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25/03/2024 | FRANCE | N°23PA01177

France | France, Cour administrative d'appel de PARIS, 8ème chambre, 25 mars 2024, 23PA01177


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 7 décembre 2022 par lequel le préfet de police de Paris a rejeté sa demande de renouvellement de titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné d'office, lui a interdit de retourner sur le territoire français pour une durée de trois ans et l'a informé de son signalement aux fins de non-admission dans le s

ystème d'information Schengen.



Par un jugement n° 2225406/8 du 23 février 2023, le ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 7 décembre 2022 par lequel le préfet de police de Paris a rejeté sa demande de renouvellement de titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné d'office, lui a interdit de retourner sur le territoire français pour une durée de trois ans et l'a informé de son signalement aux fins de non-admission dans le système d'information Schengen.

Par un jugement n° 2225406/8 du 23 février 2023, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 21 mars 2023, M. B..., représenté par Me Coquery, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 23 février 2023 du tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 7 décembre 2022 du préfet de police de Paris ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de Paris de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " visiteur ", dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de cent euros par jour de retard, ou à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

En ce qui concerne la décision portant refus de renouvellement du titre de séjour :

- elle est insuffisamment motivée ;

- elle est entachée d'un défaut d'examen de sa situation personnelle ;

En ce qui concerne l'ensemble des décisions :

- elles sont entachées d'une erreur d'appréciation dès lors que son comportement ne constitue pas une menace à l'ordre public ;

- elles méconnaissent les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, eu égard à la durée de sa présence sur le territoire français et à ses intérêts privés et familiaux en France ;

- le préfet a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de ses décisions sur sa situation dès lors qu'il réside en France depuis 15 ans, qu'il gère une SCI et possède un bien immobilier en France, que son épouse bénéficiera d'un renouvellement de son titre de séjour portant la mention " visiteur " et que ses enfants ne vivent pas en Russie.

Par un mémoire en défense enregistré le 31 juillet 2023, le préfet de police de Paris conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 20 juillet 2023, la clôture de l'instruction a été fixée au 14 septembre 2023 à 12 heures.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Larsonnier a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant russe né le 12 février 1974, est entré en France le 25 janvier 2013 sous couvert d'un visa de long séjour portant la mention " visiteur ", valable du 1er décembre 2012 au 1er décembre 2013, et régulièrement renouvelé jusqu'au 2 novembre 2021. Il a sollicité, le 21 septembre 2022, le renouvellement de son titre de séjour sur le fondement de l'article L. 426-20 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 7 décembre 2022, le préfet de police de Paris a rejeté sa demande, lui a fait obligation de quitter sans délai le territoire français, a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné d'office, a prononcé une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de trois ans et l'a informé qu'il faisait l'objet d'un signalement aux fins de non-admission dans le système d'information Schengen pour la durée de l'interdiction de retour. Par un jugement du 23 février 2023, dont M. B... relève appel, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne la décision portant refus de renouvellement du titre de séjour :

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : / 1° Restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police / (...) ". Aux termes de l'article L. 211-5 du même code : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ".

3. D'une part, l'arrêté en litige vise la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, notamment son article 8, ainsi que le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, notamment ses articles L. 412-5 et L. 426-20. D'autre part, le préfet de police de Paris a précisé les éléments de la situation personnelle et familiale de M. B.... Il a ainsi mentionné la condamnation de l'intéressé, le 7 juillet 2021, par le tribunal correctionnel de Paris à un an d'emprisonnement dont cinq mois avec sursis probatoire pendant deux ans pour violence aggravée par deux circonstances suivie d'incapacité supérieure à huit jours et a porté l'appréciation selon laquelle, eu égard à la nature de cette infraction, la présence en France de M. B... constitue une menace à l'ordre public. Il a indiqué que l'intéressé est connu défavorablement des services de police pour des faits commis le 31 aout 2015 consistant en la mise en circulation d'un aéronef non conforme aux règles de sécurité. Il a mentionné qu'il est marié avec une compatriote russe résidant en France sous couvert d'une carte de séjour d'un an portant la mention " visiteur ", qu'il est le père de deux enfants majeurs résidant à l'étranger, qu'il ne justifie pas être démuni d'attaches familiales à l'étranger où résident ses enfants et ses parents et a porté l'appréciation qu'il n'est pas porté une atteinte disproportionnée à son droit à sa vie privée et familiale. Dans ces conditions, la décision contestée comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, en application des dispositions précitées et contrairement à ce que fait valoir M. B..., le préfet de police de Paris n'était pas tenu de reprendre l'ensemble des éléments relatifs à sa situation. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision de refus de séjour doit être écarté.

4. En deuxième lieu, il ressort des pièces du dossier que le préfet de police de Paris a procédé à un examen particulier de sa situation.

5. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 426-20 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui apporte la preuve qu'il peut vivre de ses seules ressources, dont le montant doit être au moins égal au salaire minimum de croissance net annuel, indépendamment de l'allocation aux adultes handicapés mentionnée à l'article L. 821-1 du code de la sécurité sociale et de l'allocation supplémentaire mentionnée à l'article L. 815-24 du même code, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " visiteur " d'une durée d'un an. Il doit en outre justifier de la possession d'une assurance maladie couvrant la durée de son séjour et prendre l'engagement de n'exercer en France aucune activité professionnelle. Par dérogation à l'article L. 414-10, cette carte n'autorise pas l'exercice d'une activité professionnelle ". Aux termes de l'article L. 412-5 du même code : " La circonstance que la présence d'un étranger en France constitue une menace pour l'ordre public fait obstacle (...) au renouvellement de la carte de séjour temporaire (...) ".

6. Il ressort des termes de la décision contestée que, pour refuser de renouveler le titre de séjour de M. B..., le préfet de police de Paris s'est fondé sur la circonstance qu'il a été condamné, le 7 juillet 2021, par le tribunal correctionnel de Paris à un an d'emprisonnement, dont cinq mois avec sursis probatoire pendant deux ans, pour violence aggravée par deux circonstances suivie d'incapacité supérieure à huit jours commise le 31 mai 2021, et qu'il est défavorablement connu des services de police pour des faits, commis le 31 août 2015, de mise ou maintien en circulation d'un aéronef non conforme aux règles de sécurité, d'utilisation de l'appareil et de conduite d'un aéronef sans titre aéronautique et que ces faits permettent de regarder sa présence en France comme constitutive d'une menace à l'ordre public. En l'espèce, le requérant, qui ne conteste pas les faits, se prévaut de leur caractère isolé, de l'absence de récidive, de la circonstance que son épouse atteste s'être entièrement réconciliée avec lui et de la circonstance que le juge pénal n'a pas procédé au retrait de son titre de séjour. Toutefois, eu égard à la gravité et au caractère récent des faits commis le 31 mai 2021, et indépendamment des faits commis en 2015, le préfet de police de Paris a pu, sans entacher sa décision d'une erreur d'appréciation, estimer que la présence en France de M. B... représentait une menace pour l'ordre public et lui refuser, pour ce motif, le renouvellement de son titre. Par suite, le moyen doit être écarté.

En ce qui concerne l'ensemble des décisions :

7. En premier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...). / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit ue pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

8. Il ressort des pièces du dossier que M. B... est entré en France le 25 janvier 2013 sous couvert d'un visa long séjour " visiteur ", valable du 1er décembre 2012 au 1er décembre 2013 et régulièrement renouvelé jusqu'au 2 novembre 2021. Il est constant que M. B... est marié avec une compatriote russe en situation régulière sur le territoire et qu'il est le père de deux enfants résidant au Royaume-Uni. Il fait valoir qu'il possède un bien immobilier situé dans le 16e arrondissement de Paris et produit, à ce titre, un titre de propriété. Enfin, si M. B... soutient qu'il réside régulièrement sur le territoire français depuis 2013 et qu'il n'a plus aucune attache en Russie, il ressort du procès-verbal d'audition de garde à vue, en date du 31 mai 2021, qu'il a déclaré faire des allers-retours depuis dix ans et vivre en France depuis un an. Il n'établit pas être dépourvu de toutes attaches dans son pays d'origine. Eu égard à ces éléments et à la circonstance qu'il a été condamné le 7 juillet 2021 à un an d'emprisonnement dont cinq mois avec sursis probatoire pendant deux ans pour violence aggravée par deux circonstances suivie d'incapacité supérieure à 8 jours sur son épouse, M. B... n'est pas fondé à soutenir que les décisions litigieuses méconnaissent les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Par suite, le moyen doit être écarté.

9. En deuxième lieu, M. B... qui n'a pas sollicité de titre de séjour sur ce fondement ne peut utilement se prévaloir de la méconnaissance de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

10. En troisième et dernier lieu, pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 8, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de police de Paris aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de ses décisions sur la situation de M. B....

11. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'annulation, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte et celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet de police de Paris.

Délibéré après l'audience du 4 mars 2024, à laquelle siégeaient :

- Mme Villalba-Vrignon, présidente de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative ;

- Mme Collet, première conseillère ;

- Mme Larsonnier, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 25 mars 2024.

La rapporteure,

V. LarsonnierLa présidente,

C. Vrignon-Villalba

La greffière,

N. Couty

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 23PA01177


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 23PA01177
Date de la décision : 25/03/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme VRIGNON-VILLALBA
Rapporteur ?: Mme Virginie LARSONNIER
Rapporteur public ?: Mme BERNARD
Avocat(s) : COQUERY

Origine de la décision
Date de l'import : 31/03/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-03-25;23pa01177 ?
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