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28/03/2019 | CADHP | N°042/2016

CADHP | Cour africaine des droits de l'homme et des peuples, 28 mars 2019, 042/2016


Texte (pseudonymisé)
AALS c. Mali (compétence et recevabilité) (2019) 3 RICA
Collectif des Anciens Travailleurs du Laboratoire ALS
Mali (compétence et recevabilité) (2019) 3 RJ CA 77 77 77
c Requête 042/2016, Collectif des Anciens Travailleurs du Laboratoire
ALS c. République du Mali
Décision du 28 mars 2019. Faiten anglais eten français, le texte français
faisant foi
uges X C Aa A, MATUSSE MENGUE
CHIZUMILA, BENSAOULA, TCHIKAYA, ANUKAM et ABOUD.
Les requérants sont un groupe d'anciens travailleurs d'Australian
Laboratory Services (ALS), une société basée sur le territoir

e de l'État
défendeur. Les travailleurs ont affirmé avoir souffert de contamination au
plo...

AALS c. Mali (compétence et recevabilité) (2019) 3 RICA
Collectif des Anciens Travailleurs du Laboratoire ALS
Mali (compétence et recevabilité) (2019) 3 RJ CA 77 77 77
c Requête 042/2016, Collectif des Anciens Travailleurs du Laboratoire
ALS c. République du Mali
Décision du 28 mars 2019. Faiten anglais eten français, le texte français
faisant foi
uges X C Aa A, MATUSSE MENGUE
CHIZUMILA, BENSAOULA, TCHIKAYA, ANUKAM et ABOUD.
Les requérants sont un groupe d'anciens travailleurs d'Australian
Laboratory Services (ALS), une société basée sur le territoire de l'État
défendeur. Les travailleurs ont affirmé avoir souffert de contamination au
plomb en raison de leur travail et qu'en dépit des plaintes adressées aux
autorités gouvernementales, ils n'ont reçu aucune réparation. Pour cette
et raison, de leur ils ont droit allégué à un procès la violation, équitable. entre La autres, Cour de a leur rejeté droit leur à requête, la santé
estimant que les requérants n'avaient pas épuisé les voies de recours
internes.
Recevabilité (identification des requérants, 23 ; épuisement des voies
de recours internes, 36-38)
Les parties
Le Collectif des Anciens Travailleurs du Laboratoire ALS (ci- après dénommés les requérants) est un groupe informel de cent treize (113) sur cent trente-cing (135) anciens travailleurs de la société anonyme à responsabilité limitée (Sarl) ALS (Ac Ar Services), tous domiciliés au Mali
L'État défendeur, la République du Mali, devenu partie à la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples (ci-après désignée « la Charte ») le 21 octobre 1986 et au Protocole relatif à la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples portant création d'une Cour africaine des droits de l'homme et des peuples (ci-après désigné « le Protocole ») le 24 janvier 2004, a déposé, le 19 février 2010, la déclaration par laquelle il accepte la compétence de la Cour pour recevoir des requêtes émanant des individus et des organisations non gouvernementales 78
A.
3.
4.
B.
5.
6.
RECUEIL DE JURISPRUDENCE DE LA COUR AFRICAINE VOL 3 (2019)
Objet de la requête
Faits de la cause
Il ressort du dossier que les requérants, alléguant être victimes d’une intoxication au plomb résultant de leur service, ont saisi, le 1er février 2012, le Procureur près le Tribunal de Première Instance de la Commune « Ill » du District de Bamako d'une plainte pénale, puis d'un courrier adressé au Procureur général près la Cour d'appel de Bamako surle même sujet. Les requérants allèguent que le Laboratoire australien, spécialisé dans l'analyse chimique d'échantillons pour en déterminer la teneur en or et autres métaux, utilisait des produits toxiques comme l'acide, le Di-iso Buthyl de céthone (DIBK), et des solvants tels que le nitrate, le sodium, le lithium, le borax, le carbonate de soude, l’oxyde de sodium et le plomb.
N'ayant reçu du Procureur général aucune information sur l’évolution du dossier une année après la saisine, ils en ont conclu que la procédure a été anormalement prolongée par les autorités judiciaires de l'État défendeur. En conséquence, ils ont décidé de saisir la Cour de céans.
Violations alléguées
Les requérants affirment que leur droit de jouir du meilleur état de santé possible, prévu aux articles 16 et 24 de la Charte et 12 du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (ci-après désigné « le PIDESC »), a été violé.!
Les requérants soutiennent que le retard injustifié dans l'examen de l'affaire constitue une violation de leurs droits prévus aux articles 7(1) et 26 de la Charte, 2(3) et 14 du Pacte international relatifs aux droits civils et politiques (ci-après désigné « le
L'État défendeur est devenu partie au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (ci-après le « PIDESC ») le 3 janvier 1976, qu'il a ratifié le 16 juillet 1974.
L'État défendeur est également devenu partie au Pacte international relatif aux droits civils et politiques (ci-après le « PIDCP ») le 23 mars 1976, qu'il a ratifié le 16 juillet 1974.
AALS c. Mali (compétence et recevabilité) (2019) 3 RICA 77 79
I. Résumé de la procédure devant la Cour
7. La requête a été déposée le 1er juillet 2016. Elle a été signifiée à l’État défendeur le 27 septembre 2016. Elle a été transmise le 30 septembre 2016, conformément à l'article 35(3) du Règlement de la Cour (ci-après désignée le « Règlement »), à la Présidente de la Commission de l'Union africaine, et par l'intermédiaire de celle-ci, au Conseil exécutif de l'Union africaine et aux États parties au Protocole.
8. Après échanges des écritures, la Cour a décidé de clôturer la procédure écrite le 14 juin 2017 et de ne pas tenir d'audience publique.
9. Le 13 août 2018, conformément à la décision de la Cour à sa 49ème session ordinaire, le greffe a demandé aux requérants de déposer leurs observations sur les réparations dans les trente (30) jours suivant la réception de la notification.
10. Le 20 novembre 2018, les requérants ont déposé leurs observations sur les réparations transmises le 21 janvier 2019 à l'État défendeur, invité à soumettre sa réponse dans les trente (30) jours de la réception de la notification. Le 29 janvier 2019, l'État défendeur a reçu les observations des requérants sur les réparations et a soumis sa réponse le 4 mars 2019, réponse rejetée par la Cour pour soumission tardive.
IV. Mesures demandées par les parties
11. Dans la requête, il est demandé à la Cour de rendre les mesures suivantes :
i. Faire droit à la requête et déclarer que l'État défendeur a violé les dispositions mentionnées ci-dessus ;
ii. Dire que l'État défendeur doit publiquement reconnaître sa responsabilité non seulement concernant les violations alléguées liées aux maladies professionnelles dont souffrent les requérants des suites d'intoxication au plomb, mais aussi par rapport au droit au traitement médical des employés contaminés et assumer les coûts dudit traitement de manière à fournir aux travailleurs malades les meilleures conditions de vie possibles ;
ii. Ordonner à l’État défendeur de mener une enquête pour identifier les institutions privées responsables de violation des règlements en vigueur au moment des faits allégués, c'est-à-dire intoxication et non-assistance à personnes en danger ;
iv. Ordonner à l'État défendeur de verser immédiatement aux victimes des compensations en espèces et de veiller à ce que les sommes dues leur soient entièrement payées ;
80 RECUEIL DE JURISPRUDENCE DE LA COUR AFRICAINE VOL 3 (2019)
v. Ordonner toutes autres mesures de réparation nécessaires, au regard des violations alléguées dans la requête ;
vi. Ordonner à l'État défendeur de publier l'arrêt de la Cour dans le Journal officiel et dans des quotidiens locaux.
12. Dans leurs observations sur les réparations, les requérants : demandent à la Cour d'ordonner à l'État défendeur de verser
i. Cinquante millions (50 000 000) de Francs CFA à chacune des victimes au titre de compensation des frais de santé, des pertes de revenus liées au licenciement ou aux arrêts maladie, de l'incidence professionnelle des maladies, des frais d'obsèques et des pertes de revenus pour leurs proches ;
ii. Cinquante millions (50 000 000) de Francs CFA à chacune des victimes au titre du préjudice moral direct et indirect subi.
13. Dans son mémoire en défense, l'État défendeur demande à la Cour :
i. Sur la forme, déclarer la requête irrecevable pour défaut de qualité pour saisir la Cour et pour non-épuisement des recours internes ; ou ii. Sur le fond, rejeter la requête au motif qu’elle est sans fondement.
14. L'article 3(1) du Protocole dispose que « La Cour a compétence pour connaître de toutes les affaires et de tous les différents dont elle est saisie concernant l'interprétation et l'application de la Charte, du Protocole, et de tout autre instrument pertinent relatif aux droits de l'homme et ratifié par les États concernés ». Conformément à l'article 39(1) de son Règlement intérieur, « La Cour procède à un examen préliminaire de sa compétence [...] ».
A. Exception d’incompétence personnelle
15. L'État défendeur conteste la capacité juridique des requérants à déposer la requête et soutient que l'accès à la Cour devrait être autorisé uniquement aux individus, et non aux groupes d'individus. Les requérants contestent la thèse de l'État défendeur et affirment qu’ils ont qualité pour agir devant la Cour.
16. La Cour fait observer, comme elle l'a indiqué au paragraphe 1 du présent arrêt, que les requérants forment un groupe informel AALS c. Mali (compétence et recevabilité) (2019) 3 RJCA 77 81
de cent treize (113) personnes. Elle rappelle que la République du Mali est partie au Protocole et qu'elle a déposé la déclaration prévue à l’article 34(6), permettant aux individus de saisir directement la Cour, conformément à l’article 5(3) du Protocole. En conséquence, les requérants ont le droit de déposer leur requête devant la Cour de céans. L'exception soulevée par l’État défendeur à cet égard est donc rejetée.
Sur les autres aspects de la compétence
17. S'agissant de sa compétence personnelle, temporelle et territoriale, la Cour relève qu'elle n'a pas été contestée par l'État défendeur et que rien dans le dossier n'indique qu'elle n’est pas compétente à cet égard. Elle constate en conséquence qu'elle a : La compétence matérielle, étant donné que les requérants allèguent la violation du droit à la santé, prévu aux articles 16 et 24 de la Charte, et 12 du PIDESC, du droit à un procès équitable, prévu à l'article 7(1) et 26 de la Charte, du droit d'être jugé sans retard tel que prévu aux articles 2(3) et à l’article 14 du PIDCP, instruments ratifiés par l’État défendeur, d’où compétence pour la Cour de les interpréter et les appliquer, conformément à l’article 3 du Protocole ; ii. La compétence temporelle, dans la mesure où la violation alléguée en l'espèce, c'est-à-dire le fait que les juridictions nationales n'ont adopté aucune mesure pour réparer les violations commises contre les requérants, est continue ;
ii. La compétence territoriale, dans la mesure où les faits se sont produits sur le territoire de l’État défendeur, État partie au P rotocole. 18. À la lumière de ce qui précède, la Cour conclut qu’elle est compétente pour connaître de la présente affaire.
VI. Recevabilité
19. En vertu de l'article 6(2) du Protocole, «[I] a Cour statue sur la recevabilité des requêtes en tenant compte des dispositions énoncées à l’article 56 de la Charte ». En application de l'article 39(1) de son Règlement intérieur, « la Cour procède à un examen préliminaire [.. ] des conditions de recevabilité de la requête telles que prévues par les articles [... ] 56 de la Charte et l'article 40 du présent Règlement ».
20. L'article 40 du Règlement, qui reprend en substance le contenu de l'article 56 de la Charte, est libellé comme suit :
« En conformité avec les dispositions de l'article 56 de la Charte auxquelles renvoie l’article 6(2) du Protocole, pour être examinées, les requêtes doivent remplir les conditions ci-après :
1. Indiquer l'identité de leur auteur même si celui-ci demande à la Cour 82 RECUEIL DE JURISPRUDENCE DE LA COUR AFRICAINE VOL 3 (2019)
de garder l'anonymat;
2. Être compatibles avec l’Acte constitutif de l’Union africaine et la
3. Ne pas contenir de termes outrageants ou insultants ;
4. Ne pas se limiter à rassembler exclusivement des nouvelles diffusées par les moyens de communication de masse ;
5. Être postérieures à l'épuisement des recours internes s'ils existent, à moins qu'il ne soit manifeste à la Commission que la procédure de ces recours se prolonge d’une façon anormale ;
6. Être introduites dans un délai raisonnable courant depuis l'épuisement des recours internes ou depuis la date retenue par la Cour comme faisant commencer à courir le délai de sa propre saisine ;
7. Ne pas concerner des cas qui ont été réglés conformément soit aux principes de la Charte des Nations Unies, soit de l’Acte constitutif de l'Union africaine et soit des dispositions de la Charte ou de tout autre instrument juridique de l'Union africaine ».
8. L'Etat défendeur a soulevé deux exceptions relatives, d’une part, à l'identité des requérants et, d'autre part, à l'épuisement des recours internes.
A. Conditions de recevabilité en discussion entre les parties
i. Exception relative à l'identité des requérants
21. L'État défendeur soulève une exception d'irrecevabilité de la requête et invoque l'absence d’une identification appropriée des membres du groupe qui a déposé la requête. Dans leur réponse, les requérants présentent une liste des noms complets des cent treize (113) anciens travailleurs de ALS qui forment le groupe.
22. La Cour note qu'avec la présentation de la liste susmentionnée, les requérants sont formellement identifiés, conformément à l'article 40(1) du Règlement. L'exception de l'État défendeur à cet égard est donc rejetée.
ii Exception tirée du non-épuisement des recours internes
23. L'État défendeur allègue que la requête doit être déclarée irrecevable au motif que les recours internes n’ont pas été épuisés, car en l'absence d’une décision sur la plainte pénale, comme c'est le cas en l'espèce, les requérants auraient dû saisir AALS c. Mali (compétence et recevabilité) (2019) 3 RICA 77 83
le juge d'instruction et se constituer partie civile, ce qu'ils n'ont pas fait.
24, L'État défendeur affirme que les requérants ont saisi le Procureur de la République alors que l'autorité compétente en la matière est le Tribunal du Travail qui statue sur toutes les questions relatives aux litiges entre employeurs et employés.
25. L'État défendeur réitère que le Bureau du Procureur général n’a pas compétence pour statuer sur l'affaire et ajoute que les requérants dans cette affaire sont différents du Collectif des anciens travailleurs qui ont saisi la Cour.
26. Dans la requête, il est dit que les requérants ont engagé des procédures administratives et politiques qui se sont avérées infructueuses et qu'en conséquence, « le 1er février 2012, ils ont saisi le Procureur près le Tribunal de Première instance de la Commune « Ill » du District de Bamako ». Ils allèguent que « Précisément un peu plus d’un an après la plainte, le 17 mai 2013, [ils ont] adressé un courrier au Procureur général près la Cour d'appel de Bamako retraçant l'historique et joignant les divers courriers et démarches réalisés … ».
27. Les requérants considèrent que même si des recours internes sont disponibles pour remédier à la situation, ils « … sont inaccessibles, inefficaces et insuffisantes en pratique ». Citant la jurisprudence d'autres cours, ils soutiennent que l'exigence des recours internes ne peut être valable que s'ils constituent des recours efficaces, et si les délais qu’ils requièrent ne sont pas
28. Dans leur réponse, les requérants réfutent l'argument de l’État défendeur selon lequel ils auraient dû déposer une plainte avec constitution de partie civile auprès du juge d'instruction, affirmant que l’objectif derrière une plainte pénale était d'obtenir
Ak c. Turquie, Requête No. 21987/93, ECHR (18 décembre 1996), cité dans Ai Aj, Présentation de la règle sur l'épuisement des voies de recours intermes en vertu du Protocole facultatif à la CEDAW (Overview of the Rule Requiring the Exhaustion of Af As under the An Ae Y B), (2008) 4. Voir aussi ZT c. Norvège, Requête No 2238/2003, Comm. contre la Torture (2006), para. 8.1 ; Ah Ap Ag c. Mexique, Requête No. 777/01, Commission interaméricaine des droits de l'homme (12 octobre 2005), para 20.
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la reconnaissance que l'État défendeur avait violé des droits garantis.
29. Les requérants soutiennent également que pour se constituer partie civile auprès du juge d'instruction, une décision du Procureur général était nécessaire. En conséquence, en l'absence de cette décision, le processus n’a pas pu continuer etils ont été contraint d'attendre une réponse, qui, cinq (5) années plus tard, n'était toujours pas disponible.
30. Quantà la poursuite de la procédure devant le Tribunal du travail, ils soutiennent que le fait d’intenter une action civile n'empêche pas d'intenter une action pénale.
31. Les requérants allèguent que le temps écoulé entre le dépôt de la plainte pénale et la date de la saisine de la Cour indique un retard injustifié dans le traitement des recours, ce qui rend inapplicable la condition de l'épuisement des recours internes requise aux articles 40(5) du Règlement et 56(5) de la Charte.
32. La question à trancher est celle de savoir s'il existe, dans le système judiciaire de l'Etat défendeur, un recours que les requérants pouvaientexercer pour éviterle retard dans la décision du Procureur général sur leur plainte.
33. À cet égard, la Cour rappelle que dans l'affaire Ad Al c. République du Mali,* elle avait conclu qu'aux termes de l’article 62° du Code de procédure pénale malien, « les requérants avaient, au moins, la possibilité de saisir directement le juge d'instruction en se constituant parties civiles ».
34. La Cour a estimé que la saisine du juge d'instruction était un recours efficace et satisfaisant, aux termes de l’article 90 du Code de procédure pénale malien qui dispose que : « Le juge deinstruction procède, conformément à la loi, à tous les actes dinformation quil juge utiles à la manifestation de la vérité »,° et
4 Requête No. 009/2016. Arrêt du 28 septembre 2017 (recevabilité), Ad Al c. République du Mali (ci-après dénommée E poux Al c. Mali (recevabilité), para 45.
5 « Toute personne qui se prétend lésée par un crime ou un délit peut, en portant plainte, se constituer partie civile devant le juge d'instruction compétent. »
6 Ad Al c. Mali (recevabilité), para 47.
AALS c. Mali (compétence et recevabilité) (2019) 3 RICA 77 85
de l’article 1127 du même Code qui donnent aux parties civiles le droit de participer à la procédure, y compris de faire appel contre les décisions du juge d'instruction.
35. La Cour avait conclu, en conséquence, que si les requérants n'étaient pas satisfaits du prolongement de la procédure relative à leur plainte pénale devant le Procureur général, ils avaient la possibilité de saisir le juge d'instruction et de se constituer partie
36. En l'espèce, les requérants ont déposé une plainte pénale devant le Bureau du Procureur général de l'État défendeur le 1er février 2012, mais jusqu'au 1er juillet 2016, date de la saisine de la Cour de Céans, leur plainte pénale n'a donné lieu à aucune décision. Pour la Cour de Céans, en application de sa jurisprudence en la matière, les requérants auraient pu saisir le juge d'instruction pour éviter le retard allégué dans le traitement de la plainte pénale par le Procureur général. N'ayant pas exercé ce recours, les requérants n'étaient pas fondés à soutenir que la procédure a été anormalement prolongée.
37. Compte tenu de ce qui précède, la Cour conclut que les requérants n’ont pas épuisé les recours internes.
B. Conditions de recevabilité qui ne sontpas en discussion entre les parties
38. Ayant conclu que la requête est irrecevable en raison du non- épuisement des recours internes, la Cour n'a pas à se prononcer sur la question de savoir si d’autres conditions de recevabilité prévues à l’article 40 du Règlement ont été remplies, dans la mesure où les conditions de recevabilité sont cumulatives. Si donc une condition n’est pas remplie, la requête en devient
7 « Les conseils de l'inculpé et de la partie civile, tant au cours de l'instruction qu’après avoir pris communication de la procédure au greffe, peuvent conclure actes par écrit d'instruction à l'audition qu'ils de nouveaux jugeront témoins, utiles à la à défense des confrontations, de l'inculpé expertises et aux intérêts et tous de la partie civile. Le juge doit motiver l'ordonnance par laquelle il refuse de procéder aux mesures d'instruction complémentaires qui lui sont demandées. Le prévenu et la partie civile, par eux-mêmes ou par leurs conseils, peuvent faire appel de cette ordonnance ».
8 Ad Al c. Mali (recevabilité), paras 51 et 52.
86 RECUEIL DE JURISPRUDENCE DE LA COUR AFRICAINE VOL 3 (2019)
39. Compte tenu de ce qui précède, la Cour déclare la requête
VII. Frais de procédure
40. La Cour note que les parties n'ont pas fait d'observations sur les frais de procédure. Toutefois, l'article 30 du Règlement dispose comme suit : « [à] moins que la Cour n'en décide autrement, chaque partie supporte ses frais de procédure ».
41. Compte tenu ce qui précède, la Cour décide que chaque partie supportera ses frais de procédure.
La Cour,
A l'unanimité :
Sur la compétence
i. Rejette l’exception d’incompétence personnelle de la Cour ;
ii. Déclare qu'elle est compétente.
Sur la recevabilité
ii. Déclare fondée l'exception d'irrecevabilité de la requête en raison du non épuisement des recours internes ;
iv. Déclare la requête irrecevable.
Sur les frais de procédure
v. Dit que chaque partie supporte ses propres frais.
9 Voir Requête No. 02402016. Arrêt du 21 mars 2018 (recevabilité), At Ao et Aq Al c. République du Mali, para 63 ; Requête No. 022/2015. Arrêt du 11 mai 2018 (recevabilité), Am Ab c. République du Rwanda, para 48.


Synthèse
Numéro d'arrêt : 042/2016
Date de la décision : 28/03/2019

Origine de la décision
Date de l'import : 17/07/2023
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