COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
Chambre 1-8
ARRÊT AU FOND
DU 1er JUIN 2022
N° 2022/ 272
N° RG 19/12906
N° Portalis DBVB-V-B7D-BEXQC
SA EOS FRANCE
C/
[J] [X]
[M] [X]
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Me Sandra JUSTON
Me Cédric CABANES
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal d'Instance d'AUBAGNE en date du 14 Mai 2019 enregistrée au répertoire général sous le n° 11-18-0001.
APPELANTE
SA EOS FRANCE
Anciennement EOS CONTENTIA, venant aux droits de la Société COFIDIS, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité au siège sis 74 rue de la Fédération 75010 PARIS
représentée par Me Sandra JUSTON de la SCP BADIE SIMON-THIBAUD JUSTON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, ayant pour avocat plaidant Me Jean Bruno HUA, membre de la SELARL BENHAIM & HUA, avocat au barreau de MARSEILLE,
INTIMES
Madame [J] [X]
née le 15 Septembre 1955 à GUERANDE (44), demeurant 555 Route d'Holette Quartier Puchua Maison ARGI IZZARO 64310 ASCAIN
représentée par Me Cédric CABANES de la SCP LECLERC CABANES CANOVAS, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, plaidant par Me Clotilde HAUWEL, membre de la SELARL L&H AVOCATS, avocat au barreau de LILLE
Monsieur [M] [X]
né le 29 octobre 1949 à TOULON, demeurant Avenue Cytharista Immeuble le Bali Bâtiment K - 13600 LA CIOTAT
assignation à étdude d'huissier le 05 novembre 2019,
défaillant
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 08 Mars 2022 en audience publique. Conformément à l'article 804 du code de procédure civile, Monsieur Philippe COULANGE, Président a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Monsieur Philippe COULANGE, Président
Madame Céline ROBIN-KARRER, Conseillère
Monsieur Jean-Paul PATRIARCHE, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Mme Maria FREDON.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 1er Juin 2022.
ARRÊT
Rendu par défaut, prononcé par mise à disposition au greffe le 1er Juin 2022, signé par Monsieur Philippe COULANGE, Président et Madame Maria FREDON, greffière auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
Monsieur et Madame [X] ont souscrit auprès de la SA COFIDIS un contrat de crédit utilisable par fraction sous la forme d'une formule « LIBRAVOU » n°606240180.
Des échéances n'ayant pas été réglées, l'organisme de crédit a adressé aux emprunteurs une mise en demeure de déchéance du crédit, restée sans effets, en date du 18 octobre 2001.
Par ordonnance portant injonction de payer du Tribunal d'instance de la CIOTAT en date du 8 mars 2002, les emprunteurs ont été condamnés à payer à la SA COFIDIS la somme de 4 979,93 € avec intérêts conventionnels de 17,16% à compter du 18 octobre 2001.
Alors qu'un procès-verbal de saisie-attribution a été dressé le 30 mars 2018, la saisie a été dénoncée par Madame [X] le 6 avril 2018, laquelle a formé opposition le 4 mai 2018 à l'ordonnance portant injonction de payer rendue le 2 mars 2016.
Par jugement rendu le 14 mai 2019, le Tribunal d'instance d'AUBAGNE a débouté la SA COFIDIS de l'ensemble de ses demandes au motif que l'action en paiement était forclose.
Par jugement rendu le 2 juillet 2019, le Tribunal d'instance d'AUBAGNE a ordonné la rectification matérielle du jugement rendu le 14 mai 2019 dans l'affaire CONTENTIA, venant aux droits de la SA COFIDIS au titre d'une cession de créances, contre Madame et Monsieur [X].
Par déclaration au greffe en date du 6 août 2019, la SA EOS FRANCE, anciennement EOS CONTENTIA, a interjeté appel de cette décision afin qu'elle soit réformée. Elle demande à la Cour de condamner les emprunteurs à lui payer les sommes de 4 979 € en principal avec intérêts au taux conventionnel de 17,16% à compter du 18 octobre 2001 et de 500 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, outre les dépens.
Elle soutient :
- que la signification de l'ordonnance portant injonction de payer est régulière.
- que l'action en paiement n'est pas atteinte de forclusion.
- que l'opposition à l'ordonnance portant injonction de payer est infondée.
Madame [X] conclut à la confirmation totale du jugement entrepris et aux débouté de l'ensemble des prétentions de l'appelante. Elle demande à la Cour, à titre subsidiaire, de déchoir la SA EOS FRANCE de son droit aux intérêts et, en tout état de cause, de condamner cette dernière à lui payer la somme de 2 500 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, outre les dépens.
Elle fait valoir :
- que la signification de l'ordonnance portant injonction de payer est irrégulière, de sorte que ladite ordonnance doit être considérée comme non-avenue.
- que l'action en paiement de l'appelante est atteinte de forclusion.
- que la SA EOS FRANCE ne démontre pas l'existence de l'obligation alléguée à son encontre.
- que l'action en paiement intentée par l'appelante plusieurs années après l'interruption des poursuites par le créancier initial est abusive.
Bien que régulièrement assigné, Monsieur [X] n'a pas constitué avocat.
L'ordonnance de clôture a été rendu le 22 février 2022.
MOTIFS DE LA DECISION
Attendu que Monsieur et Madame [X] ont souscrit auprès de la SA COFIDIS un contrat de crédit utilisable par fraction sous la forme d'une formule « LIBRAVOU » n°606240180 ;
Que des échéances n'ayant pas été réglées, l'organisme de crédit a adressé aux emprunteurs une mise en demeure de déchéance du crédit, restée sans effets, en date du 18 octobre 2001 ;
Attendu qu'aux termes de l'article 1411 du Code de procédure civile, l'ordonnance portant injonction de payer doit être signifiée dans les six mois de sa date, à défaut de quoi elle est non avenue ;
Que le recours à un Huissier de justice pour la notification est obligatoire, quel que soit le montant de la créance ;
Qu'en conséquence, faute de signification dans le délai de six mois, la caducité de l'ordonnance est de nature à affecter la régularité de la procédure ;
Qu'en vertu de l'article 9 du Code de procédure civile, il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention ;
Que la SA EOS FRANCE verse aux débats un procès-verbal de recherches infructueuses en date du 24 décembre 2002, alors que l'ordonnance portant injonction de payer a été rendue le 8 mars 2002, de sorte que cette signification est tardive ;
Que l'appelante indique que l'ordonnance portant injonction de payer a été signifiée le 28 août 2002 et que le greffe a apposé la formule exécutoire le 15 novembre 2002 ;
Que néanmoins, elle ne produit ni l'acte de signification ni le certificat portant formule exécutoire délivré par le greffe ;
Qu'il convient toutefois de préciser qu'un certificat de non-opposition émis par le greffier en chef visant l'acte de signification de l'ordonnance portant injonction de payer ne suffit pas à démontrer la régularité de ladite signification ;
Qu'en tout état de cause, c'est à bon droit que le jugement entrepris a considéré comme non avenue l'ordonnance portant injonction de payer en date du 8 mars 2002, de sorte que celle-ci étant entachée de caducité, cela affecte la procédure entière ;
Attendu qu'en application des dispositions de l'article L311-37 du Code de la consommation, les actions en paiement engagées à l'occasion de la défaillance de l'emprunteur doivent être formées dans les deux ans de l'événement qui leur a donné naissance à peine de forclusion ;
Que la forclusion de l'action en paiement prévue à l'article L 311-37 susvisé est une fin de non-recevoir d'ordre public dont le point de départ se situe soit à l'exigibilité de l'obligation qui lui a donné naissance, soit à compter du premier incident de paiement non-régularisé ;
Que la société appelante se fonde sur un premier incident de paiement non-régularisé qu'elle allègue être survenu le 5 avril 2001 ;
Qu'en raison de la caducité de l'ordonnance portant injonction de payer, l'organisme de crédit n'est plus recevable à agir ;
Qu'il s'ensuit qu'elle est forclose dans son action en paiement et ne peut, comme l'a retenu à bon droit le jugement entrepris, prétendre à la condamnation des époux [X] à lui rembourser les sommes prêtées au titre du contrat de crédit litigieux ;
Qu'il convient donc de confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu le 14 mai 2019 par le Tribunal d'instance d'AUBAGNE ;
Attendu qu'il sera alloué à Madame [X], qui a dû engager des frais irrépétibles pour défendre ses intérêts en justice, la somme de 1 000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;
Attendu que la SA EOS FRANCE, qui succombe, supportera les dépens d'appel ;
PAR CES MOTIFS,
La Cour, statuant publiquement, par arrêt rendu par défaut, par mise à disposition au greffe, en dernier ressort,
CONFIRME dans toutes ses dispositions le jugement rendu le 14 mai 2019 par le Tribunal d'instance d'AUBAGNE ;
Y ajoutant,
CONDAMNE la SA EOS FRANCE à payer à Madame [X] la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;
CONDAMNE la SA EOS FRANCE aux dépens d'appel.
LA GREFFIERE LE PRESIDENT