exigence de l'épuisement des recours
internes ne s'applique qu'aux voies de recours judiciaires ordinaires, disponibles
et efficaces!°. Sur l'existence des recours internes, la Cour note que l’État
défendeur allègue que le Requérant n'a pas exercé le recours devant la Cour
Suprême prévu à l'article 110 (1)(2)(3) du Code électoral de 2019, qui dispose :
Tout le contentieux électoral en ce qui concerne les élections communales
relève de la compétence de la Cour suprême.
Dans tous les cas, la Cour suprême dispose de six (06) mois maximum à
compter de l'introduction de tout recours pour rendre ses décisions et
ordonner les reprises d'élections.
La reprise partielle des élections législatives ou communales est organisée
en deux fois maximum.
72. La Cour note, en outre, que l'article 117 de la Constitution béninoise dispose que
« [Ja Cour Constitutionnelle statue obligatoirement sur la constitutionnalité des lois
organiques et des lois en général avant leur promulgation ».
73. Il résulte de ces dispositions que l'existence des recours internes n’est pas en
discussion. Il reste donc à savoir quels sont les recours internes adéquats pour les
violations alléguées par le Requérant.
74. La Cour note que le Requérant fonde les violations alléguées sur l'illégitimité de
l’Assemblée nationale, le non-respect du délai minimum de six (06) mois pour
modifier unilatéralement et substantiellement les lois électorales avant les
élections communales et municipales ainsi que les conséquences desdites
violations sur la paix et la sécurité nationale et internationale, et sur son droit à
l'égalité devant la loi. Plus spécifiquement, le Requérant fonde sa demande
d'annulation des élections communales et municipales essentiellement sur le fait
que le Code électoral de 2019 a été modifié par une Assemblée nationale
19 A. T c. République-Unie de Tanzanie (fond) (20 novembre 2015 (2015) 1 RICA 482, 8 64. Voir aussi W. O. N et 9 autres c. République-Unie de Tanzanie (fond) (18 mars 2016 (2016) 1 RICA 526,
75. La Cour fait observer que les raisons invoquées par le Requérant pour soutenir
ses allégations des violations sont plutôt relatives à la conformité des dispositions
contestées des Codes électoraux de 2018 et le 2019 avec la Charte, la CADEG et
le Protocole de la CEDEAO sur la démocratie et non à la régularité matérielle des
élections communales et municipales du 17 mai 2020.
76. La Cour tient à signaler qu’il s’agit des questions déjà tranchées par la Cour
constitutionnelle de l'Etat défendeur dans ses Décisions DCC18-199, du 02
octobre 2018 et DCC 19-525 du 14 novembre 2019. Par ces décisions, les deux
(02) Codes électoraux contestés par le Requérant ont été déclarés conformes à la
Constitution.
77. La Cour fait observer que le contrôle de constitutionnalité dans l'État défendeur
concerne aussi bien la procédure suivie pour l’adoption de la loi que son contenu”
et que la déclaration de conformité d’une loi avec la constitution implique aussi sa
conformité avec la Charte. En l'espèce, la déclaration de conformité à la
Constitution du Code électoral, y compris la procédure de son adoption, suppose
sa conformité avec la Charte et ses instruments additionnels.
78.Au vu de ce qui précède, la Cour estime qu'il ne serait pas raisonnable de
demander au Requérant de soumettre à la Cour constitutionnelle des questions
sur lesquelles celle-ci s’est déjà prononcée.
79. En conséquence, elle rejette l'exception du non-épuisement des voies de recours
internes soulevée par l'État défendeur.
B. Sur les autres conditions de recevabilité
80. La Cour relève que les Parties ne contestent pas le fait que la Requête remplit les
conditions énoncées aux alinéas 1, 3, 4, 6 et 7 de l'article 56 de la Charte et à la
2 L'article 35 du Règlement intérieur de la Constitution dispose, dans le cadre du contrôle de conformité à la Constitution : « La Cour constitutionnelle se prononce sur l'ensemble de la loi, tant sur son contenu que sur la procédure de son élaboration » ;
Règle 50(2)(a)(c)(d)(f) et (g) du Règlement**. Toutefois, la Cour se doit d’examiner
si ces conditions sont remplies.
81. La Cour note que la condition énoncée à la règle 50(2)(a) du Règlement a été
remplie, le Requérant ayant clairement indiqué son identité même s’il a obtenu de
la Cour de garder l'anonymat.
82. La Cour observe que la Requête n’est pas rédigée dans des termes outrageants
ou insultants de sorte qu’elle satisfait à la règle 50(2) (c) du Règlement.
83. La Cour constate que la présente Requête n'est pas fondée exclusivement sur des
nouvelles diffusées par les moyens de communication de masse mais plutôt
concerne des dispositions législatives de l'État défendeur, et par conséquent,
remplit la condition énoncée à la règle 50(2)(d) du Règlement.
84. La Cour observe que le Code électoral de 2018 contesté par le Requérant a été
promulgué le 9 octobre 2018, suite à la décision de conformité de la Cour
Constitutionnelle de DCC 18-199 du 02 octobre de 2018. La Requête a été
déposée le 2 septembre 2019, soit dix (10) mois et vingt-quatre (24) jours après.
Le Code électoral de 2019, invoqué par les parties dans leurs soumissions après
le dépôt de la Requête, a été promulgué le 15 novembre 2019. Ainsi, cette date
n’est pas relevant à l'effet du calcul du délai raisonnable.
85. Compte tenu du fait que l'adoption du Code électoral de 2018 a été suivie des
recours internes par les acteurs politiques visant son annulation, la Cour estime
que le délai de dix (10) mois et vingt-quatre (24) jours est raisonnable pour déposer
une Requête devant elle, conformément à la règle 50(2)(f) du règlement.
86. La Cour relève enfin que la présente affaire ne concerne pas un cas qui a déjà été
réglé par les Parties conformément soit aux principes de la Charte des Nations
Unies, soit de l'Acte constitutif de l'Union africaine, soit des dispositions de la
Charte ou de tout instrument juridique de l'Union africaine. Elle remplit donc la
condition énoncée à la règle 50(2) (g) du Règlement.
21 Ancien article 40 du Règlement du 2 juin 2010.
22 Ancien article 40(1) du Règlement du 2 juin 2010.
87.Au vu de ce qui précède, la Cour conclut que la Requête remplit toutes les
conditions de recevabilité prévues aux articles 56 de la Charte et 50 du Règlement
et la déclare recevable en conséquence.
VII. SUR LE FOND
88. La Cour note que le Requérant allègue A) l'illégitimité et l'illégalité de l’Assemblée
nationale pour modifier les lois électorales ; B) la violation de l'obligation de créer
des organes électoraux indépendants et non impartiaux ; C) la violation de
l'obligation de ne pas modifier unilatéralement et substantiellement le loi portant
Code électoral de 2019 moins de six (06) mois avant les élections ; D) la violation
de l’obligation de garantir la paix et la sécurité nationale et internationale ; E) la
violation du droit à une égale protection de la loi.
A. Sur l'illégalité et l'illégitimité alléguées de l'Assemblée nationale pour
modifier les lois relatives aux élections
89. Le Requérant allègue que « l’article 13 de la Charte consacre l'égalité de suffrage
entre les électeurs, candidats et élus ». À cet égard, il soutient que « la Charte
exige qu’on s'assure du bon accomplissement des formes, des procédures et des
opérations qui l’'accompagnent. »
90. Le Requérant considère que « l'Assemblée nationale qui a voté le nouveau Code
électoral ayant servi à la tenue du scrutin du mai 2020 est illégale et illégitime», du
fait qu’elle « n'est pas représentative du peuple et ne peut donc voter un code
électoral permettant la tenue d'élections communales et municipales libres,
pluralistes et transparentes. »
91. Il allègue, en outre, « l'absence des partis politiques d'opposition dans le processus
des élections communales et municipales est incontestable », du fait que « [les
partis politiques qui ont participé au scrutin sont tous proches de Monsieur Aw
Aq ».
92. À titre d'illustration, le Requérant relève que le taux de participation dans les
bastions de l'opposition, notamment, celui de l’ex-Président De F... à Ah
ou au quartier Cadjèhoun de Ai n’a pas dépassé 10%. II cite aussi la faible
participation au quartier Zongo à Ai dans le bureau de vote où Monsieur AG
Ak qui était de 16,14%.
93. En conséquence de ce qui précède et de son exclusion forcée de la participation
directe aux affaires politiques de son pays et du fait qu’il n’a pas pu choisir son
« statut politique », le Requérant considère que les articles 1, 2, 13(1) et 20(1) de
la Charte ont été violés, ainsi que les articles 3 et 4 de la CADEG et 1(i)(2) du
Protocole de la CEDEAO sur la démocratie et le Chapitre 4.B de la Déclaration de
Bamako du 3 novembre 2000”.
94. L'État défendeur conteste cette allégation de manière générale dans sa réponse à
la demande d'annulation des élections communales et municipales, notamment en
soutenant que « la proximité entre les acteurs politiques n'enlève rien à la légalité
des élections démocratiques, le Requérant n'élevant aucun moyen juridique pour
soutenir le non-respect de conditions de fond ou de forme du processus électoral
tel que prévu par la loi en vigueur. »
95. La Cour note que le Requérant invoque la violation des articles 1, 2, 13(1) et 20(1)
de la Charte ainsi que des articles 3 et 4 de la CADEG, 1(i)(2) du Protocole de la
CEDEAO sur la démocratie et le Chapitre 4.B de la Déclaration de Bamako du 3
novembre 2000. La Cour estime, toutefois, que les allégations de violations ci-
dessus relèvent de la violation de l’article 13(1) de la Charte citées ci-dessus.
96. La Cour note que le Requérant allègue que l'Assemblée Nationale qui a voté le
Code électoral de 2019 est illégale parce qu’elle était peu représentative des
béninois, que peu de partis de l'opposition politique sérieuse ont pu présenter des
23 Déclaration de Bamako, adoptée le 3 novembre 2000 par les Ministres et chefs de délégation des États et gouvernements des pays ayant le français en partage lors du « Symposium international sur le bilan des pratiques de la démocratie, des droits et des libertés dans l’espace francophone ».
candidats aux élections communales et municipales; et qu'il a été exclu de la
participation directe aux affaires publiques de son pays et de choisir son « statut
politique ».
97. La Cour relève que la question qui se pose ici est celle de savoir si ces allégations
sont constitutives de violation du droit du Requérant de participer librement à la
direction des affaires publiques de son pays.
98. En l'espèce, la Cour note que le Requérant fait des affirmations sans les étayer.
En effet, il ne démontre pas dans quelles mesures la non-représentativité de
l’Assemblée nationale affecte sa capacité d'exercer son pouvoir législatif et, par
conséquent, comment une telle situation influe sur son droit de participer
directement aux affaires politiques de son pays et de choisir son statut politique.
À cet égard, la Cour de céans rappelle, comme elle l'a affirmé que « [d] es
affirmations d'ordre général selon lesquelles un droit a été violé ne sont pas
suffisantes. Des preuves plus concrètes sont requises».?*
99.Au vu de ce qui précède, l'allégation de violation du droit du Requérant de
participer directement à la direction des affaires publiques de son pays est rejetée.
B. Sur la violation alléguée de l'obligation de créer des organes électoraux
indépendants et impartiaux
100. Le Requérant allègue qu'il résulte des articles 13 de la Charte, 17 de la CADEG,
des résolutions de la Commission adoptées entre 1996 et 2008 sur les élections
et la démocratie, en particulier de la Résolution 164(XLVII) sur les élections en
Afrique du Sud et de l’article 3 du Protocole de la CEDEAO sur la démocratie,
« l'obligation de créer et renforcer des organes électoraux indépendants et
impartiaux ».
101. En se fondant sur le dictionnaire du droit international public (Bruxelles, 2001),
le Requérant définit l'indépendance comme « le fait pour une personne ou entité
de ne dépendre d'aucune autorité », et l'impartialité comme « l'absence de parti
24 A. Ae c. Tanzanie (fond), 8 140.
pris, de préjugé de conflit d'intérêts ». Il estime « qu’un organe électoral
indépendant doit jouir d'une autonomie administrative et financière et qu’il offre
des garanties suffisantes quant à l'indépendance et l'impartialité de ses
membres. »
102. Le Requérant reconnaît que le COS-LEPI « apparaît comme un véritable organe
électoral dans le processus d'organisation des élections au Bénin ». Par contre,
il conteste sa composition actuelle parce - que la minorité parlementaire qui a
désigné les quatre (4) membres de COS-LEPI n'est pas une véritable opposition
en ce qu'elle soutient tous des actions politiques du Président de la République
103. Le Requérant conteste, en outre, l'indépendance et l'impartialité du Directeur
général de l'Institut national de la statistique et de l'analyse économique et le
Directeur du service national de l’état civil du fait qu'ils sont nommés par le
gouvernement.
104. Le Requérant argue que l'indépendance et l'impartialité exigent que les autres
acteurs du processus électoral comme l'exécutif n'aient aucun pouvoir
disciplinaire sur l'organe électoral. À cet égard, il reproche à l’État défendeur la
garde à vue, pendant 48 heures, le coordinateur budgétaire de la CENA et l'envoi
au CENA par le Ministre des finances de l'inspecteur général des finances à la
CENA qui a révélé un manquant de trois cent vingt-cinq milliards
(325.000.000.000) milliards de francs CFA.
105. L'État défendeur allègue que, conformément à l'article 13 alinéa 1 du Code
électoral de 2019, « la CENA est dotée de la personnalité juridique. Elle dispose
d’une réelle autonomie par rapport aux institutions de la République…».
106. Il soutient qu'aux termes de l’article 25 du Code électoral de 2018 en vigueur au
moment des faits qui lui sont reprochés, « les personnes siégeant à la CENA ne
peuvent être poursuivies, arrêtées, détenues ou jugée s pour des opinions
émises ou des actes commis dans l’exercice de leurs fonctions. » Pour l’État
défendeur, cette disposition donne immunité aux membres de la CENA et qu'en conséquence, la crainte de violation invoquée par le Requérant n’équivaut pas à
la violation des instruments applicables.
107. La Cour relève que l’article 17(1)(2) de la CADEG dispose :
Les Etats parties réaffirment leur engagement à tenir régulièrement des élections
transparentes, libres et justes conformément à la Déclaration de l'Union sur les
Principes régissant les Elections démocratiques en Afrique. A ces fins, tout Etat
partie doit :
1. Créer et renforcer les organes électoraux nationaux indépendants et
impartiaux, chargés de la gestion des élections.
2. Créer et renforcer les mécanismes nationaux pour régler, dans les
meilleurs délais, le contentieux électoral.
108. L'article 3 du Protocole de la CEDEAO sur la démocratie dispose que :
Les organes chargés des élections doivent être indépendants et/ou neutres
et avoir la confiance des acteurs et protagonistes de la vie politique. En cas
de nécessité, une concertation nationale appropriée doit déterminer la
nature et la forme desdits Organes.
109. La Cour fait observer qu’elle a estimé qu'il résulte des dispositions ci-dessus qu'«
un organe électoral est indépendant quand il jouit d’une autonomie
administrative et financière et qu’il offre des garanties suffisantes quant à
l'indépendance et l’impartialité de ses membres. »°*
110. En l'espèce, la Cour note que le Requérant ne conteste pas l'autonomie
administrative et financière du COS-LEPI et de la CENA. Par contre, le
Requérant conteste l'indépendance et l'impartialité des membres du COS-LEPI
désignés par la minorité parlementaire et le pouvoir disciplinaire que le
gouvernement a sur les membres de la CENA.
25 S. At Au c. République de Côte d'Ivoire, CAfDHP, Requête n°044/2017, Arrêt (15 Juillet 2020) (fond), 8 200 ; Actions pour la Protection des droits de l'Homme c. République de Côte d'Ivoire, (fond et réparations) (18 novembre 2016), 1 RICA 697, 8 118 ;
111. La Cour note qu'au moment des faits reprochés à l’État défendeur, le Code
électoral en vigueur était celui du 2018, dont l’article 137 prévoit que le COS-
LEPI était composé de cinq (05) députés de la majorité parlementaire, quatre
(04) députés de la minorité parlementaire, du directeur général de l'Institut
national de la statistique et de l'analyse économique et du directeur du service
national en charge de l’état civil.
112. La Cour note que la question qui se pose est celle de savoir si la désignation des
quatre (04) membres du COS-LEPI par la minorité parlementaire ainsi que la
désignation du Directeur général de l'Institut national de la statistique et de
l'analyse économique et du Directeur du service national de l’état civil par le
gouvernement mettent en cause l'indépendance et l'impartialité dudit organe.
Pour la CENA, la question est de savoir si l'exercice du pouvoir disciplinaire sur
son coordinateur budgétaire par le gouvernement constitue une violation de son
indépendance et impartialité. Pour répondre à ces questions, il faut d'abord
déterminer si le COS-LEPI et la CENA sont des organes électoraux dans le sens
des dispositions ci-dessus citées.
113. Sur cette question, la Cour note que l'affirmation du Requérant selon laquelle le
COS-LEPI « apparaît comme un véritable organe électoral dans le processus
d'organisation des élections au Bénin » n'est pas contestée par l'État défendeur.
La Cour en déduit que les parties s'accordent sur le fait que le COS — LEPI est
un véritable organe électoral.
114. En ce qui concerne la CENA, sa nature d’un organe électoral est évidente, sa
mission étant, en vertu de l’article 16 alinéa 1 du Code électoral du 2018, la
« préparation, l'organisation du déroulement, la supervision des opérations de
vote et la centralisation des résultats… ».
115. Cette précision faite, la Cour va examiner l'indépendance et à l'impartialité de la
CENA et du COS-LEPI.
i. Sur l'indépendance et l’'impartialité de la CENA
116. La Cour note que le Requérant conteste l'Indépendance et l’impartialité de la
CENA, du fait que le coordinateur budgétaire de la CENA a été gardé à vue
pendant quarante — huit (48) heures et que le Ministre des finances a envoyé, à
la CENA, l'inspecteur général des finances qui a révélé un manquement de
caisse de trois cent vingt-cinq milliards (325.000.000.000) milliards de francs
CFA. De ce fait, le Requérant estime que l'État défendeur a mis en cause la
norme qui exige que l'exécutif n'ait aucun pouvoir disciplinaire sur l'organe
électoral.
117. Sur ce point, la Cour relève que, conformément aux alinéas 1 et 2 de l'article 20
du Code électoral de 2018 en vigueur à l’époque des faits reprochés à l'État
défendeur, la CENA était composée de cinq (05) membres, désignés par
l’Assemblée nationale, à raison de deux (02) par la majorité parlementaire, deux
(02) par la minorité parlementaire et d’un (01) magistrat de siège”.
118. Il résulte de ce qui précède que le coordinateur budgétaire de la CENA n'est pas
un membre de celle-ci mais plutôt un agent comptable public qui exerce ses
fonctions auprès du CENA sous le contrôle du Ministère des finances. Le
pouvoir disciplinaire exercé sur lui ne doit donc pas être confondu avec le
contrôle sur les membres de CENA qui, selon l’article 25 du texte ci-dessus cité,
« ne peuvent être poursuivis, arrêtés, détenus ou jugés pour des opinions émises
ou des actes commis dans l'exercice de leurs fonctions».
119. En conséquence, la Cour est d’avis que l’allégation du défaut d'indépendance et
d’impartialité de la CNA n’est pas établie. En conséquence, cette allégation est
rejetée.
26 Article 20 : La Commission électorale nationale autonome (CENA) est composée de cinq (05) membres désignés par l'Assemblée Nationale. Ils sont choisis parmi les personnalités reconnues pour leur compétence, leur probité, leur impartialité, leur moralité, leur sens patriotique et désignées à raison de : - deux (02) par la majorité parlementaire ; - deux (02) par la minorité parlementaire ; - un (01) magistrat de siège.
ii. Sur l'indépendance et l'impartialité du COS-LEPI
120. Sur le défaut d'indépendance et d’impartialité des quatre (04) membres du COS-
LEPI du fait qu'ils sont désignés par la minorité parlementaire qui ne représente
pas une véritable opposition, la Cour note qu'il n’est pas contesté qu'ils
appartiennent aux partis politiques différents du celui du Président de la
République. Elle note, en outre, que le fait qu’ils soient éventuellement proches
du Parti au pouvoir ou du Président de République relève de leur liberté de
détermination en matière d'alliance politique, ce qui relève d'ailleurs du droit à
l'association prévu à l’article 10 de la Charte”.
121. En ce qui concerne les deux (02) directeurs généraux membres du COS-LEPI,
la Cour note que l’État défendeur ne conteste pas qu’ils sont nommés par le
gouvernement. Par ailleurs, l’article 11 de la loi n° 94-009 du 28 juillet 1994,
portant création, organisation et fonctionnement des Offices à caractère social,
culturel et scientifique, prévoit qu’un « Directeur Général est nommé par décret
pris en Conseil des Ministres sur proposition du Ministre de tutelle, après avis du
Ministre chargé des Entreprises Publiques et Semi Publiques. »
122. La Cour fait observer que les deux (02) directeurs généraux ne siègent pas au
COS-LEPI à titre personnel, mais en raison de leurs fonctions comme directeurs
généraux. Étant donné qu'ils sont nommés et démis de leurs fonctions par le
gouvernement, leur dépendance fonctionnelle fait qu'en pratique, ils se
présentent comme représentant le gouvernement au COS-LEPI. En
conséquence, un observateur externe peut raisonnablement douter qu'un
directeur général nommé et démis par un gouvernement ne puisse pas suivre
des instructions de celui qui l'a nommé ou qu'il ne cherche pas à le favoriser, le
cas échéant.
123. La Cour a, par ailleurs, estimé que la composition d’un organe électoral doit être
équilibrée?®. En l'espèce, sur les onze (11) membres du COS-LEPI, sept (07)
sont sous contrôle du gouvernement, à savoir, les cinq (05) désignés par la
7 Az Ax Ar, the Legal and Aj Av Centre et R. C. M. X An (fond) (14 juin 2013) 1 RICA 34, 8 113.
28 Actions pour la protection des droits de l'homme c. République de Côte d'Ivoire (fond et
réparations) (18 novembre 2016) 1 RICA 697, 8 125.
majorité parlementaire et les deux (02) directeurs généraux qui sont nommés par
le gouvernement.
124. À la lumière de tout ce qui précède, la Cour conclut que le COS-LEPI, de par sa
composition, n'offre pas suffisamment des garanties d'indépendance et
d'impartialité et qu’il ne peut pas donc être perçu comme offrant de telles
garanties”°, en vertu des articles 17(2) de la CADEG et 3 du Protocole de la
CEDEAO sur la démocratie.
125. En conséquence, en plus des articles 17(2) de la CADEG et 3 du Protocole de
la CEDEAO sur la démocratie, l’État défendeur a violé l’article 13(1) de la Charte.
C. Sur la modification unilatérale et substantielle de la loi électorale moins
de six (06) mois avant les élections
126. Le Requérant allègue que l’État défendeur est partie au Protocole de la CEDEAO
sur la démocratie, tel que réaffirmé par sa Cour constitutionnelle dans sa
décision DCC 15-086 du 14 avril 2015. Il en conclut que l'État défendeur est
soumis à l'article 2.1 du Protocole de la CEDEAO sur la démocratie qui dispose
qu'« [ajucune réforme substantielle de la loi électorale ne doit intervenir dans les
six (06) mois précédant les élections, sans le consentement d'une large majorité
des acteurs politiques ».
127. Le Requérant interprète l’article 2(1) du Protocole de la CEDEAO comme
interdisant des réformes substantielles de la loi électorale dans les six (06) mois
précédant les élections, sauf consentement d’une large majorité des acteurs
politiques. Il allègue qu'en l'espèce, « la réforme du Code électoral a été votée
après le dialogue politique non inclusif, donc sans consentement d’une large
majorité des acteurs politiques ».
128. Le Requérant allègue, en outre, qu’entre le 15 novembre 2019, date d'adoption
du Code électoral de 2019 et le 2 mars de 2020, date fixée par la CENA pour le
2° Idem, 8 133.
début du dépôt des dossiers de candidature en vue des élections communales
et municipales, il s'est écoulé moins de six (06) mois.
129. Il conclut que l’article 2(1) du Protocole de la CEDEAO sur la démocratie citée ci-
dessus a été violé, le Code électoral ayant été adopté à moins de six (06) mois
de la tenue des élections communales et municipales, et sans consentement
d’une large majorité des acteurs politiques.
130. L'État défendeur réfute le mode de computation faite par le Requérant, et
soutient que les six (06) mois doivent être comptés entre le 15 novembre 2019
et le 17 mai 2020, date des élections. Ce qui fait, selon lui, plus de six (06) mois.
131. L'État défendeur allègue que le Protocole de la CEDEAO sur la démocratie a été
adopté « dans le cadre de la communauté CEDEAO avec des règles de contrôle
strictes qui s'imposent à la Cour du présent siège lorsqu'elle y recourt. »
132. La Cour note que l’article 2(1) du Protocole de la CEDEAO sur la démocratie
dispose qu'« aucune réforme substantielle de la loi électorale ne doit intervenir
dans les six (6) mois précédant les élections, sans le consentement d’une large
majorité des acteurs politiques.
133. La Cour note que l'État défendeur a ratifié le Protocole de la CEDEAO sur la
démocratie, le 21 décembre 2001, et rien dans le dossier n'indique qu'il n'y est
plus partie. À cet égard, le Requérant affirme que la Cour constitutionnelle du
l'État défendeur, dans sa décision DCC 15-086 du 14 avril 2015, a réaffirmé que
l'État défendeur est toujours lié par ce Protocole.
134. La Cour note que l’article 2(1) ci-dessus prévoit les exigences suivantes : i) la
réforme porte sur la loi électorale ; ii) elle doit être substantielle ; et iii) elle doit
intervenir durant les six (06) précédant les élections, sauf le consentement d’une
large majorité des acteurs politiques.
135. La Cour note que les deux premières conditions ne sont pas discutées et rien
dans le dossier n'indique que la loi électorale n’a pas été reformée de manière
substantielle.
136. La Cour note, par contre, que les Parties ne s'accordent pas sur la computation
du délai de six (6) mois et sur la réforme consensuelle. Il faut donc déterminer la
signification du terme « élections » dans le contexte du Protocole de la CEDEAO
sur la démocratie et la date du départ de la computation du délai de six (06)
mois.
137. La Cour est d'avis que dans le contexte de ce Protocole, « élections » veut dire
la date du vote, c’est-à-dire, le 17 mai 2020, date des élections communales et
municipales. Le point de départ de la computation du délai de six (06) moi est le
15 novembre 2019, qui correspond à la date de la publication du Code électoral
de 2019 dans le journal officiel. Ainsi, entre le 15 novembre 2019 et le 17 mai
2020, six (06) et deux (02) jours se sont découlés.
138. En conséquence, la Cour considère que l'Etat défendeur n’a pas violé son
obligation de ne pas modifier la loi électorale dans les six (6) mois précédant les
élections.
Sur l’allégation de violation de l’obligation de garantir la paix et la
sécurité nationale et internationale
139. Le Requérant allègue que des multiples violations des droits et obligations en
matière des droits de l'homme, notamment la composition déséquilibrée du COS-
LEPI affectant l'indépendance et l'impartialité de cet organe électoral, et la
discrimination, constituent une menace à la paix. Il considère d’ailleurs que la
paix n’est pas seulement l'absence de guerre.
140. Le Requérant soutient que « l’affaiblissement du règne des droits de l'homme,
de la justice et des institutions démocratiques fait le lit du terrorisme. » À cet
égard, Il fait référence à « la coïncidence des évènements malheureux des 1er
et 02 mai 2019 à Cadjèhoun entre l'enlèvement des touristes français dans le
parc de la Pendjari par des djinadistes venus du Ag Af. » Pour le Requérant, il en résulte une violation potentielle de l’article 23 (1) de la Charte
par l’État défendeur.
141. L'État défendeur n’a pas répondu à cette allégation.
142. L'article 23 de la Charte dispose
1. Les peuples ont droit à la paix et à la sécurité tant sur le plan national que
sur le plan international. Le principe de solidarité et de relations amicales
affirmé implicitement par la Charte de l'Organisation des Nations Unies et
réaffirmé par celle de l'Organisation de l'Unité Africaine est applicable aux
rapports entre les Etats.
2. Dans le but de renforcer la paix, la solidarité et les relations amicales, les
Etats, parties à la présente Charte, s'engagent à interdire :
i. qu'une personne jouissant du droit d'asile aux termes de l'article
12 de la présente Charte entreprenne une activité subversive
dirigée contre son pays d'origine ou contre tout autre pays, parties
à la présente Charte ;
ï.que leurs territoires soient utilisés comme base de départ
d'activités subversives ou terroristes dirigées contre le peuple de
tout autre Etat, partie à la présente Charte.
143. La Cour relève que les violations graves et massives des droits de l'homme,
surtout dans le contexte électoral, peuvent conduire à la dégradation de la paix
et de la sécurité nationale et internationale. Elle rappelle qu’ils sont du domaine
public les situations où la mauvaise organisation des élections, accompagnées
des violations graves et massives des droits de l'homme, ont conduit à des
troubles qui ont causés des pertes énormes en vie humaine et des dégâts
matérielles.
144. La Cour est convaincue qu'il existe une connexion chaque fois grandissantes
entre les droits de l'homme et la paix. Cependant, elle constate que, dans le cas
d'espèce, le Requérant fait des allégations sans les étayer. A cet égard, la Cour
de céans fait observer que « [d]es affirmations d'ordre général selon lesquelles un droit a été violé ne sont pas suffisantes. Des preuves plus concrètes sont
145. En conséquence, cette allégation est rejetée.
E. Sur l’allégation de violation du droit à une égale protection de la loi
146. Le Requérant allègue que « la composition du COS-LEPI est totalement
déséquilibrée en faveur du pouvoir et que ce déséquilibre affecte l'Independence
et l’impartialité de cet organe électoral ».
147. || allègue qu'« [e]n ne plaçant pas tous les candidats potentiels sur un pied
d'égalité, la composition actuelle du COS-LEPI viole le droit à une protection de
la loi, consacré par les différents instruments des droits de l'homme ci-dessus
mentionnées ratifiés par l'État défendeur, particulièrement l'article 10(3) de la
CADEG et l’article 3(2) de la Charte.
148. L'État défendeur soutient que la composition du COS-LEPI ne présente aucun
élément d'illégalité, l'article 137 du Code électoral de 2018 prévoyant que le
COS-LEPI est composé de onze (11) membres désignés comme suit : cinq (05)
députés par la majorité parlementaire, quatre (04) par la minorité parlementaire,
du directeur général de l'Institut national de la statistique et de l'analyse
économique et du directeur du service national en charge de l’état civil.
149. L'État défendeur allègue que, conformément à ce qui a été convenu avec la
Commission des lois, de l'administration et des droits de l'homme de
l’Assemblée Nationale, cinq (05) membres du COS-LEPI ont été désignés par
l’As Ay, qui est la majorité parlementaire. Le Ad Ac, qui
est la minorité parlementaire, a désigné les quatre (04) membres restants. Selon
l’État défendeur, les membres du COS-LEPI ont été nommés, conformément à
3 A. T c. Tanzanie (fond), 8 140.
l’article 137 du Code électoral de 2018 ci-dessus cité. La composition du COS-
LEPI est donc légale et légitime.
150. L'article 3 de la Charte africaine est libellé comme suit : « 1. Toutes les
personnes bénéficient d’une totale égalité devant la loi. 2. Toutes les personnes
ont droit à une égale protection de la loi ».
151. La Cour note que le principe d'égalité devant la loi résulte de ce texte*!. Tel que
libellé, il comprend deux volets : la première est relative à l'obligation des entités
en charge de l'application de la loi de le faire de manière égale pour tous. Le
second volet implique que la loi, elle-même, traite des personnes de façon
152. La Cour note que, en l'espèce, la disposition contestée par le Requérant donne
la même opportunité d’être membre du COS-LEPI à tous les partis politiques,
qu'ils soient majoritaires ou minoritaires à l’Assemblée nationale, en fonction de
leur niveau de représentation. À cet égard, la Cour a estimé que ce principe « ne
requiert pas nécessairement un traitement égal en toutes les circonstances et
peut permettre un traitement différencié des individus placés dans des situations
différentes. » En effet, la différence de traitement entre les partis majoritaires et
minoritaires en ce qui concerne la représentation au COS-LEPI résulte de leurs
différences de représentation à l'Assemblée nationale.
153. La Cour relève qu'il résulte de ce qui précède que la répartition des sièges au
COS-LEPI est conforme à l'article 137 du Code électoral de 2018. Cette
conclusion n’est, d’ailleurs, pas contestée par le Requérant. Il conteste plutôt le
fait que la minorité parlementaire, étant proche du Président de la République,
ne constitue pas une opposition sérieuse. Or, ce type jugement relève de la
31 Ayants droit de feus Z et al et Mouvement Burkinabé des droits de l'homme et des peuples c. Ag Af (fond) (2014) 1 RICA 226, 8 167. Voir aussi J. Ao c. République Unie de Tanzanie, CAfDHP, Requête n° 018/2018, arrêt du 15 juillet 2020 (fond et réparations), 8 87.
3 K.O.N et C. Am Aa c. République-Unie de Tanzanie (fond), (28
septembre 2017) 2 RICA 67, 8 150-152.
33. Ao c. Tanzanie (fond et réparations), 8 87.
sphère politique que la Cour n'est pas censée connaître, sauf si elles entraînent
des violations des droits de l'homme.
154. À la lumière de ce qui précède, la Cour rejette l’allégation du Requérant.
IX. SUR LES RÉPARATIONS
155. Le Requérant demande à la Cour d’ordonner des mesures pour remédier aux
violations de ses droits, y compris la modification de la loi électorale et
l'annulation des élections communales et municipales du 17 mai 2020.
156. L'État défendeur demande à la Cour de rejeter la demande de réparations
formulée par le Requérant et de le condamner à lui payer deux milliards (2 000
000 000) de francs CFA, à titre reconventionnel, pour l'ensemble des préjudices
subis et encourus.
157. L'article 27(1) du Protocole dispose « lorsqu'elle estime qu'il y a eu violation d’un
droit de l'homme ou des peuples, la Cour ordonne toutes les mesures
appropriées afin de remédier à la situation, y compris le paiement d’une juste
compensation ou l’octroi d’une réparation».
158. La Cour a estimé que les réparations ne sont accordées que quand la
responsabilité de l'État défendeur pour fait internationalement illicite est établie
et que le lien de causalité est établi entre l'acte illicite et le préjudice allégué.
Comme la Cour l’a indiqué précédemment, le but des réparations est de faire en
sorte que la victime se retrouve dans la situation qui aurait été la sienne si les
violations constatées n'avaient pas été commises**.
34 Voir LI. Rc. République-Unie de Tanzanie, CAÏDHP, Requête n° 009/2015, arrêt du 28 mars 2019 (fond et réparations), 8 116-118 et Ayants droits de feus Z. et al et Mouvement Burkinabé des droits de l'homme et des peuples c. Ag Af (réparations) (5 juin 2015) 1 RICA 265, 8 60.
159. La Cour rappelle qu’elle a déjà constaté que l’État défendeur a violé les droits du
Requérant prévu aux articles 17(2) de la CADEG, 2(1) et 3 du Protocole de la
CEDEAO sur la démocratie et, en conséquence, l’article 13(1) de la Charte.
A. Réparations non pécuniaires
160. Le requérant prie la Cour d’ordonner à l’État défendeur de modifier son code
électoral de 2019 et d'annuler les élections locales et municipales du
17 mai 2020.
i. Modification du Code électoral
161. Le Requérant demande à la Cour d’ordonner l'État défendeur de modifier le
Code électoral. L'État défendeur s'oppose à cette demande pour qui, selon lui,
est mal fondée.
162. La Cour note que l'interdiction de modifier les lois électorales moins de six (06)
mois avant les élections, sauf s’il y a des consensus, est un principe qui tend à
éviter des changements visant à favoriser ou défavoriser certaines candidatures
ou partis politiques à la veille des élections, et ce indépendamment du contenu
de la modification.
163. La Cour note qu'en dehors de la prohibition formelle de modifier les lois
électorales moins de six (06) mois avant les élections, la substance de la loi
modifiée peut aussi être en cause. Dans le cas d'espèce, le Requérant ne
conteste pas une disposition spécifique du Code électoral modifié, plutôt le fait
qu'il a été modifié moins de six (06) mois avant les élections.
164. Par ailleurs, la Cour note qu’elle n'a pas constaté la violation par l'État défendeur
de son obligation de ne pas modifier unilatéralement et substantiellement la loi
électorale moins de six avant les élections sans le consentement d'une large
majorité des acteurs politiques.
165. En conséquence, cette demande est rejetée.
ii. Annulation des élections communales et municipales du 17 mai 2020
166. Le Requérant demande à la Cour d'annuler les élections communales et
municipales du 17 mai 2020 du fait qu’ils ont été organisé par des organes
électoraux non indépendants et impartiaux, notamment le CENA et COS-LEPI
parce et que le Code électoral a été modifié moins de six (06) avant les élections
par une Assemblée nationale illégitime.
167. La Cour note qu’elle n'a pas constaté l’illégitimité de l'Assemblée nationale, ni le
défaut indépendance ou l'impartialité du CENA. Par ailleurs, elle a constaté que
le Code électoral a été modifié moins de six (06) mois avant les élections du 17
mai 2020 et que le COS-LEPI avait une composition déséquilibrée du fait que
sept (07) de ses onze (11) membres sont contrôlés par le gouvernement avait
par la majorité de prise des décisions.
168. La Cour fait observer que l’article 27(1) du Protocole lui donne des pouvoirs
suffisants pour ordonner à un État défendeur de prendre des mesures visant à
annuler une élection si elle l'estime appropriée pour remédier à la situation. Pour
cela, elle prendra en compte la gravité des violations constatées, leur implication
sur la crédibilité de l'ensemble du processus électoral et l'impact d’une telle
mesure sur la sécurité et la stabilité du pays.
169. La Cour note qu’en l'espèce, le Requérant n’a pas démontré l'impact substantiel
des violations constatée sur la crédibilité de l'ensemble du processus électoral
Rien dans le dossier n'indique que le processus électoral a été impacté par les
violations constatées au point que l'annulation soit la mesure la plus appropriée
pour remédier à la situation.
170. En conséquence, cette demande est rejetée.
Demande reconventionnelle
171. L'État défendeur demande à la Cour de « constater la vacuité des demandes
non fondées du demandeur anonyme et de le condamner à payer
reconventionnellement à l’État du Bénin la somme de FCFA deux milliards (2
000 000 000) à titre de réparation pour lui avoir fait encourir une condamnation
de nature à porter atteinte à l'image de l’État. »
172. Le Requérant, n’a pas répliqué.
173. La Cour note qu'il ressort du dossier que la demande reconventionnelle de l’État
défendeur est basée sur l’allégation selon laquelle le Requérant a abusé de son
droit de saisine de la Cour. Cependant, la Cour rappelle qu’elle a conclu que le
Requérant n'avait pas abusé de son droit d’ester en justice ou de la procédure
devant la Cour (voir paragraphe 45 du présent arrêt). La Cour n’a pas non plus
établi que la Requête manque de fondement comme l’État défendeur l'affirme.
La Cour a plutôt constaté la violation par l’État défendeur de son obligation de
créer un organe électoral indépendant et impartial. De plus, le fait qu’un
jugement à l'encontre de l'État défendeur soit rendu par la Cour, même si cela
peut nuire à son image, ne confère pas en soi à l'État défendeur le droit de
présenter une demande reconventionnelle.
174. En conséquence, la Cour conclut que cette demande n'est pas fondée et la
rejette.
X. SUR LES FRAIS DE PROCÉDURE
175. Le Requérant demande que l’État défendeur soit condamné aux dépens.
176. L'État défendeur n'a pas formulé de demande précise concernant les frais de
procédure.
177. La Cour note que la Règle 32(2) du Règlement* prévoit que « sauf décision
contraire de la Cour, chaque partie supporte ses frais de procédure ».
178. La Cour décide que, dans les circonstances d'espèce, chaque partie supporte
ses frais de procédure.
179. Par ces motifs,
LA COUR,
À l'unanimité,
Sur la compétence
Sur la recevabilité
ii. Rejette les exceptions d'irrecevabilité de la Requête ;
iv. Déclare la Requête recevable.
Sur le fond
v. Dit que l’allégation de l'illégitimité et de l’illégalité de l'assemblée nationale
n’a pas été établie ;
vi. Dit que l'allégation du défaut d'Indépendance et de l'impartialité de la CENA
n’a pas été établie ;
35 Ancien article 30(2) du Règlement du 2 juin 2010.
vi. Dit que l’État défendeur n’a pas violé le droit du Requérant à une égale
protection de la loi, prescrit à l’article 3(2) de la Charte ;
vili. Dit que l'Etat défendeur n'a pas violé l'obligation de ne pas modifier la loi
électorale dans les six (6) mois précédant les élections législatives
communales et municipales du 17 mai 2020, prévue par l'article 2 du
Protocole de la CEDEAO sur la démocratie ;
ix Dit que l'État défendeur a violé le droit des citoyens de participer librement
à la direction des affaires publiques de leur pays, prévu à l’article 13(1) de
la Charte, du fait que la composition du COS-LEPI ne donne pas des
garanties d'indépendance et d’impartialité, en vertu des articles 17(2) de la
CADEG et 3 du Protocole de la CEDEAO sur la démocratie.
Sur les réparations
Sur les réparations pécuniaires
x. Rejette la demande reconventionnelle de l'État défendeur.
Sur les réparations non pécuniaires
Xi. Rejette la demande d'annulation des élections communales et municipales
du 17 mai 2020.
xii. Ordonne à l'État défendeur de prendre des mesures visant conformer la
composition du COS-LEPI avec les dispositions des articles 17(2) de la
CADEG et 3 du Protocole de la CEDEAO sur la démocratie avant toute
Sur la mise en œuvre et le rapport
xili. Ordonne à l'Etat défendeur de soumettre à la Cour, dans un délai de trois
(3) mois à compter de la date de notification du présent arrêt, un rapport sur
la mise en œuvre des points xii du présent dispositif.
Sur les frais de procédure
xiv. Dit que chaque Partie supporte ses frais de procédure.
Ont signé:
Sylvain ORÉ, Président ; (A+ )_
Ben KIOKO, Vice- président SDS
Angelo V. MATUSSE, Juge ; As
Suzanne MENGUE, Juge ; ju —
M-Thérèse MUKAMULISA, Juge ; 7
Blaise TCHIKAYA, Juge ; CE =
Stella |. ANUKAM, Juge Gut Om
Imani D. ABOUD, Juge. 6
et Robert ENO, Greffier. &
Fait à Arusha, ce vingt-septième jour du mois de novembre de l'an deux mille vingt,
en anglais et en français, le texte français faisant foi.



Références :

Origine de la décision
Date de la décision : 27/11/2020
Date de l'import : 20/06/2022

Numérotation
Numéro d'arrêt : 59/2019
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