LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur les pourvois formés par :
- Mme Evelyne X..., épouse Y...,
- M. Michel Y...,
- le département des Alpes-Maritimes, partie civile
contre l'arrêt de la cour d'appel d'AIX-EN-PROVENCE, 5e chambre, en date du 16 février 2016, qui a condamné la première, pour détournement de fonds publics par personne dépositaire public, à trois ans d'emprisonnement dont un an avec sursis et mise à l'épreuve, le second, pour recel, à dix-huit mois d'emprisonnement avec sursis et mise à l'épreuve, a ordonné une mesure de confiscation, et a prononcé sur les intérêts civils ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 4 mai 2017 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Guérin, président, Mme Pichon, conseiller rapporteur, M. Soulard, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Zita ;
Sur le rapport de Mme le conseiller référendaire PICHON, les observations de la société civile professionnelle BORÉ et SALVE DE BRUNETON et de la société civile professionnelle NICOLAŸ, DE LANOUVELLE et HANNOTIN, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général LE BAUT ;
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu le mémoire commun aux demandeurs (Mme et M. Y...), les mémoires en demande et en défense produits ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que Mme Y... a été présentée devant le tribunal correctionnel selon la procédure de comparution immédiate afin d'y être jugée pour avoir, entre 2004 et juin 2011, étant agent des finances publiques, détourné des fonds publics provenant des comptes de deux EHPAD, alimentés par les ressources des hébergés admis à l'aide sociale, et tenus par la Trésorerie, fonds qui devaient être reversés au Conseil général qui en avait fait l'avance ; que son époux a comparu du chef de recel ; que le tribunal a déclaré les prévenus coupables des faits reprochés, condamné M. Y... à dix-huit mois d'emprisonnement avec sursis et mise à l'épreuve et Mme Y... à trois ans d'emprisonnement dont un an avec sursis et mise à l'épreuve, délivré un mandat de dépôt à l'encontre de celle-ci et prononcé la confiscation d'un bien immobilier commun ; que, sur l'action civile, les premiers juges, qui ont indemnisé l'agent judiciaire de l'Etat et les EHPAD, ont déclaré recevable la constitution de partie civile du département des Alpes-Maritimes et évalué son préjudice à un euro ; que les prévenus, le ministère public, l'agent judiciaire de l'Etat et le département ont interjeté appel ;
En cet état :
Sur le premier moyen de cassation proposé pour M. et Mme Y... par la société civile professionnelle Boré et Salve de Bruneton, pris de la violation des articles 6, § 1, de la Convention européenne des droits de l'homme, 432-15, 432-17 du code pénal, 8, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
" en ce que l'arrêt a déclaré non prescrite l'action publique des détournements autres que ceux réalisés par Mme Évelyne Y...les 28 octobre 2010 et 30 novembre 2011, et du recel, et a en conséquence prononcé sur la culpabilité des époux Y..., sur la peine et sur les intérêts civils ;
" aux motifs propres que sur la prescription des faits de soustraction, détournement ou destruction de biens d'un dépôt public par le dépositaire ou un de ses subordonnés : l'article 432-15 du code pénal dispose : " le fait, par une personne dépositaire de l'autorité publique ou chargée d'une mission de service public, un comptable public, un dépositaire public ou l'un de ses subordonnés, de détruire, détourner ou soustraire un acte ou un titre, ou des fonds publics ou privés, ou effets, pièces ou titres en tenant lieu, ou tout autre objet qui lui a été remis en raison de ses fonctions ou de sa mission, est puni de dix ans d'emprisonnement et d'une amende de 1 000 000 euros, dont le montant peut être porté au double du produit de l'infraction " ; que cette infraction étant occulte, le point de départ du délai de prescription de l'action publique est le jour où l'infraction est apparue et a pu être constatée dans des conditions permettant l'exercice de l'action publique ; qu'il en résulte que tant qu'il y a dissimulation, le délai de prescription ne court pas ; que lors de son audit, M. Frédéric B...a découvert l'existence de onze virements effectués de 2006 à 2011 d'un montant total de 229 199, 91 euros, lesquels ont tous été réalisés au profit d'un seul compte bancaire, celui de Mme Évelyne X..., épouse Y... et M. Michel Y... ouvert dans les livres de la Banque Postale à Marseille ; qu'il a au surplus précisé n'avoir pu remonter l'historique des opérations effectuées par Mme X..., épouse Y... en 2006 et 2007 en raison du changement du logiciel informatique ; qu'il a cependant pu contrôler toutes les écritures comptables des virements litigieux de 2008 à 2011 ; qu'aux termes de cet audit, M. B... a constaté que Mme X..., épouse Y... avait utilisé une multitude de comptes afin de masquer ses agissements, les fonds détournés transitant sur plusieurs comptes pour finalement être reversés sur le compte de la banque postale ; qu'aux termes du rapport de M. B... du 3 décembre 2014, les libellés des ordres de paiement validant les dépenses et dont le détail figure en annexe 2 au titre des détails des opérations de virements (source extraction PSAR fournie par le Bureau SI- 1B) se référent à des opérations immobilières, des primes versées à des employés de l'établissement ou des mandats ou des factures sans rapport avec le compte 44337 ; qu'il résulte enfin de l'audit que Mme X..., épouse Y... était le seul agent chargé de la gestion de personnes hébergées au titre de l'aide sociale par l'Ehpad de l'Olivier et l'Ehpad Victor Nicolaï ; que les déclarations de M. B... sont confirmées par la prévenue lors de sa garde-à-vue ; qu'elle a en effet déclaré que le système informatique Clara préexistant au système Helios ne nécessitait aucune obligation d'ordre de paiement ni de justifications à donner ; qu'en 2005, le système informatique ayant été changé, Mme X..., épouse Y... a reconnu avoir eu recours à une écriture comptable supplémentaire, prélevant les fonds déposés sur le compte 443 en les transférant sur les comptes 428 et 426 puis sur son compte personnel et en créant un compte client avec ses coordonnées et le numéro de son compte bancaire CPP 0188633A029 ; qu'elle a précisé que le compte 428 était un compte d'attente débiteur devant être soldé au 31 décembre de chaque année dont le contrôle lui incombait ainsi qu'au directeur de la trésorerie, qui n'avait pas remarqué d'anomalies ; que Mme X..., épouse Y... a également déclaré lors de son audition en garde à vue que les maisons de retraite n'avaient aucun moyen jusqu'en 2010 de s'apercevoir de ses détournements dans la mesure où elles n'avaient aucune visibilité sur les comptes ; que Mme X..., épouse Y... a par ailleurs indiqué qu'un ordre de paiement était nécessaire pour valider la dépense, ordre de paiement qu'elle générait et qu'elle devait modifier afin que ses coordonnées n'apparaissent pas ; que Mme X..., épouse Y... a précisé que seuls les ordres de paiement imprimés, lesquels ne l'étaient pas tous, étaient soumis au contrôle du comptable de la trésorerie et que le système informatique Helios faisait une suppression automatique des ordres de paiement plusieurs fois par an ; que ces éléments établissent ainsi que Mme X..., épouse Y... faisait transiter les fonds sur plusieurs comptes afin de brouiller les pistes et dissimuler ses détournements ; que les seuls éléments permettant de remonter les détournements sont les ordres de paiement ; qu'il ressort des déclarations de la prévenue qu'il est en l'état impossible de tous les retrouver dans la mesure où ils ont été écrasés automatiquement par le système informatique Helios ; que Mme D...a par ailleurs confirmé qu'aucun ordre de paiement n'avait été retrouvé aux archives de la trésorerie à l'exception de quatre ordres de paiement dont elle a pu sortir des duplicatas de l'informatique :
- un ordre de paiement de 48 257, 65 euros dont le créancier mentionné est le Conseil général dont l'objet de dépense est " régularisation ressources 2007 ",
- un ordre de paiement du 13 novembre 2014 de 27 243, 72 euros dont le créancier mentionné est " reprise 006004 reprise reprise 99 999 reprise cedex " sans mention de l'objet de dépense,
- un ordre de paiement de 18 346, 50 euros dont le créancier mentionné est " M. Y... " dont l'objet de dépense est " reg rjet mdt 417 fact 911100266-267-269 ",
- un ordre de paiement de 18 626, 53 euros dont le créancier mentionné est " M. Y... " dont l'objet de dépense est " fact 01053406 et 01031598 " ; que Mme X..., épouse Y... a reconnu avoir édité les deux derniers ordres de paiement sur lesquels elle a oublié d'effacer son nom avec son numéro de compte ; que les sommes mentionnées à ces 4 ordres de paiement ont toutes été virées sur le compte postal des époux Y..., les 15 avril 2008, 24 août 2008, 28 octobre 2010 et 30 mars 2011, ainsi qu'en attestent l'audit et le décompte des virements qui y est joint ; que la découverte par l'auditeur de la direction générale des finances publiques de ces deux ordres de paiement au nom de M. Y... ont permis de révéler les détournements occultes commis par Mme X..., épouse Y..., de sorte que le point de départ de la prescription de l'infraction de détournement court à compter de la date de signalement des faits par la direction générale des finances publiques au Ministère public, soit le 8 juillet 2014, l'audit étant toujours en cours à cette date et n'ayant fait l'objet que d'extraits ; que le procureur de la République du tribunal de grande Instance de Nice ayant ordonné une enquête par soit-transmis du 21 octobre 2014, les faits de détournement ne sont pas prescrits à l'exception des détournements réalisés les 28 octobre 2010 et 30 mars 2011 au profit de M. Y... qui n'ont quant à eux aucun caractère occulte et qui sont par conséquent prescrits ;
" et aux motifs adoptés qu'il ressort de l'enquête que Mme X..., épouse Y... exerçait les fonctions d'agent des finances publiques de catégorie C à la trésorerie de l'Escarène ; qu'elle était chargée (et elle était la seule) entre 1987 et 2011 de la gestion des ressources des personnes hébergées dans deux Ehpad (Peille et l'Escarène) ; que l'enquête a permis d'établir qu'elle avait détourné pendant plusieurs années, les ressources des personnes hébergées dans ces Ehpad au titre de l'aide sociale et qui devaient être reversées au Conseil Général ; que ces sommes ont été virées sur un compte bancaire ouvert à la Banque Postale en 1991 et dont Mme X..., épouse Y... était co-titulaire avec son mari M. Y... ; qu'il ressort de l'enquête, que, afin de masquer ses agissements, Mme X..., épouse Y... utilisait une multitude de comptes et d'opérations fictives selon le schéma décrit dans le signalement adressé par la Direction des finances publiques au parquet de Nice le 8 juillet 2014 : transfert de l'argent du compte 443 (compte servant aux ressources et aides sociales des pensionnaires des Ehpad) vers le compte 428 (compte d'attente) puis transfert sur son compte Banque Postale lequel alimentait ensuite leur compte joint au Crédit agricole ; que Mme X..., épouse Y... a indiqué qu'elle était chargée du contrôle de ces deux comptes 443 et 428 ; que Mme X..., épouse Y... a précisé dans son audition que le compte 428 étant un compte débiteur si le solde en fin d'année était nul il n'y avait pas de contrôle dessus ; qu'elle a précisé que les maisons de retraite jusqu'en 2010 n'avaient aucun moyen de s'apercevoir de tout cela car elles n'avaient pas de visibilité sur les comptes ; que s'agissant des ordres de virement ou ordres de paiement établis pour engager les dépenses Mme E..., sa supérieure, a indiqué que compte tenu du nombre de virements une trésorerie ne peut pas tout vérifier et que d'ailleurs cela n'est pas prévu ; qu'elle a ajouté que, s'agissant des ordres de paiement, à chaque fois que Mme X..., épouse Y... a fait des virements sur son compte personnel elle était en congés, que Mme X..., épouse Y... avait délégation de signature pour signer ces ordres de paiement et qu'elle ne vérifiait pas à son retour de congé car c'était impossible ; que lors de l'audit il a été relevé que plusieurs manoeuvres ont été utilisées pour brouiller la lisibilité des opérations concernées (le tiers associé aux coordonnées bancaires a été modifié à deux reprises dans Helios, les références portées sur les ordres de paiement sont sans rapport avec la nature des opérations enregistrées, existence d'une multitude de transferts d'un compte à un autre) ; que M. B... qui a pratiqué l'audit, a indiqué que Mme X..., épouse Y... a pris soin de faire plusieurs écritures comptables pour éviter tout lien direct avec elle ; qu'il s'agit en l'espèce d'une infraction occulte, Mme X..., épouse Y... ayant pris soin de faire disparaître durant toute la période de temps considérée (2004-2011) toute trace de fraude au niveau de la trésorerie de l'Escarène ainsi que cela a été souligné plus haut, de telle sorte que le délit n'a pu être constaté, dans des conditions permettant l'exercice de l'action publique avant l'intervention d'un audit réalisé par la Direction des Finances Publiques en fin d'année 2013, afin de trouver la source d'une discordance entre le montant de la dette de l'Ehpad de Peille enregistrée dans la comptabilité de la trésorerie de l'Escarène et le montant enregistré par le comptable du Conseil Général des Alpes Maritimes ; que les agissements de Mme X..., épouse Y... caractérisent l'existence d'une dissimulation de nature à retarder le point de départ de la prescription au jour de l'apparition de l'infraction dans des conditions permettant l'exercice de l'action publique ;
" alors que la prescription du délit de soustraction de bien public par une personne chargée d'une fonction publique court à compter du jour où l'infraction est apparue et a pu être constatée dans des conditions permettant l'exercice de l'action publique ; que seule la dissimulation est de nature à retarder le point de départ de la prescription ; qu'en affirmant que Mme X..., épouse Y... avait dissimulé ses détournements et que seule la découverte par l'auditeur de la direction générale des finances publiques de deux ordres de paiement au nom de M. Y... les avaient révélés, après avoir pourtant relevé que les ordres de paiement, passés par Mme X..., épouse Y... sur le compte client qu'elle avait créé avec ses coordonnées et le numéro de son compte bancaire, étaient signés et soumis au contrôle du comptable de la Trésorerie, que la discordance entre les montants enregistrés dans les comptabilités avait été constatée par une inspectrice divisionnaire des finances publiques dès son arrivée dans le service, et que les maisons de retraite parties civiles auraient pu s'en apercevoir dès 2010, date à laquelle elles ont eu accès aux comptes, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision " ;
Attendu que, pour écarter l'exception de prescription de l'action publique du chef de détournement de fonds publics, l'arrêt prononce par les motifs repris au moyen ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, procédant du pouvoir d'appréciation des juges du fond, qui caractérisent sans insuffisance ni contradiction l'existence de dissimulations de nature à retarder le point de départ de la prescription, d'où il résulte que moins de trois ans se sont écoulés entre la date à laquelle les faits ont pu être constatés et le premier acte interruptif de prescription, la cour d'appel a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Sur le deuxième moyen de cassation proposé pour M. et Mme Y... par la société civile professionnelle Boré et Salve de Bruneton, pris de la violation des articles 6, § 1, de la Convention européenne des droits de l'homme, 321-1, 321-3, 321-4, 321-9, 321-10, 432-15 et 432-17 du code pénal, et 591 et 593 du code de procédure pénale, manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt a déclaré M. Michel Y... coupable des faits de recel de bien provenant de soustraction, détournement ou destruction de biens d'un dépôt public par le dépositaire ou un de ses subordonnés commis du 1er janvier 2004 au 1er juin 2011 à l'Escarène, qui lui étaient reprochés, a en conséquence prononcé sur la peine et les intérêts civils ;
" aux motifs propres que sur l'infraction de recel, le recel est constitué par la détention des fonds détournés mais également le fait, en connaissance de cause, de bénéficier, par tout moyen, du produit d'un crime ou d'un délit ; qu'en sa qualité de co-titulaire du compte joint 00075421028 ouvert dans les livres du Crédit agricole qui recevait les fonds détournés, M. Y... a détenu et profité des fonds détournés ; qu'il en est de même de ceux déposés sur le compte de sa société dans la mesure où ils ont permis de régler les factures et les charges sociales inhérentes à son activité ; que si Mme X..., épouse Y... a confirmé gérer au lieu et place de son époux la société la Cave du château, M. Y... connaissait les difficultés de son commerce ; que lors de son audition en garde-à-vue, il a indiqué que le chiffre d'affaires de sa société avait commencé à baisser en 2008/ 2009 et qu'il avait « essayé de tenir jusqu'à la retraite » ; qu'il n'ignorait pas la baisse de fréquentation de son commerce puisqu'il était le seul salarié de la société ; que M. Y... connaissait les revenus du ménage dans la mesure où il a déclaré que son épouse percevait selon lui du temps de sa période d'activité un salaire mensuel de 1 800 euros par mois auquel s'ajoutait son salaire équivalent au SMIC, soit un revenu mensuel d'environ 3 000 euros ; que les époux Y... se sont constitués un patrimoine immobilier comprenant une maison avec piscine et un garage ; qu'ils sont propriétaires de 3 véhicules d'une valeur de 15 225 euros ; que le terrain sur lequel la maison a été construite acquis par les époux Y... le 19 décembre 1991 au prix de 300 000 francs, l'acte notarié stipulant que le prix a été réglé au moyen d'un prêt consenti par l'union de crédit pour le bâtiment ; que M. Y... a ajouté avoir confié la construction du gros oeuvre de la maison à une entreprise pour une somme à peu près identique à celle de 300 000 francs ; qu'il a reconnu avoir faire construire la piscine en 2007 moyennant paiement d'une somme de 17 000 euros ; que M. Y... a également indiqué avoir fait l'acquisition d'un garage en 1998 pour une somme de 170 000 francs qu'il a revendu 60 000 euros ; que les investigations des gendarmes sur le train de vie du ménage ont révélés que les dépenses mensuelles du ménage dépassaient 4 000 euros ; que Mme X..., épouse Y... a enfin déclaré que le couple ne se privait de rien, sortant principalement dans les restaurants de la région en invitant toujours tout le monde et étant partis à plusieurs reprises en vacances en France ; que M. Y... ne peut ainsi valablement soutenir qu'il ignorait l'origine frauduleuse des fonds alors même qu'il connaissait le montant des revenus du ménage et leur insuffisance manifeste pour financer le train de vie du couple et la constitution de son patrimoine ; que les faits visés à la prévention sont par conséquent établis et c'est à bon droit que le premier juge a déclaré M. Y... coupable des faits de recel ;
" et aux motifs adoptés que M. Y... prétend ne jamais avoir profité des détournements commis par son épouse et ne rien avoir remarqué de suspect dans leur train de vie ; que Mme X..., épouse Y... a déclaré lors de sa 3e audition que l'argent détourné (évalué par l'enquête entre 2004 et 2011 à 299 614, 58 euros étant précisé qu'elle reconnaît avoir détourné d'autres sommes depuis 1992), a servi à financer les travaux dans la maison du couple, la construction de la piscine en 2007 (17 000 euros), les mensualités du crédit de la maison, plusieurs véhicules, dont des Mercedes, Golf III, l'achat d'un garage en 1998 (payé 150 000 francs et revendu 60 000 euros en 2014), des sorties au restaurant (" on invitait tout le monde, la famille et les amis "), des voyages en France (" on ne se privait de rien "), les courses au Supermarché (" je ne regardais pas à la dépense "), des dons à leur fille (achat de voiture pour 15 000 euros, financement du mariage pour 3 000 euros) ; qu'il convient de noter que d'après les déclarations de Mme X..., épouse Y... elle percevait un salaire de 1 900 euros et M. Y... percevait un salaire de gérant de 1 500 euros ; que l'enquête a révélé que le ménage dépensait sur son compte crédit agricole entre 1 600 et 400 euros par mois en carte bancaire ; que les dépenses réalisées par le ménage excédaient largement leurs possibilités financières ; que même si M. Y... affirme être un mauvais gestionnaire et ne pas s'intéresser aux papiers et comptes bancaires il n'a pas pu ne pas remarquer la discordance entre leurs revenus officiels et leur train de vie ; que par ailleurs le compte bancaire de la Cave du Château dont M. Y... était le gérant a été crédité de remises de chèques provenant du compte de la Banque Postale pour un montant total de 50 971, 70 euros ; que cette société a connu des difficultés financières dès 2008 d'après M. Y... ; qu'il reconnaît avoir été au courant des difficultés ; qu'il n'a pas pu ne pas remarquer l'existence de dépôts de chèques pour un montant aussi important sans s'interroger sur leur provenance ; qu'il en résulte qu'il avait forcément connaissance de l'origine illégale de leurs ressources ;
" 1°) alors que le recel suppose la connaissance par le prévenu de la détention de la chose dont l'origine est frauduleuse ; qu'en affirmant que M. Y... n'avait pas pu ne pas remarquer l'existence de dépôts de chèques d'un montant important sur les comptes de la société Cave du Château après avoir pourtant relevé que Mme Y... gérait seule au lieu et place de son époux les comptes de ladite société et que M. Y... affirmait « être un mauvais gestionnaire et ne pas s'intéresser aux papiers et comptes bancaires », ce dont il résultait que ce dernier ne savait pas qu'il détenait les sommes détournées, la cour d'appel a méconnu les textes susvisés ;
" 2°) alors que le recel suppose la connaissance par le prévenu de l'origine frauduleuse de la chose qu'il détient ou dont il profite ; qu'en retenant que M. Y... n'avait pas pu ne pas remarquer la discordance entre les revenus officiels du couple et son train de vie, sans mieux s'expliquer sur la circonstance, invoquée par ce dernier, que les détournements imputés à Mme Y... s'étaient déroulés sur une période de plus de dix années et que l'ensemble des biens acquis avaient été financés à crédit, ce dont il résultait qu'il n'avait pu avoir connaissance de leur origine frauduleuse au fur et à mesure de l'encaissement des fonds détournés, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des principes susvisés " ;
Attendu que, pour caractériser l'élément intentionnel du délit de recel reproché à M. Y..., l'arrêt relève que ce dernier a détenu et profité des fonds détournés et versés par son épouse sur le compte joint ainsi que sur le compte de la société dont il était le gérant, et qu'il connaissait le montant des revenus du ménage et leur insuffisance manifeste pour financer le train de vie du couple et la constitution de son patrimoine ;
Attendu qu'en prononçant ainsi, la cour d'appel, qui a répondu aux chefs péremptoires des conclusions régulièrement déposées devant elle et caractérisé sans insuffisance la connaissance par le prévenu de la détention des fonds détournés par son épouse et de leur origine frauduleuse, a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli ;
Sur le troisième moyen de cassation proposé pour M. Et Mme Y... par la société civile professionnelle Boré et Salve de Bruneton, pris de la violation des de l'article 1er du premier Protocole additionnel de la Convention européenne des droits de l'Homme, des articles 131-21 (alinéa 1 et 3), 321-4, 321-9 6°, 321-10 et 432-17 3° du code pénal, et des articles 591 et 593 du code de procédure pénale ;
" en ce que l'arrêt a prononcé la confiscation du bien immobilier appartenant à Mme X..., épouse Y... et à M. Y... (bien immobilier situé sur la commune de l'Escarène, ..., cadastré section C n° 142) et en ce qu'il a débouté ces derniers de leurs demandes de mainlevée de la saisie pénale immobilière ;
" aux motifs propres que sur l'illégalité de la peine complémentaire de confiscation du bien ; que Mme X..., épouse Y... et M. Y... sollicitent la mainlevée de la peine complémentaire de confiscation du bien aux motifs qu'il n'a pas été acquis grâce aux fonds détournés, le crédit immobilier ayant été réglé avant 2004, début de la période de prévention ; que les gendarmes ont retrouvé lors de la perquisition au domicile des époux Y... divers documents relatifs à la construction de la maison et de la piscine ayant été mis sous scellés mais consultables ; que l'acte notarié du 19 décembre 1991 portant acquisition du terrain sur lequel a été construite la maison stipule un prix de vente de 300 000 francs réglé au moyen d'un prêt consenti par l'union de crédit pour le bâtiment, auquel s'ajoute le coût des travaux de construction de la maison ; qu'un tableau des versements édité par l'Ucb (l'Union de crédit pour le bâtiment) fait état d'un prêt de 500 000 francs consenti aux époux Y... remboursable du 30 décembre 1991 au 30 mai 2007 ; que la piscine a été construite courant 2006 moyennant paiement d'une somme de 16 500 euros selon facture du 25 avril 2006 retrouvée au domicile des époux Y... ; que Mme X..., épouse Y... a reconnu expressément que les fonds détournés avaient servi à financer les mensualités du crédit immobilier de la maison et la construction de ses ouvrages extérieurs et la piscine ; qu'il convient par conséquent de confirmer la confiscation du bien immobilier qui est le produit direct ou indirect de l'infraction ;
" et aux motifs adoptés qu'il convient de prononcer en outre, à titre de peine complémentaire par application de l'article 432-17 et de l'article 131-21 alinéas 1er et 3, la confiscation du bien immobilier appartenant à Mme X..., épouse Y... et à M. Y... (bien immobilier situé sur la Commune de l'Escarène,..., cadastré Section C n° 142) ce qui permettra notamment d'indemniser les victimes par application de l'article 706-164 du code de procédure pénale ;
" 1°) alors que la confiscation porte sur tous les biens qui sont l'objet ou le produit direct ou indirect de l'infraction ; qu'en se bornant à relever que Mme Y... avait reconnu que les fonds détournés avaient servi à financer les mensualités du crédit immobilier, de la maison et la construction de ses ouvrages extérieurs et la piscine, sans s'expliquer sur la circonstance invoquée par M. et Mme Y... que la maison avait été acquise, achevée, et le crédit immobilier soldé avant le début de la période de prévention, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision ;
" 2°) alors qu'en toute hypothèse, si le produit de l'infraction a été mêlé à des fonds d'origine licite pour l'acquisition d'un ou plusieurs biens, la confiscation peut ne porter sur ces biens qu'à concurrence de la valeur estimée de ce produit ; qu'en se bornant à relever que Mme X..., épouse Y... avait reconnu que les fonds détournés avaient servi à financer les mensualités du crédit immobilier, de la maison et la construction de ses ouvrages extérieurs et la piscine, sans constater que M. et Mme Y..., dont elle relevait qu'ils percevaient des revenus mensuels d'environ 3 000 euros, avaient intégralement financé ce bien de manière illicite, ni limiter la confiscation à concurrence de la valeur des améliorations apportées au bien par les fonds litigieux, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision " ;
Attendu que, pour confirmer la peine complémentaire de confiscation du bien immobilier en répression des faits de détournement et de recel commis de 2004 à 2011, l'arrêt relève que le prêt immobilier était remboursable jusqu'au 30 mai 2007, que la piscine a été construite courant 2006 et que Mme Y... a reconnu que les fonds détournés avaient servi à financer les mensualités du crédit immobilier de la maison et la construction de ses ouvrages extérieurs et la piscine ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, et dès lors que l'article 131-21 alinéa 3 du code pénal permet au juge de prononcer la confiscation d'un bien acquis avec des fonds dont une partie provient de l'infraction, la cour d'appel a justifié sa décision sans méconnaître les textes visés au moyen ;
D'où il suit que le moyen, dont la première branche manque en fait, doit être écarté ;
Mais sur le quatrième moyen de cassation proposé pour M. et Mme Y... par la société civile professionnelle Boré et Salve de Bruneton, pris de la violation des articles 5 et 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 132-19 et 132-25 du code pénal, préliminaire, 465, 512, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
" en ce que l'arrêt a condamné Mme X..., épouse Y... à une peine d'emprisonnement délictuelle de trois ans, assortie d'une sursis partiel d'une durée d'un an, avec mise à l'épreuve d'une durée de trois ans et en ce qu'il a ordonné le maintien en détention de cette dernière ;
" aux motifs propres que le casier judiciaire n° 1 de Mme X..., épouse Y... ne porte mention d'aucune condamnation ; qu'en vertu de l'article 132-19 du code pénal, en matière correctionnelle, une peine d'emprisonnement sans sursis ne peut être infligée qu'en dernier recours si la gravité de l'infraction et la personnalité de son auteur rendent cette peine nécessaire et si toute autre sanction est manifestement inadéquate ; que dans ce cas la peine d'emprisonnement doit, si la personnalité et la situation du condamné le permettent et sauf impossibilité matérielle, faire l'objet d'une des mesures d'aménagement prévues aux sous-sections 1 et 2 de la section 2 du présent chapitre ; que le prononcé d'une peine d'emprisonnement correctionnel de trois ans dont un an avec sursis avec mise à l'épreuve pendant trois ans est justifié et toute autre sanction est manifestement inadéquate en raison des circonstances de la cause ; que Mme X..., épouse Y... a détourné pendant de nombreuses années des fonds publics dans l'exercice de ses fonctions qui exigeaient une probité exemplaire ; que Mme X..., épouse Y... étant détenue en vertu du mandat de dépôt prononcé par le tribunal correctionnel de Nice, il n'y a pas lieu d'ordonner une des mesures d'aménagement prévues par les articles 132-5 et 132-28 du code pénal ; que pour assurer l'exécution continue de la partie ferme de l'emprisonnement, il convient d'ordonner le maintien en détention ;
" et aux motifs adoptés que s'agissant de Mme X..., épouse Y... les faits sont d'une particulière gravité eu égard au montant des sommes détournées (près de 300 000 euros) à leur réitération pendant plusieurs années et au fait qu'ils ont été commis par Mme X..., épouse Y... dans l'exercice de fonctions exigeant une probité exemplaire ; qu'il convient par conséquent de prononcer à l'encontre de Mme X..., épouse Y... une peine d'emprisonnement pour partie ferme et de l'assortir d'un mandat de dépôt pour en garantir une exécution immédiate ;
" 1°) alors que le juge qui prononce une peine d'emprisonnement sans sursis ou ne faisant pas l'objet de mesures d'aménagement doit spécialement motiver sa décision au regard des faits de l'espèce, de la personnalité de leur auteur et de sa situation matérielle, familiale et sociale ; qu'en prononçant à l'encontre de Mme X..., épouse Y... une peine d'emprisonnement sans sursis ni aménagement, sans avoir égard à sa situation matérielle, familiale et sociale, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision ;
" 2°) alors que les juges correctionnels ne peuvent décerner mandat de dépôt à l'encontre du condamné à une peine correctionnelle que par une décision spéciale et motivée ; qu'en se bornant à viser la nécessité d'assurer l'exécution immédiate et continue de la peine d'emprisonnement prononcée à l'encontre de Mme Y..., jamais condamnée, dont la qualité de retraitée des finances publiques écartait tout risque de réitération de l'infraction poursuivie, pour ordonner son maintien en détention, la cour d'appel n'a pas suffisamment justifié sa décision au regard des textes susvisés ;
Vu l'article 132-19 du code pénal ;
Attendu qu'il résulte de ce texte, que le juge qui prononce une peine d'emprisonnement sans sursis doit en justifier la nécessité au regard de la gravité de l'infraction, de la personnalité de son auteur et du caractère inadéquat de toute autre sanction ; que, si la peine prononcée n'est pas supérieure à deux ans, ou à un an pour une personne en état de récidive légale, le juge, qui décide de ne pas l'aménager, doit, en outre, soit constater une impossibilité matérielle de le faire, soit motiver spécialement sa décision au regard des faits de l'espèce et de la situation matérielle, familiale et sociale du prévenu ;
Attendu que pour confirmer le jugement ayant condamné Mme Y... à trois ans d'emprisonnement dont un an avec sursis et mise à l'épreuve et ordonner son maintien en détention, la cour d'appel énonce que le prononcé de cette peine est justifié et que toute autre sanction est manifestement inadéquate en raison des circonstances de la cause, l'intéressée ayant détourné pendant de nombreuses années des fonds publics dans l'exercice de ses fonctions qui exigeaient une probation exemplaire ; que les juges retiennent également que Mme Y... étant détenue en vertu du mandat de dépôt prononcé par le tribunal correctionnel, il n'y a pas lieu d'ordonner une des mesures d'aménagement ; qu'ils ajoutent que pour assurer l'exécution continue de la partie ferme de l'emprisonnement, il convient d'ordonner le maintien en détention ;
Mais attendu qu'en l'état de ces énonciations, la cour d'appel, qui n'a pas spécialement motivé sa décision de ne pas aménager la peine prononcée de deux ans d'emprisonnement sans sursis au regard de la situation matérielle, familiale et sociale de la prévenue et s'est prononcée par un motif inopérant pris du placement en détention de celle-ci par les premiers juges, a méconnu le texte susvisé et le principe ci-dessus rappelé ;
D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ; qu'elle sera limitée à la peine d'emprisonnement prononcée à l'encontre de la prévenue ;
Sur le moyen unique de cassation proposé pour le département des Alpes-Maritimes par la société civile professionnelle Nicolaÿ, de Lanouvelle et Hannotin, pris de la violation de l'article 1382 du code civil, du principe de la réparation intégrale du préjudice, des articles 2 et 3 du code de procédure pénale, 591 et 593 du code de procédure pénale, dénaturation des conclusions, contradiction de motifs, défaut de base légale ;
" en ce que, l'arrêt infirmatif attaqué a déclaré irrecevable la constitution de partie civile du département des Alpes-Maritimes ;
" aux motifs que si les fonds détournés par Mme X..., épouse Y... devaient être reversés au conseil général, il n'en demeure pas moins qu'ils ont été prélevés sur les comptes de l'Ehpad de l'Olivier et de l'Ehpad Victor Nicolia que la trésorerie de l'Escarène gérait ; que Mme D... a confirmé que seuls les Ehpad étaient les victimes de ces détournements ; que les Ehpad restent débiteurs des sommes détournées envers son créancier le Conseil général ; qu'il convient par conséquent de déclarer irrecevable la constitution de partie civile du département des Alpes Maritime » ;
" 1°) alors que les juges, qui sont tenus de statuer dans les limites des conclusions des parties, ne peuvent modifier d'office ni la cause ni l'objet des demandes qui leur sont soumises ; qu'en l'espèce, aux termes des conclusions d'appel du demandeur régulièrement déposées devant la cour d'appel, et comme relevé par la cour d'appel, il était demandé, non pas la condamnation des époux Y... au remboursement des sommes détournées par eux, mais seulement leur condamnation au paiement de la somme de 100 000 euros en réparation du préjudice financier résultant du retard dans la perception des sommes détournées ; dès lors, en jugeant, pour déclarer irrecevable la constitution de partie civile du département des Alpes-Maritimes, que les Ehpad restaient débiteurs des sommes détournées envers le conseil général, la cour d'appel qui a ignoré que la demande d'indemnisation ne portait que sur les intérêts de retard et non sur les sommes détournées, a modifié l'objet de la demande par excès de pouvoir et privé sa décision de base légale au regard des textes visés par le moyen ;
" 2°) alors que tout jugement doit être motivé et qu'un motif inopérant équivaut à un défaut de motifs ; qu'en jugeant, pour déclarer irrecevable la constitution de partie civile du département des Alpes-Maritimes, que les Ehpad restaient débiteurs des sommes détournées envers le conseil général, cependant que le département ne demandait pas des dommages-intérêts à hauteur des sommes détournées mais seulement des dommages-intérêts à hauteur des intérêts de retard sur dix ans calculé sur le montant des détournements, soit la somme de 100 000 euros, la cour d'appel qui a statué par des motifs inopérants, a privé sa décision de base légale au regard de textes visés par le moyen ;
" 3°) alors que tout jugement doit être motivé et que la contradiction de motifs équivaut à un défaut de motifs ; qu'en jugeant au cas présent, pour déclarer irrecevable la constitution de partie civile du département des Alpes-Maritimes, que les Ehpad restaient débiteurs des sommes détournées envers le conseil général, cependant qu'aux termes de ses conclusions d'appel régulièrement déposées, le demandeur, ainsi qu'elle l'avait d'ailleurs relevé, évaluait son préjudice, non pas au montant des détournements, soit la somme de 300 000 euros, mais à celui des intérêts de retard sur dix ans calculé sur le montant des détournements, soit la somme de 100 000 euros, la cour d'appel a entaché sa décision d'une dénaturation des conclusions d'appel du département des Alpes-Maritimes constitutive d'une contradiction de motifs, privant ainsi sa décision de base légale au regard des textes susvisés ;
" 4°) alors que tout jugement doit être motivé et que le défaut de réponse à conclusions équivaut à un défaut de motifs ; qu'en statuant comme elle l'a fait, sans même examiner, ne serait-ce que pour l'écarter, le moyen des conclusions d'appel du demandeur faisant état d'un préjudice financier, distinct des détournements, dont le demandeur demandait réparation à hauteur de 100 000 euros, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de réponse à conclusions et privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés ;
" 5°) alors que l'auteur du délit est tenu de réparer intégralement le préjudice ; qu'ayant constaté au cas présent que « les Ehpad restent débiteurs des sommes détournées envers son créancier le Conseil général », ce dont il résultait que le département n'avait pas encore perçu les sommes correspondantes, et que, nécessairement il en résultait un préjudice lié au retard dans le paiement, la cour d'appel ne pouvait déclarer irrecevable la constitution de partie civile du département sans méconnaître les conséquences légales de ses constations ; que, partant, elle a privé sa décision de base légale au regard des textes visés par le moyen " ;
Attendu que, pour déclarer irrecevable la constitution de partie civile du département des Alpes-Maritimes qui sollicitait l'indemnisation d'un préjudice financier, fondé sur la privation de ressources qu'il aurait pu affecter à sa politique d'aide aux personnes âgées dépendantes, à hauteur d'une somme de 100 000 euros calculée sur les intérêts de retard des sommes détournées, la cour d'appel relève que, si les fonds détournés par Mme Y... devaient être reversés au Conseil général, ils ont été prélevés sur les comptes des Ehpad que la trésorerie gérait ; qu'elle retient que seuls les Ehpad avaient été les victimes de ces détournements et qu'ils restaient débiteurs des sommes détournées envers son créancier, le Conseil général ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, dont il résulte que le préjudice invoqué par le département, créancier des propriétaires des fonds détournés, ne résultait pas directement des détournements de fonds reprochés, la cour d'appel, qui a répondu aux chefs péremptoires des conclusions régulièrement déposées devant elle, a, sans dénaturation ni excès de pouvoir, justifié sa décision ;
Que, dès lors, le moyen ne peut qu'être écarté ;
Par ces motifs :
II-Sur le pourvoi du département des Alpes-Maritimes :
Le REJETTE ;
I-Sur les pourvois de Mme Evelyne Y... et M. Michel Y... :
CASSE et ANNULE, en ses seules dispositions relatives à la peine d'emprisonnement prononcée à l'encontre de Mme Y..., l'arrêt susvisé de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, en date du 16 février 2016, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;
Et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée ;
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
DIT n'y avoir lieu à application de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel d'Aix-en-Provence et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le quatorze juin deux mille dix-sept ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.