AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par :
1 / la société Sermab, société à responsabilité limitée, dont le siège social est à Villiers-le-Bel (Val-d'Oise), ruelle d'Hérivaux,
2 / M. Raymond Y..., demeurant ruelle d'Hérivaux à Villiers-le-Bel (Val-d'Oise), en cassation d'un arrêt rendu le 28 janvier 1992 par la cour d'appel de Versailles (13e chambre), au profit de la société Sogicc, dont le siège est ... (Val-de-Marne), défenderesse à la cassation ;
Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 5 avril 1994, où étaient présents :
M. Bézard, président, M. Huglo, conseiller référendaire rapporteur, M. Nicot, conseiller, M. Raynaud, avocat général, Mme Arnoux, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. le conseiller référendaire Huglo, les observations de Me Baraduc-Benabent, avocat de la société Sermab et de M. Y..., de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de la société Sogicc, les conclusions de M. Raynaud, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu l'article 1382 du Code civil ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. Y..., associé et salarié de la société SOGICC, a démissionné de ses fonctions de directeur d'exploitation le 3 janvier 1990 et a créé le 9 février suivant la société SERMAB, avec MM. Z... et X...
A..., anciens salariés de la société SOGICC ; que celle-ci a assigné M. Y... et la société SERMAB en dommages-intérêts pour concurrence déloyale ;
Attendu que, pour condamner in solidum M. Y... et la société SERMAB à verser à la société SOGICC une somme de 40 000 francs à titre de provision sur dommages-intérêts, l'arrêt retient que M. Y... a proposé à certains salariés de travailler avec lui et qu'il a ainsi pris des initiatives un peu excessives ;
Attendu qu'en se déterminant par ces seuls motifs, alors que l'arrêt relève par ailleurs que le départ de deux ouvriers, dont l'un récemment embauché, ne peut être tenu pour susceptible de susciter une désorganisation, leur remplacement étant relativement aisé, et qu'il n'y a pas eu déstabilisation véritable de la société SOGICC, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la seconde branche du moyen :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a retenu une faute à l'encontre de M. Y... et de la société Sermab et les a condamnés à verser à la société Sogicc la somme de 40 000 francs à titre de provision sur dommages-intérêts, l'arrêt rendu le 28 janvier 1992, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Rouen ;
Condamne la société Sogicc, envers la société Sermab et M. Y..., aux dépens et aux frais d'exécution du présent arrêt ;
Ordonne qu'à la diligence de M. le procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit sur les registres de la cour d'appel de Versailles, en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par M. le président en son audience publique du sept juin mil neuf cent quatre-vingt-quatorze.