Vu la procédure suivante :
M. C... B... a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Strasbourg de suspendre, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, la décision du 29 avril 2021 par laquelle le maire d'Ogy-Montoy-Flanville ne s'est pas opposé à la déclaration préalable présentée par la SCI Ramos pour le changement de destination d'un local professionnel en local d'habitation et la décision du 28 septembre 2021 par laquelle il ne s'est pas opposé à la déclaration préalable présentée par M. D... A... pour des travaux de modification de la façade de ce local. Par une ordonnance n° 2201141 du 17 mars 2022, le juge des référés a fait droit à sa demande.
Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 1er et 19 avril 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cette ordonnance ;
2°) de mettre à la charge de M. B... la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code rural et de la pêche maritime ;
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Jean-Dominique Langlais, conseiller d'Etat,
- les conclusions de M. Maxime Boutron, rapporteur public.
La parole ayant été donnée, après les conclusions, au Cabinet François Pinet, avocat de M. A... et à la SCP Doumic-Seiller, avocat de M. B....
Considérant ce qui suit :
1. Aux termes de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision ".
2. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par une décision du 29 avril 2021, le maire d'Ogy-Montoy-Flanville ne s'est pas opposé à la déclaration préalable présentée par la SCI Ramos aux fins de transformer en habitation un local professionnel situé rue du Couvent et que, par une décision du 28 septembre 2021, il ne s'est pas opposé à la déclaration préalable présentée par M. A..., acquéreur de ce même bâtiment, destinée à la création ou à la modification des ouvertures. Le juge des référés du tribunal administratif de Strasbourg, saisi par M. B... sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, a prononcé la suspension de l'exécution de ces deux décisions par une ordonnance du 17 mars 2022 contre laquelle M. A... se pourvoit en cassation.
3. Il ressort des écritures en défense de M. A... devant le tribunal administratif de Strasbourg que celui-ci a opposé à la demande de M. B..., exploitant agricole disposant d'un bâtiment d'exploitation sur la parcelle voisine, une fin de non-recevoir tirée de son défaut d'intérêt pour agir contre ces autorisations d'urbanisme. En faisant droit à la demande de M. B... sans se prononcer sur cette fin de non-recevoir, le juge des référés a entaché son ordonnance d'irrégularité. Il y a lieu, par suite, d'en prononcer l'annulation, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens du pourvoi.
4. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de statuer sur la demande de suspension en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative.
5. Eu égard au caractère difficilement réversible d'une construction autorisée par une décision de non-opposition à déclaration préalable, la condition d'urgence doit en principe être constatée lorsque les travaux vont commencer ou ont déjà commencé sans être pour autant achevés. Il appartient toutefois au juge des référés de procéder à une appréciation globale des circonstances de l'espèce qui lui est soumise, notamment dans le cas où le bénéficiaire de l'arrêté justifie du caractère limité des travaux en cause ou de l'intérêt s'attachant à la réalisation rapide du projet envisagé.
6. Il ressort des pièces du dossier, d'une part, ainsi qu'il est soutenu par M. A... et n'est pas contesté par M. B..., que les travaux faisant l'objet de la déclaration préalable déposée par M. A... qui présentent en outre un caractère limité, sont achevés, seuls les travaux d'aménagement intérieur de l'habitation qui présentent au demeurant également un caractère limité et ne sont pas, par ailleurs, soumis à une telle déclaration, restant à réaliser. Il ressort des pièces du dossier, d'autre part, que la non-opposition à la déclaration préalable déposée par la SCI Ramos, destinée au changement de destination de l'immeuble en litige, ne présente pas un caractère irréversible. La condition d'urgence posée par les dispositions de l'article L. 521-1 du code de justice administrative ne peut, par suite, être regardée comme remplie.
7. L'une des conditions auxquelles l'article L. 521-1 du code de justice administrative subordonne la suspension de l'exécution d'un acte n'étant pas remplie, il n'est pas nécessaire d'examiner si la demande présentée par M. B... devant le juge des référés du tribunal administratif de Strasbourg tendant à la suspension des deux non-opposition à déclaration préalable accordées pour l'une à la SCI Ramos et l'autre à M. A... comportait un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de ces décisions, ni de se prononcer sur la fin de non-recevoir tirée du défaut d'intérêt pour agir opposée par M. A... à M. B.... La demande de ce dernier présentée sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative doit, par suite, être rejetée.
8. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. B... la somme de 3 000 euros à verser à M. A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Ces dispositions font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de M. A..., qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.
D E C I D E :
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Article 1er : L'ordonnance du 17 mars 2022 du juge des référés du tribunal administratif de Strasbourg est annulée.
Article 2 : Les conclusions présentées par M. B... devant le juge des référés du tribunal administratif de Strasbourg sont rejetées.
Article 3 : M. B... versera la somme de 3 000 euros à M. A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Les conclusions présentées au même titre par M. B... sont rejetées.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. D... A..., à M. C... B..., à la SCI Ramos et à la commune d'Ogy-Montoy-Flanville.
Délibéré à l'issue de la séance du 12 janvier 2023 où siégeaient : M. Jean-Philippe Mochon, président de chambre, présidant ; M. Olivier Yeznikian, conseiller d'Etat et M. Jean-Dominique Langlais, conseiller d'Etat-rapporteur.
Rendu le 9 février 2023.
Le président :
Signé : M. Jean-Philippe Mochon
Le rapporteur :
Signé : M. Jean-Dominique Langlais
La secrétaire :
Signé : Mme Anne-Lise Calvaire