La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

19/04/2024 | FRANCE | N°21/02850

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-1, 19 avril 2024, 21/02850


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-1



ARRÊT AU FOND

DU 19 AVRIL 2024



N° 2024/116





Rôle N° RG 21/02850 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BHADF







[D] [N]





C/



S.A.S.U. MEDITERRANEENE DE DISTRIBUTION ET DE LOCATION MDL











Copie exécutoire délivrée

le :



19 AVRIL 2024



à :



Me Mickael BENAVI, avocat au barreau de MARSEILLE



Me Marie HASCOËT, avocat au b

arreau d'AIX-EN-PROVENCE

































Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MARSEILLE en date du 29 Janvier 2021 enregistré au répertoire général sous le n° 19/01255.





APPELANT
...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-1

ARRÊT AU FOND

DU 19 AVRIL 2024

N° 2024/116

Rôle N° RG 21/02850 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BHADF

[D] [N]

C/

S.A.S.U. MEDITERRANEENE DE DISTRIBUTION ET DE LOCATION MDL

Copie exécutoire délivrée

le :

19 AVRIL 2024

à :

Me Mickael BENAVI, avocat au barreau de MARSEILLE

Me Marie HASCOËT, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MARSEILLE en date du 29 Janvier 2021 enregistré au répertoire général sous le n° 19/01255.

APPELANT

Monsieur [D] [N], demeurant [Adresse 1]

comparant en personne, assisté de Me Mickael BENAVI, avocat au barreau de MARSEILLE substitué par Me Pierre MICHOTTE, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMEE

Société Méditerranéenne de Distribution et de Location (MDL), demeurant [Adresse 4]

représentée par Me Marie HASCOËT, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 04 Mars 2024, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Véronique SOULIER, Présidente, chargée du rapport, qui a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Véronique SOULIER, Présidente

Mme Stéphanie BOUZIGE, Conseillère

Mme Emmanuelle CASINI, Conseillère

Greffier lors des débats : Monsieur Kamel BENKHIRA

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 19 Avril 2024.

ARRÊT

Contradictoire

Prononcé par mise à disposition au greffe le 19 Avril 2024

Signé par Madame Véronique SOULIER, Présidente et Monsieur Kamel BENKHIRA, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

La société Méditerranéenne de Distribution et de Location (dite MDL) exerce l'activité de location de camions avec chauffeur.

Elle applique à son personnel la convention collective nationale des transports routiers de marchandises.

Elle a engagé M. [D] [N] par contrat de travail à durée indéterminée à temps complet à compter du 23 avril 2015 en qualité de conducteur poids lourds polyvalent, groupe 5, coefficient 128 M moyennant une rémunération mensuelle brute de 1.666 € pour un horaire théorique de travail de 151,67 heures auquel s'ajoutaient 4 heures supplémentaires hedomadaires.

M. [N] a été victime d'un accident du travail le 10 juillet 2015 sans être placé en arrêt de travail.

Il a été placé en arrêt maladie entre le 11 septembre 2015 et le 19 septembre 2015.

Victime d'un accident du travail le 12 octobre 2015, il a été arrêté jusqu'au 8 novembre 2015 et a été déclaré apte à l'issue d'une visite médicale de reprise le 9 novembre 2015.

Il a été placé en arrêt de travail pour maladie du 2 au 29 janvier 2016 et a repris son poste le 30 janvier 2016.

Le 4 février 2016, à l'issue d'une visite médicale de reprise le médecin du travail l'a déclaré inapte.

Par courrier recommandé du 4 février 2016, M. [N] a été convoqué à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé le 15 février 2016.

Il a été licencié le 19 février 2016 pour cause réelle et sérieuse dans les termes suivants:

'Nous vous notifions par la présente votre licenciement motivé par les faits suivants: le 2 février 2016, nous vous reprochons d'avoir endommagé le haut de caisse du véhicule immatriculé D 927 MN.

Cette faute n'est pas isolée puisque déjà à deux reprises les 7 octobre 2015 et 8 janvier 2016 nous avons été contraints de vous adresser un avertissement pour des faits similaires.

Force est de constater que vous n'en avez pas tenu compte puisque vous avez à nouveau été l'auteur d'un accrochage en pleine responsabilité le 2 février 2016.

Cette situation ne nous permet pas de vous conserver dans l'entreprise sans risque pour la bonne marche de celle-ci.

Votre préavis d'un mois débutera dès première présentation de cette lettre par la poste.

A l'issue du préavis, nous tiendrons à votre disposition votre certificat de travail, solde de tout compte et attestation Assedic'.

Contestant la régularité et le bien fondé de son licenciement notifié selon lui entre deux visites médicales de reprise pendant une période de suspension de son contrat de travail et sollicitant la requalification de celui-ci en un licenciement nul et la condamnation de l'employeur à lui payer diverses sommes de nature salariale, dont un rappel de salaire au titre d'heures supplémentaires et indemnitaire, M. [N] a saisi le conseil de prud'hommes de Marseille le 11 juillet 2016 lequel par jugement du 29 janvier 2021 a :

- dit que le licenciement de M. [D] [N] est légitime et bien fondé;

- débouté M. [N] de l'ensemble de ses demandes;

- débouté les parties de leurs autres demandes;

- condamné M. [N] aux dépens.

M. [N] a relevé appel de ce jugement le 24 février 2021 par déclaration adressée au greffe par voie électronique.

Aux termes de ses conclusions d'appelant n°2 notifiées par voie électronique le 8 juillet 2021 auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé détaillé des moyens soutenus, M. [N] a demandé à la cour de :

Réformer le jugement déféré.

Et statuant à nouveau :

- dire le licenciement nul ou à tout le moins irrégulier et sans cause réelle et sérieuse;

Par conséquent:

Condamner la société MDL à payer à M. [N] les sommes suivantes:

- 1.530,62 € de rappel d'heures supplémentaires et 153 € de congés payés afférents;

- 384,46 € de repos compensateurs;

- 450 € d'astreinte;

- 525 € de prime qualité;

- 12.000 € de dommages-intérêts au titre du licenciement nul ou à tout le moins sans cause réelle et sérieuse;

- 1.886,35 € de dommages-intérêts au titre de l'irrégularité de procédure;

- 414 € de solde d'indemnité compensatrice de préavis et 41,40 € de congés payés afférents;

- 5.000 € de dommages-intérêts pour exécution fautive et déloyale du contrat de travail;

- 886,95 € de dommages-intérêts pas d'indication du DIF 1;

- 1.886,95 € de dommages-intérêts pour absence d'information sur la portabilité de la prévoyance.

Condamner l'employeur sous astreinte de 100 € par jour de retard à:

- délivrer l'intégralité des documents de rupture conformes à la décision à intervenir;

- délivrer un bulletin de salaire rectificatif mentionnant les sommes allouées judiciairement.

Dire que la juridiction de céans se réservera le droit de liquider l'astreinte.

Dire que le montant des condamnations portera intérêts de droit à compter du jour de l'introduction de la demande en justice avec capitalisation des intérêts.

Condamner l'employeur aux dépens, à payer une somme de 2.500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile distrait au profit de MB Avocats.

Dire que la moyenne des salaires s'élève à la somme de 1.886,95 €.

Par conclusions d'intimé notifiées par voie électronique le 28 juin 2021 auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé détaillé des moyens soutenus, la société MDL a demandé à la cour de :

Confirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Marseille du 29 janvier 2021.

En conséquence:

Rejeter l'ensemble des demandes de M. [N].

Dire que le licenciement de M. [N] est bien fondé sur une faute grave.

En tout état de cause:

Condamner M. [N] à verser à la société MDL la somme de 2.500 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

La clôture de l'instruction a été ordonnée le 22 février 2024.

SUR CE :

Sur l'exécution du contrat de travail :

Sur les heures supplémentaires et les temps de repos :

Les conducteurs routiers du transport routier de marchandises sont soumis à un régime d'équivalence dit « temps de service » permettant de tenir compte des périodes de moindre activité. Ce temps de service correspond à une durée équivalente à la durée légale du travail, fixée par le code du travail à 35 heures par semaine. Les heures supplémentaires sont celles réalisées au delà de la durée équivalente à la durée légale du travail et ne peuvent être accomplies que dans la limite des durées maximales de temps de service.

Le décret n°83-40 du 26 janvier 1983 relatif aux modalités d'application des dispositions du code du travail concernant la durée du travail dans les entreprises de transport routier de marchandises applicable depuis janvier 2007 et abrogé depuis le 1er janvier 2017 étant codifié depuis lors dans le code des transports prévoyait dans son article 5 que :

- la durée du travail effectif correspondant au temps pendant lequel le salarié est à la disposition de l'employeur sans pouvoir vaquer librement à ses occupations personnelles est égal à l'amplitude de la journée de travail (intervalle existant entre deux repos journaliers successifs ou entre un repos hebdomadaire et le repos journalier immédiatement précédent ou suivant) diminuée de la durée totale des coupures et du temps consacré aux repas, à l'habillage et au casse-croûte sous réserve que ces temps ne soient pas du temps de travail effectif ;

- la durée du temps passé au service de l'employeur ou temps de service des personnels roulants marchandises est fixée dans les conditions suivantes :

- 43 heures par semaine, soit 559 heures par trimestre pour les personnels roulants 'grands routiers' ou 'longue distance' (prenant au moins six repos journaliers par mois hors du domicile);

- 39 heures par semaine soit 507 heures par trimestre pour les autres personnels roulants;

- 35 heures par semaine soit 455 heures par rtimestre pour les conducteurs de messagerie et des convoyeurs de fonds.

Il est également prévu l'obligation, après un temps de conduite de 4h30, de prendre une pause de 45 mn pouvant être fractionnée en une pause d'au moins 15 min suivie d'une pause d'au moins 30 mn ; une durée de conduite journalière limitée à 9 heures pouvant être portée à 10 heures deux fois par semaine ; une durée de conduite hebdomadaire limitée à 56 heures et 90 heures sur deux semaines consécutives.

Sans préjudice des règles de pause prévues par le règlement (CE) n°561/2006, le personnel salarié roulant des entreprises de transport routier ne travaille en aucun cas pendant plus de six heures consécutives sans pause. Le temps de travail quotidien est interrompu par une pause d'au moins trente minutes lorsque le total des heures de travail est compris entre six et neuf heures, et d'au moins quarante-cinq minutes lorsque le total des heures de travail est supérieur à neuf heures. Les pauses peuvent être subdivisées en périodes d'une durée d'au moins quinze minutes chacune.

L'employeur est tenu d'indiquer chaque mois, par une mention sur le bulletin de paie ou par la transmission d'un document annexé au bulletin de paie (la synthèse d'activité), « la durée des temps de conduite ; la durée des temps de service autres que la conduite ; l'ensemble de ces temps constitutifs du temps de service rémunéré, récapitulés mensuellement ; les heures qui sont payées au taux normal et celles qui comportent une majoration pour heures supplémentaires ou pour toute autre cause.'

Sont considérées comme des heures supplémentaires les heures accomplies au-delà de la 39ème heure hebdomadaire pour les conducteurs courte distance, et au-delà de la 43ème heure hebdomadaire pour les conducteurs longue distance.

Les heures de temps de service effectuées à compter de la 36ème heure et jusqu'à la 43ème heure hebdomadaire incluse (ou, en cas de décompte sur le mois, les heures effectuées de la 152ème à la 186ème heure incluse) sont rémunérées en leur appliquant une majoration de 25 % .

Les heures de temps de service effectuées à compter de la 44ème heure hebdomadaire (ou de la 187ème heure mensuelle) sont rémunérées en leur appliquant une majoration de 50 %.

Le salarié a droit à 1 jour de repos compensateur lorsqu'il a accompli entre 41 et 79 heures supplémentaires sur le trimestre, 1.5 jours lorsque ce volume est compris entre 80 et 108 heures supplémentaires, et 2.5 jours lorsque le salarié a accompli plus de 108 heures supplémentaires sur le trimestre.

En vertu de L.3171-4 du code du travail, dans sa version applicable au litige en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments.

M. [N] soutient que dans le cadre de ses fonctions polyvalentes, il travaillait au-delà des heures hebdomadaires de travail sans être rémunéré des heures supplémentaires effectuées qu'il indique justifier par la différence entre les horaires réellement exécutés tels qu'ils ressortent du chronotachygraphe numérique résumé dans le 'calendaire' mensuel joint au bulletin de paie et le nombre d'heures figurant sur ces derniers, documents également produits aux débats par l'employeur en pièce n°4 lesquels sont strictement identiques à ceux produits par le salarié sans toutefois que la société MDL ne produise aucun calcul contradictoire de sorte que l'employeur n'ayant pas rapporté la preuve de l'effectivité du temps de travail du salarié, la cour devra reconnaître l'existence des heures supplémentaires alléguées. Il sollicite également le paiement d'une somme de 384,46 € au titre des repos compensateurs calculée par application de la réglementation de droit commun et non des dispositions applicables aux personnels roulants des entreprises de transport routier de marchandises.

La société MDL réplique que M. [N] sollicite vainement la communication des décomptes conducteurs alors qu'il les communique à l'appui de sa demande et qu'elle-même les produit également, ces documents permettant de constater que les calculs présentés par le salarié dans les tableaux produits sont erronés sa demande étant fondée non sur le temps de service effectué mais sur l'amplitude de celui-ci alors que pour exemples en juillet 2015, il considère que la société doit lui payer 176 heures alors que le bulletin de salaire de juillet 2015 fait état d'un paiement de 177,95 heures, et qu'en décembre 2015, l'employeur lui serait redevable de 208,10 heures alors qu'il a été payé à concurrence de 187,15 heures pour un temps de travail effectif de 180,68 heures.

Elle ajoute qu'en matière de repos compensateur, M. [N] fait état de la réglementation de droit commun alors que les personnels roulants des entreprises de transport routier de marchandises se voient appliquer un dispositif dérogatoire mis en place par le décret n°83-40 du 26 janvier 1983 applicable depuis le 04/01/2007, s'agissant de jours accordés en fonction du nombre d'heures supplémentaires effectuées par trimestre ou quadrimestre s'il a été retenu comme période de référence pour les entreprises ayant adopté ce décompte s'agissant d'un régime d'acquisition par seuils sans cumul possible de plusieurs tranches.

M. [N] produit aux débats :

- son contrat de travail dont l'article 5 stipule qu'il 'percevra une rémunération brute horaire de 1.457,55 € pour une bas de 151,67 heures de travail et 208,18 € pour 17,33 heures soit 1.666 € pour 169 heures de travail';

- les bulletins de salaire des mois d'avril 2015 à mars 2016, comportant en annexe pour les bulletins de salaire d'avril à novembre 2015 des documents mensuels intitulés 'calendaire' et 'Globofeet' détaillant l'amplitude de travail et le temps de service effectué ainsi que des listes de 7, 9, 11 ou 12 infractions à la législation sur le temps de travail pour les mois de juin 2015 à octobre 2015 (pas de temps de pause, durée journalière de travail de nuit supérieure à 10 heures, durée temps de service journlier supérieur à 12 heures...);

- des sms émanant de son supérieur hiérarchique du 13/11/2015, 20/11/2015 et 30/12/2015 lui communiquant des consignes de travail pour le jour même et l'après-midi en indiquant l'heure de démarrage et le n° d'immatriculation du camion utilisé;

- 8 confirmations de chargement correspondant notamment aux 3 journées précédentes;

- un tableau de calcul des heures supplémentaires effectuées et restant dues en mai, juillet, août, septembre et novembre 2015.

Si la société MDL produit également aux débats les documents mensuels intitulés 'calendaire' qui étant des tableaux de synthèse des temps de travail du salarié lui permettent de calculer ceux-ci et fait à juste titre remarquer qu'aucune somme n'est due à M. [N] au mois de juillet 2015 ce dernier revendiquant 176 heures de travail, heures supplémentaires comprises alors que son bulletin de salaire permet de constater que 177,95 heures lui ont été rémunérées, la cour relèvant qu'au mois d'août 2015, il revendique 176,39 heures de travail alors que 175,18 heures lui ont été payées de sorte que la différence soit 1,20 heure ne peut donner lieu au paiement de la somme réclamée de 497,86 € en revanche, l'employeur qui se borne à retenir le temps de service figurant sur les fiches de synthèse jointes aux bulletins de salaire pour affirmer qu'aucune heure supplémentaire n'est dûe au salarié ne s'explique pas sur les infractions commises par ce dernier en août, septembre et novembre 2015 relatives notamment à l'absence de temps de pause et aux dépassement des durées journalières ce dont il résulte que ces temps non seulement ne peuvent être décomptés du temps de service mais doivent à l'inverse y être ajoutés de sorte qu'au regard également des consignes émanant de l'employeur produites par le salarié objectivant les cadences imposées à celui-ci afin de respecter ses obligations contractuelles, la cour considère au vu des éléments produits que des heures supplémentaires non rémunérées ont été effectivement réalisées par le salarié à concurrence de 5,09 heures en mai 2015, 1,20 heure en août 2015, 20,59 heures en septembre 2015 et 10,49 heures en novembre 2015, soit un total de 37,37 heures et qu'il est ainsi fondé à obtenir par infirmation du jugement entrepris une somme de 475,69 € outre 47,56 € de congés payés afférents.

En matière de repos compensateur, l'étude des bulletins de salaire de M. [N] met en évidence:

- pour le trimestre d'avril à juin 2015, qu'il a accompli 3,45 heures supplémentaires en avril 2015, 15,45 heures supplémentaires au mois de mai 2015 auxquelles s'ajoutent 5,09 heures supplémentaires soit un total de 24 heures n'ouvrant pas droit à un repos compensateur;

- pour le trimestre de juillet à septembre 2015, qu'il a accompli 8,95 heures en juillet 2015, 6,18 heures en août 2015, 10,93 heures en septembre 2015 et 1,20 heure soit un total de 27,26 heures n'ouvrant pas droit à un repos compensateur;

- pour le trimestre d'octobre à décembre 2015 : qu'il a accompli 24,41 heures en octobre 2015, 10,49 heures en novembre et 33 heures en décembre soit un total de 67,9 heures lui ouvrant droit à un jour de repos compensateur lequel ne pouvant être pris par le salarié du fait de la rupture de la relation de travail doit lui être indemnisé sur la base du taux horaire retenu pour les heures supplémentaires correspondant en l'espèce à une somme de 102,23 €.

Par infirmation du jugement entrepris, il convient de condamner la société MDL à payer à M. [N] une somme de 102,23 € au titre du repos compensateur.

Sur les demandes au titre de l'astreinte et de la prime qualité :

M. [N] sollicite la condamnation de l'employeur à lui payer une somme de 450 € au titre des astreintes effectuées entre octobre et décembre 2015 correspondant à une somme de 30 € par mois prétendant avoir été d'astreinte deux fois en octobre 2015, six fois en novembre 2015 et sept fois en décembre 2015 ainsi qu'au paiement d'une prime de qualité d'un montant de 75 € par mois qu'il n'a pas perçue durant 7 mois.

La société MDL prétend qu'aucune somme n'a jamais été versée au titre d'une soit disant mesure d'astreinte qui n'existe pas dans la société, le salarié se bornant à produire des sms ne permettant d'identifier ni l'identité de l'expéditeur ni celui du destinataire sans justifier du montant réclamé, et que s'agissant de la prime qualité, les raisons pour lesquelles elle n'a pas été versée au salarié lui ont été expliquées par courrier du 3 février 2016. Elle indique que le salarié a effectivement bénéficié du versement de celle-ci au mois de juin 2015 avant qu'il n'ait acquis 4 mois d'ancienneté mais qu'elle ne lui a plus été versée celui-ci n'en remplissant plus les conditions à savoir; absence de casse et de sinistre dans le mois et présence du salarié sur le mois concerné.

***

L'astreinte correspond à une période pendant laquelle le salarié doit pouvoir intervenir pour effectuer une tâche nécessaire à l'entreprise. Elle n'est pas prévue par la convention collective des transports routiers.

M. [N] produit aux débats :

- un sms adressé notamment à M. [N] le 30 septembre 2015 rédigé ainsi qu'il suit :

'Bsr Mrs,

Suite aux différents loupés de nuit chez Casino ces derniers temps, la direction du BRT nous a demandé de trouver une solution rapide pour pallier ce problème. Nous avons décidé avec M. [H] que le conducteur qui est affecté à la tournée d'AM soit systématiquement d'astreinte ce qui veut dire que si l'un des deux conducteurs de nuit ne vient pas travailler pour une raison x, M. [H] appellera le conducteur pour l'AM. Il faut savoir que cette pratique sera suivie d'une prime de 30 € pour celui qui sera d'astreinte et qui viendra remplacer le collègue absent au milieu de la nuit. Cela prends effet dès ce soir, [T] sera d'astreinte. En espérant que nous utiliserons le moins possible cette pratique sachant que nos relations avec le BRT sont plus que tendues et que nous sommes plus prêt de la sortie que du développement avec eux':

- un sms adressé le 11 octobre 2015 par '[B]' 'Bjr [D], Pour info lundi tu es am et comme convenu tu es d'astreinte dans la nuit de dimanche à lundi. Pour info, tu es aussi prévu pour faire un doublage le mercredi 14/10. Merci et bon week-end.'.

- un sms du 07 octobre 2015 adressé par '[B]' 'Bjr [D], Demain jeudi 08/10 tu es d'AM et cette nuit comme il a été convenu avec le BRT le conducteur qui tourne l'am est d'astreinte la veille donc ce soir. Merci.'

Il résulte des échanges de courriels produits par l'employeur notamment en pièce n°18 que le supérieur hiérarchique de M. [N] est M. [B] [E] et que le dirigeant de la société est M. [Y] [H] ce qui rend crédibles les éléments produits par le salarié et qui démontre que le premier en accord avec le second a mis en place à compter du 30 septembre 2015 au sein de l'entreprise un système d'astreinte permettant de pallier en urgence l'absence de l'un de ses salariés de nuit rémunéré à concurrence de 30 € par astreinte, cette somme ne figurant pas sur les bulletins de salaire de sorte qu'alors que la société MDL se borne à nier l'existence de cette astreinte sans fournir aucun élément de réponse aux pièces produites par le salarié, il convient de faire droit à la demande de M. [N] qui produit, sans être utilement contredit par l'employeur, un tableau listant 15 astreintes qu'il indique avoir effectuées entre le 08 octobre 2015 et le 30 décembre 2015 les nuits suivant des journées durant lesquelles il était prévu pour travailler l'après-midi.

Il convient par infirmation du jugement entrepris de condamner la société MDL à payer à M. [N] une somme de 450 € au titre des astreintes.

***

La prime qualité liée à l'exécution du contrat de travail correspond à un objectif fixé par l'employeur. Dès que celui-ci est atteint, la prime est due au salarié.

La société MDL ne conteste pas l'existence au sein de l'entreprise d'une prime qualité mensuelle mais considère que le salarié n'a rempli les conditions lui permettant d'y prétendre qu'au mois de juin 2015 en se fondant sur un seul élément, le courrier que M. [H] a adressé au salarié le 3 février 2016 aux termes duquel il lui indique 'concernant la prime qualité mensuelle, nous vous rappelons qu'elle est en principe attribuée à compter de 4 mois d'ancienneté. Compte tenu de votre embauche en avril 2015, vous ne pouviez donc y prétendre avant le salaire du mois d'août. Toutefois, nous avons consenti à vous en faire bénéficier plus tôt puisqu'elle a été versée à compter de juin. Pour autant cette prime qualité, comme son nom l'indiqué est attribuée sur la base de critères objectifs qui doivent être remplis : absence de casse et de sinistre sur le mois, la prime étant par ailleurs calculée en fonction de la présence sur le mois. Or, il apparaît que chaque mois, hormis au mois de juin les conditions d'attribution de la prime n'ont pas été remplies. Par conséquent, la prime n'a pas été acquise sur les mois d'août à décembre 2015.'

Le salarié ne remettant pas en cause les conditions d'attribution de cette prime qu'il ne discute pas, il résulte de l'examen des pièces versées aux débats par l'employeur que M. [N] a été absent puisque placé en arrêt maladie du 11 au 12 septembre 2015, puis du 12/10 au 31/10/2015 et du 02 au 07/11/2015, qu'un accrochage lui a été imputé le 09 décembre 2015, qu'il a été placé en arrêt maladie du 2/01 au 29/01/2016 puis du 05/02 au 20/02 et du 1er/03 au 02/03/2016 et également en janvier , février et mars 2016, que s'il ne peut donc percevoir la prime litigieuse pour les mois de septembre à mars 2016 en revanche la société MDL ne justifie pas que les conditions sus-énoncées n'étaient pas remplies en juillet et août 2015 de sorte que par infirmation du jugement entrepris, il convient de la condamner à payer à M. [N] une somme de 150 €.

Sur la demande de dommages-intérêts pour exécution fautive et déloyale du contrat de travail :

M. [N] sollicite la condamnation de l'employeur à lui payer une somme de 5.000 € à titre de dommages-intérêts pour exécution fautive et déloyale du contrat de travail en indiquant avoir travaillé dans des conditions difficiles et abusives compte tenu des nombreuses heures supplémentaires effectuées et du rythme de travail imposé qu'il s'est trouvé dans l'incapacité de poursuivre et qui a eu des conséquences graves sur son état de santé.

La société MDL conteste les différents manquements et souligne l'absence de démonstration par le salarié du préjudice allégué.

De fait, alors que la cour n'a que très partiellement fait droit aux demandes salariales de M. [N] que ce dernier impute à l'employeur la responsabilité des arrêts de travail qu'il a subis, deux jours en septembre 2015, 26 jours à compter du 12 octobre en raison d'un accident du travail puis 26 jours en janvier 2016 en produisant uniquement une attestation de salaires concernant l'accident du travail du 12 octobre 2015, la reconnaissance du caractère professionnel de cet accident par la caisse primaire d'assurance maladie ainsi qu'un relevé d'indemnités journalières de la sécurité sociale sans même indiquer la nature des affections présentées, il ne justifie ni d'un lien de causalité entre les difficultés de santé de M. [N] et ses conditions de travail ni de l'existence et de l'étendue du préjudice dont il sollicite réparation à concurrence de 5.000 €.

C'est à juste titre, par des dispositions qui sont confirmées que la juridiction prud'homale a débouté M. [N] de cette demande.

Sur la rupture du contrat de travail :

L'article L 1232-1 du code du travail dispose que tout licenciement pour motif personnel doit être justifié par une cause réelle et sérieuse, c'est à dire pour un motif existant, exact, objectif et revêtant une certaine gravité rendant impossible la continuation du contrat de travail.

En application des dispositions de l'article L 1235-1 du code du travail, la charge de la preuve n'incombe spécifiquement à aucune des parties, le juge formant sa conviction au vu des éléments fournis par les parties. En cas de doute, celui-ci profite au salarié.

En application des dispositions des articles L 1132-1 et L 1134-1 du code du travail, dans leur version applicable au litige, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, notamment en matière de rémunération, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou renouvellement de contrat en raison, entre autres de son état de santé ou de son handicap.

En cas de litige, il appartient à celui qui se prévaut d'une discrimination directe ou indirecte de présenter au juge les éléments de fait laissant supposer la situation qu'il dénonce .

Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.

M. [N] soutient qu'en l'état de sa charge hebdomadaire de travail, il a dû faire face de manière constante à des conditions de travail difficiles le plaçant dans un état dépressif invalidant, que son contrat de travail a été suspendu à plusieurs reprise pour cause d'accident du travail et de maladie et pour la dernière fois à compter du 2 janvier 2016 jusqu'au 2 mars suivant, soit une période supérieure à trente jours consécutifs, qu'il incombait à l'employeur d'organiser une visite médicale de reprise, que s'il a été reçu par la médecine du travail le 4 février 2016 laquelle a conclu à son inaptitude en raison de son état de santé aucune seconde visite médicale, pourtant obligatoire, n'a été organisée, qu'alors que son contrat de travail était suspendu et qu'il avait été déclaré inapte, l'employeur a engagé le même jour à son encontre une procédure de licenciement, irrégulière l'employeur n'ayant justifié ni du strict délai de 5 jours entre la date de la convocation et celle de l'entretien préalable ni de la régularité des élections professionnelles concernant les institutions représentatives du personnel, le licenciement notifié en période de suspension de son contrat de travail produisant les effets d'un licenciement nul puisque fondé sur l'état de santé du salarié ce qui constitue un motif discriminatoire prohibé, l'employeur ne pouvant échapper au régime de l'inaptitude en prononçant un licenciement disciplinaire.

A titre subsidiaire, il conteste le bien-fondé du licenciement arguant de l'imprécision de la lettre de licenciement et de ce que l'employeur n'a pas rapporté la preuve de l'existence matérielle des faits du 2 février 2016 faute d'avoir produit le constat d'accident correspondant, de ce que l'employeur reprend dans la lettre de licenciement des faits antérieurement sanctionnés

La société MDL réplique que M. [N] fait une présentation erronée de ses arrêts de travail en tentant de faire croire que sa reprise était soumise à une visite médicale de reprise ce qui n'était pas le cas, sa dernière période d'arrêt maladie (du 2/01 au 29/01) étant inférieure à trente jours de sorte que le contrat de travail n'était nullement suspendu et que le salarié n'avait aucune obligation de passer une visite médicale de reprise, l'employeur n'ayant nullement connaissance de l'avis d'inaptitude le 4 février 2016 au jour de l'envoi de la convocation à un entretien préalable.

***

Par application des dispositions de l'article R4624-24 du code du travail dans sa version applicable au litige la visite médicale de reprise est obligatoire après une absence d'au moins 30 jours pour cause d'accident du travail, ou de maladie ou d'accident non professionnel.

Pendant toute la durée de l'arrêt de travail, le contrat de travail du salarié est suspendu. Tant que la visite médicale de reprise n'a pas lieu, le contrat de travail reste suspendu. C'est bien cet examen de reprise qui met fin à la suspension du contrat de travail, même s'il ne coïncide pas avec le retour en poste du salarié.

La visite médicale de reprise a lieu lors de la reprise du travail et au plus tard dans les 8 jours (ancien article R 4624-22 du Code du travail). Dès que l'employeur a connaissance de la date de fin de l'arrêt de travail, il soit saisir le service de santé au travail pour que l'examen médical soit organisé dans un délai de 8 jours à compter de la reprise du salarié.

Lorsque l'employeur n'organise pas la visite médicale de reprise dans ce délai de 8 jours, ce retard ouvre droit à des dommages et intérêts pour le salarié.

Par application de l'ancien article R 4624-31 du code de travail, l'inaptitude physique avec impossibilité de reclassement ne peut être constatée par le médecin du travail qu'après une étude de poste et des conditions de travail dans l'entreprise ainsi qu'à l'issue de deux examens médicaux de l'intéressé espacés de deux semaines, accompagnés, le cas échéant, des examens complémentaires.sauf lorsque le maintien du salarié à son poste de travail entraîne un danger immédiat pour sa santé ou sa sécurité ou celles des tiers ou lorsqu'un examen de préreprise a eu lieu dans un délai de trente jours au plus, l'avis d'inaptitude médicale peut être délivré en un seul examen.

Si le salarié reprend son poste dans l'attente de la visite médicale de reprise, il est de nouveau soumis au pouvoir disciplinaire, même avec la suspension du contrat de travail, mais seulement pendant le délai de 8 jours durant lequel la visite médicale peut être organisée. S'il commet une faute durant ces 8 jours, il peut être sanctionné.

Le salarié qui ne remplit pas les conditions d'une visite médicale de reprise ne pourra s'en prévaloir auprès de son employeur. Il doit informer préalablement son employeur de sa demande de visite médicale.

Si l'employeur n'est en aucun cas averti, l'employé ne pourra pas lui opposer un avis d'inaptitude rendu lors de cette visite.

M. [N] verse aux débats :

- un bulletin de salaire du mois de janvier 2016 mentionnant une absence maladie du 02/01/2016 au 29/01/2016 (soit 28 jours);

- un bulletin de salaire du mois de février 2016 mentionnant une absence maladie du 05/02/2016 au 29/02/2016 soit 24 jours;

- un bulletin de salaire du mois de mars 2016 mentionnant une absence maladie des 01er et 02/03/2016;

- une attestation de paiement des indemnités journalières pour la période du 01/01/2016 au 22 avril 2016 indiquant :

- maladie du 02/01/2016 au 04/01/2016 : 3 jours de carence

- maladie du 05/01/2016 au 29/01/2016 : 25 jours

- maladie du 05/02/2016 au 07/02/2016 : 3 jours de carence

- maladie du 08/02/2016 au 02/03/2016 : 24 jours;

- une fiche d'aptitude médicale établie le 04/02/2016 mentionnant comme examen visite de reprise sur laquelle le médecin du travail a coché la case ' inapte' indiquant 'Ne peut occuper son poste actuellement, relève de la médecine de soins et nécessite d'être revu au moment où il reprendra le travail';

- la lettre de licenciement pour cause réelle et sérieuse qui lui a été notifiée le 19 février 2016;

- un courrier recommandé avec accusé de réception adressé par M. [N] le 26 février 2016 à la direction de l'entreprise contestant la lettre de licenciement du 19/02/2016 reçue le 24/02/2016 en indiquant 'les motivations ne sont pas fondées dans les 3 courriers précédents, je vous rappelle que je vous ai répondu à ses dites courriers dont la sanction a été un avertissement, je vous demande de reconsidérer votre décision et de m'en informer dès que possible'.

S'agissant d'un licenciement notifié par l'employeur pendant une période d'arrêt de travail pour maladie du salarié, les éléments de fait présentés par le salarié laissent supposer la discrimination alléguée et il appartient à l'employeur de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination, ce qu'il fait.

En effet, il verse aux débats les pièces suivantes :

- un arrêt de travail initial de M. [N] à compter du 02/01/2016 jusqu'au 16/01/2016 ainsi qu'une prolongation de cet arrêt de travail du 15/01/2016 au 20/01/2016;

- un arrêt de travail initial de M. [N] à compter du 05/02/2016 au 19/02/2016 ainsi qu'une prolongation de celui-ci du 19/02/2016 au 02/03/2016;

- une notification d'un avertissement adressé à M. [N] le 08 janvier 2016 lui reprochant 'd'avoir endommagé l'enseigne d'un magasin TZ612 à [Localité 3] le 09 décembre 2015 sachant que la franchise s'élève à 1000 €. Nous vous avons déjà sanctionné en vous notifiant un avertissement le 07 octobre 2015. Nous vous rappelons que la sinistralité à un coût non négligeable. De plus le 21 décembre 2015, vous avez livré 1 rolls de trop au client C7638 à [Localité 2] sans contrôler les documents de livraison...';

- un courrier en réponse de M. [N] du 15/01/2016 au sujet de l'accrochage de l'enseigne du magasin TZ 612 à [Localité 3] expliquant que 'les dégats causés sont dus à une manoeuvre malencontreuse de ma part mais je vous rappelle que pour livrer ce client je suis obligé de stationner en contre sens de la voie routière et obligé de monter sur le trottoir il faudrait peut être un camion moins volumineux....pour le roll manquant, j'ai rappelé le BRT pour les informer et lui est passé le client par téléphone qui a reconnu qu'il y avait des documents du roll manquant du 4ème client mélangé dans son enveloppe et signé par écrit pour les bons de livraison.

A cet effet, je vous confirme que cela ne se reproduira plus car je serai doublement plus vigilant..;';

- des échanges de courriels entre M. [B] [E] et le courtier d'assurance LBC Associés au sujet du sinistre du 12 mai 2015, le constat amiable n'ayant pas été rédigé immédiatement, le conducteur et le tiers n'en ayant pas et le chauffeur devant continuer sa tournée;

- un constat amiable illisible, (pièce n°31);

- des factures illisibles;

- des échanges de courriel entre M. [E] et le courtier d'assurances à propos du sinsitre DQ 927 MN du 09/12/2015 - conducteur M. [N] du 4 février 2016 avec copie d'un constat amiable automobile et devis de remise en état de l'enseigne Spar endommagée datée du 11/01/2016;

- un courriel non daté émanant de [B] [E] adressé à M. [Y] [H] 'Pour info, cet AM M. [N] a accroché la bâche d'un semi d'un transporteur avignonnais en quittant les quais au BRT avec la porte arrière du porteur DQ 927. Ils doivent se rapprocher de nous pour arrangement à l'amiable';

- des photographies non datées d'une plaque d'immatriculation ,

- une facture de carrosserie CEPH établie le 9 février 2016 correspondant à une fiche du 9 février 2016 portant sur le découpage de la partie endommagée du profil supérieur de la paroi gauche,

- la lettre de licenciement reprochant au salarié ' d'avoir le 2 février 2016 endommagé le haut de caisse du véhicule immatriculé D 927 MN.

Il résulte de ces éléments que contrairement aux affirmations de M. [N], celui-ci n'a pas été absent plus de 30 jours à compter du 02/01/2016 puisque son arrêt de travail n'a été prolongé que jusqu'au 29 janvier 2016 et qu'à compter de cette date il a repris son travail avant d'être de nouveau placé en arrêt de travail six jours plus tard à compter du 5 février 2016 en sorte que l'employeur n'avait ainsi aucunement l'obligation de solliciter la médecine du travail afin d'organiser une visite de reprise, que si une visite médicale a bien eu lieu auprès de la médecine du travail le 04 février 2016 alors qu'elle n'était pas obligatoire, M. [N] ne justifie pas en avoir préalablement informé la société MDL de sorte que l'avis d'inaptitude, lequel n'est d'ailleurs pas un avis d'inaptitude définitif en l'absence d'une étude de poste, de deux visites médicales obligatoires ou d'une seule visite médicale avec mention danger immédiat, le médecin du travail ayant indiqué seulement que le salarié serait à revoir lorsqu'il reprendrait son activité, n'est pas opposable à l'employeur, M. [N] n'en faisant d'ailleurs pas état dans le courrier contestant son licenciement adressé à l'employeur le 26 février 2016, ce dernier l'ayant ainsi convoqué le 4 février 2016 à un entretien préalable à un éventuel licenciement sans avoir eu préalablement connaissance de l'avis litigieux.

Au surplus, alors que les pièces produites n'établissent aucun lien de causalité entre l'état de santé du salarié et ses conditions de travail, elles démontrent que l'employeur n'a pas licencié M. [N] pour un motif discriminatoire prohibé en lien avec sa santé mais pour faute simple en raison de la survenance le 2 février 2016 d'un nouvel accrochage au volant de son camion malgré un avertissement antérieur récent puisque notifié au salarié le 8 janvier précédent dont celui-ci n'a pas contesté la matérialité.

En conséquence, l'employeur ayant établi que sa décision est étrangère à toute discrimination, le jugement entrepris ayant débouté M. [N] de sa demande de licenciement nul est confirmé.

En revanche, ainsi que l'a exactement relevé le salarié, alors qu'un licenciement pour cause réelle et sérieuse lui a été notifié le 19 février 2016 l'employeur lui ayant reproché le 2 février 2016,d'avoir endommagé le haut de caisse du véhicule immatriculé D 927 MN, la société MDL dont de nombreuses pièces sont partiellement ou totalement illisibles qui a pourtant parfaitement justifié des éléments matériels justifiant l'avertissement notifié le 8 janvier 2016 pour un précédent accrochage imputable au salarié ne verse pas aux débats le constat amiable établi ensuite de l'accrochage du 2 février 2016, ne produit aucun élément relatif aux circonstances de cet accident et ne démontre donc pas contrairement aux termes de la lettre de licenciement que le salarié a été l'auteur d'un 'accrochage en pleine responsabilité' et ainsi l'imputabilité alléguée.

En conséquence, le doute devant profiter au salarié, la cour considère que le licenciement de M. [N] est dépourvu de cause réelle et sérieuse et infirme les dispositions contraires du jugement entrepris l'ayant déclaré bien-fondé.

Sur l'indemnisation du licenciement abusif:

S'il est exact que le licenciement de M. [N] est irrégulier faute pour l'employeur, dont l'accusé de réception produit est illisible, de justifier du respect du délai de 5 jours entre la date de convocation à l'entretien préalable et l'entretien lui-même ainsi que de la régularité du procès-verbal de carence concernant les institutions représentatives du personnel celui-ci n'étant ni daté ni signé et l'employeur ne justifiant pas l'avoir adressé à l'inspection du travail, la sanction de l'article L.1235-2 du code du travail n'est cependant pas applicable à un salarié ayant moins de deux années d'ancienneté lequel doit démontrer le préjudice qu'il a subi, la jurisprudence constante dont fait état le salarié affirmant ne pas avoir besoin de prouver son préjudice pour obtenir l'indemnisation sollicité étant relative à l'article L.1235-15 du code du travail applicable en matière de licenciement économique.

En l'espèce, M. [N] ne justifiant ni de l'existence ni de l'étendue du préjudice allégué, il convient de confirmer le jugement entrepris ayant rejeté ce chef de demande.

En revanche, par application des dispositions de l'article L.1235-5 du code du travail alors applicable, la perte injustifiée de son emploi cause nécessairement un préjudice à M. [N].

Tenant compte d'une ancienneté dans l'entreprise inférieure à un an, d'un âge de 46 ans d'un salaire de 1.886,95 € après intégration des heures supplémentaires mais également de ce qu'il n'a pas justifié de sa situation au regard de l'emploi postérieurement à la rupture du contrat de travail il convient de condamner la société MDL à lui payer une somme de 3.000 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Par application de l'article L1234-9 du code du travail dans sa version en vigueur du 27 juin 2008 au 24 septembre 2017 'le salarié titulaire d'un contrat de travail à durée indéterminée, licencié alors qu'il compte une année d'ancienneté ininterrompue au service du même employeur, a droit, sauf en cas de faute grave, à une indemnité de licenciement'.

En l'espèce, M. [N] ayant été embauché le 25 avril 2015, la fin de son préavis étant intervenu le 19 mars 2016 et les périodes d'arrêt de travail pour maladie non professionnelle étant exclues du calcul de l'ancienneté, ce dernier ne justifie pas d'une ancienneté continue dans l'entreprise d'un an et n'a pas droit à une indemnité de licenciement.

M. [N] indique que l'employeur a calculé le préavis sur la base du salaire correspondant à 151,57 heures au lieu de le calculer sur la base du salaire mensuel perçu et sollicite le paiement d'un solde s'élevant à 414 € outre 41,40 €, montants qui seront retenus comme n'étant pas critiqués par l'employeur, le jugement entrepris étant infirmé de ce chef.

Sur la demande de dommages-intérêts pour défaut d'indications réglementaires lors de la rupture du contrat:

M. [N] soutient qu'au moment où il a été licencié il était obligatoire de mentionner sur les documents de fin de contrat le droit individuel à la formation acquis par le salarié de même que l'employeur était tenu de l'informer sur la portabilité de la prévoyance pendant une certaine durée et l'inviter à faire un choix or ces informations ne lui ont pas été communiquées et il sollicite la condamnation de l'employeur à lui payer 886,95 € (montant figurant dans le dispositif du jugement entrepris) pour absence d'indication du DIF 1 et 1.886,95 € pour absence d'indication sur la portabilité de la prévoyance.

La société MDL réplique que l'information des droits en matière de portabilité et droit au DIF a été communiquée au salarié au moment de la remise des documents de fin de contrat et que celui-ci ne rapporte pas la preuve d'un préjudice qui en serait résulté, ne justifiant pas avoir souhaité suivre une formation et ne pas avoir pu le faire du fait de l'absence d'information de droit au DIF.

Le DIF instauré par la loi n°2004-391 du 4 mai 2004 destiné à favoriser l'accès à la formation professionnelle pour les salariés a été remplacé par le CPF (compte personnel formation) depuis le 1er janvier 2015, ce nouveau dispositif étant rattaché à la personne et à l'entreprise, le salarié conservant la possibilité de saisir ses heures DIF dans le nouveau système, la seule obligation de l'employeur étant de communiquer aux salariés les heures acquises au 31 décembre 2014 ce qui ne concerne pas M. [N] qui n'était pas présent dans l'entreprise à cette période et qui n'établit pas que cette absence d'information lui ait causé un préjudice.

S'agissant de la portabilité des droits au titre de la prévoyance, l'employeur justifie avoir informé le salarié de ce que 'par application de l'article L.911-8 du code de la sécurité sociale, il bénéficiait immédiatement et gratuitement de la prév oyance frais de santé au titre des risques portant atteinte à l'intégrité physique de la personne ainsi que des risques de décès, d'incapacité de travail ou d'invalidité' dans le certificat de travail remis à celui-ci le 19 mars 2016.

C'est à juste titre que le jugement entrepris a débouté M. [N] de ses demandes indemnitaires.

Sur la remise sous astreinte d'un bulletin de salaire rectificatif et de documents de rupture conformes au présent arrêt:

Le sens du présent arrêt conduit à ordonner la remise par l'employeur à M. [N] d'un bulletin de salaire rectificatif et de documents de rupture conformes au présent arrêt sans qu'il soit nécessaire d'assortir cette injonction d'une astreinte, le salarié ne versant aux débats aucun élément laissant craindre une résistance ou un retard abusif de la part de la société MDL.

Sur les intérêts et leur capitalisation :

Les créances de nature salariale allouées porteront intérêts à compter de la date de réception par l'employeur de la convocation devant le bureau de conciliation du conseil de prud'hommes et les créances indemnitaires à partir de la décision qui les prononce.

Les intérêts échus dus au moins pour une année entière seront capitalisés dans les conditions prévues par l'article 1343-2 du code civil.

Le jugement déféré, qui a rejeté ces demandes sera infirmé.

Sur les dépens et les frais irrépétibles :

Le jugement entrepris ayant condamné M. [N] aux entiers dépens est infirmé.

La société MDL est condamnée aux entiers dépens, dont distraction de ceux d'appel au profit de la société d'avocats MB et à payer à M. [N] une somme de 2.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais exposés en première instance et en appel.

PAR CES MOTIFS :

La Cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement, par arrêt contradictoire prononcé par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile et en matière prud'homale,

Confirme le jugement entrepris en ce qu'il a débouté M. [N] de ses demandes:

- de dommages-intérêts pour exécution fautive et déloyale du contrat de travail,

- de licenciement irrégulier et nul,

- au titre d'une indemnité légale de licenciement ,

- de dommages-intérêts pour absence d'indication du DIF 1 et d'information sur la portabibilité et la prévoyance,

- d'astreinte assortissant la remise d'un bulletin de salaire et de documents de fin de contrats rectifiés.

L'infirme pour le surplus:

Statuant à nouveau et y ajoutant:

Condamne la société Méditerranéenne de Distribution et de Location (MDL) à payer à M. [D] [N] les sommes suivantes :

- 475,69 € de rappel de salaire au titre des heures supplémentaires et 47,56 € de congés payés afférents;

- 102,23 € au titre des repos compensateurs;

- 450 € au titre des astreintes;

- 150 € au titre de la prime qualité.

Dit que le licenciement de M. [N] est dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Condamne la société Méditerranéenne de Distribution et de Location (MDL) à payer à M. [D] [N] les sommes suivantes:

- 414 € au titre du solde du préavis et 41,40 € de congés payés afférents;

- 3.000 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Ordonne la remise par la société Méditerranéenne de Distribution et de Location (MDL) à M. [N] d'un bulletin de salaire rectificatif et de documents de rupture conformes au présent arrêt.

Dit que les créances de nature salariale allouées porteront intérêts à compter de la date de réception par l'employeur de la convocation devant le bureau de conciliation du conseil de prud'hommes et les créances indemnitaires à partir de la décision qui les prononce, les intérêts échus dus au moins pour une année entière seront capitalisés dans les conditions prévues par l'article 1343-2 du code civil.

Condamne la société Méditerranéenne de Distribution et de Location (MDL) aux dépens de première instance et d'appel dont distraction de ces derniers au profit de la société d'avocats MB et à payer à M. [D] [N] une somme de 2.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 4-1
Numéro d'arrêt : 21/02850
Date de la décision : 19/04/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 27/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-04-19;21.02850 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award