LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Louis Vuitton Malletier (la société LVM) est titulaire des droits d'auteur sur un modèle de chaussure dénommé "Emily" présenté dans son catalogue automne 2007 ainsi que de la marque figurative évoquant un fermoir dont les pourtours de la partie supérieure ont la forme d'un triangle inversé ou de la lettre V, marque déposée le 11 mars 2004 et enregistrée sous le numéro 04 3 279 135 pour désigner notamment les sacs à main, trousses de voyage et portefeuilles ; que reprochant à la société HetM Hennes et Mauritz France (la société HetM) d'avoir fait paraître en 2008, dans la presse écrite et sur son site internet, deux photographies publicitaires destinées à promouvoir une robe portée par un mannequin chaussé du modèle de chaussure susvisé et d'avoir commercialisé dans ses magasins des articles de maroquinerie revêtus d'un signe contrefaisant sa marque, la société LVM a assigné la société HetM en contrefaçon et concurrence déloyale ; que, reconventionnellement, cette dernière a sollicité la nullité de ladite marque ainsi que la déchéance des droits de la société LVM sur celle-ci ;
Sur le premier moyen, après délibéré de la première chambre civile :
Attendu que la société HetM fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir décidé qu'elle avait commis des actes de contrefaçon au préjudice de la société Louis Vuitton Malletier en reproduisant sans autorisation le modèle de soulier Emily dans le cadre d'une campagne publicitaire, alors, selon le moyen :
1°/ qu'en décidant que les deux photographies critiquées engageaient la responsabilité de la société HetM Hennes et Mauritz sans constater que la première des deux photographies, représentant un mannequin vu de face, comportait la reproduction des caractéristiques où la cour d'appel a situé le siège de l'originalité du modèle de chaussure revendiqué, la société HetM ayant contesté l'utilisation de ce modèle de chaussure et fait valoir que les caractéristiques de ce modèle n'étaient pas visibles sur la photographie en cause, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article L. 335-2 du code de la propriété intellectuelle ;
2°/ que lorsqu'elle est accessoire au sujet traité, la représentation d'une oeuvre ne réalise pas la communication de cette oeuvre au public et ne constitue pas une contrefaçon ; que pour décider que la représentation du modèle de chaussure revendiqué ne présentait pas un caractère accessoire, la cour d'appel, sans s'arrêter au sujet traité dans les deux photographies, soit une légère robe revêtant une jeune femme ingénue, s'est fondée sur le seul fait que la représentation de la chaussure se détachait visiblement des autres éléments composant la photographie ; qu'en statuant de la sorte, la cour d'appel, qui, tout en constatant que la robe occupait une place centrale dans les deux photographies, n'a pas recherché si, quelle que soit son importance visuelle, la chaussure n'avait pas un caractère accessoire par rapport au sujet traité a privé sa décision de toute base légale au regard des articles L. 122-2, L. 122-3 et L. 335-2 du code de la propriété intellectuelle ;
Mais attendu que la cour d'appel a constaté par motifs propres que les chaussures en cause reproduites sur les photographies litigieuses, loin d'être accessoires, se détachaient d'autant plus aisément que le mannequin qui les portait, vêtu d'une robe courte, était photographié de face et présenté seul sur fond blanc et par motifs adoptés que ces souliers étaient destinés à mettre en valeur la robe puisqu'ils étaient parfaitement assortis à ladite robe et mis en évidence par le port de jambières et les différentes positions adoptées par le mannequin qui met ainsi en avant les chaussures qu'il porte, lesquelles sont parfaitement identifiables et surtout qu'ils participent indéniablement à une mise en scène destinée à mettre en valeur les vêtements commercialisés par la société défenderesse ;
Que le moyen, qui ne tend en réalité qu'à remettre en discussion ces constatations des juges du fond qui sont souveraines, manque en fait ;
Mais sur le deuxième moyen, pris en sa première branche :
Vu les articles L. 711-1 et L. 711-2 c) du code de la propriété intellectuelle ;
Attendu que pour rejeter la demande en nullité de la marque, l'arrêt relève que la preuve n'est pas rapportée qu'à la date du dépôt de la marque il existait un fermoir adoptant la même combinaison de lignes arbitraires voire s'en rapprochant ; qu'il en déduit que les consommateurs sont enclins à reconnaître à cette combinaison un caractère distinctif au demeurant faible en raison de la fonction utilitaire du signe ;
Attendu qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher si, en l'absence de tout élément verbal, le consommateur de référence percevrait le signe comme une identification d'origine des produits ou simplement comme un élément fonctionnel et décoratif, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;
Et sur le troisième moyen, pris en sa seconde branche :
Vu l'article L. 714-5 du code de la propriété intellectuelle ;
Attendu qu'encourt la déchéance de ses droits le propriétaire de la marque qui, sans justes motifs, n'en a pas fait un usage sérieux, pour les produits et services visés dans l'enregistrement, pendant une période ininterrompue de cinq ans et qu'est assimilé à un tel usage, l'usage de la marque sous une forme modifiée n'en altérant pas le caractère distinctif ;
Attendu que pour rejeter la demande en déchéance des droits de la société LVM sur sa marque en ce qu'elle désigne les sacs à main, trousses de voyage et portefeuilles, l'arrêt relève que les publicités diffusées dans les magazines Elle des 5 mars et 2 avril 2007 et L'Officiel du mois d'avril 2007 témoignent de la diffusion dans la presse à grand tirage de visuels qui mettent en valeur ce qui constitue l'aspect distinctif de la marque ; qu'il relève encore que le signe exploité présente un aspect gaufré et non pas lisse et brillant mais que cette différence d'aspect de la matière n'altère pas le caractère distinctif de la marque ;
Attendu qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher si, eu égard au secteur économique concerné et à la nature des produits, un tel usage pouvait être qualifié de sérieux, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a confirmé le jugement du tribunal de grande instance de Paris du 9 avril 2010 ayant rejeté la demande en nullité de la marque n° 04 3 279 135 en ce qu'elle désigne les sacs, trousses de voyage et portefeuilles et en ce que, l'infirmant, il a rejeté la demande en déchéance des droits de la société Louis Vuitton Malletier sur cette marque, l'arrêt rendu le 20 mai 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et pour être fait droit les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne la société Louis Vuitton Malletier aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du six mai deux mille quatorze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par Me Bertrand, avocat aux Conseils, pour la société Hennes et Mauritz
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué, confirmatif de ce chef, d'AVOIR décidé que la société HetM HENNES ET MAURITZ avait commis des actes de contrefaçon au préjudice de la société LOUIS VUITTON MALLETIER en reproduisant sans autorisation le modèle de soulier EMILY dans le cadre d'une campagne publicitaire ;
AUX MOTIFS QUE la société HetM fait valoir, comme elle le fit devant les premiers juges, que les parutions publicitaires sous forme de deux photographies, ne réalisent par une communication au public dans la mesure où sur la photo présentant le mannequin de face et diffusée sur interdit, il n'est pas possible de distinguer l'escarpin et sur celle du mannequin vu de profil, publiée dans les magazines « Elle » et « Glamour », l'escarpin n'apparaît pas entier, le cadrage sectionnant la partie inférieure de la photo ; qu'elle ajoute que le propos de ces publicités est de mettre en exergue la robe, son prix (19,60 euros) et le mannequin qui la porte, et nullement l'escarpin de la société LVM, pour conclure à l'absence de contrefaçon en raison de l'absence de reproduction de l'ensemble des caractéristiques de l'escarpin et de l'aspect accessoire de cette reproduction partielle ; mais que c'est par des motifs pertinents que la cour fait siens que les premiers juges ont relevé que bien que la robe occupe une place centrale dans le décor des deux photos, il demeure que, la place des chaussures est d'autant moins accessoire que le mannequin, photographié de face, ne porte qu'une robe courte de couleur bleue, des jambières de couleur sombre et les souliers revendiqués ; que ces éléments se détachent d'autant plus aisément, que le mannequin est présenté seul, sur un fond blanc, à l'exclusion de tout autre élément décoratif ; qu'il en va de même pour la photographie présentant le mannequin de profil, d'autant plus que celui-ci plie légèrement la jambe gauche, et ce faisant, présente le soulier revendiqué en laissant voir très distinctement, l'ensemble des caractéristiques qui fondent son originalité, peut important que l'extrême bout du soulier ne soit pas représenté dès lors que l'observateur reconstitue mentalement sans difficulté la partie manquante ; que sans même qu'il soit nécessaire de se prononcer sur la pertinence de la théorie de l'accessoire après l'intervention de la directive du 21 mai 2011, force est de constater que les reproductions réalisées par les deux photographies ne présentent pas un caractère accessoire et qu'elles engagent la responsabilité de la société HetM (arrêt attaqué p. 4 al. 6 et 7 et p. 5 al. 1 et 2) ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE la société HetM ne prétend pas avoir reproduit dans le cadre de la campagne publicitaire litigieuse un autre modèle d'escarpins que le modèle Emily sur lequel la société LOUIS VUITTON détient des droits patrimoniaux d'auteur, il y a lieu de constater que la photographie support de la campagne publicitaire litigieuse, représente une jeune femme en mouvement, de face ou de profil, vêtue d'une robe courte bleu ciel, de jambières noires et des souliers revendiqués, ainsi que de la mention inscrite en petits caractères « Robe 19,90 ¿ » et du logo HetM en bas de la photographie, inscrit en grosses lettres de couleur rouge ; que s'il peut être admis que les chaussures ne sont pas l'objet de cette photographie publicitaire et que l'attention se trouve tout d'abord attirée par la robe qui occupe la place centrale sur le visuel, il n'en demeure pas moins que la photographie de mode à usage publicitaire expose à la cliente potentielle aussi bien l'objet même de la publicité, en l'espèce le vêtement HetM, que les accessoires qui l'accompagnent et le mettent en valeur, en l'occurrence les souliers parfaitement assortis à ladite robe et mis en évidence par le port de jambières et les différentes positions adoptées par le mannequin qui dégage une de ses jambes en l'avançant ou en la pliant et qui met ainsi en avant les chaussures qu'elle porte, lesquelles sont, contrairement à ce que soutient la société HetM, parfaitement identifiables ; qu'ainsi, même si lesdites chaussures participent indéniablement à une mise en scène destinée à mettre en valeur les vêtements commercialisés par la société défenderesse, elles conservent leur propre attractivité et seront perçues de manière distincte par la consommatrice de sorte que la communication au public est réalisée et partant l'atteinte aux droits d'auteur dont est investie la société LOUIS VUITTON de par la reproduction non autorisée (jugement p. 6 dernière ligne et p. 7 al. 1 à 3 ) ;
ALORS, d'une part, QU'en décidant que les deux photographies critiquées engageaient la responsabilité de la société HetM HENNES ET MAURITZ sans constater que la première des deux photographies, représentant un mannequin vu de face, comportait la reproduction des caractéristiques où la cour d'appel a situé le siège de l'originalité du modèle de chaussure revendiqué, la société HetM ayant contesté l'utilisation de ce modèle de chaussure et fait valoir que les caractéristiques de ce modèle n'étaient pas visibles sur la photographie en cause, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article L.335-2 du Code de la Propriété Intellectuelle ;
ALORS, d'autre part, QUE lorsqu'elle est accessoire au sujet traité, la représentation d'une oeuvre ne réalise pas la communication de cette oeuvre au public et ne constitue pas une contrefaçon ; que pour décider que la représentation du modèle de chaussure revendiqué ne présentait pas un caractère accessoire, la cour d'appel, sans s'arrêter au sujet traité dan les deux photographies, soit une légère robe revêtant une jeune femme ingénue, s'est fondée sur le seul fait que la représentation de la chaussure se détachait visiblement des autres éléments composant la photographie ; qu'en statuant de la sorte, la cour d'appel qui, tout en constatant que la robe occupait une place centrale dans les deux photographies, n'a pas recherché si, quelle que soit son importance visuelle, la chaussure n'avait pas un caractère accessoire par rapport au sujet traité a privé sa décision de toute base légale au regard des articles L.122-2, L.122-3 et L.335-2 du Code de la Propriété Intellectuelle.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué, confirmatif de ce chef, d'AVOIR rejeté la demande de la société HetM HENNES ET MAURITZ en nullité de la marque n° 04 3 279 135 de la société LOUIS VUITTON MALLETIER en ce qu'elle désigne les sacs, trousses de voyages et portefeuilles ;
AUX MOTIFS QUE la marque est constituée de la représentation en deux dimensions d'une forme particulière de fermoir métallique composé d'une plaque supérieure de fixation, de forme rectangulaire aux bords arrondis, pourvue de deux rivets, un moraillon accroché à cette plaque supérieure, dont les pourtours sont légèrement incurvés vers l'extérieur et épousent la forme d'un triangle inversé ou de la lettre « V », un palastre de forme rectangulaire ; que l'appréciation du caractère distinctif de cette marque doit être reportée au 11 mars 2004, pour les sacs à mains, les trousses de voyage et les portefeuilles ; qu'au regard des exigences de l'article 3 § 1 a) de la directive n° 89/104 auquel l'article L.711-1 du Code de la Propriété Intellectuelle renvoie, il importe de déterminer si ce signe est de nature à remplir la fonction essentielle de la marque et donc d'apprécier si les consommateurs le perçoivent comme leur indiquant la provenance de ces produits ; que la question est de savoir en l'espèce si la marque figurative litigieuse ne sera perçue par les consommateurs que comme un fermoir ou si le caractère singulier des formes qu'elle adopte pourra leur signifier l'indication d'une origine commerciale et donc leur permettre de distinguer les produits qu'il apporte de ceux provenant d'une autre origine ; que force est de constater qu'aucun fermoir produit aux débats n'adoptait en 2004 la combinaison des lignes arbitraires composant le signe déposé, ni même s'en approchait ; que les consommateurs sont ainsi enclins à reconnaître à cette combinaison un caractère distinctif, au demeurant faible en raison de la fonction utilitaire du signe, mais dont la faiblesse peut être compensée par l'importance que LVM réserve à l'exploitation de sa marque, point qui sera examiné dans le cadre de l'appréciation de la demande en déchéance (arrêt attaqué pp. 5-6) ;
ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE l'impossibilité alléguée pour ce signe d'assurer la fonction d'identité d'origine qui constitue le rôle premier de la marque se trouve contredite par le fait que la forme en « V » du moraillon peut évoquer l'initiale de VUITTON ; qu'il est au surplus démontré par les pièces produites que cette marque n'est pas seulement utilisée comme fermoir de sacs, de trousses ou de portefeuilles, mais également de façon purement décorative sur des chaussures n'exerçant pas alors d'autre fonction que celle de rattacher l'article considéré à la société LOUIS VUITTON (jugement p. 8 dernier al. et p. 9 al. 1er) ;
ALORS, d'une part, QUE la forme d'un produit ne peut constituer une marque valable qu'à condition d'être distinctive ; que le signe constitué par la représentation du produit ou d'un dispositif destiné à être apposé sur ce produit ne peut présenter un caractère distinctif et constituer une marque valable propre à identifier le produit comme provenant d'une entreprise déterminée qu'à la condition qu'il diverge de façon significative, aux yeux du public pertinent constitué par les consommateurs habituels du type de produit considéré, de la norme ou des habitudes suivies dans le secteur commercial en cause, les consommateurs moyens n'ayant pas pour habitude de présumer l'origine des produits en se fondant sur leur forme ou celle des éléments dont ils sont revêtus ; que pour reconnaître un caractère distinctif, quoique faible, au fermoir constituant le signe déposé à titre de marque, la cour d'appel s'est bornée à énoncer qu'aucun fermoir produit aux débats n'adoptait en 2004 la combinaison de lignes arbitraires composant le signe déposé ni ne s'en approchait ; qu'en statuant par ces motifs uniquement relatifs au caractère partiellement arbitraire de la forme du fermoir, impropres à caractériser en quoi cette forme était apte à identifier les produits comme provenant d'une entreprise déterminée, la cour d'appel qui, en l'absence de toute référence au public pertinent constitué des consommateurs habituels des produits de maroquinerie, ne s'est pas expliquée, comme elle y était invitée, sur le fait que les produits de ce type portent habituellement la marque gravée sur l'objet, de sorte qu'un consommateur ne sera pas enclin à identifier comme une marque un objet dépourvu de cette gravure, ni sur le fait que le fermoir ne comportait pas suffisamment de caractéristiques autres que celles que le consommateur s'attend à trouver dans ce type d'objet pour regarder une telle forme comme assurant une fonction d'identification du produit, de sorte sue le signe en cause ne divergeait pas de façon assez significative de la norme ou des habitudes du secteur commercial considéré pour remplir sa fonction d'origine, a privé sa décision de toute base légale au regard des articles L.711-1 et L.711-2 c) du Code de la Propriété Intellectuelle ;
ALORS, d'autre part, QU'en énonçant que l'impossibilité alléguée pour le signe d'assurer la fonction d'identité d'origine qui constitue le rôle premier de la marque se trouvait contredite par le fait que la forme en V du moraillon pouvait évoquer l'initiale de VUITTON, la cour d'appel a statué par un motif hypothétique en violation de l'article 455 du Code de Procédure civile ;
ALORS, enfin, QUE seul étant en cause le pouvoir distinctif de la marque pour désigner les sacs à mains, trousses de voyage et portefeuilles pour lesquels elle était opposée, la cour d'appel ne pouvait relever que la marque était également utilisée de façon purement décorative sur des chaussures et qu'elle n'exerçait pas alors d'autre fonction que celles de rattacher l'article considéré à la société LOUIS VUITTON sans statuer par un motif inopérant, privant ainsi sa décision de toute base légale au regard des articles L.711-1 et L.711-2 c) du Code de la Propriété Intellectuelle.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué, infirmatif de ce chef, d'AVOIR rejeté la demande en déchéance des droits de la société LOUIS VUITTON MALLETIER sur la marque n° 04 3 279 135 ;
AUX MOTIFS qu'il importe de déterminer si la preuve est administrée de l'exploitation sérieuse de la marque n° 04 3 279 135, c'est-à-dire sous la forme qui figure à son enregistrement ou, en application de l'article L.714-5 du Code de la Propriété Intellectuelle, sous une forme modifiée qui n'en altère pas le caractère distinctif ; qu'à cet égard, les pièces (n° 57-1 à 57-3, publicités diffusées dans les magazines Elle des 5 mars et 2 avril 2007 et L'Officiel du mois d'avril 2007) témoignent de la diffusion de visuels qui mettent en valeur ce qui constitue l'aspect distinctif de la marque (configuration de la partie supérieure, du moraillon et du palastre, positionnement et mise en exergue des rivets) à ceci près qu'à la différence du signe déposé, celui exploité présente un aspect gaufré et non pas lisse et brillant ; que cette différence d'aspect qui ne renvoie qu'à une différence de matière et de présentation, constitue une exploitation sous une forme modifiée qui n'en altère pas le caractère distinctif ; que par ailleurs ces pièces justifient d'une large diffusion de la marque dans la presse à grand tirage en 2007 qui n'a pu que contribuer à asseoir son caractère distinctif intrinsèque (arrêt attaqué p. 7 dernier al. et p. 8 al. 1 à 3) ;
ALORS, d'une part, QU'encourt la déchéance de ses droits le propriétaire de la marque qui, sans justes motifs, n'en a pas fait un usage sérieux, pour les produits et services visés dans l'enregistrement, pendant une période ininterrompue de cinq ans ; qu'une marque fait l'objet d'un usage sérieux lorsqu'elle est utilisée conformément à sa fonction essentielle qui est de garantir l'identité d'origine des produits pour lesquels elle a été enregistrée ; que, pour décider qu'il était justifié d'un usage de la marque faisant échec à la demande de déchéance, la cour d'appel s'est fondée sur des publicités parues dans la presse à l'exclusion de tout élément démontrant que le signe était effectivement apposé sur des produits présents sur le marché ; qu'ainsi elle a violé l'article L.714-5 du Code de la Propriété Intellectuelle ;
ALORS, d'autre part, QUE pour décider qu'il était justifié d'un usage de la marque faisant échec à la demande de déchéance, la cour d'appel s'est fondée, à l'exclusion de tout autre élément, sur trois publicités parues, aux mois de mars et d'avril 2007, dans deux magazines ; qu'en se fondant sur un tel usage de la marque dont la société HetM soulignait le caractère sporadique, hors de toute référence aux caractéristiques du produit et au marché considéré et sans relever que cet usage présentait le caractère sérieux légalement requis, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article L.714-5 du Code de la Propriété Intellectuelle.