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03/05/2024 | FRANCE | N°24/00162

France | France, Cour d'appel de Rennes, Chambre etrangers/hsc, 03 mai 2024, 24/00162


COUR D'APPEL DE RENNES



N° 24/89

N° RG 24/00162 - N° Portalis DBVL-V-B7I-UXRM

N° RG 24/00167



JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT



O R D O N N A N C E





article L 3211-12-4 du code de la santé publique



Nous, Véronique VEILLARD, Présidente de chambre à la cour d'appel de RENNES, déléguée par ordonnance du premier président pour statuer sur les recours fondés sur l'article L 3211-12-4 du code de la santé publique, assistée de Elodie CLOATRE, greffière,



Statuant sur l'appel

formé par lettre recommandée avec accusé de réception manuscrite postée le 24 Avril 2024 émanant de Mme [X] [E]-[I], et sur l'appel formé par courrier élec...

COUR D'APPEL DE RENNES

N° 24/89

N° RG 24/00162 - N° Portalis DBVL-V-B7I-UXRM

N° RG 24/00167

JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT

O R D O N N A N C E

article L 3211-12-4 du code de la santé publique

Nous, Véronique VEILLARD, Présidente de chambre à la cour d'appel de RENNES, déléguée par ordonnance du premier président pour statuer sur les recours fondés sur l'article L 3211-12-4 du code de la santé publique, assistée de Elodie CLOATRE, greffière,

Statuant sur l'appel formé par lettre recommandée avec accusé de réception manuscrite postée le 24 Avril 2024 émanant de Mme [X] [E]-[I], et sur l'appel formé par courrier électronique émanant de Me Paméla LEMASSON DE NERCY le 29 avril 2024 à 21 heures 13 pour :

Mme [G] [E]

née le 01 Juillet 1984 à [Localité 4]

[Adresse 1]

[Localité 2]

Actuellement hospitalisée à l'EPSM [3] ([Localité 5])

ayant pour avocat désigné Me Paméla LEMASSON DE NERCY, avocat au barreau de RENNES

d'une ordonnance rendue le 19 Avril 2024 par le Juge des libertés et de la détention de VANNES qui a ordonné le maintien de son hospitalisation complète ;

En l'absence de [G] [E], régulièrement avisée de la date de l'audience, représentée par Me Benoît FLAMANT substituant Me Paméla LEMASSON DE NERCY, avocat

En l'absence de Mme [X] [E]-[I], mère et tiers demandeur, régulièrement avisée,

En l'absence du procureur général régulièrement avisé, Monsieur DELPERIE, avocat général, ayant fait connaître son avis par écrits déposés les 29 et 30 avril 2024, lesquels ont été mis à disposition des parties,

En l'absence du représentant de l'établissement de soins, régulièrement avisé,

Après les renvois successifs prononcés aux audiences du 02 mai 2024 à 11 H 00 et du 02 mai 2024 à 16 H 00, et après avoir entendu en audience publique le 03 Mai 2024 à 14 H 00 l'avocat de l'appelant en ses observations,

Avons mis l'affaire en délibéré et ce jour, après en avoir délibéré, avons rendu par mise à disposition au greffe la décision suivante :

EXPOSÉ DU LITIGE

Le 11 avril 2024, à la suite d'une tentative de suicide avec un sabre, Mme [G] [E] a été admise en soins psychiatriques en urgence à la demande d'un tiers, en l'espèce [X] [E]-[I], sa mère.

Le certificat médical du 11 avril 2024 du Dr [B] [C] a indiqué que Mme [G] [E] présentait un discours délirant de persécution, un délire interprétatif (pensait que sa famille, le voisinage et le corps médical cherchaient à l'empoisonner), ne présentait pas de critique et souffrait d'une adhésion totale au délire. Il est noté qu'elle souffrait d'hallucinations acoustico-verbales et qu'elle entendait des voix l'insultant.

Les troubles ne permettaient pas à Mme [G] [E] d'exprimer un consentement. Le médecin a estimé que son hospitalisation devait être assortie d'une mesure de contrainte et a estimé que cette situation relevait de l'urgence.

Par une décision du 11 avril 2024 du directeur de l'Etablissement public de santé mentale Morbihan, Mme [G] [E] a été admise en soins psychiatriques sous la forme d'une hospitalisation complète en urgence.

Le certificat médical des ' 24 heures établi le 12 avril 2024 à 10 heures 40 par le Dr [S] [L] et le certificat médical des ' 72 heures établi le 14 avril 2024 à 11 heures 08 par le Dr [O] [W] ont préconisé la poursuite de l'hospitalisation complète.

Par décision du 14 avril 2024, le directeur de l'Etablissement public de santé mentale Morbihan a maintenu les soins psychiatriques de Mme [G] [E] sous la forme d'une hospitalisation complète pour une durée de un mois.

Par requête reçue au greffe le 12 avril 2024, le directeur de l'Etablissement public de santé mentale Morbihan a saisi le tribunal judiciaire de Vannes afin qu'il soit statué sur la mesure d'hospitalisation complète de Mme [G] [E].

Par ordonnance en date du 19 avril 2024, le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Vannes a autorisé la poursuite de l'hospitalisation complète de Mme [G] [E].

Mme [X] [E]-[I] a interjeté appel de l'ordonnance du 19 avril 2024 concernant sa fille par lettre recommandée avec accusé de réception postée le 24 avril 2024 et reçue au greffe de la cour d'appel de Rennes le 26 avril 2024.

Un avis d'audience lui a été adressé qu'elle a émargé le 29 avril 2024. Une mention manuscrite 'Ne peut pas être présente à l'audience, ni rencontrer d'avocat' a été apposée sur le retour d'avis, sans précision d'auteur ni de date. Cet avis d'audience a été transmis à maître [U] par courriel du mardi 30 avril 2024 à 12 h 10.

Mme [G] [E] a interjeté appel de l'ordonnance du 19 avril 2024, par l'intermédiaire de son conseil, par courrier électronique en date du 29 avril 2024. L'appelante soutient que le jugement est insuffisamment motivé, notamment en ce qu'il n'identifie et ne répond pas aux moyens soulevés par son conseil.

Un avis d'audience a été adressé à Mme [G] [E] qu'elle a émargé le 30 avril 2024. Cet avis d'audience a été transmises à maître [U] par courriel du mardi 30 avril 2024 à 14 h 58.

A l'audience du 2 mai 2024 à 11 h 00, madame [E] est absente, sans qu'aucune explication n'ait été produite à cette absence. Contact téléphonique pris pendant l'audience par madame la greffière avec l'établissement de soin, il est demandé de transmettre sans délai à la cour d'appel soit un courrier de madame [E] indiquant qu'elle ne souhaite pas comparaître, soit un certificat médical en cas d'incompatibilité à la comparution.

L'examen de l'affaire a été reporté à 16 h le temps de l'accomplissement de la formalité demandée. A 16 h, faute de réponse conforme de l'établissement de soins, l'examen de l'affaire a été reporté au vendredi 3 mai 2024 à 14 h. Le 3 mai 2024 à 9 h 37, Mme [E] a fait parvenir, par l'intermédiaire du secrétariat de l'établissement de soins, un document portant la mention manuscrite signée par elle selon laquelle elle ne souhaitait pas être présente à l'audience du 3 mai 2024 et demandait à être représentée par son avocate.

A l'appui de son appel, Mme [G] [E] soutient, oralement par l'intermédiaire de son conseil, que les réquisitions du ministère public prises en 1ère instance n'ont pas été communiquées de sorte que l'ordonnance du juge des libertés et de la détention est entachée de nullité, que les motifs de différé de notification des décisions d'admission en hospitalisation complète sont irréguliers outre qu'aucune notification ultérieure n'est intervenue, que la délégation de signature accordée à Mme [M] est irrégulière.

A l'appui de son appel, Mme [X] [E]-[I] soulève une erreur matérielle en ce que l'ordonnance déférée a mentionné 'M. [X] [E]-[I]' ayant agi en qualité de 'père', alors qu'elle est 'Mme [X] [E]-[I]' ayant agi en qualité de 'mère'. Elle ajoute que sa fille n'a pas surmonté un traumatisme ancien, qu'elle a peur de tout le monde sauf de ses parents, qu'elle n'a jamais mis en cause son père et qu'il convient de ne conserver dans l'ordonnance que la mention de son oncle. Elle précise encore qu'elle avait demandé une hospitalisation pour un temps strictement nécessaire et qu'il convient qu'une mention de limitation à un mois soit portée dans la décision.

Le ministère public a indiqué solliciter dans les deux procédures la confirmation de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la jonction

Les deux appels ayant pour objet la même et unique décision prise le 19 avril 2024 par le juge des libertés et de la détention à l'égard de Mme [G] [E], il y a lieu d'ordonner la jonction des affaires inscrites au rôle sous les numéros 24/162 et 24/167.

Sur la recevabilité des appels

Aux termes de l'article R. 3211-18 du code de la santé publique, le délai d'appel est de dix jours à compter de la notification de l'ordonnance.

Selon l'article R. 3211-19, le premier président ou son délégué est saisi par une déclaration d'appel motivée transmise par tout moyen au greffe de la cour d'appel et la déclaration est enregistrée avec mention de la date et de l'heure.

En l'espèce, Mme [X] [E]-[I] a formé le 24 avril 2024 un appel de la décision du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Vannes du 19 avril 2024 et Mme [G] [E] a interjeté appel de ladite ordonnance le 29 avril 2024.

Ces appels, réguliers en la forme, seront donc déclarés recevables.

Sur la rectification de l'erreur matérielle

Il y sera fait droit s'agissant des références en première page à 'M.' et à 'père' qui seront remplacées par celles de 'Mme' et 'mère', l'ordonnance étant rectifiée ainsi qu'indiqué au dispositif de la présente décision.

De même, il résulte des déclarations consignées par procès-verbal du greffier à l'audience qui s'est tenue devant le juge des libertés et de la détention le 18 avril 2024 qu'[G] [E] a déclaré avoir très peur d'être livrée à son 'frère' et à son 'oncle'.

Il convient en conséquence de remplacer le terme 'père' par celui de 'frère' dans le 8ème paragraphe de la page 2 de l'ordonnance déférée.

Sur la communication des réquisitions du ministère public

Aux termes de l'article L. 3216-1 du code de la santé publique, la régularité des décisions administratives peut être contestée devant le juge des libertés et de la détention, et en cas d'irrégularité, celle-ci n'entraîne la mainlevée de la mesure que s'il en est résulté une atteinte aux droits de la personne qui en faisait l'objet.

La saisine du juge des libertés et de la détention prévue par l'article L. 3211-12-1 du code de la santé publique doit être accompagnée des avis et pièces tel que prévu par les articles R. 3211-12, -24 et -26 du même code afin de permettre au juge judiciaire de contrôler la régularité des décisions administratives et le cas échéant de statuer sur leur contestation.

En l'espèce, il ressort des avis et pièces mentionnés dans l'exposé des faits et de la procédure que maître [K], qui assistait [G] [E] en première instance, a été mise en mesure de consulter le dossier de la procédure dans lequel se trouvaient les réquisitions du ministère public, de sorte que le moyen n'est pas fondé.

Sur la délégation de signature

La délégation de signature établie le 5 septembre 2022 par M. [R], directeur de l'établissement de soins, mentionne qu'il a délégué sa signature à M. [Y], directeur des soins et, en cas d'absence ou d'impossibilité de celui-ci, à Mme [M], attachée d'administration hospitalière. Il en résulte que la décision d'admission en soins psychiatriques d'urgence avec tiers signée le jeudi 11 avril 2024 par Mme [M] est régulière.

La décision de maintien pour un mois en hospitalisation complète a été signée le 14 avril 2024 par Mme [D] [A], administrateur de garde, laquelle figure sur la délégation de signature établie le 13 janvier 2024 par M. [R], directeur, en vue d'assurer la continuité du service public des soins. Il en résulte que la décision de maintien en soins psychiatriques d'urgence avec tiers signée le dimanche 14 avril 2024 par Mme [A] est régulière.

Sur la notification des décisions d'admission et de maintien

Ces décisions ont été respectivement notifiées à Mme [E] les 12 avril 2024 et 14 avril 2024. C'est seulement la signature de l'accusé de réception par la patiente qui n'a pu être recueillie compte tenu de son état (à savoir sous l'emprise d'angoisses morbides ou sédatée).

Il n'en demeure pas moins que ses droits lui ont été notifiés et que ces notifications sont régulières.

Sur le fond

Aux termes du I de l'article L. 3212-1 du code de la santé publique, 'une personne atteinte de troubles mentaux ne peut faire l'objet de soins psychiatriques sur la décision du directeur d'un établissement mentionné à l'article L. 3222-1 du même code que lorsque les deux conditions suivantes sont réunies : 1° Ses troubles mentaux rendent impossible son consentement ; 2° Son état mental impose des soins immédiats assortis soit d'une surveillance médicale constante justifiant une hospitalisation complète, soit d'une surveillance médicale régulière justifiant une prise en charge sous la forme mentionnée au 2° de l'article L. 3211-2-1.'

Il convient de rappeler, qu'en application de l'article L3212-1 I du code de la santé publique, le juge statue sur le bien fondé de la mesure et sur la poursuite de l'hospitalisation complète au regard des certificats médicaux qui lui sont communiqués, sans substituer sa propre appréciation des troubles psychiques du patient et de son consentement aux soins, à celle des médecins.

En l'espèce, il résulte des pièces versées au dossier de la procédure et notamment des certificats médicaux que [G] [E] souffre de délire paranoïde avec hallucinations acoustico-verbales et cénesthèques, associant des thématiques de persécution et ésotériques, angoisses envahissantes et massives, idées suicidaires, rationalisme morbide.

La mère d'[G] [E] confirmait dans son courrier contenant appel que sa fille n'avait pas surmonté un traumatisme ancien, sans toutefois préciser lequel.

Sous le bénéfice de ces observations, l'ordonnance qui a maintenu la mesure de placement d'hospitalisation complète de Mme [E] sera confirmée, sans qu'il y ait lieu à limiter à un mois la mesure, ce qui ne relève pas des attributions de l'autorité judiciaire.

Sur les dépens

Les dépens seront laissés à la charge du trésor public.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort, en matière de contentieux des soins et hospitalisations sous contrainte,

Reçoit Mme [X] [E]-[I] en son appel,

Reçoit Mme [G] [E]-[I] en son appel,

Ordonne la jonction des procédures RG 24/00162 et RG 24/00167

Ordonne la rectification de l'erreur matérielle de l'ordonnance déférée et dit que :

- la mention 'M.' [X] [E]-[I] est remplacée par 'Mme' [X] [E]-[I] et que, dans la même phrase, la mention 'père' est remplacée par la mention 'mère',

- le terme 'père' est remplacé par celui de 'frère' dans le 8ème paragraphe de la page 2 de l'ordonnance déférée,

Rejette les moyens tirés de l'irrégularité de la procédure,

Confirme au fond l'ordonnance entreprise,

Rejette le surplus des demandes,

Laisse les dépens à la charge du trésor public.

Fait à Rennes, le 03 Mai 2024 à 17 heures 00

LE GREFFIER, PAR DÉLÉGATION,Véronique

VEILLARD, Présidente de chambre

Notification de la présente ordonnnance a été faite ce jour à [G] [E] , à son avocat, au CH et ARS/tiers demandeur/curateur-tuteur

Le greffier,

Cette ordonnance est susceptible d'un pourvoi en cassation dans les deux mois suivant la présente notification et dans les conditions fixées par les articles 973 et suivants du code de procédure civile.

Communication de la présente ordonnance a été faite ce même jour au procureur général, PR et JLD

Le greffier


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : Chambre etrangers/hsc
Numéro d'arrêt : 24/00162
Date de la décision : 03/05/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 11/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-05-03;24.00162 ?
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