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05/05/2024 | FRANCE | N°24/00923

France | France, Cour d'appel de Douai, Etrangers, 05 mai 2024, 24/00923


COUR D'APPEL DE DOUAI

Chambre des Libertés Individuelles





N° RG 24/00923 - N° Portalis DBVT-V-B7I-VQ2X

N° de Minute : 909







Ordonnance du dimanche 05 mai 2024





République Française

Au nom du Peuple Français





APPELANT



M. [S] [H]

né le 26 Août 1988 à [Localité 3]

de nationalité Algérienne

actuellement retenu au centre de rétention de [Localité 1]

dûment avisé, comparant en personne par visioconférence



assis

té de Me Zélie HENRIOT, avocat au barreau de DOUAI, avocat (e) commis (e) d'office et de Mme [I] [T] interprète assermenté en langue arabe, tout au long de la procédure devant la cour, présente en salle d'audi...

COUR D'APPEL DE DOUAI

Chambre des Libertés Individuelles

N° RG 24/00923 - N° Portalis DBVT-V-B7I-VQ2X

N° de Minute : 909

Ordonnance du dimanche 05 mai 2024

République Française

Au nom du Peuple Français

APPELANT

M. [S] [H]

né le 26 Août 1988 à [Localité 3]

de nationalité Algérienne

actuellement retenu au centre de rétention de [Localité 1]

dûment avisé, comparant en personne par visioconférence

assisté de Me Zélie HENRIOT, avocat au barreau de DOUAI, avocat (e) commis (e) d'office et de Mme [I] [T] interprète assermenté en langue arabe, tout au long de la procédure devant la cour, présente en salle d'audience à Coquelles

INTIMÉ

M. LE PREFET DE LA SOMME

dûment avisé, absent non représenté

PARTIE JOINTE

M. le procureur général près la cour d'appel de Douai : non comparant

MAGISTRAT(E) DELEGUE(E) : Sylvie DROUARD, Conseillère à la cour d'appel de Douai désigné(e) par ordonnance pour remplacer le premier président empêché

assisté(e) de Véronique THÉRY, greffière

DÉBATS : à l'audience publique du dimanche 05 mai 2024 à 13 h 30

Les parties comparantes ayant été avisées à l'issue des débats que l'ordonnance sera rendue par mise à disposition au greffe

ORDONNANCE : rendue à Douai par mise à disposition au greffe le dimanche 05 mai 2024 à 14 H 40

Le premier président ou son délégué,

Vu les articles L.740-1 à L.744-17 et R.740-1 à R.744-47 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA) et spécialement les articles L 743-21, L 743-23, R 743-10, R 743-11, R 743-18 et R 743-19 ;

Vu l'aricle L 743-8 du CESEDA ;

Vu la demande de l'autorité administrative proposant que l'audience se déroule avec l'utilisation de moyens de télécommunication audiovisuelle ;

Vu l'accord du magistrat délégué ;

Vu l'ordonnance rendue le 04 mai 2024 par le Juge des libertés et de la détention de BOULOGNE SUR MER prolongeant la rétention administrative de M. [S] [H] ;

Vu l'appel motivé interjeté par M. [S] [H] par déclaration reçue au greffe de la cour d'appel de ce siège le 04 mai 2024 ;

Vu le procès-verbal des opérations techniques de ce jour ;

Vu l'audition des parties, les moyens de la déclaration d'appel et les débats de l'audience ;

EXPOSE DU LITIGE

M.[S] [H], ressortissant algérien, a fait l'objet d'un placement en rétention administrative ordonné par M. le préfet de la Somme le 2 mai 2024, notifié à 9h03, pour l'exécution d'un éloignement au titre d'une interdiction judiciaire du territoire français d'une durée de 5 ans prononcée le 30 janvier 2023 par le tribunal judiciaire de Marseille, la cour d'appel d'Aix en Provence ayant constaté le désistement d'appel le 24 avril 2023.

Un recours en annulation de l'arrêté de placement en rétention administrative a été déposé au visa de l'article L 741-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile le 3 mai 2024 à 15h29.

Par requête reçue au greffe le 3 mai 2024 à 10h55, M. le préfet a sollicité la prolongation de la rétention administrative pour un délai de 28 jours.

Vu l'article 455 du code de procédure civile,

Vu l'ordonnance du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Boulogne sur Mer en date du 4 mai 2024, notifié à 11h07, rejetant la requête en annulation de l'arrêté de placement en rétention administrative et ordonnant la première prolongation du placement en rétention administrative de M.[S] [H] pour une durée de 28 jours,

Vu la déclaration d'appel de M.[S] [H] du 4 mai 2024 à 14h30 sollicitant la main-levée du placement en rétention administrative,

Au titre des moyens soutenus en appel l'étranger soulève :

- sur la décision de placement en rétention:

- l'insuffisance de motivation de l'arrêté,

- l'incompatibilité de son état de santé avec la rétention,

- sur la requête en prolongation de la rétention:

- le défaut de diligences de l'administration pendant sa détention, en évoquant une incarcération du 30 janvier 2023 au 10 octobre 2023,

- le défaut de diligences utiles de l'administration alors qu'il a indiqué être demandeur d'asile en Suisse et aux Pays-Bas.

A l'audience de la cour, le conseil de M.[S] [H] reprend ces moyens et indique que celui-ci a fait la demande il y a 5 mois aux Pays-Bas et il y a 3 mois en Suisse.

M.[S] [H] a fait ses observations.

MOTIFS DE LA DÉCISION

De manière liminaire il est rappelé que le juge judiciaire ne peut se prononcer ni sur le titre administratif d'éloignement de l'étranger, ni, directement ou indirectement, sur le choix du pays de destination.

Les prérogatives judiciaires se limitent à vérifier la régularité et le bien fondé de la décision restreignant la liberté de l'étranger en plaçant ce dernier en rétention, ainsi qu'à vérifier la nécessité de la prolongation de la rétention au vu des diligences faites par l'administration pour l'exécution de l'expulsion et le maintien de la rétention dans la plus courte durée possible.

Sur le recours contre la décision de placement en rétention

Au titre de son contrôle, le juge judiciaire doit s'assurer que l'arrêté administratif de placement en rétention est adopté par une personne habilitée à cet effet, est fondé sur une base légale (titre d'éloignement valable) et se trouve suffisamment motivé en fait et en droit par rapport aux critères posés par l'article L 741-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Sur la motivation de l'arrêté de placement en rétention administrative

L'obligation de motivation des actes administratifs, sanctionnée au titre du contrôle de la légalité externe de l'acte, doit être existante, factuelle en rapport avec la situation de l'intéressé et non stéréotypée.

Cependant, cette motivation n'est pas tenue de reprendre l'ensemble des éléments de la personnalité ou de la situation de fait de l'intéressé dès lors qu'elle contient des motifs spécifiques à l'étrangers sur lesquels l'autorité préfectorale a appuyé sa décision.

Ainsi, dés lors que l'arrêté de placement en rétention administrative contient des motivations individualisées justifiant, au regard des articles L 741-1 et L 612-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'option prise par l'autorité préfectorale quant à la rétention et mentionnant l'absence de vulnérabilité au sens de l'article L 741-4 du même code, l'acte administratif doit être reconnu comme comportant une motivation suffisante indépendamment de toute appréciation de fond.

Il ressort de l'article L 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que: «'la décision de placement en rétention prend en compte l'état de vulnérabilité et de tout handicap de l'étranger. Le handicap moteur, cognitif ou psychique et les besoins d'accompagnement de l'étranger sont pris en compte pour déterminer les conditions de son placement en rétention»

En l'espèce, l'arrêté de placement en rétention administrative mentionne bien les déclarations de M.[S] [H] quant à son état de santé, en retenant qu'à supposer réelles les pathologies déclarées, il pourra recevoir les traitements adéquats en rétention. Il est donc ainsi motivé sur l'état de vulnérabilité invoqué.

Indépendamment de toute appréciation de fond, cette motivation est suffisante en soi, le préfet n'est pas tenu de motiver sa décision sur l'ensemble des critères de personnalité de l'étranger dés lors qu'il s'appuie sur des motifs suffisants pour justifier l'inanité du recours à l'assignation à résidence et la nécessité de la rétention.

Sur l'incompatibilité invoquée de l'état de santé de M.[S] [H] avec la rétention

Si M.[S] [H] invoque prendre un traitement contre des crises d'angoisse et souffrir d'asthme, il n'apporte aucun justificatif établissant que son état de santé serait incompatible avec la mesure de rétention, ni d'ailleurs qu'il ne pourrait pas obtenir, en rétention, les traitements adéquats.

Sur la requête en prolongation de la rétention administrative

Sur les diligences de l'administration pendant la détention de M.[S] [H] en 2023

M.[S] [H] se prévaut de l'absence de diligences pendant la détention intervenue de janvier à octobre 2023, reprochant à l'administration de ne pas avoir effectué les démarches pour l'éloigner pendant cette période. La cour note, au regard des éléments qui lui sont soumis, que l'administration n'a manifestement pas envisagé de rétention à cette époque, misant sans doute sur un départ volontaire (ce qui a d'ailleurs été le cas d'après les déclarations de l'intéressé), et qu'il ne peut donc être reproché à l'autorité administrative de ne pas avoir, à cette époque, engagé de démarches en vue d'un éloignement.

Sur les diligences de l'administration

Selon la directive dite « retour » n° 2008-115/CE du 16 décembre 2008, en son article 15 §1, 'toute rétention est aussi brève que possible et n'est maintenue qu'aussi longtemps que le dispositif d'éloignement est en cours et exécuté avec toute la diligence requise'.

Il ressort de l'article L 741-3 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que l'administration doit justifier avoir effectué toutes les 'diligences utiles' suffisantes pour réduire au maximum la période de rétention de l'étranger.

Il ressort de l'article L 751-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qu'au cas spécifiques des étrangers faisant l'objet d'une demande de réadmission dans un pays de l'espace [E], l'étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à la détermination de l'Etat responsable de l'examen de sa demande d'asile et, le cas échéant, à l'exécution d'une décision de transfert. Lorsqu'un Etat requis a refusé de prendre en charge ou de reprendre en charge l'étranger, il est immédiatement mis fin à la rétention de ce dernier, sauf si une demande de réexamen est adressée à cet Etat dans les plus brefs délais ou si un autre Etat peut être requis. En cas d'accord d'un Etat requis, la décision de transfert est notifiée à l'étranger dans les plus brefs délais.

M.[S] [H] invoque avoir indiqué dans son audition l'existence de demandes d'asile en Suisse et aux Pays-Bas et reproche à l'administration de n'avoir fait aucune recherche en ce sens. Or cet argument est fallacieux puisqu'il ressort de l'audition réalisée le 23 avril 2024 qu'à la question d'une précédente demande d'asile politique, M.[S] [H] a seulement mentionné la demande qu'il avait effectuée en France en 2023 et son refus.

Ce n'est que par un courrier du 3 mai 2024 que M.[S] [H] a sollicité la vérification de sa situation dans la base Eurodac, et la requête a été immédiatement réalisée par l'administration, le jour-même.

Pour le reste des diligences, avant cette demande de l'intéressé, l'administration a formé une demande de laissez-passer consulaire auprès des autorités algériennes et une demande de routage le 2 mai 2024.

Dès lors, l'autorité administrative justifie avoir effectué les diligences nécessaires à la mise en oeuvre de l'éloignement.

PAR CES MOTIFS

DÉCLARE l'appel recevable ;

CONFIRME l'ordonnance entreprise.

DIT que la présente ordonnance sera communiquée au ministère public par les soins du greffe ;

DIT que la présente ordonnance sera notifiée dans les meilleurs délais à M. [S] [H] par l'intermédiaire du greffe du centre de rétention administrative par truchement d'un interprète en tant que de besoin, à son conseil et à l'autorité administrative ;

LAISSE les dépens à la charge de l'État.

Véronique THÉRY, greffière

Sylvie DROUARD, Conseillère

A l'attention du centre de rétention, le dimanche 05 mai 2024

Bien vouloir procéder à la notification de l'ordonnance en sollicitant, en tant que de besoin, l'interprète intervenu devant le premier président ou le conseiller délégué : Mme [I] [T]

Le greffier

N° RG 24/00923 - N° Portalis DBVT-V-B7I-VQ2X

REÇU NOTIFICATION DE L'ORDONNANCE 909 DU 05 Mai 2024 ET DE L'EXERCICE DES VOIES DE RECOURS (à retourner signé par l'intéressé au greffe de la cour d'appel de Douai par courriel - [Courriel 2]) :

Vu les articles 612 et suivants du Code de procédure civile et R. 743-20 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile

Pour information :

L'ordonnance n'est pas susceptible d'opposition.

Le pourvoi en cassation est ouvert à l'étranger, à l'autorité administrative qui a prononcé le maintien en zone d'attente ou la rétention et au ministère public.

Le délai de pourvoi en cassation est de deux mois à compter de la notification.

Le pourvoi est formé par déclaration écrite remise au secrétariat greffe de la Cour de cassation par l'avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation constitué par le demandeur.

Reçu copie et pris connaissance le

- M. [S] [H]

- par truchement téléphonique d'un interprète en tant que de besoin

- nom de l'interprète (à renseigner) :

- décision transmise par courriel au centre de rétention de pour notification à M. [S] [H] le dimanche 05 mai 2024

- décision transmise par courriel pour notification à M. LE PREFET DE LA SOMME et à Maître Zélie HENRIOT le dimanche 05 mai 2024

- décision communiquée au tribunal administratif de Lille

- décision communiquée à M. le procureur général

- copie au Juge des libertés et de la détention de BOULOGNE SUR MER

Le greffier, le dimanche 05 mai 2024

N° RG 24/00923 - N° Portalis DBVT-V-B7I-VQ2X


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Etrangers
Numéro d'arrêt : 24/00923
Date de la décision : 05/05/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 12/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-05-05;24.00923 ?
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