La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

11/05/2023 | FRANCE | N°21/00923

France | France, Cour d'appel de Pau, Chambre sociale, 11 mai 2023, 21/00923


JN/SB



Numéro 23/1606





COUR D'APPEL DE PAU

Chambre sociale







ARRÊT DU 11/05/2023







Dossier : N° RG 21/00923 - N° Portalis DBVV-V-B7F-H2AI





Nature affaire :



A.T.M.P. : demande de prise en charge au titre des A.T.M.P. et/ou contestation relative au taux d'incapacité









Affaire :



[K] [Y]



C/



CPAM PAU-PYRENEES









Grosse délivrée le


à :





















RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS











A R R Ê T



Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 11 Mai 2023, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues...

JN/SB

Numéro 23/1606

COUR D'APPEL DE PAU

Chambre sociale

ARRÊT DU 11/05/2023

Dossier : N° RG 21/00923 - N° Portalis DBVV-V-B7F-H2AI

Nature affaire :

A.T.M.P. : demande de prise en charge au titre des A.T.M.P. et/ou contestation relative au taux d'incapacité

Affaire :

[K] [Y]

C/

CPAM PAU-PYRENEES

Grosse délivrée le

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

A R R Ê T

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 11 Mai 2023, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.

* * * * *

APRES DÉBATS

à l'audience publique tenue le 02 Mars 2023, devant :

Madame NICOLAS, magistrat chargé du rapport,

assistée de Madame LAUBIE, greffière.

Madame NICOLAS, en application de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile et à défaut d'opposition a tenu l'audience pour entendre les plaidoiries et en a rendu compte à la Cour composée de :

Madame NICOLAS, Présidente

Madame SORONDO, Conseiller

Madame PACTEAU, Conseiller

qui en ont délibéré conformément à la loi.

dans l'affaire opposant :

APPELANT :

Monsieur [K] [Y]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Localité 3]

Comparant assisté par Madame [L], juriste à la [5], munie d'un pouvoir

INTIMEE :

CPAM PAU-PYRENEES

[Adresse 1]

[Localité 3]

Comparante en la personne de Madame [T]

sur appel de la décision

en date du 22 FEVRIER 2021

rendue par le POLE SOCIAL DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE PAU

RG numéro : 19/00083

FAITS ET PROCÉDURE

La Caisse Primaire d'Assurance Maladie de Pau Pyrénées (la caisse ou l'organisme social) a:

- le 13 septembre 2016 , pris en charge, au titre de la législation sur les risques professionnels, l'accident survenu le 2 septembre 2016, à M. [K] [Y] (l'assuré), salarié de la société [4] (l'employeur) en qualité de technicien approvisionneur,

-le 8 novembre 2018, après consolidation fixée au 7 novembre 2018, notifié à l'assuré sa décision de fixer son taux d'incapacité permanente partielle (IPP) à 8 %, avec attribution d'une indemnité en capital.

Le 20 février 2019, l'assuré, conformément aux modalités indiquées par la caisse dans la notification de sa décision, a contesté la décision fixant son taux d'IPP à 8 %, devant le pôle social du du tribunal de grande instance de Pau, ( se substituant au tribunal du contentieux de l'incapacité).

Cette juridiction, devenue le pôle social du tribunal judiciaire de Pau, a:

' par jugement du 16 mars 2020, ordonné une consultation médicale confiée au docteur [H] afin d'être éclairée sur le taux d'IPP de l'assuré au 7 novembre 2018, date de la consolidation de son accident de travail; l'expert a rendu son rapport le 13 octobre 2020,

' par jugement du 22 février 2021 :

- dit que l'assuré présentait au 7 novembre 2018 un taux d'IPP de 8% suite à la consolidation de son état de santé en lien avec son accident de travail du 2 septembre 2016,

- débouté l'assuré de sa demande tendant à l'adjonction d'un coefficient professionnel supplémentaire à ce taux d'IPP,

- dit que les frais d'expertise et les dépens resteront à la charge de la caisse.

Cette décision a été notifiée aux parties, par lettre recommandée avec accusé de réception, reçue de l'assuré le 3 mars 2021.

Le 17 mars 2021, par lettre recommandée avec avis de réception adressée au greffe de la cour, l'assuré en a régulièrement interjeté appel.

Selon avis de convocation du 26 septembre 2022, contenant calendrier de procédure, les parties ont été régulièrement convoquées à l'audience du 2 mars 2023, à laquelle elles ont comparu.

PRÉTENTIONS DES PARTIES

Selon ses conclusions visées par le greffe le 3 février 2022, reprises oralement à l'audience de plaidoirie, et auxquelles il est expressément renvoyé, l'assuré, M. [K] [Y], appelant, conclut à l'infirmation du jugement déféré en ce qu'il lui a refusé l'attribution d'un coefficient professionnel, et demande à la cour :

- d'adjoindre en sus du taux médical attribué, un coefficient professionnel qui ne saurait être inférieur à 5%,

- de condamner la caisse aux frais de l'expertise et aux entiers dépens de la procédure,

- de le renvoyer devant la caisse pour la liquidation de ses droits.

Selon ses dernières conclusions visées par le greffe le 2 mars 2023 reprises oralement à l'audience de plaidoirie, et auxquelles il est expressément renvoyé, la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de Pau Pyrénées, intimée, conclut à la confirmation du jugement déféré.

SUR QUOI LA COUR

L'appelant, ne conteste pas, au plan médical, le taux d'incapacité permanente partielle de 8 %, qui lui a été attribué, tant par le médecin-conseil, de la caisse, que par le médecin consulté par le premier juge.

Il estime cependant, au visa de décisions jurisprudentielles, qu'au vu des éléments du dossier, ce taux doit être majoré d'un coefficient professionnel, dès lors que, en substance :

- il a dû faire face à un licenciement pour inaptitude professionnelle,

- il ne peut plus exercer son précédent métier de technicien approvisionneur,

-les restrictions physiques émises par le médecin du travail, corrélées à son âge et à son manque de formation, contribuent à sa difficulté à retrouver un emploi.

La caisse s'y oppose, faisant valoir que le taux fixé par le médecin-conseil intègre le retentissement professionnel, conformément à l'article L434-2 du code de la sécurité sociale, et qu'il n'existe pas d'éléments objectifs démontrant que les lésions résultant de l'accident du 2 septembre 2016, ont compromis de façon définitive sa situation professionnelle, alors même que pendant la période d'alternance, il a perçu un salaire plus important que celui perçu lors de son activité de technicien approvisionneur, qu'il perçoit une seconde rente pour un accident survenu le 21 janvier 2006, et que les difficultés invoquées ne sont qu'hypothétiques.

Rappel des règles applicables

La date à laquelle s'apprécie le taux d'incapacité permanente partielle, est la date de consolidation de l'état de santé de la victime, ainsi qu'il résulte de la combinaison des dispositions des articles L434-2 et L441 3 du code de la sécurité sociale, selon lesquels :

« le taux d'incapacité permanente est déterminé d'après la nature de l'infirmité, l'état général, l'âge, les facultés physiques et mentales de la victime ainsi que d'après ses aptitudes et sa qualification professionnelle compte tenu du barème indicatif d'invalidité » et « (...) toute modification dans l'état de la victime, dont la première constatation médicale est postérieure à la date de guérison apparente ou de consolidation de la blessure, peut donner lieu à une nouvelle fixation des réparations... ».

En application des dispositions des articles L434-2 alinéa 1 du code de la sécurité sociale, et R434-32 alinéas 1 et 2 du même code :

«Le taux de l'incapacité permanente est déterminé d'après la nature de l'infirmité, l'état général, l'âge, les facultés physiques et mentales de la victime ainsi que d'après ses aptitudes et sa qualification professionnelle, compte tenu d'un barème indicatif d'invalidité »,

« Au vu de tous les renseignements recueillis, la caisse primaire se prononce sur l'existence d'une incapacité permanente et, le cas échéant, sur le taux de celle-ci et sur le montant de la rente due à la victime ou à ses ayants droit.

Les barèmes indicatifs d'invalidité dont il est tenu compte pour la détermination du taux d'incapacité permanente d'une part en matière d'accidents du travail et d'autre part en matière de maladies professionnelles sont annexés au présent livre. Lorsque ce dernier barème ne comporte pas de référence à la lésion considérée, il est fait application du barème indicatif d'invalidité en matière d'accidents du travail. »

Par ailleurs, le barème indicatif d'invalidité, précise au titre des principes généraux posés en son chapitre préliminaire, que selon l'article L434-2 du code de la sécurité sociale, le médecin doit tenir compte, avant de proposer le taux médical d'incapacité permanente, non seulement de la nature de l'infirmité, de l'état général, de l'âge et des facultés physiques et mentales, mais également des aptitudes qualification professionnelles, dans les termes suivants:

«5° Aptitudes et qualification professionnelles. La notion de qualification professionnelle se rapporte aux possibilités d'exercice d'une profession déterminée. Quant aux aptitudes, il s'agit là des facultés que peut avoir une victime d'accident du travail ou de maladie professionnelle de se reclasser ou de réapprendre un métier compatible avec son état de santé.

Lorsqu'un accident du travail ou une maladie professionnelle paraît avoir des répercussions particulières sur la pratique du métier, et, à plus forte raison, lorsque l'assuré ne paraît pas en mesure de reprendre son activité professionnelle antérieure, le médecin conseil peut demander, en accord avec l'intéressé, des renseignements complémentaires au médecin du travail. La possibilité pour l'assuré de continuer à occuper son poste de travail - au besoin en se réadaptant - ou au contraire, l'obligation d'un changement d'emploi ou de profession et les facultés que peut avoir la victime de se reclasser ou de réapprendre un métier, devront être précisées en particulier du fait de dispositions de la réglementation, comme celles concernant l'aptitude médicale aux divers permis de conduire ».

Sur ce,

Le rapport médical d'évaluation du taux d'incapacité permanente établi par le médecin-conseil, le 24 octobre 2018, et produit par l'appelant sous sa pièce numéro 5, est particulièrement détaillé et circonstancié, et a fixé à 8 % le taux d'incapacité permanente partielle, en retenant que les séquelles de l'accident du travail du 2 septembre 2016, consolidé le 7 novembre 2018, consistant à avoir raté le marchepied à la descente d'un camion, et avoir subi une torsion du genou gauche, consistent en la « persistance de douleurs, une raideur du genou en flexion, d'une amyotrophie du quadriceps gauche, sur un état antérieur préexistant », sur un homme né le 13 juillet 1970, technicien en automatisme (machine à distribuer le café), lequel bénéficiait d'un contrat à durée indéterminée à temps plein, et qui, malgré diverses tentatives de reprise de son poste de travail, notamment à temps partiel, a fait l'objet d'une décision médicale d'inaptitude à la reprise de son poste.

L'examen, conformément au barème indicatif d'invalidité, contenu à l'annexe I du code de la sécurité sociale, a été effectué par comparaison avec le côté sain, et retient que l'extension du genou gauche (comme celle du genou droit d'ailleurs), est complète, qu'en revanche, la flexion du genou gauche est à 110° (correspondant à 5 % d'IPP), alors que celle du genou droit est à 135°, avec douleur en fin de mouvement, sans laxité pathologique, les mensurations de la cuisse gauche (53,5), étant inférieures à celle de la cuisse droite (56).

Le médecin consulté par le premier juge, dans un rapport en date du 13 octobre 2020, au vu des mêmes constatations cliniques, a été d'avis de maintenir à 8 % le taux d'incapacité permanente.

Il résulte des éléments du dossier que :

-l'appelant, nonobstant les diverses tentatives de reprendre son poste de travail, lesquelles se sont avérées infructueuses, a fait l'objet d'un licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement,

-cette inaptitude est en lien avec les séquelles de la maladie professionnelle litigieuse,

-le médecin du travail a retenu que l'appelant était apte à un autre poste, avec les restrictions suivantes : pas de manutention, pas de station debout prolongée, pas de déplacement marché en terrain irrégulier ou escalier,

-l'appelant a donc été dans l'impossibilité de reprendre son activité antérieure, et a ainsi perdu sa qualification,

-de ce fait, il a perçu l'allocation d'aide au retour à l'emploi, de l'ordre de 1200 € mensuels, alors qu'il justifie par ses bulletins de salaire, d'un précédent salaire net variant de 1500 à 1580 € ,

- il était âgé de 48 ans au jour de la consolidation de son état de santé,

-il justifie d'un contrat d'apprentissage en date du 14 septembre 2020, rémunéré à concurrence de 100 % (la première année) ou 115 % (la seconde année) du SMIC de 1539 € bruts mensuels.

Ainsi, il est établi que les séquelles de la maladie litigieuse, ont fait perdre à l'appelant sa qualification professionnelle, son emploi, lui imposent des restrictions médicales à l'exercice de certains gestes (manutention, station debout prolongée, marche en terrain irrégulier ou escalier), et restreignent ainsi ses capacités professionnelles, même si la formation dont il justifie, est de nature à lui permettre de trouver un emploi, l'appelant ne justifiant d'aucun élément de nature à confirmer les propos de son représentant sur l'audience, selon lesquels il n'aurait pas retrouvé d'emploi, alors même que son contrat d'apprentissage est en date de l'année 2020, et que les débats ont été clôturés en 2023.

Le contenu des rapports d'expertise soumis à la cour, n'établit pas que les éléments qui viennent d'être rappelés, ont été pris en compte pour la fixation du taux d'IPP.

Ces éléments justifient la majoration du taux d'incapacité permanente partielle, dans une proportion de 2 %, soit un taux d'IPP de 10 % au total.

Le premier juge sera infirmé.

Sur les dépens

La caisse, qui succombe, supportera les entiers dépens de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS :

La cour, après en avoir délibéré, statuant, publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Infirme le jugement du pôle social du tribunal judiciaire de Pau en date du 22 février 2021,

Et statuant à nouveau,

Fixe à 10 %, le taux d'incapacité permanente partielle présentée par M. [Y] [K], au 7 novembre 2018, date de la consolidation de son état de santé suite à l'accident du travail dont il a été victime le 2 septembre 2016,

Renvoie M. [Y] [K], devant la Caisse Primaire d'Assurance-Maladie de Pau Pyrénées, pour la liquidation de ses droits,

Condamne la Caisse Primaire d'Assurance-Maladie de Pau Pyrénées, à supporter les frais d'expertise et les entiers dépens de première instance et d'appel.

Arrêt signé par Madame NICOLAS, Présidente, et par Madame LAUBIE, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Pau
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 21/00923
Date de la décision : 11/05/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-05-11;21.00923 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award