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05/01/2021 | FRANCE | N°19/16719

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-1, 05 janvier 2021, 19/16719


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-1



ARRÊT AU FOND

DU 05 JANVIER 2021

O.B.A.S.

N° 2021/ 22













N° RG 19/16719 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BFC2B







[W] [M]





C/



[U], [O], [L] [K]





















Copie exécutoire délivrée

le :

à :





Me Martine DESOMBRE

Me Agnès ERMENEUX










>Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE en date du 30 Septembre 2019 enregistrée au répertoire général sous le n° 18/01764.





APPELANT



Monsieur [W] [M]

né le [Date naissance 3] 1934 à [Localité 12] de nationalité Française,

demeurant [Adresse 2]



représenté par Me Mart...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-1

ARRÊT AU FOND

DU 05 JANVIER 2021

O.B.A.S.

N° 2021/ 22

N° RG 19/16719 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BFC2B

[W] [M]

C/

[U], [O], [L] [K]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Martine DESOMBRE

Me Agnès ERMENEUX

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE en date du 30 Septembre 2019 enregistrée au répertoire général sous le n° 18/01764.

APPELANT

Monsieur [W] [M]

né le [Date naissance 3] 1934 à [Localité 12] de nationalité Française,

demeurant [Adresse 2]

représenté par Me Martine DESOMBRE de la SCP DESOMBRE M & J, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,

et assisté de Me Fabienne BEUGNOT, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIME

Monsieur [U], [O], [L] [K]

né le [Date naissance 1] 1938 à [Localité 14],

demeurant [Adresse 13]

représenté par Me Agnès ERMENEUX de la SCP ERMENEUX-ARNAUD- CAUCHI & ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 23 Novembre 2020 en audience publique. Conformément à l'article 804 du code de procédure civile, Olivier BRUE, Président, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Monsieur Olivier BRUE, Président

Madame Anne DAMPFHOFFER, Conseiller

Mme Danielle DEMONT, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : M. Rudy LESSI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 05 Janvier 2021.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 05 Janvier 2021,

Signé par Monsieur Olivier BRUE, Président et M. Rudy LESSI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :

Vu l'assignation du 17 janvier 2018, par laquelle Monsieur [W] [M] a fait citer Monsieur [U] [K], devant le tribunal de grande instance de Marseille.

Vu le jugement rendu le 30 septembre 2019, par cette juridiction, ayant rendu la décision suivante:

Rejette la demande de révocation de l'ordonnance de clôture formée par [W] [M],

Declare irrecevables les conclusions et les pièces 19 et 20 notifiées par [W] [M] le 29 juillet 2019,

Constate que la fin de non recevoir tirée de l'absence de qualité pour agir de [W] [M] soulevée par [U] [K] est sans objet,

Declare recevable l'action introduite par [W] [M] en ce qulelle n'est pas prescrite,

Rejette la demande de transfert de propriété de la parcelle caclastrée numéro [Cadastre 7] d''une superficie égale à 1920 m2 formée par [W] [M],

Rejette la demande de dommages et intérêts pour résistance abusive formée par [W] [M],

Rejette la demande formée par [W] [M] sur le fondement de Particle 700 du Code de Procédure Civile,

Rejette la demande de dommages et intérêts pour procédure abusive formée par [U] [K],

Condamne [W] [M] à verser à [U] [K], la somme de 3.000,00 euros, sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile,

Rejette toute autre demande,

Condamne Monsieur [W] [M] aux dépens.

Vu la déclaration d'appel du 29 octobre 2019, par Monsieur [W] [M].

Vu les conclusions transmises le 29 avril 2020, par l'appelant.

Selon lui, le courrier du 1er juin 2011, portant refus par le vendeur d'honorer l'option, ne peut être le point de départ du délai de prescription, en application de l'article 1124 du Code civil, selon lequel la révocation de la promesse pendant le temps laissé au bénéficiaire pour opter n'empêche pas la formation du contrat promis.

Monsieur [W] [M] soutient que la promesse souscrite au bénéfice de sa mère [Y] [S] veuve [M] pouvait expressément bénéficier à ses héritiers et qu'elle doit être honorée par les héritiers de la promettante [T] [K].

Il estime qu'un accord sur la chose et sur le prix étant irrévocablement intervenu, la vente est parfaite pour les parcelles [Cadastre 7] et [Cadastre 8]. Il considère que l'expropriation opérée sur cette dernière lui est inopposable à défaut de publication de l'ordonnance d'expropriation et qu'il ne peut être invoqué un défaut de qualité de ce chef.

Monsieur [W] [M] écarte le moyen tiré de la vileté du prix, dès lors que le terrain n'est pas constructible et qu'aucune opération immobilière ne peut y être réalisée. Il en est de même pour le risque fiscal.

Il estime qu'à ce jour l'existence d'une lésion de plus de 7/12 n'est pas démontrée.

Vu les conclusions transmises le 26 juin 2020 par Monsieur [U] [K].

Il observe qu'il n'a pas qualité pour défendre en ce qui concerne la parcelle ayant fait l'objet d'une expropriation telle qu'elle résulte du relevé de propriété établi en 2017.

Monsieur [U] [K] soulève la prescription de l'action, estimant que le point de départ est le courrier de refus d'accepter la levée de l'option adressé le 1er juin 2011 par son conseil Maître [J], indiquant qu'il entendait se libérer de sa promesse, que cette possibilité lui ait été effectivement ouverte non. Il observe que l'appelant invoque l'application de l'article 1124 du Code civil, dans sa rédaction en vigueur à compter du 1er octobre 2016. Il considère que la volonté de lever l'option ne peut constituer le fait prévu par l'article 2224 du Code civil, alors que Monsieur [W] [M] savait depuis plus de cinq ans que la promesse avait été rétractée.

Il considère que la tacite reconduction ne peut intervenir que si aucune des parties ne manifeste sa volonté de rompre le contrat comme cela a été le cas en l'espèce.

Monsieur [U] [K] fait valoir qu'une promesse de vente sans terme fixe ne peut pour autant conférer à l'obligation à caractère perpétuel et qu'au-delà de ce délai raisonnable, la promesse est caduque, alors qu'en l'espèce, 40 ans se sont écoulés. La demande en réalisation forcée de la vente ne peut donc prospérer.

Selon lui, la chose objet de la promesse n'est plus la même, tant en raison de l'expropriation d'une partie de la surface que par son changement de nature de terrain agricole, devenu constructible. Le prix issu de l'indexation prévue par la promesse signée en 1971 serait de

78 652,62 euros, alors qu'il a reçu une offre de la part d'un promoteur à hauteur de 2 millions d'euros.

Il invoque subsidiairement la nullité de la vente pour vileté du prix, rappelant que celui-ci doit être réel et sérieux aux termes de l'article 1591 du Code civil ou la rescision pour lésion.

Monsieur [U] [K] considère que l'action purement spéculative de Monsieur [W] [M] lui a causé un préjudice, alors qu'il souhaite préparer sereinement sa succession.

Vu l'ordonnance de clôture rendue le 27 octobre 2020.

SUR CE

Par acte notarié en date du 21 octobre 1971, [T] [I] veuve [K] et [Y] [S] veuve [M] ont convenu :

- de la résiliation amiable du bail consenti à [Y] [S] veuve [M] le 23 septembre 1961, moyennant le paiement d'une indemnité de 25.000,00 Francs payable le jour de la libération des lieux;

- de la promesse par [T] [I] veuve [K] de vendre à [Y] [S] veuve [M], la parcelle section A numéro [Cadastre 5] pour 20 ares et 50 centiares, sur la commune de [Localité 12], cette promesse de vente était consentie pour une durée de quatre années à compter du 01 novembre 1971, tacitement prorogée jusqu'à un an après la mise en service de la rocade.

[T] [I] veuve [K] est décédée le [Date décès 4] 1978, laissant pour lui succéder [U] [K] qui a recueilli dans la succession la parcelle cadastrée Section A Numéro [Cadastre 5].

La parcelle section A numéro [Cadastre 5], d'une contenance de 20 ares et 50 centiares, s'est ensuite trouvée amputée d'une surface de 130 m2, par suite de l'expropriation de [U] [K] pratiquée par l'Etat, suivant jugement du 27 novembre 1996. La parcelle cadastrée section A numéro [Cadastre 5], devenue la parcelle [Cadastre 9], est désormais d'une contenance de 19 ares et 20 centiares.

[Y] [S] veuve [M] est décédée le [Date décès 6] 1999, sans avoir levé l'option, laissant pour lui succéder [W] [M] .

Par courrier simple daté du 2 mars 2011, Monsieur [W] [M] a indiqué à Monsieur [U] [K] son intention d'acquérir, aux conditions prévues dans la promesse de vente en date du 21 octobre 1971, la parcelle objet de cette promesse.

Par lettre recommandée avec avis de réception en date du 1er juin 2011, Monsieur [U] [K] a indiqué à Monsieur [W] [M] qu'íl considérait que la promesse de vente consentie par [T] [I] veuve [K] était caduque.

Par courrier recommandé avec avis de réception du 18 novembre 2016, Monsieur [W] [M] a informé Monsieur [U] [K] de sa décision de lever l'option.

Il n'est pas contesté que la rocade L2 a été partiellement ouverte à la circulation le 24 novembre 2016, puis totalement, le 24 octobre 2018.

Sur le défaut de qualité concernant la parcelle n°[Cadastre 8]

Le relevé de propriété mentionne l'État français comme propriétaire des parcelles numéros [Cadastre 10] et [Cadastre 11] ex n°[Cadastre 8].

Il est justifié que le jugement d'expropriation du 27 novembre 1996 a été publié.

Monsieur [U] [K] n'a donc pas qualité pour se défendre sur ce point.

Sur la prescription:

Le bénéficiaire d'une promesse unilatérale de vente d'un immeuble ne dispose que d'un droit à caractère personnel et mobilier.

Il est constant que Monsieur [W] [M] n'avait acquis aucun droit immobilier et qu'il convient d'appliquer la prescription de droit commun en matière de droits mobiliers.

Le point de départ du délai de prescription quinquennale prévu par l'article 2224 du Code civil, est la date à laquelle le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits permettant de l'exercer.

En l'espèce , aucune prescription ne pouvait courir avant le terme fixé par la promesse de vente , soit le 24 novembre 2016;

La réponse par courrier recommandé avec avis de réception en date du 1er juin 2011 au premier courrier de levée d'option adressé le 2 mars 2011, sans respecter les formes prévues par la promesse de vente ne peut ainsi constituer le point de départ du délai de prescription.

Celui-ci doit être fixé à la date de l'envoi du courrier recommandé de levée d'option le 18 novembre 2016.

L'action engagée par acte du 17 janvier 2018 n'est donc pas prescrite au regard du délai prévu par l'article 2224 du Code civil.

Sur la caducité de la promesse de vente

L'acte notarié de promesse de vente du 21 octobre 1971 stipule:

'Ladite promesse est consentie pour une durée de quatre années à compter du 1 er

novembre 1971.

Elle sera tacitement prorogée jusqu'à un an après la mise en service de la rocade.

Passé ces délais, sans que Madame [M] ait manifesté son intention d'acquérir, la présente promesse sera considérée comme nulle et non avenue, sans qu'il soit besoin pour Madame [K] de faire aucune mise en demeure, ni de remplir aucune formalité.

Madame [M] pourra lever l'option, soit par exploit d'huissier, soit par lettre

recommandée avec accusé de réception.

La réalisation ne pourra avoir lieu qu'au profit de Madame [M], ou de ses

héritiers, qui s'interdit formellement le droit de céder à qui que ce soit le bénéfice de la

présente promesse'.

Le courrier simple adressé le 2 mars 2011 par Monsieur [M] ne peut être considéré comme une levée d'option valable, dès lors que la promesse de vente prévoyait l'envoi d'un courrier recommandé ou la délivrance d'un acte d'huissier de justice.

La rétractation est intervenue officiellement par le courrier recommandé adressé le 1er juin 2011 par Monsieur [K].

Il ne peut cependant être considéré que la révocation de la promesse pendant le temps laissé aux bénéficiaires pour opter empêche la formation du contrat promis.

Il n'est par ailleurs pas possible en pareil cas d'ordonner la réalisation forcée de la vente, s'agissant d'une simple obligation de faire ne se résolvant qu'en dommages et intérêts.

Sur la vileté du prix:

Il résulte des dispositions de l'article 1591 du Code civil, que lorsque le prix est dérisoire, le contrat ne constitue plus une vente.

L'appréciation du prix s'effectue non à la date de la promesse, mais à celle de l'échange de l'accord des volontés, soit à la date de la levée de l'option intervenue en l'espèce, le 18 novembre 2016.

Monsieur [W] [M] proposait de racheter le bien pour un prix de 78'257,62 euros, portée dans ses dernières écritures à 126 201 €, par application de la clause d'indexation insérée dans l'acte de promesse de vente, concernant à l'époque une terre agricole.

Par courrier du 19 janvier 2006, Monsieur [D] [R], architecte a confirmé la constructibilité de la parcelle, avec un COS de 0,5.

Il ressort du certificat d'urbanisme délivré le 8 février 2017 produit aux débats que le terrain litigieux se trouve dans une zone actuellement constructible, dite 'd'orientation d'aménagement habitat' du PLU et vise un projet d'immeuble collectif.

Sont versées aux débats des offres d'achat par les promoteurs suivants :

- Le 11 janvier 2006 : Groupe AIC : 624 000 € HT

- Le 10 février 2006: Marine Promotion : 672 000 € HT

- Le 1er avril 2014 : Groupe Arcade : 800 000 € HT

- Le 5 mars 2018 : Bouygues Immobilier : 1 1001,35 €

Monsieur [U] [K] fournit une proposition d'achat par la SAS Marignan, non signée, de la parcelle n°[Cadastre 7] d'une superficie de 1920 m², datée du 9 septembre 2019, pour la somme de deux millions d'euros, en vue de la construction d'un ensemble immobilier de 2800 m² de surface de plancher.

Il ressort de ces éléments concordants que le prix proposé par Monsieur [W] [M] n'est ni réel, ni sérieux et que le contrat litigieux doin en conséquence être annulé de ce chef.

La demande de transfert de propriété formée par Monsieur [W] [M] ne peut donc prospérer.

Sur la demande en à titre de dommages et intérêts de Monsieur [U] [K]

Monsieur [U] [K] ne démontre pas que l'action en justice a été engagée de mauvaise foi à son encontre, ni fondée sur une une erreur grossière équivalente au dol, avec l'intention de nuire au défendeur. Sa demande en dommages et intérêts formée de ce chef est donc rejetée.

Le jugement est confirmé par substitution de motifs;

Il y a lieu de faire application de l'article 700 du code de procédure civile ;

La partie perdante est condamnée aux dépens, conformément aux dispositions de l'article 696 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Condamne Monsieur [W] [M] à payer à Monsieur [U] [K] ,la somme de 2 000 €, en application de l'article 700 du Code de procédure civile,

Condamne Monsieur [W] [M] aux dépens d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-1
Numéro d'arrêt : 19/16719
Date de la décision : 05/01/2021

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 1A, arrêt n°19/16719 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2021-01-05;19.16719 ?
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