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06/05/2024 | FRANCE | N°24/00044

France | France, Cour d'appel de Douai, Référés, 06 mai 2024, 24/00044


République Française

Au nom du Peuple Français







C O U R D ' A P P E L D E D O U A I



RÉFÉRÉ DU PREMIER PRÉSIDENT



ORDONNANCE DU 6 MAI 2024







N° de Minute : 66/24



N° RG 24/00044 - N° Portalis DBVT-V-B7I-VOOA





DEMANDEUR :



Madame [E] [H]

née le 6 juin 1974 à [Localité 5]

demeurant [Adresse 1]

[Localité 4]



représentée par Me Christelle MATHIEU, avocate au barreau de Valenciennes









DÉFENDERESSE :



S.A. SOCIETE IMMOBILIERE DU GRAND HAINAUT (SIGH) prise en la personne de son représentant légal, domiciliée en cette qualité audit siège.

Dont le siège social est situé [Adresse 2]

[Localité 3]



représenté...

République Française

Au nom du Peuple Français

C O U R D ' A P P E L D E D O U A I

RÉFÉRÉ DU PREMIER PRÉSIDENT

ORDONNANCE DU 6 MAI 2024

N° de Minute : 66/24

N° RG 24/00044 - N° Portalis DBVT-V-B7I-VOOA

DEMANDEUR :

Madame [E] [H]

née le 6 juin 1974 à [Localité 5]

demeurant [Adresse 1]

[Localité 4]

représentée par Me Christelle MATHIEU, avocate au barreau de Valenciennes

DÉFENDERESSE :

S.A. SOCIETE IMMOBILIERE DU GRAND HAINAUT (SIGH) prise en la personne de son représentant légal, domiciliée en cette qualité audit siège.

Dont le siège social est situé [Adresse 2]

[Localité 3]

représentée par Me Dominique HENNEUSE, avocat au barreau de Valenciennes substituée par Me Claire ZAFRA-LARA avocate au barreau de Valenciennes

PRÉSIDENTE : Hélène CHÂTEAU, première présidente de chambre désignée par ordonnance du 22 décembre 2023 du premier président de la cour d'appel de Douai

GREFFIER : Christian BERQUET

DÉBATS : à l'audience publique du 8 avril 2024

Les parties ayant été avisées à l'issue des débats que l'ordonnance serait prononcée par sa mise à disposition au greffe

ORDONNANCE : contradictoire, prononcée publiquement par mise à disposition au greffe le six mai deux mille vingt-quatre, date indiquée à l'issue des débats, par Hélène CHÂTEAU, Présidente, ayant signé la minute avec Christian BERQUET, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire

44/24 - 2ème page

EXPOSE DU LITIGE

Par acte sous seings privés en date du 22 avril 1983, la SA d'HLM du Hainaut, aux droits de laquelle vient la Société Immobilière Grand Hainaut (ci-après dénommée SIGH), a donné à bail à [B] [T] un local à usage d'habitation situé [Adresse 1] à [Localité 4], et ce, moyennant la somme mensuelle de 696,01 francs, outre une provision sur charges de 22,39 francs par mois.

[B] [T] est décédée le 18 mars 2022, laissant sa fille [E] [H] dans le logement situé [Adresse 1] à [Localité 4].

Par acte en date du 5 janvier 2023, la SA SIGH a fait délivrer à Mme [E] [H] une sommation de quitter les lieux situé [Adresse 1] à [Localité 4].

Par acte du 18 avril 2023, la SA SIGH a fait assigner Mme [E] [H] devant le juge des contentieux de la protection près le tribunal judiciaire de Valenciennes aux fins de solliciter son expulsion.

Par jugement du 22 février 2024, le juge des contentieux de la protection de Valenciennes a :

- débouté Mme [E] [H] de sa demande de transfert du bail signé le 22 avril 1983 par [B] [T], portant sur un immeuble à usage d'habitation situé [Adresse 1] à [Localité 4] ;

- constaté la résiliation de plein droit de ce contrat de bail par l'effet du décès de [B] [T] survenu le 18 mars 2022 ;

- dit que Mme [E] [H] est occupante sans droit ni titre du logement situé [Adresse 1] à [Localité 4] depuis cette date ;

- ordonné l'expulsion de Mme [E] [H] et de tous occupants de son chef, avec, si besoin est, le concours de la force publique, passé le délai de 2 mois suivant la délivrance d'un commandement d'avoir à libérer les lieux ;

- dit que le sort des meubles sera réglé conformément aux articles l.33-1 et suivants et R.433-1 et suivants du code des procédures civiles d'exécution ;

- fixé l'indemnité mensuelle d'occupation à compter du 18 mars 2022 à une somme égale au montant du loyer, augmenté des charges, qui auraient été dus à la date de la résiliation, si le bail s'était poursuivi et en tant que de besoin, condamné Mme [E] [H] au paiement de cette indemnité mensuelle d'occupation à compter de la résiliation du bail et jusqu'à la libération effective des lieux ;

- débouté Mme [E] [H] de sa demande de délai d'expulsion ;

-  condamné Mme [E] [H] à payer à la SA SIGH la somme de 300 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens ;

- rappelé l'exécution provisoire de la décision.

Par déclaration adressée au greffe de la cour d'appel de Douai le 8 mars 2024, Mme [E] [H] a interjeté appel de la décision.

Par acte en date du 26 mars 2024, signifié à personne morale, Mme [E] [H] a fait assigner la SA SIGH devant le premier président de la cour d'appel de Douai aux fins de voir ordonner l'arrêt de l'exécution provisoire du jugement rendu par le tribunal judiciaire de Valenciennes en date du 22 février 2024.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES A L'AUDIENCE DU 8 AVRIL 2024

Mme [E] [H] représentée par Maître Mathieu, au visa de l'article 514-3 du code de procédure civile, demande au premier président de :

- juger recevables et bien fondées ses demandes ;

- en conséquence, ordonner l'arrêt de l'exécution provisoire du jugement rendu par le tribunal judiciaire de Valenciennes en date du 22 février 2024 ;

- condamner la SA SIGH à lui payer la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers frais et dépens.

44/24 - 3ème page

Elle expose que :

-    elle vivait avec sa mère au [Adresse 1] à [Localité 4] depuis 1983, ainsi, occupait-elle le logement litigieux donné à bail depuis plus d'un an conformément aux dispositions des articles 14 et 40 de la loi du 6 juillet 1989 de sorte qu'elle peut bénéficier d'un transfert du contrat de location. Elle ajoute qu'elle remplit les conditions de ressources pour bénéficier de ce logement social et que depuis le décès de sa mère, survenu le 18 mars 2022, elle s'acquitte seule et de manière régulière le loyer de sorte qu'il existe un moyen sérieux de réformation du jugement ;

-  le maintien dans le logement actuel est absolument nécessaire compte tenu de son état psychologique fragilisé suite au décès de sa grand-mère et de sa mère tel qu'en témoignent des certificats médicaux de son médecin traitant, le docteur [G] [C] des 28 mars 2022, 16 mai 2023 et 24 octobre 2023 où le maintien dans le domicile actuel est préconisé. En outre, elle justifie de consultations auprès d'une psychologue, Mme [Y] [V] et d'un certificat médical du docteur [Z] [K], psychiatre indiquant que : « le maintien dans le logement actuel est indispensable sur le plan psychiatrique pour pouvoir observer une amélioration clinique chez cette patiente encore très fragile ». Ainsi, sa détresse psychologique actuelle exclut tout déménagement de sorte que les plus larges délais pour quitter les lieux doivent lui être accordés et qu'il existe un moyen sérieux de réformation du jugement ;

-  le maintien dans le logement actuel est absolument nécessaire compte tenu de son état psychologique fragilisé suite au décès de sa grand-mère et de sa mère tel qu'en témoignent des certificats médicaux de son médecin traitant, le docteur [G] [C] des 28 mars 2022, 16 mai 2023 et 24 octobre 2023 où le maintien dans le domicile actuel est préconisé. En outre, elle justifie de consultations auprès d'une psychologue, Mme [Y] [V] et d'un certificat médical du docteur [Z] [K], psychiatre indiquant que : « le maintien dans le logement actuel est indispensable sur le plan psychiatrique pour pouvoir observer une amélioration clinique chez cette patiente encore très fragile ». Ainsi, sa détresse psychologique actuelle exclut tout déménagement de sorte que les plus larges délais pour quitter les lieux doivent lui être accordés et qu'il existe un moyen sérieux de réformation du jugement ;

-   il résulte des pièces médicales produites aux débats et notamment du certificat médical établi par le docteur [K], psychiatre, que le maintien dans le logement est primordial et vital pour sa santé psychiatrique. Elle ajoute qu'un tel maintien dans les lieux n'est pas préjudiciable pour la SA SIGH dans la mesure où elle n'est redevable d'aucune dette locative de sorte que l'exécution provisoire de la décision entraînerait des conséquences manifestement excessives.

La SA Société Immobilière Grand-Hainaut représentée par Maître Claire Zafra Lara substituant Maître Henneuse demande à la présente juridiction, au visa des articles 40 de la loi 89-462 du 6 juillet 1989, L 621-2 du code de la construction et de l'habitation, 514- 3 du code de procédure civile, de :

- déclarer Mme [E] [H] irrecevable en ses demandes au vu de l'absence d'observations en première instance sur l'exécution provisoire,

- débouter Mme [E] [H] de l'intégralité de ses demandes,

- condamner Mme [E] [H] à lui payer la somme de 1500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner Mme [E] [H] aux entiers frais et dépens de l'instance

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la recevabilité de la demande d'arrêt de l'exécution provisoire

Il ressort des dispositions de l'article 514-3 alinéa 1er du code de procédure civile, applicable aux instances introduites après le 1er janvier 2020, ce qui est le cas de l'espèce, qu'en cas d'appel, le premier président peut arrêter l'exécution provisoire de la décision lorsque celle-ci risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives et lorsqu'il existe un moyen sérieux d'annulation ou de réformation de la décision de première instance.

L'alinéa 2 du même article dispose que :

'La demande de la partie qui a comparu en première instance sans faire valoir d'observations sur l'exécution provisoire n'est recevable que si, outre l'existence d'un moyen sérieux d'annulation ou de réformation, l'exécution provisoire risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives qui

se sont révélées postérieurement à la décision de première instance.'

44/24 - 4ème page

Il est constant qu'en première instance Mme [E] [H] sollicitait, s'il n'était pas fait droit à sa demande de transfert du bail dont sa mère était titulaire, des délais pour quitter les lieux, cette demande équivalant à une demande de voir écarter l'exécution provisoire. D'ailleurs le premier juge n'a pas seulement rappelé que l'exécution provisoire était de droit, mais a aussi indiqué dans sa motivation qu'il

n'y avait pas lieu d'écarter l'exécution provisoire.

La demande d'arrêt de l'exécution provisoire de la décision du 22 février 2024 sera en conséquence déclarée recevable.

Sur le bien fondé de la demande d'arrêt de l'exécution provisoire

Il est constant que le premier président, statuant sur l'article 514-3 du code de procédure civile, ne saurait se prononcer sur le caractère fondé ou non du moyen invoqué par la partie demanderesse à l'appui de sa demande, appréciation qui ne relève que de la cour d'appel saisie du recours.

Doit donc être considéré comme 'moyen sérieux d'annulation ou de réformation' au sens de l'article précité, le moyen qui, en violation manifeste d'un principe fondamental de procédure, ou d'une règle de droit, serait retenu par la cour d'appel comme moyen d'infirmation de la décision de première instance sans contestation sérieuse sur le fond.

A cet égard, n'apparaissent pas sérieux les moyens invoqués par Mme [H] pour obtenir le transfert du bail dont sa mère était bénéficiaire dès lors qu'elle n'apparaît pas remplir les conditions prévues à l'article L 621-2 du code de la construction et de l'habitation pour pouvoir rester dans les lieux compte tenu de la taille du logement.

En revanche, apparaissent sérieux au sens de l'article 514-3 du code de procédure civile les moyens invoqués pour obtenir des délais pour quitter les lieux, eu égard à son état de santé psychiatrique préoccupant attesté tant par les nombreux certificats médicaux de son médecin traitant et du médecin psychiatre qui la suit, une expulsion ayant par ailleurs au vu de ce même état de santé des conséquences manifestement excessives. Mme [H] doit pouvoir bénéficier de temps pour trouver un autre logement et faire le deuil de celui qui est le sien depuis 40 ans.

Chaque partie conservera à sa charge les frais et dépens qu'elle a engagés dans le cadre de la présente procédure, les parties étant déboutées de leurs demandes respectives d'indemnité d'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Déclare recevable et fondée la demande de Mme [E] [H],

Ordonne l'arrêt de l'exécution provisoire du jugement du juge des contentieux de la protection près le tribunal judiciaire de Valenciennes en date du 22 février 2024 rendu dans le litige opposant la société immobilière du Grand Hainaut à Mme [E] [H],

Dit que chaque partie conservera à sa charge les frais et dépens qu'elle a engagés dans le cadre de la présente procédure,

Déboute les parties de leurs demandes respectives d'indemnité d'article 700 du code de procédure civile

Le greffier La présidente

C. BERQUET H. CHÂTEAU


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Référés
Numéro d'arrêt : 24/00044
Date de la décision : 06/05/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 12/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-05-06;24.00044 ?
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